Anecdotes pour servir à l’histoire secrète des Ebugors. Statuts des sodomites au XVIIe siècle./III/25

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Texte établi par Jean HervezBibliothèque des curieux (éditions Briffaut) (p. 123-126).

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ARTICLES
DU TRAITÉ DE PAIX

Entre les Ebugors et les Cythéréennes.


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I.

Aussitôt après la signature du présent traité, les Ebugors et leurs alliés se retireront de devant la place et s’en retourneront dans leurs États respectifs.

II.

Les Ebugors n’étendront pas davantage leur domination à cause des inconvénients qui en résulteraient pour le bien commun. Ils pourront vivre selon leurs lois et leurs usages, mais ils ne décrieront pas comme ils ont fait jusqu’ici le gouvernement des Cythéréennes. Au contraire, les deux peuples travailleront de concert à entretenir la paix et auront l’un pour l’autre les égards qu’ils se doivent réciproquement.

III.

Les Cythéréennes auront, comme avant la guerre, la liberté du commerce ; mais elles auront soin de ne fournir que des marchandises de bon aloi ; pour cet effet, il sera établi des bureaux dont les commis seront chargés de visiter exactement tout ce qui sera exposé en vente ; on transportera les marchandises gâtées dans les magasins d’où elles ne sortiront qu’après avoir été mises en état d’être vendues ; il y en aura à tout prix pour la commodité de ceux qui voudront faire emplette.

IV.

Les Cythéréennes traiteront désormais leurs prisonniers avec plus de douceur et n’exigeront point une rançon exorbitante ; elle sera réglée sur la qualité des captifs. Cet article ne regarde pas les Friscaniens, sur qui on pourra prendre tout ce qu’ils prennent aux autres.

V.

Les Emécondines ne pourront trafiquer qu’avec les grands seigneurs, auxquels elles auront le privilège de vendre comme belles marchandises ce qui n’a qu’un éclat éblouissant.

VI.

On permet aux Todéves de venir faire des recrues à Cythère, mais il leur est défendu d’enrôler personne qui ait moins de quarante ans.

VII.

Il est ordonné aux Omines de ne plus se mêler désormais de toutes les affaires qui pourraient survenir dans la suite entre les puissances contractantes. Il leur est enjoint d’aller s’établir parmi les Brularnes et de faire ensemble un seul corps de nation. Comme les Cythéréennes ne veulent point commercer ouvertement avec les Omines, ceux-ci ne viendront qu’en secret à Cythère, et l’on s’engage à leur rendre dans le particulier toute sorte de bons offices.

VIII.

Les Caginiens pourront, comme à l’ordinaire, faire ligue offensive et défensive avec les Ebugors.

IX.

Il y aura toujours une sentinelle à la porte des magasins de Cythère pour empêcher les disputes qui pourraient survenir entre les vendeurs et les acheteurs.

Il y avait encore quelques articles secrets dont on ne juge pas à propos de donner connaissance au public.

Telle fut la fin de ce siège fameux, pendant lequel on fit voir de part et d’autre tout ce que peuvent la valeur et l’adresse réunies. Lorsque la guerre s’alluma entre les Cythéréennes et les Ebugors, il y avait lieu de croire qu’elle ne se terminerait que par la perte d’une des deux nations. Heureusement, les suites n’ont pas été si funestes.

Fasse le Ciel que cette paix soit durable ! Ce sont là les vœux que je fais tous les jours dans ma solitude. Pendant ma jeunesse, je ne respirais que les combats ; aujourd’hui que je me vois avancé en âge, couvert de glorieuses cicatrices et comblé d’honneurs militaires, je n’aspire plus qu’après le repos et la tranquillité.