Amours et Haines (1869)/La Chanson de la Nourrice

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Amours et HainesMichel Lévy frères, éditeurs (p. 215-218).
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LA CHANSON DE LA NOURRICE.


En me promenant ce matin,
(J’aime la rose et le jasmin,
La rose éclose.)
J’ai rencontré, chemin faisant,
Un bel ange du ciel volant.
(J’aime la rose.)

Sa robe était de blanc satin,
(J’aime la rose et le jasmin,

La rose éclose.)
Et ses yeux d’étoiles bien doux :
« Mon bel ange, où donc allez-vous ? »
(J’aime la rose.)

« — Madame, je vais mon chemin,
(J’aime la rose et le jasmin,
La rose éclose.)
« Des enfants petits dans mes bras ;
« Madame, n’en voulez-vous pas ?
(J’aime la rose.)

« Choisissez dans tout mon butin.
(J’aime la rose et le jasmin,
La rose éclose.)
« J’en ai des bruns, des blonds aussi ;
« Voulez-vous pas de celui-ci ?
(J’aime la rose.)

« Il est beau comme un chérubin.
(J’aime la rose et le jasmin,

La rose éclose.)
« Il est doux comme un jour d’avril ;
« Ce petit-là vous convient-il ?
(J’aime la rose.)

« Ses lèvres sont de grenat fin.
(J’aime la rose et le jasmin,
La rose éclose.)
« Il est tout blond comme le miel,
« Il a les yeux couleur du ciel.
(J’aime la rose.)

« Voyez son pied, voyez sa main.
(J’aime la rose et le jasmin,
La rose éclose.)
« Madame, c’est un petit roi.
« — Mon bel ange, donnez-le-moi !
(J’aime la rose.)

« Je le mettrai dedans mon sein,
(J’aime la rose et le jasmin,

La rose éclose.)
« Dedans mon sein bien enfermé ;
« J’en veux faire mon bien-aimé.
(J’aime la rose.)

« — Mettez-le donc en votre sein.
(J’aime la rose et le jasmin,
La rose éclose.)
« Emportez-le dans la maison,
« Car le bon Dieu vous en fait don. »
(J’aime la rose.)