Allie/46
XLIV
Un soir que nous étions à dîner en famille, je remarquai que Marie et Olive tenaient une conversation à mi-voix avec Jacques et Cécile. Allie causait avec moi de je ne sais quel projet pour l’amélioration de la ferme. Marie était très espiègle à ses heures, de sorte que nous ne faisions pas attention à leur chuchotement. Je remarquai bien qu’ils étaient tous les quatre en grande toilette, mais je supposai qu’ils attendaient des amis pour la soirée.
Allie était assise à sa place habituelle, à ma droite, quand, tout à coup, Cécile se leva de table et vint se placer derrière moi ; Jacques, Marie et Olive prirent la même position derrière leur mère.
— Donnez-moi votre main ! me dit Cécile.
— Donnez-nous votre main ! dirent Jacques, Marie et Olive à leur mère. Et d’un geste spontané ils mirent la main d’Allie dans la mienne.
Je ne retirai pas ma main ; Allie ne fit aucun effort pour retirer la sienne.
— Alors, vous dites : oui ? demandèrent-ils tous les quatre, à l’unisson.
Je me levai et déposai sur les lèvres tremblantes d’Allie mon premier baiser depuis notre vie commune.
C’est ainsi que se consomma l’union de nos deux cœurs, que nos âmes-sœurs avaient, depuis longtemps, préparée, mais que le destin avait tenus si longtemps séparés.