Almanach des muses 1770/Vers à M. Le François sur quelques critiques

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(p. 115-116).


VERS
À M. LE FRANÇOIS
Sur quelques Critiques.


    Envain la critique farouche,
    Envain l’envie au regard louche
  ſur mes écrits diſtillent leur poiſon :
Le François applaudit ; que faut-il davantage ?
    la fleur qui plaît au papillon,
    ne recherche pas d’autre hommage,
    & n’appellera pas outrage,
    le mépris forcé du Frélon.
    Oui, malgré les cris & le ton
    du cenſeur jaloux & ſauvage,
je ſuivrai les erreurs d’un goût vif & volage :
    le plaiſir a toujours raiſon[1].
  Eſt-il un Art, faut-il un Apollon,
  quand on n’écrit que pour le badinage ?
    Je ne veux pas me faire un nom ;
    j’amuſe les jours du bel âge,
    & le cœur eſt mon hélicon.
    Je laiſſe au célèbre Voltaire,
je laiffe aux le François la gloire de courir
    dans une plus belle carriere :

leur ſort eſt de briller, le mien eſt de jouir.
    La jeune & ſenſible Bergere
ne voit dans l’univers que le lit de fougere,
  que les Amours deſtinent au plaiſir.

Par Madame la Marquiſe D’ANTREMONT.

Comment ſe peut-il trouver quelqu’un qui ne rende pas juſtice aux graces, à la légereté & au peu de prétention du petit nombre de vers que Madame la Marquiſe d’Antremont nous a donnés juſqu’à préſent, & qu’on deſire ſi fort de voir s’augmenter tous les jours !



  1. Vers agréable.