Amourette
AMOURETTE
Or’ que l’hyver roidist la glace espesse,
Reschaufon-nous ma gentille maistresse,
Non acroupis dans le fouyer cendreux,
Mais au plaisir des combats amoureux.
Assison-nous sur ceste verte couche :
Sus baisez-moy de ceste belle bouche,
Pressez mon col de voz bras despliez,
Et maintenant vostre mere oubliez.
Que de la dent vostre tetin je morde,
Que voz cheveux fil à fil je destorde :
Il ne faut point en si folastres jeux,
Comme au dimenche arrenger ses cheveux.
Approchez- vous, tendez-moy vostre jouë.
Vous rougissez ? il fault que je me jouë.
Vous sou-riez : avez-vous point ouy
Quelque doux mot qui vous ayt resjouy ?
Je vous disois que la main j’allois mettre
Sur voz genoux : le voulez-vous permettre ?
Ne fuyez pas, maistresse : je voy bien
Au clin des yeux, que vous le voulez bien.
Je vous entens en voyant vostre mine.
Je jure Amour, que vous estes si fine,
Que pour mourir de bouche ne diriez
Qu’on vous baisast, bien que le desiriez :
Car toute fille, encor’ qu’elle ait envie
Du jeu d’aimer, desire estre ravie.
Tesmoin en est Helene, qui suivit
D’un franc vouloir celuy qui la ravit.
Je veux user d’une douce main forte.
Ha vous tombez : vous faites ja la morte.
Sus, endurez ce doux je ne sçay quoy :
Sans vous baiser vous moqueriez de moy
En vostre lit quand vous seriez seulette.
Or sus, c’est fait, ma gentille doucette :
Recommençon à fin que noz beaux ans
Soient reschaufez de combas si plaisans.