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Acadie/Tome I/14

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Texte établi par Henri d’Arles, J.-A. K.-Laflamme (Tome Ip. 313-342).

CHAPITRE ONZIÈME


Guerre entre la France et l’Angleterre. — L’Acadie envahie par les Français, commandés par Du Vivier et de Gannes. — Efforts de ces derniers pour soulever les Acadiens. — L’expédition se retire. — Nouvelle tentative en ce sens par Marin, plus tard par de Ramesay. — Combat de Grand-Pré. — Fidélité des Acadiens à leurs maîtres. — Témoignages de Mascarène et d’autres à ce sujet. — Le compilateur Akins. — Parkman.


La conduite sage et prudente de Mascarène avait produit les plus heureux résultats. Non seulement il avait réussi à se concilier l’estime et la confiance de tous, mais il avait en toutes choses établi des règlements et des procédures, propres à assurer l’harmonie, et à éloigner ces malentendus qui furent si fréquents au temps d’Armstrong. Le 28 juin 1742, il écrivait au duc de Newcastle : « Les bruits qui ont souvent couru d’une déclaration de guerre à la France, n’ont pas eu pour effet jusqu’à présent de changer le caractère des Acadiens, qui se montrent bien disposés à garder leur serment de fidélité, ainsi qu’à se soumettre aux ordres et réglements édictés par ce gouvernement pour le maintien de la paix[1]. »

Cependant, Mascarène n’était pas sans avoir encore bien des inquiétudes ; il savait que, si les Français envahissaient la Nouvelle-Écosse, ils ne manqueraient pas de faire tous leurs efforts pour décider les Acadiens à se joindre à eux. Or, comment résister à une attaque possible ? Le fort d’Annapolis était presque démantibulé ; la garnison comprenait cinq compagnies de trente-et-un hommes chacune ; et sur ces cent-cinquante-cinq soldats, un tiers était invalide. Dans une lettre du 1er décembre 1743, adressée au Secrétaire d’État, il se plaignait amèrement de la situation[2] : « Je demande la permission de représenter les difficultés avec lesquelles nous serons aux prises, advenant une rupture avec la France… Les habitants de cette province, à l’exception des garnisons d’Annapolis et de Canso, sont tous des Français catholiques romains, qui, en retour du serment d’allégeance qu’ils ont prêté, ont pu garder leurs biens et pratiquer leur religion. L’on ne peut compter sur le concours de ces gens, en cas de rupture avec la France ; ce sera déjà beaucoup si nous pouvons les empêcher de se joindre à nos ennemis, ou de céder à la révolte que ceux-ci essaieront de fomenter parmi eux. Par mesure de précaution, j’ai cherché par tous les moyens, surtout depuis que je suis chargé de l’administration de cette province, à leur faire apprécier les avantages dont ils jouissent sous le Gouvernement Britannique, de façon à les détacher de leurs anciens maîtres ; mais, pour arriver à un résultat sérieux et efficace en ce sens, il faudra beaucoup de temps ; et d’ici là, cette province se trouve dans une pire condition de défense que les autres colonies américaines, lesquelles ont des hommes pour les protéger, tandis que nous, loin de pouvoir nous reposer de ce soin sur nos habitants, nous devons nous méfier d’eux. »

La guerre entre la France et l’Angleterre éclata enfin le 15 mars 1744[3].

Cet événement allait soumettre la fidélité des Acadiens à une rude épreuve. Si la paix se fût prolongée quelques années de plus, Mascarène, en suivant la même ligne de conduite habile et bienveillante, eût pu, ainsi qu’il en caressait l’espoir, assurer pour jamais la loyauté de cette population, et l’attacher à la Couronne Britannique par des liens d’affection et de reconnaissance, assez forts pour résister à toutes les séductions. Ses successeurs n’eussent sans doute pas osé s’écarter d’une pareille attitude, laquelle fut devenue, pour les gouverneurs à venir, un guide et un modèle.

Cependant la France, qui avait si peu fait pour coloniser et conserver l’Acadie, n’avait jamais renoncé à pouvoir la reconquérir un jour ; et il appert avec évidence, par tous les documents de la chancellerie française, que les autorités du Canada avaient la quasi-certitude que les Acadiens allaient saisir l’occasion, qui s’offrirait bientôt à eux, de secouer la domination anglaise. La suite des événements fera voir pourtant que les craintes de Mascarène, aussi bien que les espérances des Français, étaient sans fondement réel.

Si ce gouverneur n’avait pas eu le temps d’affermir la loyauté des Acadiens en leur faisant aimer leurs maîtres, cette loyauté n’en reposait pas moins sur des motifs d’intérêt, et surtout sur le respect dû au serment qu’ils avaient prêté. En 1748, quand la guerre dont nous parlons sera terminée, Mascarène dira des Acadiens : « Aux Français qui les pressaient de prendre les armes, ils opposaient leur serment, la vie commode qui leur était faite sous le gouvernement anglais, l’absence de griefs contre lui[4]. » Voilà ce qu’avaient produit quatre années d’une administration juste et conciliante.

De 1744 à 1748, l’Acadie fut envahie à quatre reprises par les Français ; Annapolis fut assiégée trois fois. Mais, chaque fois, les assiégeants durent se retirer sans avoir obtenu le concours des Acadiens, sur qui ils avaient compté et pour qui ils avaient apporté des armes. Tout fut mis en œuvre pour vaincre la résistance de ces compatriotes. Des cajoleries l’on passa aux menaces, et des menaces aux voies de faits, sans parvenir jamais à ébranler leur détermination. Et cela est vrai aussi bien des habitants de Beaubassin que de ceux de Grand-Pré et d’Annapolis. Il fallait que le désappointement des Français fut extrême, pour avoir recours à des moyens bien propres à affaiblir la sympathie fraternelle que les Acadiens conservaient naturellement à leur endroit. En effet, les moyens de persuasion n’ayant donné aucun résultat, Du Vivier et de Gannes, qui commandaient la première expédition, en vinrent aux ordres les plus sévères[5] : « Nous, capitaine d’infanterie, commandant des troupes envoyées pour assiéger Port-Royal, par ordre de M. Du Quesnel, etc… déclarons, au nom du roi, ce qui suit : Les habitants des Mines, comprenant les paroisses de Grand-Pré, Rivière Canard, Piziquid et Cobequid, sont requis de reconnaître l’obéissance qu’ils doivent au Roi de France, et en conséquence les dites paroisses sont mises à contribution de la façon suivante… (Suit l’énumération de tout ce que comprend la présente réquisition)… Et tous ceux qui contreviendront au présent ordre seront punis comme sujets rebelles, et livrés aux mains des sauvages comme ennemis de l’État, car nous ne pouvons pas refuser aux sauvages la demande qu’ils nous ont faite de s’emparer de tous ceux qui ne voudront pas faire leur soumission… »

Du Vivier[6].
Grand-Pré, le 27 août 1744.

Or, voici le texte de la requête que les habitants de ces mêmes régions présentèrent à de Gannes, lequel avait été chargé par le gouverneur de l’Île Royale, Du Quesnel, d’aller relever Du Vivier devant Port-Royal, avec ordre de passer l’hiver aux Mines :

« À M. de Gannes, chevalier, capitaine d’infanterie, commandant des troupes et des sauvages alliés, actuellement dans la Province.

« Nous, les soussignés, agissant au nom des habitants des Mines, de rivière Canard, de Piziquid, et des rivières avoisinantes, vous prions humblement de vouloir bien considérer qu’encore qu’il ne vous fût pas difficile, à raison des forces que vous commandez, de vous procurer par vous-même les grains et les viandes que vous et M. du Vivier avez réquisitionnés, il nous serait presque impossible, quant à nous, de vous fournir toutes ces choses, en tout, ou même en partie, sans de grands risques pour notre propre subsistance, car les moissons n’ont pas été aussi bonnes que nous l’avions espéré. Nous espérons, Messieurs, que vous ne voudrez pas nous plonger, nous et nos familles, dans une ruine totale ; et nous comptons que, par sympathie pour nous, et pour ne pas nous exposer à périr, vous retirerez vos sauvages et vos troupes de nos districts.

« Nous vivons sous un gouvernement doux et paisible, et nous avons les meilleures raisons de lui garder fidélité. Nous espérons donc que vous aurez la bonté de ne pas nous en séparer, et que vous nous ferez la faveur de ne pas nous réduire à une profonde misère. Nous n’attendons pas moins de votre obligeance, et vous prions respectueusement de nous croire, Messieurs,

Vos très humbles et très dévoués serviteurs, au nom des cantons ci-haut mentionnés.

Jacques Leblanc
Pierre Leblanc
François Leblanc
Renné X Grange l’aîné
Claude Leblanc
Jacques Terriot
Antoine Landry
Pierre Richard l’aîné
Joseph X Granger
R. Leblanc.

Mines, oct. 10, 1744[7].


« Nous avons, dit Beamish Murdoch, au moins douze réquisitions de la nature de celle-ci, (citée plus haut), émanées de Du Vivier, dans lesquelles il commande nommément aux Acadiens de venir s’enrôler sous son drapeau, de fournir tant de chevaux et d’hommes pour les conduire, de lui remettre des cornes à poudre, de lui envoyer des députés qui prêteront serment au nom de tous, de lui procurer des échelles, des piques, des haches, des pelles, des bestiaux, du blé, de cuire du pain, de fournir des chemises, des canots, etc. Toute contravention à ces ordres devant être le plus souvent punie de mort, ou parfois suivie de châtiments corporels… Je ne sais pas si l’on doit attribuer un pareil ton à l’orgueil nobiliaire, qui prédominait à cette époque, à la dureté de sentiments qui caractérisait la caste militaire, ou à une incapacité personnelle de la part de Du Vivier : toujours est-il que, selon moi, ces procédés furent fatals à sa cause[8]. » Le départ précipité de Du Vivier ne peut guère s’expliquer que par la déception qu’il éprouva du côté des Acadiens. Une escadre française était attendue de jour en jour dans le port d’Annapolis, et rien ne semblait justifier la levée si soudaine du siège. Cette escadre, portant 75 canons, arriva, en effet, mais trop tard. Son commandant, ne trouvant pas les troupes qu’il avait compté y rencontrer, incapable de réduire la garnison avec ses seuls équipages, reprit la mer sans avoir rien tenté[9]. Cette soudaineté à partir fut presque aussi fâcheuse aux Français que l’avait été la précédente ; car il arriva de Boston, quatre jours après, tout un convoi chargé de vivres et de munitions pour ravitailler la garnison d’Annpolis, — lequel convoi fût inévitablement tombé aux mains du commandant de l’escadre française[10].

Dès que la nouvelle que l’état de guerre existait entre la France et l’Angleterre lui fut parvenue, Mascarène s’employa activement à mettre le fort d’Annapolis, le seul que compta la Province, en état de soutenir un siège. Il y avait à y faire des travaux considérables, puisque les murs étaient tombés en ruines, à tel point, nous dit Garneau, « que les bestiaux montaient par les fossés pour paître sur les remparts écroulés ». Or, comment exécuter cette entreprise sans le concours des Acadiens, desquels on dépendait, et pour les matériaux et pour la main d’œuvre ? Car la garnison d’Annapolis ne comprenait pas cent hommes valides. J’admets que c’était le devoir des habitants français de venir en aide à leur gouverneur ; mais j’admets aussi que cela supposait, de leur part, beaucoup de bonne volonté. Eh ! bien, Mascarène avait pris un tel ascendant sur eux qu’ils ne firent jamais aucune difficulté de se prêter à son désir. Écrivant, en décembre 1744, au gouverneur Shirley, il lui disait : « Notre Fort était dans un état déplorable… Les habitants français se montrèrent disposés, non seulement à aller couper le bois nécessaire pour le réparer, mais encore à travailler eux-mêmes à sa restauration ; et nous en avions déjà achevé une partie, quand, le premier juillet, les Indiens, au nombre de trois cents environ, vinrent nous interrompre[11]. »

Plus tard, quand Duvivier se fut retiré, Mascarène reprit les travaux abandonnés, et requit de nouveau l’assistance des Acadiens : « J’ai demandé aux députés représentant les habitants de cette rivière de fournir à l’Ingénieur les matériaux requis pour exécuter nos réparations, au prix qui avait été convenu : et tous ont semblé accéder à nos désirs, et prendre part à l’œuvre commune avec beaucoup d’entrain[12]. »

L’expédition malheureuse de Duvivier n’empêcha pas le capitaine Marin d’en tenter une autre, l’année suivante, laquelle aboutit également à un échec[13].

La décadence de la France, qui avait commencé vers la fin du règne de Louis XIV, s’accentua sous la Régence, pour se consommer sous Louis XV, et aboutir à la grande catastrophe qui devait marquer sa ruine finale ou sa régénération. La décadence n’était pas seulement dans l’ordre économique, mais aussi, mais surtout peut-être dans l’ordre moral ; et elle influait en particulier sur les vertus guerrières traditionnelles de la nation française : ces vertus avaient subi l’effet de l’ambiance générale ; elles s’étaient amollies, comme tout le reste. L’Angleterre allait avoir l’occasion de s’en convaincre, lorsque, quelques années plus tard, elle entreprendrait de compléter l’humiliation de sa trop remuante rivale, en abattant les restes de son antique prestige colonial, et en lui enlevant les moyens de restaurer sa force et sa gloire.

Ce fut un grand soulagement pour l’Angleterre, quand il devint évident que la puissante flotte du duc d’Enville, dispersée par les tempêtes, affaiblie par la maladie et la mort d’une partie de l’équipage, désorganisée par les dissensions entre les chefs, avait cessé de lui être une menace[14]. De Ramesay, qui attendait, sous les murs d’Annapolis, l’arrivée et la coopération de cette flotte, dut renoncer au siège de cette ville, se retirer sur les Mines, et peu après sur Beaubassin.

Ici se place le seul fait d’armes glorieux pour la France, à l’époque et au lieu où nous sommes ; ce fait fut accompli par les Canadiens que commandait de Ramesay. Pendant que ce dernier était à Beaubassin. Mascarène, après avoir ravitaillé Annapolis, fit occuper le quartier des Mines par un détachement de 470 hommes, commandés par le colonel Noble, du Massachusetts. Ce corps d’armée s’installa temporairement au village de Grand-Pré, dans les maisons des Acadiens. De Ramesay conçut le projet hardi de franchir à la raquette, avec ses hommes la longue distance qui le séparait de ce dernier endroit et de venir surprendre pendant la nuit les troupes anglaises : entreprise qui valut à ces Canadiens une gloire sans lendemain[15]. Ce fait eut lieu en janvier et février 1747.

Nous avons vu, par divers documents, quelle avait été l’attitude des Acadiens pendant ces quatre années d’invasions répétées de la part des troupes françaises. Écoutons d’autres témoignages tirés de la correspondance du gouverneur Mascarène lui-même. À différentes reprises, l’on y voit que, dans les intervalles de ces expéditions, les Acadiens venaient l’informer des mouvements des Français, et travailler à mettre les fortifications en état de résister à leurs attaques.


Au gouverneur Philipps, à la date du 9 juin 1744, il écrit :

« J’ai fait tout en mon pouvoir pour garder les Acadiens dans la fidélité qu’ils ont promise : jusqu’à présent ils ne s’en sont pas écartés, et ils nous prêtent main-forte dans les travaux de réparations que nous avons à exécuter[16]. »

Aux Lords du Commerce, à la même date : « Ces derniers, (les habitants français), m’ont assuré qu’ils étaient résolus de rester fidèles à Sa Majesté ; et ils nous semblent avoir donné des preuves de cette résolution dans l’aide qu’ils nous ont prêtée pour les travaux de restauration du Fort : si vos Seigneuries s’en rapportent à ce que je leur ai déjà dit sur le caractère de ces Acadiens, elles en concluront que c’était là tout ce que nous pouvions espérer de leur part[17]. »

Au secrétaire de la guerre, le 2 juillet 1744 : « Les habitants français de cette rivière ont gardé jusqu’ici la fidélité qu’ils avaient jurée, et ne se sont en aucune manière joints à l’ennemi, qui a tué la plus grande partie de leurs troupeaux ; le prêtre qui demeure parmi eux s’est également conduit comme un honnête homme… Ces gens nous ont donné leur assistance pour la réparation de nos ouvrages jusqu’à la veille du jour où a eu lieu l’attaque[18]. »

Au gouverneur Shirley, le 28 juillet 1744 : « Dès que les Indiens se furent retirés, les habitants français nous ont apporté des provisions, et ils continuent à témoigner de leur résolution d’être fidèles à leur serment, aussi longtemps que nous garderons le fort. Deux députés sont arrivés hier des Mines, apportant avec eux un pacte signé par la plupart des habitants de cet endroit par lequel ils s’engagent à empêcher le transport de leurs bestiaux à Louisbourg, conformément à la défense qui leur en a été faite.

« Ces habitants français sont certainement dans une situation très périlleuse, — ceux qui prétendent être leurs amis et anciens maîtres ayant permis à des bandits de les dépouiller, et se voyant d’autre part menacés de ruine et de destruction, s’ils manquent à l’allégeance qu’ils ont jurée au gouvernement Britannique[19]. »

À King Gould, Écr., à la même date : « Les habitants français sont toujours fidèles à leur serment, et ne se sont aucunement joints à l’ennemi ; mais nous ne bénéficions plus de l’aide qu’ils nous donnaient pour la réparation de nos ouvrages, à cause de la peur qu’ils ont des Indiens[20]. »


À ———, Annapolis Royale, décembre 1744 :

« Les secours opportuns que nous avons reçus du Gouverneur du Massachusetts, et le fait que les habitants français se sont refusés à prendre les armes contre nous, ont été la cause de notre salut. Si au contraire ceux-ci se fussent soulevés, ils pouvaient nous opposer trois ou quatre mille hommes qui nous eussent rendu la situation bien dure ; car cela eut permis à l’ennemi de nous harceler et de nous serrer de près plus longtemps, et nous eut empêché de réparer nos brèches ou d’aller chercher du bois de chauffage et d’autres objets de première nécessité[21]. »

Au cher Ladeveze, (sans date) : « La grande Armada française, sous les ordres du duc Damville, (sic), qui n’eut fait de nous qu’une bouchée — which would have swallow’d us —, par la grâce de Dieu a été affaiblie et dispersée par la maladie et les tempêtes… En toutes ces terribles occurrences, j’ai traité les habitants français avec tant de douceur, administré la justice si impartialement, usé à leur égard de tant de bons procédés, qu’encore que l’ennemi ait amené au milieu d’eux deux mille hommes armés, et qu’il ait employé tour à tour les caresses et les menaces, pour les soulever contre nous, par l’entremise d’émissaires dressés à cette fin, il n’a réussi à en joindre à sa cause qu’une vingtaine au plus[22]. »


Au duc de Bedford, secrétaire d’État, le 15 juin 1748 :


« Les tentatives répétées faites par les ennemis contre la Nouvelle-Écosse n’ont pas eu le succès qu’ils en attendaient ; et nonobstant les moyens dont ils se sont servis pour entraîner dans la révolte les habitants, qui tous sont d’extraction française et papistes, ils n’ont réussi à en détacher de nous que quelques-uns ; et après avoir envahi cette province à trois reprises différentes, et avoir chaque fois assiégé ce fort en nombre bien supérieur à celui que nous pouvions leur opposer, ils furent en fin de compte, voici à peu près un an, obligés de se replier sur Québec[23]. »

Deux mois plus tard, le 6 août 1748, Mascarène écrivait au lieutenant-colonel Gorham :


« Monsieur,

« Comme vous avez commandé, la plus grande partie du temps, les détachements de troupes de la Nouvelle Angleterre, envoyés aux Mines pour empêcher les Canadiens de s’établir dans cet endroit de la Province, et comme vous devez être au courant de la somme de provisions et autres choses nécessaires fournies par les habitants de ce lieu, et aussi des pertes qu’ils ont encourues par l’incendie de leurs maisons, la destruction de leurs enclos, et des travaux qu’ils ont dû accomplir pour nous aider, (nous vous déléguons) pour aller régler avec eux toutes leurs réclamations, par la livraison d’effets envoyés par le gouverneur Shirley, lesquels se montent à plus de 10,000 livres de la Nouvelle Angleterre[24]. »

Nous ferons remarquer en passant, que, de ces lettres citées plus haut, une seule se trouve au volume des Archives de la Nouvelle-Écosse. Nous ferons remarquer, de plus, que, pour la période qui va du 4 juillet 1740 au 27 octobre 1745, ce volume contient 43 documents d’intérêt divers, tandis que d’octobre 1745 à avril 1748 il n’y a rien. Et l’on se demande pourquoi cette accumulation de documents pour les quatre ans qui ont précédé la guerre, alors que l’on ne nous renseigne pas sur les trois années qui suivirent et qui furent autrement importantes. La raison de cette suppression est facile à deviner : Avant la guerre, le gouverneur Mascarène entretenait des doutes sur la fidélité des Acadiens, et il donnait libre cours à ses soupçons ; les premières années de son administration, il eut bien des pourparlers avec les missionnaires avant de les plier à sa manière de voir à leur sujet et au sujet des habitants. Toute sa correspondance de cette époque reflétant fidèlement les pensées qui l’animaient alors, les craintes qu’il concevait, les difficultés qu’il éprouvait, Akins a été bien aise de la recueillir religieusement : elle servait si bien son objet. Il est vrai qu’il s’y glisse quelques propos favorables aux Acadiens. Mais cela était perdu et comme noyé dans l’ensemble… D’autre part, publier les documents concernant la période de la guerre, c’eût été apprendre au grand public que les Acadiens étaient demeurés fidèles à leur serment, dans les conjonctures les plus critiques… Or, le compilateur ne pouvait pas se permettre de faire une révélation si contraire à ses vues : voilà pourquoi il a sauté prestement par-dessus trois années chargées des incidents les plus caractéristiques. C’était si bien là son intention qu’il a trouvé le moyen, à la page 157 de son indigeste volume, de reproduire en note une lettre de MM. de Beauharnois et Hocquart au ministre de Maurepas, dans laquelle ces messieurs faisaient part à ce dernier des espérances que leur donnait un appui possible de la part des Acadiens. Des espérances ! Mais tout le monde en a ! Et quel mal y avait-il pour M. de Beauharnois à en nourrir ? Ne lui était-il pas loisible de croire que les Acadiens prendraient les armes contre les Anglais ? Les espérances dont il se berçait n’ont pourtant pas eu de réalisation ; elles n’ont pas influé sur l’attitude des Acadiens, laquelle fut loyale. Quel service Akins rendait-il à l’histoire en exhumant un document qui expose l’état d’âme du gouverneur du Canada ? N’eut-il pas mieux valu cent fois donner les pièces exposant les faits tels qu’ils se sont passés que d’imprimer une lettre qui n’a, dans l’espèce, aucune importance ? Ce n’est pas sur les calculs ni les conjectures de celui-ci ou de celui-là que l’on bâtit l’histoire, mais sur le réel. Aux yeux du compilateur, le document en question émettait des doutes sérieux sur la fidélité des Acadiens envers le gouvernement anglais et donnait comme général leur désir de retourner à la France. C’est là l’unique raison pour laquelle il lui a donné une place dans son travail[25].

Comme le prouvent surabondamment les citations ci-dessus transcrites, les craintes des Anglais aussi bien que les espérances des Français ne reposaient sur aucun fondement sérieux. La guerre avait soumis la loyauté acadienne à une épreuve telle que l’on pouvait en tirer la mesure de ce que ce peuple donnerait, s’il était traité avec équité : « Quand nous considérons tout ce qui s’est passé, a dit B. Murdoch, dans une sorte de résumé des événements, nous voyons plus clairement comment il se fait que la petite armée de Louisbourg, tandis que considérablement grossie par les guerriers micmacs, à qui l’on avait toujours laissé croire que le Roi de France n’avait jamais cédé leurs droits territoriaux, n’a pas reçu d’assistance effective de la part des Acadiens. Bien qu’une partie des habitants de Beaubassin fut demeurée antipathique au régime anglais, dans les cantons de Cobequid, Piziquid, Grand-Pré, et autres, aussi bien que le long de la rivière Annapolis, un très petit nombre de personnes furent soupçonnées de vouloir prêter main-forte à l’invasion ; et Duvivier reçut aussi peu d’aide de la part des Acadiens après qu’il eût traversé l’Avon (Piziquid), que, l’année suivante, le prince Charles Stewart devait en recevoir peu, après avoir franchi la Tweed. Les lettres du gouverneur Mascarène ont montré pleinement combien, à cette époque, les missionnaires ou les populations étaient loin de donner aucun secours efficace aux forces envahissantes[26]. » Dans sa lettre à ———, datée de Port-Royal, 15 mars 1745, Mascarène a pu dire : « Les habitants français se sont en général bien conduits, encore qu’il n’y eût rien de surprenant à ce que l’ennemi comptât de ses créatures parmi eux[27]. » Et dans sa communication au « cher Ladeveze », que nous avons reproduite plus haut[28], il fixe à une vingtaine le nombre de ceux que les Français rallièrent à leur cause. Nous croyons que ce rapport contient l’exacte vérité, attendu qu’il est de tout point conforme aux données de source française. Douze de ces Acadiens furent arrêtés sur les dénonciations de leurs propres compatriotes. Qu’on le remarque cependant, ces douze ne furent pas arrêtés pour avoir pris les armes, mais seulement pour avoir avisé ou assisté l’ennemi en quelque autre façon, ou pour avoir négligé de donner des informations utiles aux autorités anglaises, quand cela était en leur pouvoir. Voici les noms de ces douze prévenus : Louis Gauthier et ses deux fils, Joseph et Pierre, Armand Bugeaud, Joseph Leblanc dit Lemaigre, Charles et François Raymond, Charles et Philippe LeRoy, Joseph Brassard dit Beausoleil, Pierre Guédry et Louis Hébert, ci-devant domestique du capitaine Handfield[29]. Quelques-uns d’entre eux furent condamnés, les autres relâchés, après des explications qui furent jugées satisfaisantes[30].

Ce qui est étonnant en tout ceci, ce n’est pas que vingt personnes aient prêté assistance à l’ennemi, mais plutôt qu’il n’y en ait pas eu davantage, cette guerre ayant duré quatre années au cours desquelles la province fut envahie à différentes reprises. Il a dû nécessairement se trouver des hommes pour donner des informations au parti adverse et le servir en quelque mesure. Cela arrive toujours en pareille occurrence. Supposer le contraire serait ignorer totalement la nature humaine. Les relations françaises font voir qu’il se présentait souvent à leur camp des soldats échappés de la garnison d’Annapolis. Ces déserteurs les renseignaient sur la situation des Anglais. Ces faits sont de tous les temps et de tous les lieux ; et nulle conclusion, défavorable aux Acadiens en général, ne saurait en découler.

Inutile par conséquent d’insister sur ce point. Il reste acquis que les habitants français, placés dans une position extrêmement délicate, s’en sont tirés à leur honneur, et ont donné des preuves éclatantes du grand cas qu’ils faisaient de leur serment de fidélité. Comme l’a dit Mascarène dans une lettre plus haut citée : « Aux Français qui les sommaient de prendre les armes, ils répondaient par leur serment de fidélité[31]. » D’ailleurs, les faits sur lesquels nous nous basons pour établir leur loyauté ne sont contestés par personne, si ce n’est par Parkman. Cet historien qui, dans son ouvrage Moncalm et Wolfe, ne consacre que trois pages au récit des événements survenus de 1710 à 1749, résume en trois lignes les péripéties de la guerre dont nous venons d’esquisser les phases les plus importantes : « Ceci — à savoir le serment de fidélité à Georges II que presque tous les habitants prêtèrent en 1730 — rendit à la province une tranquillité relative jusqu’à la guerre de 1745, alors que quelques-uns d’entre eux demeurèrent neutres, tandis qu’un certain nombre prirent les armes, et que plusieurs autres prêtèrent secours à l’ennemi en le renseignant et en lui fournissant des provisions[32]. »

Cette phrase, en apparence simple et candide, est au fond insidieuse et malhonnête : latet anguis in herba[33]. Elle ne précise rien, mais, par voie d’insinuation, elle laisse le lecteur sous l’impression qu’environ un tiers des Acadiens garda la neutralité, un tiers s’arma, et les autres aidèrent les français de différentes manières. C’est là un truc assez ordinaire à Parkman ; sans même sortir de notre sujet, nous pourrions en citer bien d’autres exemples. Et ce truc peut être habile chez un avocassier ou un politicien aux abois. Mais ici, il s’agit d’histoire, et l’histoire doit être traitée sérieusement et impartialement. Au lieu de vagues imputations, que ne produit-il un document à l’effet que les Acadiens ont recouru aux armes ?

En présence de la fidélité que ceux-ci conservèrent, malgré toutes les séductions et toutes les menaces, que devient l’accusation portée par le même historien contre les prêtres ? « Il ne fait pas de doute que les Acadiens, s’ils eussent été laissés à eux-mêmes, n’eussent prêté le serment requis, (après le traité d’Utrecht). Mais les autorités françaises du Canada et du Cap Breton firent tout en leur pouvoir pour les en empêcher, et employèrent des agents à fin d’entretenir leur hostilité à l’égard de l’Angleterre. Parmi ceux-ci les plus actifs furent les prêtres français, qui, en dépit du traité, persuadèrent à leurs troupeaux qu’ils étaient encore les sujets du roi Louis[34]. »

Et plus loin : « Tout le clergé acadien, à un degré ou à un autre, semble s’être servi de son influence pour empêcher les habitants de prêter serment, et pour leur persuader qu’ils étaient toujours sujets français. Quelques-uns de ces prêtres étaient brouillons, turbulents et méfiants ; les autres étaient trop tranquilles pour plaire aux Officiers de la Couronne[35]. »

Pareille accusation est répétée par cet historien sur tous les tons et dans les termes les plus formels. Or, de deux choses l’une : ou ces missionnaires avaient l’influence que leur prête si généreusement Parkman, ou ils ne l’avaient pas. S’ils l’avaient, comme les Acadiens restèrent tout de même fidèles à leur serment, c’est donc que l’influence des prêtres sur eux s’exercer dans ce sens ; et alors l’accusation de Parkman ne tient pas debout ; — ou c’est que les Acadiens, qu’il aime à nous représenter comme de pauvres gens n’ayant aucune volonté personnelle, et se faisant les dociles instruments de l’ingérence cléricale, étaient au contraire capables de résistance, de fermeté et d’indépendance de jugement. L’une et l’autre alternative confondent les assertions de Parkman. Voici un peuple, qui, d’après lui, est soumis aveuglément à la conduite de ses chefs religieux ; il n’a aucune initiative ; il en passe par ce que veulent ces derniers. Or ce peuple est resté fidèle, en masse, au serment qu’il a prêté. Qu’en conclure, si ce n’est que ces prêtres ont été loin de lui prêcher la révolte ? Que s’ils la lui ont prêchée, le peuple avait donc de la volonté, de l’énergie, puisqu’il a su rester dans la ligne du devoir, se soustraire à toute influence extérieure et agir d’après ses propres conseils ? Dans tous les cas, le raisonnement de l’écrivain américain pèche par la base. Et l’on peut dire de Parkman ce que le poète latin dit de l’un de ses confrères : « (Lucilius) écrit trop vite et beaucoup trop. Que de fois, en moins d’une heure, et debout sur un pied, il a dicté bel et bien deux cents vers. Dieu sait alors s’il était content de lui-même[36] ! » Parkman écrit l’histoire comme l’autre faisait ses vers, stans pede in uno, debout sur un pied, — position peu commode pour enchaîner les faits selon leur ordre véritable et pour échafauder des raisonnements qui ne se détruisent pas l’un par l’autre !

Si nous prononçons quelquefois des jugements sur le caractère d’un individu, nous n’aimons guère à le faire à l’égard de toute une race ; il est si facile dans ce cas de tomber dans l’absolu. Cependant, nous en hasarderons un sur les Acadiens, et l’on verra que le type dominant chez ce peuple est justement l’opposé de ce que prétend Parkman. Ce dernier fait à nos ancêtres le reproche d’être « weak of purpose », à savoir de volonté faible, et, comme on dit, « sans dessein ». Or, le trait le plus frappant des Acadiens est au contraire un entêtement extrême. Aujourd’hui encore, dans la province de Québec, lorsque l’on veut peindre d’une façon saisissante l’entêtement d’une personne, l’on dit : « elle a une tête d’Acadien », et c’est la même chose que de dire « tête de Breton ». La fermeté est une belle qualité, mais l’entêtement est un défaut, et nous n’hésitons pas à affirmer que ce défaut est commun à tous les Acadiens. Parkman a eu assez peu de psychologie pour ne pas le voir. Il spéculait tellement à tort et à travers, au gré de sa fantaisie, qu’il a mis à côté, et qu’il a voulu que nos pères fussent tout le contraire de ce que la nature les avait faits. Et voilà ce que l’on gagne à traiter l’histoire comme un art d’imagination !

Les efforts tentés par les Français pour porter les Acadiens à violer leur serment de fidélité méritent, selon nous, une sévère condamnation ; et ces efforts durèrent depuis le commencement de cette guerre jusqu’à la prise de Beauséjour par les Anglais. Si les Acadiens eussent prêté leur concours à leurs anciens maîtres, Annapolis fût sans doute tombée aux mains de ses premiers possesseurs. Mais la conquête définitive de l’Acadie ne s’en fût pas nécessairement suivie. Et quand même ce fait l’eût assurée, nous croyons que l’honneur n’en imposait pas moins aux Français l’obligation de ne rien faire pour détourner les Acadiens de leurs devoirs, et les exposer ainsi aux plus dures représailles. Leur sort, jusque-là, avait été aussi doux qu’il était permis de l’espérer d’une administration militaire, et dans un temps où les préjugés de race ou de religion régnaient dans toute leur intensité. Pendant tout un siècle, la France n’avait rien fait pour peupler l’Acadie et en faire une colonie capable de se suffire à elle-même ; elle n’avait rien fait pour la protéger et la soutenir au moment du danger. Que si, tardivement, elle voulait réparer les erreurs de son passé, elle devait le faire par ses propres moyens, sans recourir à des procédés déloyaux, de nature à détourner de sa cause ses anciens sujets. La conduite de la France, pendant cette guerre, lui aliéna, en effet, la sympathie si naturelle que ceux-ci lui avaient toujours conservée. Si l’Angleterre, ou plutôt ses représentants, eussent compris cela, et s’ils eussent agi de manière à tirer avantage de ce revirement opéré dans l’âme acadienne par les derniers événements, nous n’aurions peut-être pas eu à déplorer les malheurs qui ont suivi. Quoiqu’il en soit, il nous semble que le fait que les Acadiens avaient su résister aux incessantes tentatives de séductions, qui leur étaient venues des Français, aurait dû bien disposer en leur faveur les autorités de la colonie : leur fidélité inébranlable au drapeau britannique, en dépit de la pression contraire que l’on cherchait à exercer sur eux, n’était-elle pas un gage certain pour l’avenir ? Interprétée avec bienveillance ou même avec simple équité, leur conduite loyale aurait dû leur attirer l’amitié et la reconnaissance de leurs maîtres. Mais, la reconnaissance n’est-elle pas rara avis[37] !



  1. Akins, p. 119. Extracts from a letter of Gov. Mascarene to His Grace the Duke of Newcastle, dated 28th of June, 1742.
  2. Akins, p. 128-9.
  3. Cette guerre est connue sous le nom de Guerre de la Succession d’Autriche. « Le 15 novembre 1743, Marie-Thérèse (d’Autriche) conclut à Worms un traité d’alliance avec le roi d’Angleterre (George II), le roi de Sardaigne et l’électeur de Saxe. Elle se proposait d’enlever la couronne impériale à Charles VII, la Silésie à Frédéric II, l’Alsace, la Lorraine et les Trois Evêchés à la France. La France conclut de son côté la ligue de Francfort avec la Prusse, la Suède et l’Électeur Palatin, le 5 avril 1744. Elle s’engageait à maintenir Charles VII, à lui rendre ses États, et garantissait la Silésie à Frédéric… Charles VII étant mort au début de 1745, d’Argenson (Secrétaire d’État aux affaires étrangères), entreprit de porter à l’Empire l’Électeur de Saxe, Auguste III. Auguste III refusa la candidature à l’Empire et promit même sa voix à François de Lorraine. Le fils de Charles VII, Maximilien-Joseph, dès qu’une armée autrichienne eut envahi ses États, fit de même par le traité de Füssen, le 22 avril 1745… La France avait déclaré la guerre à l’Angleterre le 15 mars 1744, et elle avait repris contre cette puissance le duel suspendu par la paix d’Utrecht. La grande guerre maritime s’ouvrit cette année même. En 1745, les Anglais d’Amérique levèrent 4 à 5 mille hommes, amenèrent des transports, et, avec le secours du Commodore Warren qui leur amena de Londres 4 vaisseaux, s’emparèrent de Louisbourg, le 26 juin. » — Hist. de France, par Lavisse. Tome VIII. Deuxième Partie — Louis XV, 1715-1744, par H. Carré.
  4. Akins. Extract from a letter of Gov. Mascarene to Governor Shirley. April 1748. — Page 159 de la compilation.
  5. M. Du Vivier’s orders to the inhabitants of Mines, Piziquid, River Canard, and Cobequid. (Translated from the French), Akins, p. 134. Nous ne croyons pas nécessaire de donner en son entier ce document, qui est un ordre de réquisition en règle, obligeant les Acadiens de ces cantons à fournir des hommes, des chevaux et des cornes à poudre, (powder horns), à tel jour et telle heure fixés, comme aussi à envoyer des députés devant, au nom de tous, jurer fidélité au Roi de France. (Cf. Archives du Canada. Île Royale. Corresp. Générale, 1744, vol 26. M. Du Quesnel, Gouverneur, c. 11. Août 27. Grand-Pré, fol. 196).
  6. La nouvelle de la déclaration de guerre étant parvenue à Duquesnel, gouverneur de Louisbourg, celui-ci s’empressa de porter un grand coup aux Anglais, avant que ceux-ci ne s’y fussent préparés. Il envoya donc, de bonne heure en mai 1744, Du Vivier, qui s’empara de Canso, et ensuite entra dans l’Acadie, avec son détachement, auquel se joignirent plusieurs partis de sauvages. Un certain nombre d’Acadiens, dit Ferland, prirent tous les arrangements qu’il leur proposa (par la proclamation du 27 août, que nous venons de citer), pour la fourniture des vivres et de toutes les autres choses dont il pourrait avoir besoin. » — « Du Vivier, dit Parkman, had looked for help from the Acadians of the neighboring village, who were French in blood, faith and inclination. They would not join him openly, fearing the consequences if the attack should fail ; but they did what they could without committing themselves, and made a hundred and fifty scaling ladders for the besiegers. » — « Ainsi accueilli, continue Ferland, Du Vivier s’avança jusqu’aux environs du Port Royal, au commencement de septembre. Il s’était flatté que tous les Acadiens prendraient les armes contre les Anglais. Duquesnel lui avait promis de lui envoyer deux vaisseaux, mais il ne le put faire ; comme la saison était avancée, et qu’il n’y avait pas d’espérance que Port-Royal put être pris, le gouverneur de Louisbourg envoya le Sieur de Gannes de Falaise, pour relever Du Vivier. Port-Royal avait reçu des renforts, tandis que les Français se trouvaient sans vivres ; d’ailleurs, la plupart des sauvages s’étaient déjà retirés. Sur ces entrefaites, (octobre 1744) les habitants des Mines envoyèrent à de Gannes une humble requête dans laquelle ils le suppliaient de faire retirer les sauvages et les troupes. Toutes ces considérations pesées, de Gannes ordonna à Du Vivier de lever le siège, et reprit la route de Louisbourg avec son détachement. » Hist. du Canada. Tome II, ch. XXX, p. 460-61. Parkman. A Half-Century of Conflict, vol. II, ch. XVIII, A Mad Scheme, raconte au long, et avec des détails de son invention, cette expédition de Du Vivier contre Annapolis. Il remarque que Du Vivier descendait du fameux La Tour ; il dit aussi que, tandis que ce commandant attendait les secours que lui avait promis Du Quesnel, « he kept the Acadians at work in making ladders and fire-arrows », p. 63. Parkman tient absolument à faire passer les Acadiens pour traîtres à leur serment de fidélité. La suite du chapitre montrera ce qu’il faut penser de ses assertions. — En 1705, Du Vivier avait épousé, en Acadie, Marie Muis, de Pomboncoup. En 1707, d’après un doc. conservé aux Arch. de la Marine, l’on voit que « François Du Vivier, enseigne des vaisseaux de Sa Majesté et capitaine d’une compagnie franche de la marine, en garnison au fort royal de l’Acadie, et dame Marie Muis, son épouse » avaient vendu à Jean-François Flanc une maison et un pré sur le bord de la rivière du Dauphin. » (Cf. Rameau. Une Colonie. Pièces justificatives, IIIe Série n. IX). De Gannes est l’auteur d’un mémoire intitulé : « Observations sur les erreurs de la relation du Siège de Port-Royal… faites sur de faux mémoires par le révérend Père Charlevoix. » Parkman. Half-Century… Vol. I, ch. VII, p. 155, en note. Parkman, à ce propos, renvoie à l’édit, anglaise de Charlevoix : — History and general Description of New France, by Charlevoix, translated from the original edition and edited with notes by Dr. John Gilmary Shea (New York, Francis P. Harper, 1900). C’est en note de la page 227 du vol. V, de cet ouvrage que Shea mentionne le Mémoire de Gannes sur le siège de Port-Royal ; il s’en sert, dans les pages qui suivent, pour corriger à chaque instant le récit de Charlevoix. Au livre XVIe de son Histoire, page 269 et page 271, de l’édition in-16o de Didot, (Paris, 1744), Charlevoix parle de de Gannes, comme ayant prêté main-forte à M. de Villebon pour la défense de Maxoat, en 1696 : « M. de Villebon avait déjà mis son fort en assez bon état, il fit encore travailler le reste du jour à de nouveaux retranchements, en quoi il fut parfaitement secondé par son frère, par M. de Gannes, un de ses officiers… » « Sur le midi le Sieur de Falaise arriva de Québec, ayant fait une diligence extrême pour avoir part à la défense de Maxoat, dont il avait appris le siège en chemin. »
  7. Akins, p. 135. — À la page suivante, le compilateur reproduit la réponse que fit de Gannes à cette requête : M. Alex. Bourg, Notaire, aux Mines. Messieurs, par considération pour vous, je veux bien agréer votre demande. Signé : De Gannes. Oct. 13, 1744.

    Dans le MS., Richard fait remarquer que Pierre Richard, l’un des signataires de la requête, était le « frère de notre ancêtre, René Richard, venu au Canada après la déportation. » (Feuillet 246 du MS. original d’Acadie).

  8. History of Nova Scotia. Vol. II, ch. IV, p. 42-3. — Dans le MS., il y a, à cet endroit, la note suivante, tirée de Hannay, History of Acadia. « Duvivier issued peremptory orders to the Acadians for supplies, and created a most unfavorable impression. Any who refused to comply with his demands were to be handed over to the tender mercies of the Savages. Notwithstanding this threat, the Acadians were very unwilling to give him any assistance (et que penser alors des affirmations de Parkman ?) and his bright hopes of a spontaneous rising of the Acadian people against British power vanished before the chilling reality. A new generation had grown up who were not disposed to welcome those who would bring war to their doors. » — Ch. XVIII, p. 334.
  9. Parkman, loc. cit. p. 63, dit de son côté : « He (Duvivier) waited in vain for the promised succor… He waited for the ships which did not come… At length, instead of aid from Louisbourg, two small vessels appeared from Boston, bringing Mascarene a reinforcement… This discouraged the besiegers, and towards the end of September they suddenly decamped and vanished. » — Voici, d’autre part, ce que dit Rameau : « Si Duvivier eut fait assez de diligence pour se présenter devant Port-Royal en juin, il eut probablement enlevé de force la place. D’autant plus que les Micmacs, sous la conduite de l’abbé Leloutre, se portèrent sur Annapolis, le 1er juillet, au nombre de 300. — Les Indiens abandonnèrent l’attaque de ce fort peu après, quand fut arrivé, dans le bassin d’Annapolis, le Provincial Galley, du Massachusetts, avec une petite troupe de 70 hommes, et remontèrent aux Mines pour y attendre l’expédition française qui ne les rejoignit que le 24 août 1744. Duvivier campa en vue de Port-Royal le 25 août. Il harcela les Anglais, et fit sommer Mascarène de lui rendre la place… Les négociations entre lui et ce gouverneur traînèrent en longueur ; enfin, un brigantin et un sloop anglais entrèrent dans la rade, Annapolis était sauvée ! Le 3 octobre arriva De Gannes, envoyé par le gouv. de Louisbourg, avec ordre de ramener le détachement de réguliers qui était à Port-Royal. Ce fut en vain que Duvivier insista pour qu’on attendit les navires qui venaient de Louisbourg. De Gannes voulut absolument partir le dimanche 4 octobre ; il resta 10 jours aux Mines, et était encore le 26 octobre à Beaubassin, où il reçut de Louisbourg un avis du départ des vaisseaux pour Port-Royal, où ils arrivèrent ce jour même, 26 octobre. Si de Gannes fût resté quelques jours de plus devant Annapolis, la situation devenait extrêmement critique pour les Anglais. Il commit deux erreurs graves : l’une, d’en partir trop tôt, l’autre de ne pas se ménager un moyen de communication entre Beaubassin, où il resta jusqu’à la fin d’octobre, et Annapolis. Le chef de la petite escadre, venue de Louisbourg, s’apercevant à son arrivée que les troupes françaises étaient parties, attendit trois jours dans le port, et regagna ensuite la mer, après avoir capturé les deux petits vaisseaux anglais qui étaient dans la rade d’Annapolis. » Une Colonie, etc., t. II, ch. XIII, p. 100 et seq. — Cf. également Pièces justificatives, IVe Série, Pièce II. Comment avorta le siège d’Annapolis par Duvivier, en septembre 1744, et Lettre de M. de Gannes pour se justifier, 8 nov. 1744. — Archives de la Marine.

    Cf. Garneau. Hist. du Canada, Liv. VIII, ch. II, p. 167-8., du tome second de la sec. édition, Québec, 1852. — Cf. Histoire populaire du Canada, d’après les doc. franc., et américains, par Jacques de Baudoncourt, (Paris, Bloud et Barral, s-d. mais l’avant-propos est daté : 25 novembre 1886), chap. XI, p. 275. — Cf. New France and New England, by John Fiske, ch. VII, Norridgewock and Louisbourg, p. 226-7. — B. Murdoch. Hist. of N. S. vol. II, ch. IV. Hannay, Hist. of Acadia, ch. XVIII.

    « Duvivier était le fils d’un officier français, et avait le grade d’enseigne de vaisseau et de capitaine. En 1708, il épousa, dans des circonstances particulières, Marie Muis de Pomboncoup. Sa mère était Anne, fille de Charles de la Tour, qui s’était établi en Acadie dès les premiers temps de la colonie. En 1735, Duvivier avait rédigé un Mémoire, dans lequel il prétendait qu’avec cent hommes, et des armes qui seraient distribuées aux habitants, il serait capable de faire la conquête du pays. Ce Mémoire est donné en entier, dans la traduction anglaise, au tome I, appendice au ch. LVI de l’Histoire de la Nouvelle-Écosse, par B. Murdoch, p. 508-9-10-11. » (Hist. of Canada, par William Kingsford. Vol. III, liv. X, c. III, note de la page 307). Toronto and London, 1889.

    Cf. Archives du Canada. Île Royale. Correspondance Générale. 1744. Vol. 26, M. Du Quesnel, gouverneur, c. 11.

    (M. Du Quesnel, gouv. de Louisbourg, mourut subitement en oct. ou nov. 1744) A. C. C. G. Île-Royale, 1744, vol. 77.

    Nov. 25. Louisbourg. MM. Duchambon et Bigot au Ministre : « M. de Gannes est de retour d’Acadie avec son détachement. Il représente que le manque de provisions l’a forcé d’abandonner le siège de Port-Royal, mais M. Duvivier et d’autres le blâment grandement de cela. » Fol. 48, 9½ pages.

    Nov. 18. Louisbourg. M. Duchambon, Lieutenant du Roi, au Ministre : « Détails des opérations de M. de Duvier en Acadie, et de celles de M. de Gannes, qui tous deux ont été relevés de leur commandement quelque temps avant la mort de M. Duquesnel. Il se plaint de la conduite de M. de Gannes. Il est à craindre que les Anglais ne maltraitent les Acadiens. » — Fol. 79, 18 pages.

    Nov. 28. Louisbourg. M. de Gannes. « Donne un compte rendu de son expédition à Port-Royal ; explique la cause de son insuccès, et se défend des accusations portées contre lui par M. Du Vivier. » — Fol. 204, 7 pages.

  10. Hannay, parlant de l’expédition de Duvivier, dit : « Duvivier, ayant échoué devant Annapolis, retourna aux Mines, où il se proposa de prendre ses quartiers d’hiver avec ses soldats ; mais les Acadiens lui firent des remontrances, en termes si énergiques, qu’il fut contraint de se retirer de là. À Beaubassin, il trouva la population également opposée à ce qu’il y fît un séjour, et finalement il repartit pour Louisbourg. » Hist of Acadia, ch. XVIII, p. 335.

    Nous avons vu plus haut la requête des habitants des Mines à de Gannes. Même requête fut donc présentée à Duvivier, comme il est dit dans une lettre de Mascarène, de décembre 1744, page 147 de Akins.

  11. Akins, p. 140-1. Gov. Mascarene to governor Shirley. Longue lettre de 7 pages, qui donne tous les détails possibles concernant l’expédition infructueuse de Duvivier, et dans laquelle il n’est aucunement question de de Gannes.
  12. Akins, p. 150. Gov. Mascarene to — (pas d’adresse). Annapolis Royal, 15 mars 1745.
  13. « Au mois de janvier 1745, 120 canadiens et environ 400 sauvages, sous le commandement du lt. Marin, furent détachés pour se rendre à l’Acadie, et se joindre aux troupes de M. de Gannes, autour de Port-Royal. » Ferland, t. II, ch. xxx, p. 462. Parkman dit que cette expédition décampa le 26 de mai 1745. Cf. A Half-Century, t. II, ch. XX, p. 127. Hannay, p. 337. Murdoch. Vol. 2, ch. vi, p. 74 : « In the beginning of May, a rumor came to Annapolis that there was a body of 300 Canadians and 300 Indians at Mines, with several officers, etc. This party was commanded by Mr. Marin, a lieut. from Canada. They came to the vicinity of the fort at Annapolis during May… This party had spent the winter at the head of the bay of Fundy ; and after three weeks spent in the neighbourhood of Annapolis, where there success was confined to the surprise and capture of the two Boston trading schooners, they received a request from M. Duchambon, sent by express, begging their aid to come to his relief, he being then heavily besieged… » Marin, comme Duvivier et de Gannes, envoya des réquisitions : « The written orders issued by Marin, copies of which have been preserved, are about 20 in number… They very much resemble the orders issued the previous summer by Duvivier : Indeed they seem at once cruel and ludicrous ; cruel in their menacing language… » Le sieur Marin mourut le 29 octobre 1750, à la Rivière-au-Bœuf, au cours d’une expédition qu’il faisait au nom de M. Duquesne.

    Cf. Akins, p. 156-7-8, les Délibérations du conseil du gouverneur Mascarène, pour enquêter sur la conduite de quelques Acadiens à l’égard de l’expédition du Sieur Marin. Cf. Arch. du Canada, Île Royale, Corr. Gén. 1744, vol. 26, c. 11 : November 27, 1744. Louisbourg. M. Duchambon au Ministre. « M. de Beauharnais ayant résolu d’envoyer 50 Canadiens et 50 sauvages en Acadie, et comme ceux-ci doivent arriver là en janvier, je leur enverrai l’ordre d’y demeurer jusqu’au printemps. » Fol. 90, 4 pp.

  14. Cf. Journal Historique en forme de Lettre d’un officier capitaine dans le Régiment de Ponthieu embarqué sur le vaisseau le Prince d’Orange. Au sujet du voyage de la Flotte commandée par M. le Duc d’Enville et partie pour le Canada le 20 juin 1746 — Le Can.-Français. Doc. inéd. sur l’Acadie. Tome i, pièce XI, de page 70 à page 105. Ce journal est tiré des Arch. du Sém. de Québec. C’est un MS. renfermé dans un cahier relié, admirablement écrit, non signé. — Cf. Arch. du Can. Île Royale. Corr. gén. 1745 à 1748, vol. 27. M. Bigot, contrôleur, c. 11, 1746. Avril 5. Rochefort. M. Bigot au Ministre. Concernant l’équipement à Rochefort de la flotte que le Roi envoie en Acadie, etc., sous les ordres du duc d’Enville. Fol. 153., 4½ pp. — Décembre 14. Port-Louis. Le même au même. Il donne de mauvaises nouvelles de l’escadre du duc d’Enville. Perte du Borée, etc. Folio 166. — 6 pp. Parkman. Half-Century etc., vol II, ch. XXI. B. Murdoch, vol.II, ch. VII, (La flotte comprenait 21 vaisseaux, dont Murdoch donne les noms, p. 92, et un équipage de 3150 hommes ; en outre il y avait vingt frégates, etc, et plusieurs bâtiments de transport, portant le régiment de Ponthieu. Les forces de terre étaient sous le commandement de M. Pommeril, brigadier-général). Hannay, ch. XIX. Ferland, vol. II, c. XXXII. Kingsford Hist. of Canada, vol. III, c. V, p. 338 et seq. — Ce duc de d’Enville était un Larochefoucaud.
  15. L’auteur passe bien rapidement sur ce fait d’armes, l’un des plus beaux de notre histoire. Nous renvoyons, pour plus de détails, son chapitre VII et VIII du vol. 5 de B. Murdoch, au ch. XXII de A half century on Conflict, et surtout aux pièces LXIV-LXV-LXVI des Doc. inéd. Can.-Français, tome II, p. 10 et suiv., que l’éditeur a accompagné de la note ci-dessous : « Les pièces qui suivent renferment le récit d’une des expéditions les plus audacieuses, et de l’un des faits les plus héroïques dont il nous fait mention dans les annales du Canada. Nous voulons parler de l’expédition et du combat des Mines. On vit 250 Canadiens partir au cœur d’hiver (janvier 1747), faire plus de soixante lieues en raquettes à travers les forêts, et venir attaquer, au village de la Grand-Prée, une troupe de plus de cinq cents anglo-américains cantonnée dans les maisons, dont l’une était en pierre et armée de canons. Après une lutte soutenue durant douze heures, une partie des ennemis fut tuée et un grand nombre fut prisonniers. La première des pièces que nous publions est le journal de M. de la Corne, second commandant de l’expédition, qui remplaça M. de Villiers dès le commencement de l’action, lorsque ce dernier fut blessé à la première attaque. La seconde pièce est le journal de M. de Beaujeu, le futur héros de la Monongahéla. Son récit est beaucoup plus long et beaucoup plus détaillé que celui de M. de la Corne. Nous y ajoutons une troisième pièce, où se trouve raconté un des hauts faits de cette glorieuse journée, accompli par un des officiers, M. de Lusignan lui-même. Ce fait est rapporté par l’évêque de Québec, Mgr de Pontbriand, dans une lettre au ministre. Enfin une quatrième vient de M. de Lusignan lui-même. » L’abbé H.R. Casgrain. Cf. Rameau. Pièces justificatives, 4e Série III.

    Le M. de Villiers, dont il est parlé ici est le célèbre Louis Coulon, le troisième sieur de Villiers, qui est passé dans l’histoire avec le surnom de « le Grand Villiers », ainsi que dit Edmond Mallette, dans sa belle étude sur Washington et Coulon de Villiers, donnée à Boston, devant la Société Historique Franco-Américaine, le 1er septembre 1902. Cette étude, conservée dans les Archives et publiée dans le Bulletin Historique de la dite Société, nous a été communiquée par notre ami M. J.-A. Favreau. Il y a là, entre autres, des renseignements sur le capitaine Marin (Pierre-Paul Marin de la Marque), dont il a été question dans la note 13 : « Le 29 octobre 1753, le cap. Marin mourût au fort de la rivière aux Bœufs, d’une dysenterie contractée pendant qu’il surveillait la construction de ce fort. Une sépulture chrétienne lui fut donnée dans le cimetière du fort, par le moine Denys Baron, prêtre récollet, aumônier de l’expédition, en présence du capitaine Legardeur de Repentigny, de Laforce, garde-magasin militaire, et de quelques autres personnes qui signèrent l’acte de décès, » — page 29-30.

    « Le de Beaujeu, qui a laissé un Journal de la campagne du Détachement de Canada à l’Acadie et aux Mines en 1746-7, (Arch. du Ministère de la marine et des colonies, vol. 87, fol. 314), s’appelait Daniel-Hyacinthe Marie de Beaujeu, né à Villemarie, le 19 août 1711, de Louis-Liénard de Beaujeu et Louise-Thérèse-Catherine Migeon de Bransac, fille de Jean-Bte. Migeon de Bransac et de Dame Catherine Gaucher de Belleville. Fut tué glorieusement à la bataille de la Monongahéla, le 9 juillet 1755, et inhumé au Fort Duquesne (Pittsburg), le 12 du même mois, comme en fait foi l’acte de sépulture signé de F. Denys Baron, P. R. »

    (Cf. Hist. des Grdes-Familles franc. du Canada. Montréal, Eus. Sénécal, 1867, — La Famille de Beaujeu, p. 251 et seq.).

  16. British Museum. — Dr A. Brown’s MSS. — Add. 19071. — M. A. B. Grosart a écrit en tête du document dont il est fait ici des extraits les remarques suivantes (fol. 36) : « 1742-1753. Private Letter-Book and Journal of Major Paul Mascarène, then Governor of the Province of Nova Scotia. This is perhaps the most precious MS. in the collection. It contains the President’s private history, his application to the King on the suicide of Lieut. Armstrong… his instructions and recommendations to his son… Letters of private friendship, and a great number of most interesting Anecdotes and Remarks. The whole history… in its origin… progress… gradual development… and preparations… of the Acadian Removal is here presented… This MS. extends over fifty-six folio pages exceedingly neatly and closely written. All Holograph. » (fol. 45, V.).

    (Cf. Can-Fran. Doc. Inéd… Tome II, p. 80, pièce LXIX).

  17. Id. Ibid. fol. 47. — (Can.-Fr. T. II, p. 80).
  18. Id. Ibid. fol. 48 v… « The French Inhabitants of this River have kept hitherto in their fidelity, and no ways join’d with the Enemy… and the Priest residing amongst them has behav’d also hitherto like an honest man… » (Can.-Fr. Tome II, p. 80-81).
  19. (Id. Ibid. Can. — Fr. Tome II, p. 81, fol. 52 v.).
  20. (Id. Ibid. Can. — Fr. Tome II, p. 81, fol. 53).
  21. Akins, p. 149. L’éditeur ajoute : « Cette lettre est également de la main du gouverneur Mascarène. »
  22. (Can.-Fr. T. II, p. 82, fol. 61).
  23. (Citée dans B. Murdoch. Tome II. ch. IX, p. 119).
  24. (Can.-Fr. Tome II, p. 82, fol. 118). Cf. Murdoch. Appendix to ch. IX, vol. 2. An account of merchandize delivered to the deputies and elders of the three districts of Menis, viz’t. Grand-Prée, Pisaquid, & River Canard, on acc’t of their payment for provisions, etc., they supplied the N. Eng. Troops… pp. 125-6-7.
  25. Charles, marquis de Beauharnois, succéda à M. de Vaudreuil comme gouverneur du Canada, en 1726. Envoya une expédition contre les Outagamis en 1728 ; s’opposa aux empiétements des Anglais dans la région des grands Lacs ; interdit en 1728 toute intervention du conseil supérieur dans les affaires du clergé. D’où conflit qui se termina par le rappel de l’intendant Dupuy. En 1731, il envoya La Vérendrye à la découverte du N.-O. et de la mer de l’Ouest. Dès 1734, il exposait au ministre les mesures à prendre pour la défense du Canada. En 1740, il fit mettre les forts de Chambly, de St-Frédéric et de Niagara en état de défense. Il fut rappelé en France en 1746. Sous son administration eut lieu la découverte des Montagnes Rocheuses, en 1743. — Gilles Hocquart remplaça en 1729 M. d’Aigremont, mais n’eut le titre d’Intendant qu’en 1731. Il régla les poids et mesures, et travailla activement au développement de la colonie. Il fut remplacé par Bigot en 1748. — La lettre dont il est ici question est datée de Québec, 12 septembre 1745 ; Akins n’en donne qu’un assez court fragment ; B. Murdoch la reproduit beaucoup plus au long, au Tome II de son Hist. of N. S., Appendix to ch. VI, p. 79 et seq. — Cette lettre est tirée du vol. X des New York Documents (Dr O’Callaghan’s), pp. 4, 5,
  26. Vol. Il, ch. IV, pp. 41-2.
  27. Akins, p. 151.
  28. Can.-Fr., Tome II, p. 82, pièce LXIX des Doc. inéd. : « They could not prevail upon above twenty to joyn with them. »
  29. Cf. Akins, p. 151 et suiv.
  30. Au fait dont il est parlé ici, voici des variantes : « A proclamation of gov. Shirley, dated 21 October 1747, was received at Annapolis Royal, 12 April 1748. It promised the King’s protection to the loyal inhabitants of Nova Scotia, but it proscribed by name, as guilty of treason and outlaws, Louis Gauthier (suivent les autres noms). £50 sterling is offered for each, if delivered up within six months ; also a pardon to such of the guilty as deliver up an outlaw besides the reward of £50… It is to be presumed that the twelve persons proscribed had been notorious, in aiding the French and Indians in the subsisting war. » — (B. Murdoch, vol. ii, ch. ix, p. 117) : « One of the results of the aid and comfort which De Villiers had received from the Acadians was a proclamation proscribing as guilty of treason twelve of the French inhabitants. The men thus declared outlaws were Louis Gautier, etc… a reward of fifty pounds sterling was offered for the capture of each of these persons. » (Hannay, ch. XIX, p. 352). « …Les officiers anglais annoncèrent l’intention de poursuivre un certain nombre d’habitants qui étaient réputés avoir pris les armes. Douze furent mis hors la loi, parmi lesquels la famille Gauthier, et le 7 novembre onze autres furent sommés de se présenter à Annapolis devant la cour. » Rameau. Une Colonie, etc. Tome II, ch. XIII, p. 128. — À la page 108 de ce même chapitre, Rameau dit : « Mascarène… opéra quelques enquêtes sur les relations des Acadiens avec les Français durant le séjour de Du Vivier aux Mines… Il pensait bien que plus d’une connivence avait dû se produire entre quelques-uns des habitants et leurs envahisseurs. On arrêta donc aux Mines Armand Bugeaud, fils de l’ancien chirurgien de ce district, Joseph Le Blanc, dit Le Maigre, et quelques autres ; ils furent acquittés et relâchés, mais on surveilla les Acadiens avec méfiance… »
  31. Their plea with the French who pressed them to take up arms, was their oath. (Letter to Shirley, April 1748. — Akins, p. 159).
  32. « This restored comparative quiet till the war of 1745, when some of the Acadians remained neutral, while some took arms against the English, and many others aided the enerny with information and supplies. » — (Vol I, ch. IV. Conflict for Acadia, p. 96).
  33. Qui legitis flores et humi nascentia fraga,
    Frigidus, o pueri, fugite hinc, latet anguis in herba.

    Virgile. Buc.-Egl. III, 92-93.

    (Un serpent sous l’herbe, ou sous roche, comme nous disons en français.)

  34. Montcalm and Wolfe, vol. I, ch. IV, p. 95.
  35. Ibid. p. 110. — Cf. également A Half-Century of Conflict, vol. I, ch. ix, p. 210 : From first to last, the Acadians remained in a childlike dependence on their spiritual and temporal guides.
  36.  « Nam fuit hoc vitiosus : in hora sæpe ducentos,
    Ut magnum, versus dictabat stans pede in uno. »

    Horati Satirarum. Lib. I, IV, 9-10. (Cf. The Works of Horace, edited with Explanory Notes, by Thos. Chase, L. L. D. p. 140. Philadelphia. Eldredge & Brother, No 17, Seventh Str., 1884). — Les Œuvres d’Horace, traduction de Jules Janin, Tome ii, livre i. Satire iv, p. 25. (Paris, Librairie des Bibliophiles, rue Saint-Honoré, 338, MDCCCLXXVIII).

  37. Rara avis in terris, nigroque simillima cygno.

    Oiseau rare, plus rare qu’un cygne au noir plumage.

    Juvenal. Sat. VI, trad. Victor Poupin. (Paris, lib. de la Bibl. Nationale, 1886.)