Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 12/Géométrie des courbes, article 6

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Autres démonstrations des mêmes théorèmes
et de théorèmes plus généraux ;

M. Pagani Michel, ingénieur italien, résidant à Genève.
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L’application du calcul différentiel à la démonstration des théorèmes proposés, au moyen de l’expression des diamètres conjugués en fonction des axes et des angles que ces diamètres font avec eux, ne pouvant offrir d’autre difficulté que la longueur des calculs, nous nous sommes cru fondés à penser qu’en demandant la démonstration de ces théorèmes, ce n’était pas tant une démonstration quelconque qu’on désirait qu’une démonstration simple et élémentaire, à la portée des jeunes-gens qui étudient l’application de l’analise algébrique à la géométrie des lignes et surfaces du second ordre.

C’est d’après cette considération que nous nous sommes proposés de démontrer les théorèmes dont il s’agit, sans rien emprunter du calcul infinitésimal, et en nous appuyant uniquement sur ces principes connus, savoir que, dans l’ellipse et l’ellipsoïde, la somme des quarrés des diamètres conjugués est une quantité constante, et que le plus grand et le plus petit des diamètres principaux sont aussi le plus grand et le plus petit de tous les diamètres.

Ayant ensuite aperçu que ces théorèmes n’étaient que des cas particuliers d’autres théorèmes plus généraux et non moins faciles à démontrer ; nous avons pensé devoir nous attacher de préférence à la démonstration de ces derniers.

THÉORÈME I. Si deux variables constamment positives l’une et l’autre, sont liées entre elles par l’équation et sont aussi des quantités positives, que l’on suppose inégales, et dans laquelle est un nombre positif quelconque plus grand que l’unité ; et si et ne pouvant varier qu’entre les limites et peuvent d’ailleurs recevoir, entre ces limites, toutes les valeurs compatibles avec l’équation qui les lie ; et seront maximums, lorsqu’un aura et minimums. lorsqu’on aura

Démonstration. Soit posé

ce qui est permis, et soient fait ensuite

étant une nouvelle variable, il viendra


d’où

on aura ensuite

d’où

Cela posé, on voit que sera d’autant plus petit ou d’autant plus grand que sera lui-même plus petit ou plus grand, c’est-à-dire, que et approcheront plus ou moins de l’égalité, mais, par les expressions de et de on voit que ces deux fonctions seront d’autant plus grandes que sera plus petit, et d’autant moindres que sera plus grand ; donc et seront maximums lorsqu’on aura et minimums, lorsqu’on aura

Si l’on suppose que sont les deux demi-diamètres principaux d’une ellipse ; et qu’on fasse et seront deux demi-diamètres conjugués quelconques : ce théorème deviendra donc le premier des deux théorèmes proposés, et il sera démontré en outre que l’angle des diamètres conjugués, dont le sinus est en général devient le plus petit possible, lorsque ces diamètres sont égaux.

THÉORÈME II. Si trois variables constamment positives, sont liées entre elles par l’équation sont également des quantités positives, telles qu’on a et dans laquelle est un nombre positif quelconque plus grand que l’unité ; et si ne pouvant varier qu’entre les limites peuvent d’ailleurs recevoir, entre ces limites, toutes les valeurs compatibles avec l’équation qui les lie ; et seront maximums, lorsqu’on aura et minimums, lorsqu’on aura

Démonstration. 1.o Si l’on niait que le maximum, tant de que de dût répondre au cas où il faudrait qu’on montrât des maximums de ces deux fonctions dans lesquels deux au moins des trois variables fussent inégales. Supposons que ce soient en mettant l’équation de condition sous la forme

et considérant comme une constante, on voit qu’aux valeurs inégales de on pourrait (Théor. I) substituer des valeurs égales qui rendraient et et conséquemment et plus grand qu’auparavant ; leurs valeurs primitives ne seraient donc point maximums, ainsi qu’on l’avait supposé.

2.o Si l’on niait que le minimum, tant de que de dût répondre au cas où deux des trois variables ont atteint les limites de grandeur et de petitesse entre lesquelles elles se trouvent renfermées, et où conséquemment la troisième a la valeur moyenne entre ces limites, il faudrait qu’on montrât des minimums de ces fonctions dans lesquelles deux au moins des trois variables auraient des valeurs différentes de supposons que ce soient en mettant l’équation de condition sous la forme

et supposant comtant, on voit qu’il y aurait moyen de rendre et plus inégaux encore, sans que cette équation cessât d’avoir lieu ; mais alors (Théor. I) et et par conséquent et deviendraient plus petits qu’ils ne l’étaient d’abord, et conséquemment leurs valeurs primitives ne seraient point des minimums, ainsi qu’on l’avait d’abord supposé.

En supposant que sont les trois demi-diamètres principaux d’une ellipsoïde, et faisant on pourra considérer comme trois demi-diamètres conjugués quelconques, et notre théorème deviendra, le dernier des deux théorèmes proposés.

On voit de plus qu’en poursuivant de la même manière on étendrait sans peine la proposition à un nombre quelconque de variables.

En recourant au calcul différentiel, on peut même s’élever à un théorème incomparablement plus général et démontrer que si des variables en nombre quelconque sont liées entre elles par la condition

leur somme et leur produit seront maximums, si les deux premières dérivées et sont de mêmes signes ; et qu’au contraire sera minimum, si ces deux mêmes dérivées sont de signes contraires, et qu’il en sera de même de si dans ce cas on a en outre

En effet, ne supposons, pour fixer les idées que quatre variables seulement, nous aurons d’abord, par l’équation de condition,

(1)

posant ensuite

nous aurons

en mettant dans les équations (2, 3) la valeur de donnée par l’équation (1), elles deviendront


on voit d’abord que, si l’on a il en résulte conditions communes au maximum et au minimum.

Par une nouvelle différentiation, on a, en considérant comme fonctions de et mettant toujours pour sa valeur donnée par l’équation (1)

Si nous faisons ces valeurs deviennent


ou bien encore


d’où l’on voit que et seront maximums on minimums, suivant que et seront positives ou négatives.

Genève, le 26 août 1821.