Album des missions catholiques, tome IV, Océanie et Amérique/L'épiscopat australien

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Collectif
Société de Saint-Augustin (p. 40-43).

L'ÉPISCOPAT AUSTRALIEN


Mgr POLDING (Jean),
bénédictin,
premier archevêque de Sydney.
(1794-1877.)

'EST au mois de septembre 1835 que Jean Polding, nouvelle sacré évêque de Hiero-Césarée, arriva en Australie. Il y fut reçu par le R. P. Ullathorne, aujourd'hui évêque de Birmingham, alors vicaire général. L'Australie n'avait, à cette époque, que trois missionnaires, MM. Thery, Dowling et Encroe.

La grande colonie anglaise était alors surtout un lieu de déportation pour les criminels. Dans la seule année 1835, d'après le relevé officiel, on avait transporté, dans la Nouvelle-Galle du Sud, 3,000 hommes et 179 femmes ; dans la Terre de Van Diemen, 2,054 hommes et 922 femmes ; le total des condamnés réduits à la servitude s'élevait à 30,000 dans la Nouvelle-Galles du Sud, et à 20,000 dans l'île de Van Diemen. Il y avait en outre, dans les maisons de correction de l'île de Norfolk, de Moreton-Bay et de Port-Arthur, 3,000 détenus.

L'état moral de toute cette population était épouvantable, et, pour la soumettre, le gouvernement anglais n'avait trouvé et n'employait que les châtiments corporels d'une révoltante cruauté. Dès son arrivée à Sydney, Mgr Polding s'occupa particulièrement et avec un zèle infatigable de l'amélioration morale de ces malheureux. Il allait, comme un simple missionnaire, accompagné d'un prêtre, dans les prisons, dans les cantonnements des convicts, dans les maisons de correction, prêcher la foi catholique et préparer au repentir ces âmes gangrenées. Sa charité obtint les plus consolants résultats, et plusieurs gouverneurs de la colonie se firent un devoir de le reconnaître publiquement. Mgr Polding obtint aussi, par ses incessantes prières, un adoucissement des peines corporelles.

En 1841, il se rendit en Angleterre, puis à Rome, pour demander au Saint-Siège l'établissement, en Australie, de la hiérarchie catholique. Sa proposition fut agréée, et, le 15 février 1842, le pape Grégoire XVI le nommait premier archevêque de Sydney. Pendant son séjour à Rome, quelques difficultés survenues dans l'Église de Malte ayant demandé l'intervention du Saint-Siège, Mgr Polding fut envoyé à Malte avec pleins pouvoirs. Sa mission fut couronnée de succès, et Grégoire XVI, pour lui témoigner sa satisfaction, le créa comte romain et assistant au trône pontifical.

Le 12 novembre 1866, le Saint-Siège accorda pour auxiliaire à Mgr Polding, Mgr Augustin Sheehy, nommé évêque de Betsaïde in partibus.

Le 28 février 1873, à cause du grand âge de l'archevêque de Sydney, Mgr Roger-Bède Vaughan, Bénédictin, fut nommé son coadjuteur avec future succession, avec le titre d'archevêque de Nazianze in partibus.

Sur la proposition de Mgr Polding, le Saint Père créa, le 31 mars 1874, une seconde province ecclésiastique en Australie ayant son siège à Melbourne.

Les funérailles de Mgr Polding ont eu lieu à Sydney le 19 mars, dans la cathédrale provisoire, présidées par Mgr Vauhan, assisté de NN. SS. Lanigan, évêque de Goulbourne, Murray, évêque de Maintland, et Quinn, évêque de Bathurst, en présence de tout le clergé et de toutes les sociétés catholiques de Sydney. L'équipage de sir Hercules Robinson, gouverneur et commandant en chef de la colonie, suivait le char funèbre.




Mgr VAUGHAN (Roger-Bède)
bénédictin,
deuxième archevêque de Sydney.
(1834-1883.)

Mgr Roger-Bède Vaughan, deuxième archevêque de Sydney, était le second fils du colonel Vaughan de Courtfield et le frère de l'évêque de Salford, Mgr Herbert Vaughan.

Né à Courtfield le 9 janvier 1834, il entra, en 1853, dans l'Ordre de Saint-Benoît, et fut ordonné prêtre, à Saint-Jean-de-Lantran, par le cardinal Patrizzi, le 9 avril 1859. D'abord professeur de philosophie à Saint-Michel, centre des études de l'Ordre des Bénédictins,

Mgr Jean POLDING, Bénédictin, premier archevêque de Sydney. (Voir p. 38.)


Mgr Roger-Bède VAUGHAN, Bénédictin, deuxième archevêque de Sydney. (Voir p. 38.)


S. Ém. le cardinal MORAN, troisième archevêque de Sydney. (Voir p. 41.)


NOUVELLE-NURSIE. — MGR SALVADO, bénédictin, évêque de Port-Victoria, abbé de la Nouvelle-Nursie. (Voir p. 37 et 41.)

en Angleterre, il fut, en 1862, élu prieur du chapitre de Menevia et Newport, réélu en 1866, réélu une troisième fois en 1870.

Mgr Vaughan fut sacré à Liverpool, le 19 mars 1873, par S. Ém. Mgr Manning, archevêque de Westminster.

Ce pieux prélat n’avait pas encore cinquante ans lorsque Dieu l’appela à l’éternelle récompense au cours d’un voyage en Europe. Il est mort le 17 août 1883 d’une maladie du cœur. Débarqué à Liverpool, il a expiré subitement dans la nuit, tandis qu’il se disposait à se rendre à Rome afin de déposer ses hommages aux pieds de Sa Sainteté.

Mgr Vaughan avait quitté son diocèse vers la fin de juin. On lui avait fait, à l’occasion de son départ, de magnifique démonstrations qui témoignaient combien l’éminent archevêque était aimé et estimé par la population de son diocèse. Mgr Vaughan était en effet un prélat des plus distingués et sa mort est une grande perte pour l’Église d’Australie.

Les funérailles solennelles du prélat ont eu lieu à Liverpool, le 23 août. La messe de Requiem a été célébrée par le R. P. Dom Jérôme Vaughan, prieur des Bénédictins de Fort-Augustus, assisté du R. P. Bernard Vaughan, jésuite, et de M. l’abbé Jean Vaughan, tous frères de l’éminent défunt. Cinq évêques, parmi lesquels Mgr Herbert Vaughan, de Salford, frère aîné de l’archevêque décédé, ont donné les absoutes d’usage. Le panégyrique a été prononcé par le R. P. Morris, de la Compagnie de JÉSUS. Le corps de Mgr Vaughan a été transporté à Sydney et repose dans la cathédrale Sainte-Marie, dont il avait fait, en 1882, la dédicace solennelle.




Son Éminence le cardinal MORAN (Patrice-François),
troisième archevêque de Sydney.


Ce prélat gouvernait un diocèse irlandais quand le Saint-Père jeta les yeux sur lui et l’invita à occuper le trône si prématurément laissé vide par la mort de Mgr Vaughan.

La promotion de Mgr Moran au siège métropolitain de la Nouvelle-Galles du Sud lui permit de réaliser le vœu le plus cher de ses jeunes années : travailler à la diffusion de l’Évangile dans les pays étrangers. Dans son enfance sa mère lui faisait lire les Annales de la Propagation de la Foi ; cette lecture éveilla dans son âme un tel désir de se vouer à l’œuvre des missions qu’il fut sur le point de partir pour la Chine. Mgr Kirby l’en empêcha en lui remontrant que l’Irlande offrait à son zèle un champ bien suffisant.

Aussitôt que sa nomination fut connue, on prépara à Sydney une magnifique réception à l’archevêque le jour de son arrivée.

« Notre archevêque, disait le Freeman’s Journal, nous arrive de la terre du chant, de la patrie des bardes et des ménestrels. Comme tous les cœurs irlandais sont extrêmement sensibles aux charmes de la musique, il est juste que les concerts et des hymnes de louange fassent partie du programme de la réception que nous voulons faire à celui qui vient au nom du Seigneur ! »

C’est le 8 novembre 1884, que le nouvel archevêque de Sydney fit son entrée solennelle dans sa ville métropolitaine.

Un temps splendide favorisa l’exécution du cérémonial préparé de longue main par les pieux catholiques. Vingt bateaux à vapeur pavoisés et décorés allèrent à la rencontre de la Ligurie qui amenait le prélat. Mgr Moran étant descendu sur l’un d’eux, toute la flottille s’avança processionnellement dans le port. Le steamer pontifical était escorté par les autres steamboats rangés sur deux lignes et portant les membres catholiques du parlement australien, bon nombre de membres protestants et les diverses associations religieuses. Au débarcadère l’archevêque fut complimenté au nom du gouverneur qui lui envoyait en même temps une voiture de gala pour le conduire à la cathédrale.

Le Freeman’s Journal assure que qui ait jamais eu lieu en Australie. Il évalue à 100,000 le nombre des personnes qui se pressaient sur les quais et dans les rues sur le passage du prélat. Toutes les villes de la Nouvelle-Galles du Sud avaient envoyé des catholiques notables pour les représenter. Un grand nombre d’adresses furent lues à la cathédrale, au nom du clergé et des fidèles, soit de l’archidiocèse, soit des diocèses suffragants. Mgr Moran répondit par une longue et éloquente allocution. Les démonstrations enthousiastes déployées partout en son honneur, les perpétuelles ovations renouvelées sur son passage, ont dû adoucir l’amertume du chagrin qu’avait éprouvé le nouvel archevêque en se séparant de son diocèse d’Ossory et de la patrie irlandaise.

L’année suivante, le 27 juillet 1885, il recevait le chapeau de cardinal.

Le successeur des Polding et des Vaughan est un lettré de haute valeur. Les vieilles annales irlandaises n’ont pas de secret pour lui. Justement fier des gloires de son pays natal, il a fait revivre dans des livres estimés les traditions les plus anciennes, les plus touchantes, les plus précieuses de l’Ile des Saints. Sa plume élégante a retracé la vie des pontifes illustres qui fleurirent pendant l’âge d’or de l’Irlande, à l’époque où la Verte Erin envoyait à l’Europe continentale des instituteurs et des apôtres.

Mgr Patrice-François Moran est né dans le diocèse de Kildare, le 17 septembre 1830.




Mgr SALVADO (Rudesindo),
bénédictin,
évêque de Port-Victoria,
préfet apostolique de la Nouvelle-Nursie.

Le monastère de la Nouvelle-Nursie que nous avons décrit au chapitre précédent, est le plus beau titre de gloire et l’œuvre préférée de ce grand évêque qui en fut le créateur de concert avec Mgr Serra.

Le 12 mars 1867, le jour de la fête de saint Grégoire le Grand, lui aussi l’apôtre monastique d’un grand peuple, le pape Pie IX donna la bulle qui érigeait le monastère de la Nouvelle-Nursie en abbaye nullius diœcesis et en préfecture apostolique, comprenant un espace de seize milles carrés autour de la colonie bénédictine, dont Sa Sainteté formait un véritable diocèse, distinct de celui de Perth, quoiqu’il s’y trouve enclavé. Mgr Salvado était nommé, par la même bulle, abbé perpétuel et préfet apostolique de la Nouvelle-Nursie, cette dignité et cette charge devant, après lui, passer à ses successeurs. C’était le digne couronnement du long et pénible apostolat de Mgr Salvado.

Le Souverain Pontife voulut que l’ancien Bénédictin de Saint-Martin de Compostelle assistât aux fêtes du dix-neuvième centenaire du martyre de saint Pierre, pour y représenter, avec Mgr Polding, archevêque de Sydney, les églises du continent océanien.

Après ces glorieuses solennités, Mgr Salvado vint en France et obtint des Conseils de la Propagation de la Foi quelques secours pour sa mission.

De là, il se rendit en Espagne, où la reine Isabelle II lui fit l’accueil le plus sympathique. Sa pensée était d’établir, non loin de Madrid, un monastère de son Ordre, qui devait être en même temps un séminaire, un collège et une ferme-école pour les jeunes Espagnols désireux de se consacrer, sous le froc bénédictin, à l’évangélisation des sauvages de l’Australie. On dit même que la reine voulait lui céder, dans ce but, une portion de l’immense palais de l’Escurial, qui n’est aujourd’hui qu’un désert de pierre.

Mais la révolution renversa peu de temps après le trône de la reine Isabelle, et le projet de Mgr Salvado ne put s’exécuter. Néanmoins l’évêque profita de son séjour dans sa catholique patrie, pour recruter un bon nombre de jeunes Espagnols tout dévoués à son œuvre.

A l’époque du Concile du Vatican, le vaillant évêque des Australiens revint en Europe, toujours plein de force et d’ardeur, quoiqu’il eût alors, depuis quelques années, dépassé la cinquantaine.

Avant de repartir pour le Nouveau-Monde, il fit connaître l’état prospère de sa colonie monastique et de son abbaye, où vivent maintenant 72 moines, tous Espagnols.

« Mais, disait-il, nous sommes toujours et pour longtemps encore les enfants de la Providence, parce que, à mesure que nos ressources augmentent, nous admettons un plus grand nombre de sauvages à partager notre vie. Les indigènes de cette première génération ne peuvent pas encore se suffire ; il faut que nous les aidions en beaucoup de manières. Qu’il survienne une longue sécheresse ou des pluies prolongées, une épizootie sur les bestiaux ou une épidémie chez les sauvages, comme en 1860 ; voilà toutes nos réserves épuisées et nous nous trouvons réduits presque à la mendicité. Lorsque la seconde génération de nos Australiens sera arrivée à l’âge d’homme, elle pourra se passer de notre secours, parce qu’elle aura eu, dès l’enfance, l’habitude du travail, de l’ordre et de l’économie comme chez les bons agriculteurs de l’Europe. Nous-mêmes, dans quelques années, nous aurons terminé nos constructions, qui absorbent tout ce qui n’a pas été dépensé pour l’entretien journalier de plus de trois cents personnes. Nous ne serons plus réduits alors à tendre la main à nos frères de l’Ancien Monde, et nous pourrons vivre de notre propre vie, Toujours, il est vrai, à la sueur de notre front, mais, enfin, avec nos ressources personnelles. »




Et maintenant, quittant l’Australie, passons en revue les îles de son voisinage.

En voici d’abord une sur laquelle flotte le pavillon tricolore.

Terre française !