Anna Rose-Tree/Lettre 42
XLIIme LETTRE.
Mylady Ridge,
à Miſtreſs Goodness ;
à Londres.
Malgré vos promeſſes & mes doutes,
je ne vois pas, Miſtreſs, que les choſes
changent de face. L’état de Fanny devient
tous les jours plus viſible, & perſonne ne
ſe préſente pour l’épouſer. “ Soyez tranquille,
Mylady, m’avez-vous dit à mon départ
de Londres, vous n’aurez que l’embarras
du choix. Celui qui a fait le mal le réparera, j’en ſuis ſûre ; je le verrai
il eſt de mes Amis. Je lui ferai bien ſentir
qu’on ne déshonore pas une Fille de qualité :
il reviendra à Fanny. En outre, je
vais écrire à Mylord Clarck, j’ai des
moyens pour le dégoûter de cette Émilie
dont il raffole. Avant deux mois je le
conduirai moi-même aux pieds de votre
charmante Fille ; fiez-vous à mes ſoins „
Je vous ai crue, Miſtreſs, & je m’imagine
que vous n’avez pas à vous plaindre de mes
généroſités. Cependant je n’entends parler ni
de Buckingham ni de Clarck, ni même de
vous. Expliquez-moi les raiſons de ce ſilence.
Je ne vous accuſe point encore de m’avoir
trompée ; je pourrois pourtant concevoir
quelques doutes : faites-les ceſſer, & comptez
que je ne mettrai pas de bornes à ma
reconnoiſſance ; mais dans le cas contraire,
craignez tout de mon reſſentiment : c’eſt
dans ce ſentiment que je ſuis votre Servante