ANALISE INDÉTERMINÉE.
Sur une nouvelle classe de problèmes indéterminés
avec application à la décomposition des fractions ;
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Les seuls problèmes indéterminés qu’on se soit proposés et qu’on ait cherché à résoudre jusqu’ici, sont ceux où, étant données des équations numériques, en moindre nombre que les inconnues qu’elles renferment, il s’agit de satisfaire à ces
équations, par des valeurs des inconnues qui soient entières, si les équations ne passent pas le premier degré, ou tout au moins rationnelles ; si elles sont de degrés plus élevés.
Mais l’analise indéterminée peut être envisagée d’une manière
beaucoup plus générale. Au lieu de supposer, en effet, que les
données qui entrent dans les équations qu’il s’agit de résoudre sont
de simples quantités numériques, on peut supposer que ce sont des
fonctions d’une ou de plusieurs variables
et au lieu
de demander de satisfaire à ces équations par des valeurs numériques
entières ou rationnelles de on peut se proposer
de les résoudre par des valeurs de ces inconnues fonctions entières
ou tout au moins rationnelles des mêmes variables
Qu’on ait, par exemple, entre les trois inconnues les deux équations
si l’on demande quelles sont les valeurs les plus générales de fonctions entières de qui y satisfassent, on trouvera
où désigne une fonction entière de tout-à-fait arbitraire. On doit remarquer, au surplus, qu’ici les coefficiens numériques peuvent être fractionnaires, sans que les fonctions cessent pour cela d’être réputées entières. Une fonction entière des variables est simplement, en effet, une fonction où ces variables n’entrent point au dénominateur.
Soit encore, entre les deux inconnues l’équation
et supposons qu’on demande d’y satisfaire de la manière la plus générale par des valeurs de fonctions rationnelles de on trouvera pour ces valeurs
où représente encore une fonction rationnelle de tout-à-fait
arbitraire. Ici les coefficiens numériques pourraient être radicaux,
sans que pour cela les fonctions cessassent d’être réputées rationnelles ; une fonction rationnelle des variables étant
simplement une fonction qui ne renferme pas ces variables sous
des radicaux.
Nous ne nous occuperons uniquement, dans ce qui va suivre,
que de la résolution des équations du premier degré à deux inconnues, et même dans le seul cas où les données et les inconnues sont et doivent être simplement fonctions d’une seule variable
Nous ferons voir ensuite que le problème de la décomposition des
fractions n’est qu’un cas particulier de celui qui nous aura occupés.
Soit proposée l’équation
dans laquelle sont supposés des nombres entiers, et à
laquelle on se propose de satisfaire par des valeurs entières de il est connu, 1.o que le problème n’est possible qu’autant que
le plus grand commun diviseur de et se trouve être diviseur
de 2.o que le problème se résout immédiatement lorsque le plus petit des coefficiens est l’unité ; 3.o enfin, que par des
transformations plus ou moins nombreuses, on ramène facilement
à ce cas celui où ce plus petit coefficient est différent de l’unité.
Ainsi, si l’équation proposée est
on aura, de suite,
et en prenant pour un nombre entier quelconque, on aura aussi
un nombre entier pour la valeur correspondante de y.
Si, au contraire, l’équation à résoudre est
on l’écrira d’abord ainsi
posant
elle deviendra
qu’on pourra écrire ainsi
posant encore
elle deviendra
ou
posant enfin
nous aurons
d’où, en remontant,
Voilà donc des valeurs entières de fonctions d’un nombre
entier tout-à-fait arbitraire.
Les équations indéterminées dans lesquelles les données et les
inconnues sont et doivent être des fonctions entières d’une variable
se traitent à peu près de la même manière. Soit en effet, en
général, entre et une équation de la forme
dans laquelle sont supposés
des nombres donnés quelconques, et à laquelle il faille satisfaire
par des valeurs de et fonctions entières de il est facile de
voir, 1.o que le problème ne sera possible qu’autant que le plus grand
commun diviseur des coefficiens de et sera en même temps
diviseur de la fonction de qui forme le second membre ; 2.o que
l’équation sera immédiatement résoluble, si l’un des coefficiens est
une quantité purement numérique ; 3.o enfin que, par des transformations plus ou moins nombreuses, on pourra toujours ramener
à ce cas celui où les deux coefficiens seront l’un et l’autre des
fonctions de
Soit, en premier lieu, l’équation
elle donnera immédiatement
formule où, en prenant pour une fonction entière tout-à-fait
arbitraire de on aura aussi pour une fonction entière de
Soit, en second lieu, l’équation
en la multipliant par quarré du coefficient de la plus haute
puissance des dans le coefficient le moins élevé ; on pourra la
mettre sous cette forme
en posant
elle deviendra
Multipliant celle-ci par quarré du coefficient de la plus
haute puissance de dans le coefficient le moins élevé, on pourra
ensuite la mettre sous cette forme
posant ensuite
elle deviendra
et de là, en remontant,
voilà donc des valeurs de qui, en prenant pour l’une fonction
entière quelconque de seront aussi des fonctions entières de cette
variable ; en y changeant en ce qui est permis ; elles
deviennent
où est toujours une fonction entière quelconque de
Venons présentement aux applications que nous avons annoncées.
Soit d’abord la fraction numérique qu’il faille décomposer en
deux autres dont les dénominateurs soient respectivement et En désignant les numérateurs par et on aura
ou
d’où
où l’on peut donner à une valeur entière quelconque.
Si l’on veut que soit plus petit que racine du dénominateur, il faudra prendre et l’on aura ainsi
Par une semblable méthode, on décomposerait ultérieurement
en deux autres fractions dont les numérateurs seraient l’un et
l’autre moindres que On trouverait ainsi
Ainsi, en général, toute fraction numérique peut être considérée comme la somme algébrique d’une suite d’autres
dans lesquelles les numérateurs sont tous moindres que a.
Soit, en second lieu, la fraction à décomposer en deux autres
dont les dénominateurs soient les deux facteurs premiers entre eux
et de son dénominateur ? En désignant par les numérateurs respectifs de ces deux fractions, on aura
d’où
cela donne
Si l’on veut que les numérateurs soient plus petits que les dénominateurs, on pourra prendre cela donnera
On pourrait, par le même procédé, décomposer ultérieurement
en deux fractions ayant et pour dénominateurs ; et des numérateurs
plus petits que ces nombres. On trouverait ainsi
et nous venons de voir tout-à-l’heure comment se décomposaient
les fractions de la dernière sorte.
Si, en général, on a la fraction numérique
dans laquelle les nombres
soient premiers entre eux, on
pourra la décomposer en
dans laquelle les numérateurs seront moindres que les dénominateurs.
Cette application de l’analise indéterminée ordinaire a déjà été
indiquée par M. Legendre (Théorie des nombres, dernière édition,
pag. 26). La décomposition des fractions littérales, fonctions d’une
variable, est une application toute semblable de la nouvelle analise
indéterminée dont il vient d’être question ci-dessus.
Soit, en premier lieu, la fraction
qu’il faille décomposer en deux autres dont les dénominateurs soient
et en désignant les numérateurs par
on aura
ou
en résolvant cette équation comme ci-dessus, on trouve
Si l’on veut que soit d’un degré inférieur au second, et d’un degré inférieur au quatrième, il ne s’agira que de faire ce qui donnera
On décomposerait, par un semblable procédé, la dernière fraction
en deux autres, ayant pour dénominateurs
et et des numérateurs du premier degré au plus.
Soit, en second lieu, la fraction
qu’il faille décomposer en deux autres, ayant pour dénominateurs
et en appelant et leurs numérateurs, nous aurons
ou bien
cela donne
Si l’on veut que les numérateurs soient d’un moindre degré que
les dénominateurs, il suffira de poser et l’on aura
Nous sommes loin de prétendre, au surplus, que cette méthode
soit préférable aux autres méthodes connues, et notamment à celle
qui se trouve indiquée dans le précédent mémoire ; et nous avons
eu simplement l’intention de faire voir comment le problème de
la décomposition des fractions littérales se rattache à la nouvelle
branche d’analise indéterminée que nous avons signalée.