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ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ/VII

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ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ
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d'accord avec les observations et avec les tables de Copernic. Quant aux hypothèses mêmes de Copernic, je suis d’avis qu’en aucun cas, on ne les doit introduire dans les écoles. »

Il est clair qu’un changement d’opinion se prépare dans l’esprit de ceux qu’intéressent les choses de l’Astronomie ; avec Gemma Frisius et Osiander, on a tenu pour utile toute hypothèse capable de sauver les phénomènes, alors même que cette hypothèse n’était, pour le philosophe, ni vraie, ni vraisemblable ; désormais, on exigera d’une hypothèse, avant d’en user en Astronomie, qu’elle soit, d’une manière certaine ou tout au moins probable, en conformité avec la nature des choses ; on va donc mettre l’Astronomie sous la dépendance de la Philosophie et de la Théologie.


VII
De la réforme grégorienne du calendrier à la condamnation de Galilée.


Les hypothèses astronomiques sont de simples artifices destinés à sauver les phénomènes ; pourvu qu’elles atteignent à ce but, on ne leur demande ni d’être vraies, ni même d’être vraisemblables.

Cette opinion, depuis la publication du livre de Copernic et de la préface d’Osiander jusqu’au moment de la réforme grégorienne du calendrier, semble avoir été généralement reçue des astronomes et des théologiens. Au contraire, durant le demi-siècle qui s’écoule de la réforme du calendrier à la condamnation de Galilée, nous la voyons reléguée dans l’oubli, voire même violemment combattue au nom d’un réalisme général ; ce réalisme veut trouver dans les hypothèses astronomiques des affirmations sur la nature des choses ; il exige, dès lors, que ces hypothèses s’accordent avec les doctrines de la Physique et avec les textes de l’Écriture. Le savant jésuite Christophe Clavius, de Bamberg, a composé un ample commentaire à la Sphaera de iesn de Sacro-Bosco. Les deux premières éditions de ce livre, imprimées à Rome en 1570 et en 1575, ne s’attardaient pas à la discussion des hypothèses astronomiques ; en 1581 , Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/120 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/121 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/122 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/123 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/124 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/125 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/126 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/127 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/128 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/129 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/130 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/131 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/132 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/133 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/134 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/135 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/136 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/137 — 128 —

Les deux propositions censurées ne présentaient ni l'un ni l'autre des deux caractères qui doivent signaler toute hypothèse astronomique recevable ; il les fallait donc entièrement rejeter, n’en pas user même dans le seul but de sauver les phénomènes ; aussi le Saint-Office faisait-il défense à Galilée d’enseigner d’aucune manière la doctrine de Copernic.

La condamnation portée par le Saint-Office était la conséquence du choc qui s’était produit entre deux réalismes. Ce heurt violent eût pu être évité, le débat entre les Ptoléméens et les Copernicains eût pu être maintenu sur le seul terrain de l'Astronomie, si l'on eût écouté de sages préceptes touchant la nature des théories scientifiques et des hypothèses sur lesquelles elles reposent ; ces préceptes, formulés par Posidonius, par Ptolémée, par Proclus, par Simplicius, une tradition ininterrompue les avait conduits jusqu’à Osiander, à Reinhold, à Mélanchthon ; mais ils semblaient maintenant bien oubliés.

Il se trouva cependant des voix autorisées pour les faire entendre de nouveau.

L’une de ces voix fut celle du Cardinal Bellarmin, de celui-là même qui allait, en 1616, examiner les écrits copernicains de Galilée et de Foscarini ; dès le 12 avril 1615, Bellarmin avait écrit à Foscarini une lettre1 pleine de sagesse et de prudence, dont voici quelques passages :

« Il me semble que Votre Paternité et le Seigneur Galilée agiraient prudemment en se contentant de parler ex suppositione, et non pas d’une manière absolue, comme j’ai toujours cru qu’avait parlé Copernic. Dire qu’en supposant la Terre en mouvement et le Soleil immobile, on sauve toutes les apparences mieux que ne le pourraient faire les excentriques et les épicycles, c’est très bien dire ; cela n’offre aucun danger et cela suffit au mathématicien. Mais vouloir affirmer que le Soleil demeure réellement

1. Cette lettre a été publiée pour la première fois dans l'ouvrage suivant : DOMENICO BERTI, Copernico e le vicende del sistema copernicano in Italia nella seconda metà del secolo XVI e nella prima del secolo XVII ; Roma, 1876 ; pp. 121-125. — 129 —

immobile au centre du Monde, qu'il tourne seulement sur lui-même, sans courir d’orient en occident, que la Terre occupe le troisième ciel et qu’elle tourne avec une grande vitesse autour du Soleil, c’est chose fort périlleuse ; cela risque non seulement d’irriter tous les philosophes et tous les théologiens scolastiques, mais encore de nuire à la foi et de rendre fausse la Sainte Écriture...

« Si l’on avait une démonstration certaine que le Soleil se tient au centre du Monde, que la Terre est au troisième ciel, que ce n’est pas le Soleil qui tourne autour de la Terre, mais la Terre qui tourne autour du Soleil, alors, il faudrait procéder avec beaucoup de circonspection en l’explication de l’Écriture... Mais qu’une telle démonstration existe, je ne le croirai pas tant qu’on ne me l’aura pas montrée. Autre chose est de prouver que l'on sauve les apparences en supposant que le Soleil est au centre du Monde et que la Terre est dans le Ciel, autre chose est de démontrer qu’en vérité le Soleil est au centre du Monde et la Terre dans le Ciel. En ce qui concerne la première démonstration, je crois qu’elle peut être donnée ; mais de la seconde, je doute fort ; et en cas de simple doute, vous ne devez pas abandonner l’Écriture telle que les Saints Pères l’ont exposée... »

Galilée eut connaissance de la lettre adressée par Bellarmin au P. Foscarini ; divers écrits rédigés entre le moment où il eut communication de cette lettre et sa première condamnation contiennent des ripostes aux arguments du Cardinal ; la lecture de ces écrits dont M. Berti a, le premier, publié des extraits, nous fait saisir sur le vif la pensée de Galilée touchant les hypothèses astronomiques.

Une pièce1, rédigée vers la fin de l’année 1615 et destinée aux consulteurs du Saint-Office, les met en garde contre deux erreurs : La première consiste à prétendre que la mobilité de la Terre est, en quelque sorte, un immense paradoxe et une sottise manifeste qui n’a pas été démontré jusqu'ici et qui ne pourra jamais être démontré. La seconde est de croire que Copernic et les autres astronomes

1. DOMENICO BERTI, Op. cit., pp. 132-133. — 130 —

qui ont posé cette mobilité « n’ont pas cru qu’elle fût vraie en fait et dans la nature », qu’ils l'ont seulement admise par supposition, afin de pouvoir plus aisément satisfaire aux apparences des mouvements célestes, afin de rendre plus commodes les calculs astronomiques.

En affirmant que Copernic croyait à la réalité des hypothèses formulées au livre De revolutionibus ; en prouvant, par l’analyse de cet ouvrage, que Copernic n’admettait pas la mobilité de la Terre et l’immobilité du Soleil seulement ex suppositione, comme le voulaient Osiander et Bellarmin, Galilée gardait la vérité historique. Mais ce qui nous intéresse plus que son avis d’historien, c’est son opinion de physicien. Or celle-ci se laisse aisément deviner en la pièce que nous analysons. Galilée pensait que la réalité du mouvement de la Terre est non seulement démontrable, mais déjà démontrée.

Cette pensée se manifeste plus clairement encore en un autre texte ; en celui-ci, nous voyons non seulement que Galilée pensait que l'on pouvait démontrer les hypothèses copernicaines, mais nous apprenons encore comment il entendait que la démonstration fût conduite :

« Ne point croire1 que le mouvement de la Terre soit susceptible de démonstration tant que cette démonstration n’a pas été exposée est une conduite très prudente ; aussi ne demandons-nous pas que personne croie une telle chose sans démonstration ; la seule chose que nous recherchions c’est que, pour le bien de la Sainte Église, on examine avec une extrême sévérité tout ce qu’ont produit ceux qui suivent une telle doctrine ou tout ce qu’ils pourraient produire ; qu’on n’admette aucune de leurs propositions, à moins que les arguments dont elle tire sa force ne surpassent de beaucoup les raisons de l’autre partie ; que leur avis soit rejeté lorsqu'ils n’ont pas pour eux plus de quatre-vingt-dix pour cent des raisons. Mais, en revanche, lorsqu'il aura été prouvé que l'opinion produite par les philosophes et les astronomes de la partie adverse est

1. DOMENICO BERTI, Op. cit., pp. 129-130. Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/141 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/142 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/143 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/144 Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/145