Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 15/Géométrie analitique, article 1

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Solution du premier des trois problèmes de géométrie
énoncés à la page
 308 du présent volume ;

Par M. Stein, professeur au gymnase de Trèves,
ancien élève de l’école polytechnique.
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PROBLÈME. Quel est le lieu des points du plan d’un triangle desquels menant des droites à ses sommets, puis, par ces mêmes sommets respectivement, des perpendiculaires à ces droites, ces perpendiculaires forment, par leur rencontre, un triangle circonscrit équivalant à un carré donné ?

Solution. Soit l’aire du carré donné.

Soit rapporté le triangle donné à deux axes rectangulaires quelconques, et soit alors le point dont on cherche le lieu. Soient en outre les trois sommets du triangle donné, et les sommets respectivement opposés du triangle variable de figure et de situation dont l’aire doit être constante.

Ce dernier triangle excède le premier de trois autres triangles ayant respectivement pour bases les trois côtés de celui-ci et ayant pour sommets les sommets de l’autre.

Considérons, en particulier, celui dont le sommet est en son aire est, comme l’on sait,

Mais, parce que les droites qui vont du point aux points sont respectivement perpendiculaires à celles qui vont du point aux deux mêmes points, on doit avoir, par les théories connues,

c’est-à-dire,

d’où

En substituant ces valeurs dans l’expression de l’aire du triangle dont il s’agit, elle devient, en réduisant et décomposant,

Par un simple mouvement d’accens, on trouvera, pour les aires des deux autres triangles excédans

d’un autre côté, l’aire du triangle donné est

en égalant donc à la somme de ces quatre expressions, on obtiendra l’équation de la courbe cherchée.

Présentement, pour simplifier un peu nos résultats, plaçons l’origine au sommet du triangle donné, en laissant d’ailleurs toujours aux axes une direction arbitraire, afin de ne pas trop sacrifier la symétrie à la simplicité. En désignant par les deux côtés qui concourent à ce sommet et par l’angle compris, on aura, comme l’on sait

en conséquence l’équation de la courbe sera

En réduisant tout le premier membre en une seule fraction, et ayant toujours égard aux relations ci-dessus, on trouve finalement

le lieu cherché du point est donc une ligne du quatrième ordre.

Il est aisé de voir que cette courbe passe par l’origine ; et, comme cette origine est un quelconque des sommets du triangle donné, il s’ensuit qu’elle doit passer par les trois sommets de ce triangle et quelle doit conséquemment lui être circonscrite. Cette circonstance, au surplus, était facile à prévoir. En prenant, en effet, un des sommets pour le point la direction de l’une des trois droites qui doivent concourir à former le triangle dont l’aire doit être égale à demeurera indéterminée ; d’où il suit qu’on pourra toujours prendre cette direction telle que la condition soit remplie.

Il est même facile de voir que la courbe passera deux fois par chaque sommet, puisque les termes les moins élevés de son équation sont de deux dimensions en et . En ne conservant que ces seuls termes, l’équation résultante du second degré sera donc l’équation des deux tangentes à la courbe à l’origine. Cette équation est

On doit observer que, comme géométriquement parlant, une surface n’est proprement susceptible d’aucun signe, peut être pris indistinctement en plus ou en moins ; de sorte qu’il y a proprement deux lignes du quatrième ordre, l’une et l’autre circonscrites au triangle donné, dont les points satisfont aux conditions du problème.

Si, au lieu de demander que les perpendiculaires menées par les sommets du triangle donné aux droites qui vont du point à ces mêmes sommets interceptent un triangle équivalant à un carré donné, on exigeait que ces perpendiculaires concourussent en un même point, il suffirait, pour plier l’équation générale à cette circonstance, d’y supposer Elle deviendrait simplement

équation qui appartient à un cercle ; et, comme alors la courbe ne cesse pas de passer par les trois sommets du triangle donné, il s’ensuit que cette courbe n’est autre chose, dans ce cas, que le cercle circonscrit à ce triangle, comme on pourrait d’ailleurs s’en assurer directement. On peut aussi s’assurer bien facilement par des considérations purement géométriques qu’en effet si, de l’un quelconque des points de la circonférence circonscrite à un triangle, on mène des droites à ses sommets, les perpendiculaires menées respectivement à ces droites par ces mêmes sommets concourront en un autre point de cette circonférence, diamétralement opposé au premier.

Si, au contraire, on exigeait que l’aire fut infinie, il serait nécessaire et il suffirait pour cela que l’un quelconque des facteurs du dénominateur du premier membre de l’équation fût nul ; mais ces facteurs, égalés à zéro, ne sont autre chose que les équations des trois côtés du triangle donné ; donc, pour que l’aire constante cherchée soit infinie, il est nécessaire et il suffit que le point soit pris sur la direction de l’un des côtés du triangle donné ; ce qui est d’ailleurs manifeste, puisqu’alors deux des côtés du triangle circonscrit seraient parallèles, et qu’ils ne peuvent l’être que dans ce seul cas.

Considérons encore le cas où l’aire du triangle donné serait nulle, c’est-à-dire, le cas où les trois points appartiendraient à une même ligne droite ; mais, pour plus de symétrie, recourons à nos premières formules. En supposant ces trois points sur l’axe des nous aurons et les aires de nos trois triangles excédans deviendront

et, comme d’un autre côté l’aire du triangle donné est nulle, l’équation du lieu cherché sera simplement

équation qui se réduit à

ou encore à

dans laquelle ne sont autre chose que les distances entre les trois points donnés pris deux à deux.

Ainsi, les points du plan d’une droite desquels menant des droites à trois points fixes pris sur cette dernière droite, et ensuite respectivement par ces trois mêmes points fixes des perpendiculaires à ces droites, ces perpendiculaires interceptent entre elles un triangle équivalant à un carré donne sont les points d’une parallèle indéfinie à la droite qui contient les trois points fixes. La distance de cette parallèle à la droite sur laquelle les trois points fixes sont situés est la moitié du quotient de la division du produit des distances deux à deux entre les trois points fixes par l’aire du carré donné.

Il faut encore se rappeler ici qu’à cause du double signe dont est susceptible, la parallèle à la droite qui contient les trois points fixes peut être indistinctement menée de côté ou d’autre de cette droite.


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