Année galante ou Étrenne à l’amour

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Couverture de l’Année galante ou Étrenne à l’amour

FRONTISPICE


AIR : On chante d’aise air de la Rosiere de Salenci.




Je viens armé de mon flambeau
Dans vos sens vous lancer ma flam̃e
Et de cet almanach nouveau
Souffler mon ardeur dans votre ame
Ainsi l’Amour sous les jupons
De sa torche allume les C…



Si votre cœur reconnaissant
Daigne l’agréer pour etrennes
Vous livrant au culte galant
Les votres deviendront les miennes
Ainsi l’amour sous les jupons
Verse le plaisir dans les C…



Il faut sans beaucoup de façons
Pour etre mes cheres pretresses
Laisser voir et prendre aux garçons
Vos tetons vos cuisses vos fesses
Ainsi l’Amour sous les jupons
Au plaisir prepare les C…



Belles foutés a l’unisson
Voila le bon conseil a suivre
Vous en verrés mainte leçons
Que je vous donne dans ce livre
Ainsi l’Amour sous les jupons
De plaisirs ennivre les C…

No I.


AIR : Au coin du feu




Quand la triste froidure
Relegue la nature
Au coin du feu
L’Amour bravant l’injure
Fait parler la nature
Bien loin du feu



Ailleurs c’est la Duchesse
Dont on tate, la fesse
Au coin du feu
Ici troussant sa cotte
Une fille qu’on frotte
Bien loin du feu



Pour le faire a son aise
La Dame, veut qu’on baise
Au coin du feu
A la simple le Grisette
Un V… sert de chaufrette
Bien loin du feu.


JANVIER.


Le Traineau


Air : Des folies d’Espagne.


A deux Amans que l’amour favorise
Tous les endroits et tous les tems sont bons ;
Leurs sens actifs que sa flamme électrise
Savent braver l’Hyver et ses glaçons.

No. I.

CONTE
Le Trainau Anecdocte Ruſſe.


Telles Regions telles mœurs ; tel homme tel goût, un des plus grands divertissements de la Noblesse Russe pendant l’Hiver, est de parcourir en Traineau un grand espace de pays, ce qui ne leur est pas difficiles puisque les reines dont il se servent pour cet exercice sont sans contredit les plus agiles de tous les animaux domestiques.

Un Seigneur de cette Contrée pour rendre le plaisir de cette course plus piquant, s’y faisoit accompagner par sa Maitresse, et aimoit a jouir des plus douces faveurs de l’Amour dans le tems même ou l’equipage glissant alloit le plus vite ; mais il en fut un jour la victime, etant dans la chaleur de l’action, il ne s’apperçut pas que ses reines traversoient une riviere glacée, point extremement large, mais qu’on savoit être très profonde et très rapides aussi n’etoit il pas encor au milieu que la glace rompit sous lui et engloutit d’un meme coup l’Autel du Dieu de Cythere, le Sacrifice et le Sacrificateur.

No. II.

CONTE
Lettre d’un Provençal a un de ſes ami
en Province.


Il faut que je te raconte mon cher compatriote une avanture extraordinaire qui vient de m’arriver je suis bien guerri je t’assure du desir qu’on a de trouver des gens de son pays voici le fait : comme nous sommes dans le carnaval je fut conduit il y a quelque temps a un Bal par quelqu’un avec qui je me suis lié depuis peu, et j’y trouva entre plusieurs Demoiselle fort aimable, une petite blonde qui suivant ce quelle me dit se trouva être des environs de chés moi, nous dansames ensembles et fimes ainsi connaissance.

Le Bal fini il est question de s’en retourner chez soi. je cru qu’il etoit de l’honnêteté de proposer a ma blonde de la reconduire chez elle, elle me proposa de manger ensemble une salade en buvant une bouteille de vin que j’acceptois. joublioit de te dire quelle avoit commencé par faire un bon feu, la belle ettendue sur sa chaise les pieds sur les chenets avoit relevée insensiblement ses jupes et sa chemise jusque sur ses genoux beaucoup plus haut que son derriere tu juge aisement de ce que j’avois a contempler et en quel etat par consequent etoit ce que tu devinera je n’osois pourtant en faire rien remarquer, m’imaginant que ce que je voyoit faire pouvoit etre en usage dans la Capitale ou regne comme disoit un de nos Regents l’aisance et la liberté. J’etois dans ses reflections lorsque tout a coup l’on entendit frapper de la maniere la plus terrible ma compagne hesite un moment et se determine enfin a ouvrir quand elle voit que l’on va mettre la porte en bas quel est mon saisissement il entre aussitot un grand Estaffier qui commence par imprimer une paire de soufflets sur le visage de ma blonde, et ni m’ayant vu quoique je fasse de mon mieux pour me cacher, me menace de me jetter par la fenêtre en jurant et sacrant, comme il commence a me saisir et a m’ajuster quelque coups de poings j’entre en composition ; et moyennant 12tt, j’obtiens de m’en aller par ou j’etois venu je promet bien de ne plus faire connaissance avec mes pays et encore moins mes payses. Je suis mon cher, &c.


FÉVRIER.


La Parade.


Air : Nous sommes Précepteurs d’Amour,


Avec un objet fait au tour,
Je ne joûrois point de la sorte.
Qui voit le Temple de l’Amour,
Doit-il badiner à la porte ?

No II.


AIR : Voila ce que c’est d’aller au Bois.





Être folatre être Badin
Voila ce que c’est qu’un Arlequin
Savoir mettre le monde en train
Exciter a rire
Mille bons mots dire
Ainsi qu’a fait maitre Carlin
V’la ce que c’est qu’un Arlequin



Lancer quelques brocard malin
Voila ce que c’est qu’un Arlequin
Par exemple sans etre fin
Dire a Morfontaine
Que du Bois sans peine
Il aura plus que Commartin
V’la ce que c’est qu’un Arlequin



Avoir quelques coups de Rondin
Voila ce que c’est qu’un Arlequin
Quand par un mal’heureux destin
A quelqu’un, l’on touche
Dont l’humeur farouche
Ne repond qu’avec un gourdin
V’la ce que c’est qu’un Arlequin

No. III.


AIR : Vous m’entendez bien




Agnès s’emparant d’un Licol
Trainoit un Taureau par le col
Affin qu’a sa Genise
Eh bien
Il rendit un service
Vous m’entendez bien



Mais l’animal ne se hatoit
Car la pauvre Bête avoit fait
Avec une vingtaine
Eh bien
Et sans reprendre haleine
Vous m’entendez bien



Ce que regardant Louison
Qui mieux instruite etoit dit-on
Aussitot vous le tire
Eh bien
Par ou vous allés rire
Vous m’entendez bien



De tout il faut tirer parti
Filette apprenées de ceci
Quand un amant échappe
Eh bien
Comment on le ratrape
Vous m’entendez bien


MARS.


Le Service intéressé.


Air : Réveillez-vous &c.


Avec la plus grande innocence,
On met en humeur ce Taureau,
Et pourquoi cette complaisance ?
C’est que l’on veut avoir un Veau.

No. III.

CONTE
Le Taureau Anecdocte Françoises.


Dans un petit pays situé vers le midi de la France les filles de la Campagne avoient un usage bien singulier, vers le mois de Mars on amenoit toutes les Genisses du canton au Taureau afin de les faire emplir comme il ne laissoit pas d’y en avoir une certaine quantité l’animal sur la fin refusoit le service dont il ne faisoit qu’un jeu dans le com̃encement, les filles alors tachoient d’exciter le Taureau, allons hüe Robin disoient elle mon ami Robin et finissoient par se servir avec lui du petit exercice que connoissent les filles de joie à Paris, quelque fois cela le mettoit en train d’autres fois cela le mettoit en fureur, cette usage s’abolit parce qu’un jour Robin animé de cette maniere par une jeune fille, soit qu’il la trouva a son gré soit qu’il fut fatigué par la petit manœuvre s’eleva sur elle aulieur de s’elever sur la Genisse dont-il avoit le derriere en perspective la blessa de plusieurs coups, et auroit finit par la tuer si on n’etoit venu a son secours avec des batons et autres ustancilles necessaires en pareil cas.


AVRIL.


La Guirlande.


Air : Chançons, Chançons.


Des amours voyez-vous l’image ?
A quoi le plaisir les engage !
O qu’ils sont fous !
Souvent, des qu’elle est attendrie.
Reine ou Bergere s’humilie
A nos genoux.

No. IV.


AIR : D’un Bouquet de Romarin




Avec son petit Voisin
Le Jeune Formose
S’amusoit chaque matin
La gentille Rose
C’etoit d’abord mille jeux
Simples innocents comme eux
Ils ne songoient tous les deux
A rien autre choses



Desirs en prenant le frais
Vint sur la verdure
De voir comme les a faits
La Dame nature
Ce que Formose montroit
Rose de fleurs l’entouroit
Lui tandis qu’on le paroit
Changoit de figure



Mais Rose qui ne savoit
Quelle en est la cause
De tous ses yeux regardoit
La Metamorphose
Il voulut voir a son tour
Ne voila t’il pas qu’amour
Apprend a Formose un tour
Qui fait pamer Rose

No. IV.

CONTE
Les deux Enfans Anecdocte Françoise.


Il n’y a pas longtems qu’a paris deux enfans garçon et filles agé l’un de 10 et l’autre de 9 ans, élevés ensembles des le berceau a cause, de l’intimité de leurs parents avoient tellemt. contracté l’habitude de jouer ensemble qu’ils ne pouvoient se quitter, il est vrai que l’on en etoit pas faché dans les deux familles parceque chacune d’elles s’en occupoit peu, et se reposoit sur eux memes du soin de s’amuser on apprit fort singulieremt. quel etoit le genre de leurs divertissemt. un jour la petite arriva en pleurs dans la chambre de sa mere, se plaignant que son petit ami venoit de lui tacher son fourreau neuf, la maman demande com̃ent cela c’est fait et la petite reste toute interdite en se mordant les levres, la maman n’y pensa plus, mais le papa concevant des soupçons a l’inspection de la tache resolu de les épier, et dès le soir meme sçeut a quoi s’en tenir, voici quel etoit leur manege, dès qu’ils etoient seuls le petit garçon com̃ençoit par passer sa tête sous les jup. de sa bonne amie lui baisoit les cuisses et le ventre, après cela il la faisoit mettre a genoux la tête a terre, la troussoit et après lui avoir donné quelques claques sur le cul il placoit son visage dessous, lui lechant ce qu’on devine de reste la petite ressentoit insensiblement les sensations du plaisirs, et enfin arrivoit au comble, c’etoit apres cela a son tour elle entouroit la petite genitalle du garçon, d’un ruban quelle tiroit ingenument par les deux bouts et en peu, de tems lui procuroit ce qui fut cause de son indiscretion. je laisse a juger si on les laissa jouer davantage ensemble.


MAI.


Le Mai.


Air : Tu croyois, en aimant Colette


Le Printems qui vient de renaître
Anime tout, et je le vois,
Bien mieux que sous une fenêtre,
On plante le Mai dans un bois.

No V.


AIR : Jupiter un Jour en fureur




Quel est le bonheur d’un Garçon
De pouvoir l’offrir a sa Belle
Et quand il est agrée d’elle
Lui planter dans la saison
Tel le presentoit a Therese
Guillot la perle du hameau
Ha ! mon ami qu’il est beau
Dit elle sautant d’aize



Puisque lui repondit Guillot
L’offrande a le don de te plaire
Il faut me le prouver ma chere
Autrement que par un mot
De grace pour faire connoitre
Si de ma Therese le cœur
A mon present fait honneur
Ouvre moi ta fenêtre



Therese se laisse engager
Au doux penchant de la nature
Qu’exitoit encor la tournure
Du don fait par le Berger
Ouvrant d’elle meme sa porte
Je crains dit elle un accident
Enfonce le bien avant
De peur qu’on ne l’emporte

No. V.

CONTE
Le May Anecdocte villagoiſe


Dans presque toutes les campagnes surtout aux environs de Paris, il est d’usage le premier de May de planter devant la porte de quelqu’un pour lui faire honneur un arbre le plus droit et le plus haut que l’on puisse trouver sans etre bien gros, on le depouille de son ecorce et de toutes ses branches ne laissant que les plus elevées, et apres lui avoir ainsi donné le nom de may, tout les habitant en corps le portent soit au Seigneur soit au Curé, ou a quelque particulier plus riche et plus hupé que les autres. Un jeune laboureur consideré dans son hameau, ou il donnoit le ton et meme plus entendu qu’a un paysan n’appartient, persuada un jour aux garçons d’en donner un au fermier de l’endroit quoiqu’il n’en fut pas beaucoup aimé et ne le merita meme pas par la maniere presque tyrannique avec laquelle il exercoit les droits du Seigneur, il est vrai qu’on fut d’autant plus etonné que ce jeune laboureur eut fait des demarches pour obtenir a cet homme un temoignage d’estime et de vénération dont il n’etoit pas digne, que lui meme venoit d’etre la victime de ses exactions par une grosse som̃e d’argent qu’il avoit été obligé de lui donner l’etonnemt auroit cessé alors comme il cessa ensuite si on avoit sçut qu’il etoit d’intelligence avec une jolie fille du fermier et que ce cher may placé aupres de la porte et vis-a-vis les fenêtres de la Demoiselle devoit servi d’escalier pour ce procurer les moyens de ce voir et de se témoigner mutuellement leur amour, mal’heureusement cela ne dura pas longtems, le fermier qui avoit toujours les oreilles au gué ayant entendu grimper quelqu’un par le may a la chambre de sa fille attendit environ un quart d’heure et monta ensuite brusquement chés elle il surprit nos deux amants occupés a planter de may ensemble d’une maniere plus agréable que l’autre et n’ayant d’habillemt que ce qui etoit necessaire pour la ceremonie ce qui ne les surchargoient point, irrité mon brutal de fermier leurs distribuat quelques coups, et finit par faire un bon procès a l’un ce qui acheva de le ruiner et envoyer l’autre chés une tante qui demeuroit loin de la.


JUIN


La Tonte.


Air : Vous m’entendez bien.


Du Berger, plus que du Mouton
Je désire avoir la toison,
Et j’ai de quoi répondre,
Eh ! bien,
S’il veut aussi me tondre
Vous m’entendez bien.

No. VI.


AIR : Du Serein qui te fait envie




Touchants a la mousse legere
D’ou sort ce petit arbrisseau
La jeune Lise Considere,
L’arbuste d’un genre nouveau
Mais que veut faire la cruelle
Avec ce fatal instrument
Et pour quel usage tient t’elle
Ces ciseaux la dans ce moment



Lise tu ne sçait pas sans doute
A quoi cet arbre peut servir
il est l’ornement de la route
Qui nous mene tous au plaisir
Si tu n’ignorois l’avantage
Qu’on tire de cet arbre la
Lise, tu ne pourois je gage
te divertir a couper ça



Lise éxamine cette Tige.
Vois comme elle brave ta main
Tu n’es pas au bout du prodige
Puisque sa place est dans ton sein
O Lise laisse la conduire
Par un Berger bien amoureux
Je te promets qu’il doit t’instruire
En le faisant d’un joli jeu.

No VI.

CONTE
Le devant Razé


Rien de plus simple que l’amour, rien de plus varié, rien souvent de plus Bizarre que son culte, on a vu Pechote[1] prendre plaisir a insinuer et a se faire insinuer des plumes de Paon dans le derrière, un particulier avoit une manie aussi singuliere que celle la, il goutoit une satisfaction extreme a voir razer le devant d’une femme qu’il payoit expres, la ceremonie se faisoit tous les deux jours et voici comme on y presidoit la patiente joliment cœffée et la gorge a demie nue, avoit soin de prendre une chemise blanche et parfumé un deshabillé elégant et dans cet acoutrement atendoit son original qui ordinairement ne tardoit pas a paroitre suivi de la femme de chambre Barbiere il n’etoit pas plutôt entré qu’elle se levoit et lui sans preambule n’y autre preparation alloit a elle et de ses propres mains levoit juppes et chemises, dessous laquelle il sentoit pour savoir si on avoit eut soin de mettre des odeurs, elle etoit ensuite obligé de soutenir ses habit elle meme nue jusqu’au nombril, alors la Barbierre remplissoit son petit ministere, et lui pendant le tems considerent attentivement les objets qui etoient devant ses yeux tant le principal que les accessoires se provoquoit du mieux qu’il lui etoit possible au plaisir, quand il le sentoit approcher il poussoit de la main la femme de chambre et vis-a-vis sa maîtresse il dirigoit son instrument sur la partie qui venoit d’etre savonné et qui etoit ou a moitié ou tout a fait razé il la savonoit une seconde fois avec ce dont on peut se douter mais pas aussi abondament.


JUILLET.


Le Bain.


Air : La bonne aventure.


Nageur, dans les transports
D’une audace heureuse,
Presse les secrets trésors
De cette Baigneuse……
Mais que vois-je ! en son effroi
Une autre s’accroche à toi :
La bonne aventure
O gué !
La bonne aventure !

No VII.


AIR : Avec les jeux dans le village.




Qu’il est charmant ce badinage
Auquel invite la saison
Filles pour ce mettre a la nage
Otent chemise et cotillon
Malgré que la pudeur en gronde
On devoile plus d’un Tresor
Chacune veut entrer dans l’onde
Comme Venus quand elle en sort



En ce mois la chaleur enleve
La crainte qu’on a du Garçon
A la reserve faisant treve
Les Sexes sont a l’unisson
En jouant l’on est pas severe
De tout on s’effarouche peu
Il est vrai que pour la Bergere
Cela souvent passe le jeu



De ce Bain le but ordinaire
Est dit on de ce raffraichir
On en croira tout le contraire
Pour peu qu’on puisse reflechir
Le feu qui dans ces eaux s’allume
Pire que tous les feux Gregeois
Par son ardeur Brule et consume
Le cœur et les sens a la fois

No. VII.

CONTE
Les Baigneuſes ſurpriſes Anec. Languedne.


Les bonnes fortunes vienne souvent au moment qu’on y songe le moins, un jeune homme en Languedoc dans la saison des Bains, avoit l’habitude d’en prendre tous les jours avec un de ses amis a un ruisseau ou depuis un mois il n’avoit jamais vu personne quoique le lieu fut infiniment agréable, un jour qu’ils etoient allés un peu plus tard qu’a l’ordinaire en traversant un petit Bois qui y etoit adossé ils entendirent du bruit comme si quelqu’un avoit pris leurs places ce que voyant ils prirent le parti de se promener en attendant qu’on s’en aille, chemin faisant il leur vint en fantaisie d’examiner aux moins qui sont ceux qui les ont devances, et pour ce ils se coulent dans les broussailles, il se savent bientot gré de leurs curiosité en appercevant sur l’autre rive, deux jolies brunes dont l’une etoit deja entierement nue et l’autre l’etoit presque, puisqu’il ne lui restoit plus que sa chemise qu’elle eut bientôt quitté a l’exemple de l’autre elles ne furent pas entierement dans le ruisseau, que nos deux observateurs inpatients de profiter d’une si belle occasion se deshabillent le plus doucement qu’ils peuvent, et ayant attendu que les deux Dames furent un peu éloignées descendent doucement dans la riviere la traversent et s’emparents des corcets, d’hesabillés, jupons et chemises, vont les cacher plus loin et apres se cachent. eux memes derriere de vieux troncs de saules et ne se montrent que lorsque les Baigneuses se raprochant arrivent justement ou ils sont, quelle fut la surprise, et l’effroi des dernieres qui courent d’abord a leurs habit et ne les trouvant pas ce mettent en grande colere et accablant les deux importuns d’injures eux alors de courir après elles de les attraper et les apprivoiser au point qu’ils passerent toute la matinée avec elles non seulement dans le bain ou ils badinerent et folatrerent Dieu sait la joie, mais encore apres en être sorti, les Dames auqu’elles a leurs grand contentement ils avoient servis de valets de chambre les inviterent a partager sur l’herbe un dejeuner frugal quelles avoient apportées alors recommencerent les folies on joue on se culbute on se fouette, encore ne dis-je pas tout.


AOUST.


La Moisson.


Air : Je suis Lindor &c.


Ménage bien, Moiſsonneuse gentille,
Ce bel épi, tout fier d’être en ta main !
C’est de l’Amour le plus riche butin :
Il ne doit pas tomber sous la faucille.

No. VIII.


Air : La Bonne aventure au gué




Que j’admire en ses instants
De L’Amour l’allure
Qu’il sçait donner aux mamans
De la tablature
En ce mois tous les chemins
Sont marqués de ces larcins
La Bonne aventure au gué
La Bonne aventure



Toi qui veux des mœurs du temps
Faire la peinture
Retif va le long d’un Champ
Pour voir la nature
Tu auras chemin faisant
Plus d’un tableau très plaisant
De Bonne aventure au gué
De Bonne aventure



D’amour pour savoir le fin
En fait de Posture
Les filles de Laretin
N’ont besoin je jure
Un V… ne leur fait pas peur
Elles cherchent de bon cœur
La Bonne aventure au gué
La Bonne aventure

No. VIII.

CONTE
Le divertiſſeur de filles Anec. Villagoiſes.


Dans un Village pas bien éloigné de Paris toutes les filles avoient pris un garçon en amitié tellement qu’elles se servoient de lui pour les divertir toutes ensembles aussi ses mains pouvoient elles errer librement sous tous les jupons et tout les fichus, tout etoit a sa disposition celles meme qui éssayoient de se deffendre en etoient empechées par les autres il est vrai que tout se passoit en jeux et qu’elles evitoient toutes ce qui pouvoit etre dangereux et par consequent d’etre surprises separement, mais apres qu’il leur avoit rendu le service de les chatouiller l’une apres l’autre chacune d’elles venoit a son tour lui donner la monoye de sa piece, il arriva un jour qu’une des meres s’etant douté de l’orgie, surprit la petite assemblée clandestine, et le bruit s’en etant repandu en un instant dans le village, le garçon fut obligé de s’eloigner pour longtems et filles furent tenues de plus courts.


Fin


SEPTEMBRE.


La Chasse.


Air : De la fanfare de St. Cloud.


J’irois souvent à la Chasse
Avec aussi joli train ;
Et je découvre une place
Où mon coup seroit certain.
J’irois souvent à la Chasse
Avec aussi joli train.

No. IX.


AIR : De la Fanfare, de l’halali, ou
bien vous qui portéz cornes en tête.




En vain l’on me vante la chasse
Aux chiens courants a corps a cris
Une autre ou il faut moins de place
Est préferable a mon avis



Piqué par sa flamme amoureuse
Qui Suit les deux en cet instant
Aupres d’une aimable chasseuse
Est toujours de mon sentiment



Peu jaloux que trompe raisonne
Ou que l’on force pres de lui
Pourvu que l’Amour bientôt sonne
Pour sa voisine l’halali

No. IX.

CONTE
Le Mariage de neceſſité Anec. Françoiſe


Un officier etoit epris des charmes d’une jeune Delle dans sa province qui repondoit assés bien a sa passion C’est a dire qu’elle l’aimoit pour le moins autant qu’elle en etois aimée, son Pere et sa Mere qui ne trouvoient point dans le Gentilhomme un parti convenable firent tout ce qui dependoit d’eux des qu’ils s’en apperçurent pour l’empecher de parler a leur fille et meme de la voir ce qui ne faisoit qu’augmenter la tendresse que les deux jeunes gens avoient l’un pour l’autre, mais quoique ces mêmes parents evitasent eux mêmes pour cette raison toute relation avec l’Officier, comme il etoit cependant non seulement leur voisin mais encore d’une famille anciennement voisine et alliée, ils ne purent se dispenser de l’inviter a une partie de chasse qu’on faisoit ordinairement au mois de Septembre pour l’ouverture de la Campagne et a laqu’elle les Dames assistoient pour la rendre plus gaye, tablants la dessus nos deux amants concertent ensemble de se perdre et se donnant un rendez vous ; la chasse commence il s’agissoit de prendre un Chevreuil et a meme assez de succes pour appliquer les assistants et donner aux amoureux le moyen de realiser leurs projets qu’ils realisèrent par parenthese tant qu’ils purent cependant ils ne furent pas long-tems a reparoitre, et on ne se doutat de rien : on prit ce jour la plusieurs Chevreuils ce qui n’est pas fort interressant, mais ce qu’il l’est davantage, c’est que deux mois après la Dlle se jette aux pieds de son Pere et de sa Mere leur declare tout ce qui est arrivé et meme ce qui en resultoit, elle les coñoissoit au mx la Péllerine ; Ceux ci commencent par envoyer chercher un Chirurgien et s’etant assuré par son moyen de la verité des faits « tu nous a trompé ma chere fille lui dirent ils nous voulions ton bonheur et tu la cherché par un moyen qui ne pouvoit que nous faire beaucoup de peine, ce n’est pas l’instant de te faire des reproches il seroient sans remede et tu est dans un etat qu’il faut respecter, mais voici le souhait que nous te faisons bien sincerement c’est que tu ne sois jamais punie de la demarche que tu a faite seulle et sans nous, apres cela ils firent venir le jeune homme a qui ils se plaignirent d’une maniere plus vive, et qu’ils menacerent meme s’il ne se rendoit pas toujours digne de la tendresse de sa femme, ils ne s’occupèrent plus ensuite qu’a les réunir par le Mariage.


OCTOBRE.


Les Vendangeurs.


Air : Jamais le Vin ne m’embarrasse.


Comme cette main amoureuse,
Est habile à saisir le joint !
A ce jeu, belle Vendangeuse,
Ton panier ne s’emplira point.

No. X.


AIR : De la Vendangeuse Contredce




La petite vendangeuse
Tout en aimant le raisin
Tu est bien plus amoureuse
De ce que porte Colin
Il sçait le mettre le Drole
Par son badinage entrain
Tu tire parti du role
Qu’il fait jouer a sa main



De ce petit exercice
Quelle fait si galament
Que tu sens le bon office
Que t’on visage est charmant
Mais quand Colin le chatouille
Tu te venge plaisament
Cateau qui si bien le mouille
Dit moi sans rougir comment



Si tu lui donnois carriere
Il pouroit bien autrement
D’une meilleure maniere
Te pousser un compliment
Pour te rendre plus heureuse
Souffre donc au meme endroit
La petite vendangeuse
Qu’il te place un plus gros doigt

No. X.

CONTE
Les deux Orphelins Anecdoc. Villageoiſe.


Deux paysans avoient toujours été en procès ensemble pour une vigne dont ils possedoient chacun une partie sans pouvoir en faire constater l’etendue. ils moururent presque en meme tems, laissant l’un un garçon et l’autre une fille, comme les deux jeunes gens etoient d’une paroisse differente ils ne se connaissoient point, les parents, et amis de chacun deux les animerent on ne sçait pas pourquoi l’un contre l’autre de maniere qu’ils etoient decidés tous les deux a poursuivre avec acharnement les affaires ce qu’ils avoient trouves dans la succession de leurs peres, les choses en resterent là jusqu’au moment de la vendange qu’ils etoient obligés de faire en meme tems ils se promirent bien avant d’y aller de ne pas se parler ni meme se regarder, cepandant ils sont les premiers objets qu’ils rencontrent en arrivant a leur bien, et malgré qu’ils s’en deffendent comme ils etoient egalement beaux et bienfaits ils ne peuvent s’empecher de concevoir l’un pour l’autre les sentiments les plus tendre bientôt après de ſe le dire, que sçais-je, les raisins n’etoient pas aux trois quart cueillis qu’ils etoient plus occupées de se caresser, que de faire vendange, et coucher ensemble au dessous de leur treille ils se livroient aux plaisirs de l’amour pour lesquels le jupon et le bavolet etoient de foibles obstacles, je ne sçais pas ce qui en resulta mais ils se marierent ensemble deux mois après et ils terminerent ainsi leur procès.


NOVEMBRE.


Les Laboureurs.


Air : De la Barone.


Allons, courage !
Ainsi les maux ne sont plus rien
Double soc fera double ouvrage,
Semez, Labourez bel et bien :
Allons, courage.

No. XI.


AIR : Des Bonnes Gens




Quand la promte soirée
Fait disparoitre le jour
Lorsque de sa durée
L’hiver rend le temps plus court
C’est alors qu’amour s’empresse
De meme qu’au bon vieux temps
Par le plaisir la tendresse
D’egayer les Bonnes Gens



Que j’aime les Veillées
De ses naifs paysans
Et dans leurs assemblées
Que de portraits amusants
Surtout quand l’Amour &c



On fille ou l’on tricotte
En s’animant par des Chants
Une vieille marmotte
Une histoire entre ses dents
Cependant l’Amour &c



On sent s’en qu’on y pense
Quelques mains sous son jupon
On finit par la danse
Qu’on fait ensemble et en rond
Comme alors Amour &c.

No. XI.

CONTE
La devote Anecdocte Françoiſe.


Un de mes amis m’a raconté qu’il avoit fait autre fois, la connoissance d’une jeune, devote très aimable, mais qui par le melange le plus bizarre accordoit de très bonnes foi l’attention la plus scrupuleuse a observer les preceptes de la Religion avec le penchant le plus lubrique pour les plaisirs de la chair il fut quelque tems a s’appercevoir de la nature de son temperament mais enfin il avait sçu a n’en pouvoir douter qu’elle se branloit regulierement tous les jours, agissant d’apres cette decouverte, il azardoit de tems en tems des histoires libres avec elle en se servant pour ne point revolter sa pudeur de termes les moins indecent et eloignant a dessein le denoument pour avoir le plaisir de comtempler ses yeux que le desir rendoit plus brillant et sa main qui se portoit tout naturellement dans sa poche après cela il s’approchoit d’elle mettant la sienne sur ses jupons a l’endroit sensible et le frotant autant qu’il le pouvoit a travers des habits il obtint successivement de lever le premier jupon, le second, le troisieme, car c’etoit en hiver, et enfin la chemise, c’etoit pour la chatouiller plus a son aise, mais ce fut pendant beaucoup de tems, tant la devote faisoit une belle resistance, il ne tarda pas alors de la determiner a souffrir autre chose que la main, toujours egalement Religieuse elle n’en faisoit pas moins ses prieres le matin et le soir n’en entendoit pas moins deux messes et n’en restoit pas moins deux ou trois heures le soir a l’Eglise.


DECEMBRE.


Le Parc.


Air : Du haut en bas.


Que fais-tu là ?
Le bieau travail ! Morgué, j’enrage !
Que fais-tu là ?
Peut-on s’amuser comme ça ?
Seule a parguer, j’perdons courage ;
Ensemble, au moins faisons l’ouvrage
Que tu fais là.

No. XII.


AIR : Daigne ecouter l’amant




L’ami Rusteau vouloit un jour a Jeañe
De son mieux faire un compliment d’Amour
Rusteau etoit aussi sçavant qu’un âne
Mais comme lui pouvoit faire sa cour



En sa presence il restoit sans rien dire
Sur ses deux pieds roide com̃e un poteau
Jeanne en courroux lui dit qu’il se retire
Ailleurs que la pour tourner son chapeau



Triste il s’en va Jeanne a la fantaisie
D’aller apres son amant confondu
Lui dans un coin tenoit l’arbre de vie
Viens reprit elle et que ne montrois tu


No. XII.

CONTE
Lettre d’une Pariſienne a une de ſes
amies en Campagne

Je n’ai appris que d’hier ma chere amie a apprecier dans les hommes une qualité dont je ne connoisois point encor la valeur, celle de n’avoir point d’Esprit tu crois que je plaisante, voici mon aventure tu connois bien le grand imbecille que dans notre societé nous appellions le grand Cousin par ce qu’il ne scait pas dire deux tu ne te douterois jamais de ce qu’il a fait. Comme je le regarde a peu près sans consequence, je ne faisoit aucune difficulté de m’abiller et me deshabiller devant lui. Un jour que je m’abillois toute seule en sa presence pour faire quelque visites, car on revient a force de la Campagne, ne voila t’il pas qu’il approche de moi avec les deux poingts a la hauteur de sa Culotte, je veux lui oter en badinant, et il me reste entre les mains la plus monstreuse allumette qu’on puisse s’imaginer, je t’avoue que quoique je voulusse me facher bien fort je ne put m’empecher de partir d’un grand éclat de rire, pour lui il ne disoit rien mais il bandoit toujours, ma foi que veux tu j’ai pris l’occasion au cheveux, et je m’en trouve bien, c’est de ces gens qui courent quatre Postes sans débrider et neuf dans la Journée, pour surcroit de bonheur il ne parle pas, je t’assure qu’il n’y a ni Esprit ni amabilite qui vaille cela et pour le mal que je te veux, je te souhaiterois une pareille trouvaille, adieu.

Fin


Pot-Pouri des douze Mois.


No I.

AIR : Vous m’entendez bien



On ne peut appeller transi
Un amant quand il scait ainsi
Malgré le froid extreme
Eh bien
Prouver combien il aime
Vous m’entendez bien



II.

AIR : J’avois toujours gardé mon cœur



Les belles dont on ne voit pas
Les traits ni le visage
Font de leurs plus secrets appas
Sens peine l’etalage



III.

AIR : Jardinier ne vois tu pas



Quand Lison en ricannant
Empogne cette piece
La friponne en ce moment
Ne songe qu’au changement
D’espece D’espece D’espece



IIII.

AIR : Reveillez vous belle endormie



Le joli bijou qui toccupe
Et qu’a parer tu prends plaisirs
Ne peut trouver que sous ta jupe
L’ornement qui peut l’embellir

No. V.

AIR : Reveillez vous belle



Il n’est pas d’instant dans l’année
Ou le cœur puisse etre plus gai
Qu’a cette heure tant fortunée
Ou l’on vient pour planter le mai



VI.

AIR : Pour la Baronne



Avec la Sienne
Tu veux faire comparaison bis
Bergere tu perdra ta peine
Si tu ne mele ta toison
Avec la Sienne



VII.

AIR : J’avois toujours.



Pour pretendre que le Garçon
Qui folatre dans l’onde
Ne trouveras jamais le fond
Il ne faut pas de Sonde



VIII.

AIR : Daigne écouter l’amant



Depuis longtems ce petit Dieu moissoñe
Quand Cerès vient moissoñer a son tour
Et sa moisson encore ne foisonne
Autant que fait la moisson de l’Amour

No IX.

AIR : Reveillez vous belle



Des charmes de sa chevatiere
Cet ecuyer comme je crois
Se menageant la vue entierre
N’est certe pas trop mal’adroit



X.

AIR : Du haut en bas



A ton pressoir
Chacun porteroit sa vendange
A ton pressoir
L’heureux Colin le scait mouvoir
Sens pour cela qu’il le derange
Moi je voudrois que d’arbre il change
A ton pressoir



XI.

AIR : Viens dans mes bras



Sur sa charrue il me met presque nue
Que fait il donc ! il me perce Lucas
Dieux Dieux comme il remue
Ah ! doux plaisir je me meurs ds ses bras



XII.

AIR : Jardinier ne vois.

Ce manche est de l’instrument
Que possede javotte
Si tu ne scais pas comment
Nigaud trousse seulement la Cotte &c.


FIN
  1. Ce Pechote ou pexoto est un Banquier de Religion et Juif de profession.