Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 16/Géométrie descriptive, article 1

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GÉOMÉTRIE DESCRIPTIVE.

Méthode graphique pour les tangentes à la spirale conique ;

Par M. H. Garbinski, Professeur à l’Université royale de Varsovie.
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Si, tandis que la génératrice d’un cône droit se meut uniformément sur la surface convexe de ce cône, un point parti du sommet parcourt uniformément cette génératrice mobile ; ce point décrira, sur le cône, une courbe à double courbure, que nous appellerons spirale conique. Le but que nous nous proposons ici est de découvrir une méthode graphique pour mener une tangente à cette courbe, en l’un quelconque de ses points.

Supposons, pour fixer les idées, que l’axe du cône soit vertical, et coupons-le par un plan horizontal quelconque, la projection de la génératrice mobile sera une droite tournant uniformément sur ce plan, autour de l’un de ses points, projection du sommet du cône ; et la projection du point générateur sera un point parcourant uniformément cette droite, à partir du point fixe sur lequel elle tourne ; c’est-à-dire, que la projection du point générateur de la spirale conique décrira une spirale d’Archimède, laquelle sera ainsi la projection horizontale de cette courbe à double courbure.

Soit, en second lieu, un cylindre droit de même axe que notre cône, et d’un rayon quelconque. Si l’on projette la génératrice mobile de ce cône sur la surface convexe du cylindre, par un plan passant par l’axe commun, sa projection sera une génératrice mobile de ce cylindre, parcourant uniformément sa surface convexe. Si de plus on projette le point générateur de la spirale conique sur ce même cylindre ; par une perpendiculaire à l’axe commun, sa projection sera un point décrivant uniformément la génératrice mobile du cylindre ; c’est-à-dire, que la projection du point générateur de la spirale conique sur le cylindre, faite comme il vient d’être dit, décrira sur ce cylindre la courbe à double courbure connue sous le nom d’hélice.

Il suit de là que le lieu des perpendiculaires abaissées sur l’axe du cône, de tous les points de la spirale conique, est la surface gauche connue sous le nom d’hélicoïde ; surface dont la génératrice sera constamment horizontale, et aura pour directrices de son mouvement, d’une part l’axe commun du cône et du cylindre, et de l’autre, indistinctement, la spirale conique ou l’hélice tracée sur le cylindre.

La spirale conique se trouvant donc ainsi l’intersection du cône et d’une hélicoïde, il s’ensuit que si, par un quelconque des points de cette courbe, on mène deux plans tangens l’un au cône et l’autre à l’hélicoïde, l’intersection, de ces deux plans sera la tangente à la courbe en ce point.

Ces préliminaires ainsi entendus, convenons, à l’exemple de M. Vallé, et pour abréger le discours, que généralement le symbole représentera le point ou la ligne dont les projections horizontales et verticales sont respectivement et Prenons pour plan de projection horizontale le plan perpendiculaire à l’axe du cône qui contient l’extrémité de la première circonvolution de la spirale conique, et pour plan de projection vertical un plan parallèle quelconque à celui qui contient ce même point et l’axe du cône.

Soient (fig. 4) la commune section de ces deux plans, le sommet du cône, son axe, sa section circulaire, suivant le plan de projection horizontal, sa section triangulaire parallèle au plan de projection vertical, l’extrémité de la première circonvolution de la spirale conique, la génératrice dans sa situation initiale, enfin le point de la spirale par lequel on se propose de lui mener une tangente, et que, pour fixer les idées, nous supposons appartenir à la première circonvolution de cette courbe, la génératrice passant par ce point, et la perpendiculaire abaissée du même point sur l’axe du cône.

Concevons un cylindre droit, de même axe que le cône, et ayant pour rayon en prolongeant jusqu’à la rencontre de la surface convexe de ce cylindre en ce point sera un de ceux de l’hélice et une des génératrices de l’hélicoïde dont il a été question ci-dessus ; et à laquelle il faudra mener un plan tangent par le point

Si, par le point on conçoit une tangente à l’hélice, la projection horizontale de cette tangente sera une tangente en au cercle et elle percera le plan horizontal en un point de cette droite telle que la longueur sera égale à celle de l’arc

Soit une droite mobile constamment horizontale et s’appuyant continuellement dans son mouvement, d’une part sur l’axe commun du cône et du cylindre, et d’une autre sur la tangente en à l’hélice ; cette droite, dans son mouvement, engendrera un paraboloïde hyperbolique, tangent suivant à l’hélicoïde ; et ces deux surfaces auront en le même plan tangent ; de sorte que notre problème se réduit à déterminer, pour ce même point, le plan tangent au paraboloïde hyperbolique.

On sait que le plan tangent à une telle surface, en l’un de ses points, a deux élémens rectilignes communs avec elle ; puis donc que est un de ces élémens, il n’est plus question que de trouver l’autre qui doit, comme celui-là, passer par le point

On sait aussi qu’un même le paraboloïde hyperbolique peut être engendré de deux manières, par le mouvement d’une droite qui s’appuye continuellement sur deux autres, en restant constamment parallèle à un plan fixe, et qu’on déduit le deuxième mode de génération du premier, en prenant pour directrices deux situations quelconques de la génératrice, et pour plan directeur un plan parallèle à la fois aux deux directrices primitives.

Le point étant un des points de l’axe commun du cône et du cylindre, et le point un des points de la tangente à l’hélice en et la droite étant d’ailleurs horizontale, il s’ensuit que cette droite représente une des situations de la génératrice, dans le mode primitif de génération ; et, comme représente une autre, il s’ensuit que ces deux droites peuvent être prises pour directrices de seconde génération du paraboloïde. Il faudra prendre alors pour plan directeur un quelconque des plans parallèles à la fois à l’axe du cône et à la tangente à l’hélice en qui sont les deux directrices de première génération ; et, comme la première de ces deux directrices est verticale, ce plan le sera également.

Faisons passer le plan directeur par le point sa trace sur le plan horizontal passera par et sera parallèle à Soit le point où cette trace rencontre alors la droite menée du point au point s’appuyant sur les deux directrices de seconde génération, et se trouvant en outre dans le plan directeur, appartiendra au paraboloïde ; et, comme la droite lui appartient également, il s’ensuit que le plan conduit par ces deux droites sera le plan tangent en au paraboloïde et conséquemment à l’hélicoïde ; et devra conséquemment contenir la tangente en à la spirale conique.

Ce plan passant par l’horizontale et par le point sa trace sur le plan horizontal devra être une parallèle conduite par à et coupant en quelque point Puis donc que le point se trouve ainsi appartenir au plan tangent par à l’hélicoïde, et qu’il appartient aussi d’ailleurs, comme point de au plan tangent au cône par le même point, il s’ensuit qu’il appartient à l’intersection de ces deux plans, c’est-à-dire, à la tangente en à la spirale conique : la droite est donc la projection horizontale de cette tangente. Cette droite est donc aussi tangente en à la spirale d’Archimède, projection horizontale de cette spirale conique. Nous obtenons donc, chemin faisant, un procédé fort simple, pour mener une tangente à la spirale d’Archimède, en l’un quelconque de ses points.

En projetant le point sur le plan vertical en et menant cette dernière droite sera la projection verticale de la tangente à la spirale conique ; cette tangente sera donc ).

Cette construction extrêmement simple d’ailleurs, devient malheureusement illusoire lorsqu’on veut mener la tangente par le point attendu qu’alors les points se confondent, ce qui rend la direction de indéterminée. Il faut donc voir comment on pourra vaincre cette difficulté.

Il est connu qu’une hélice fait en tous ses points un angle constant avec les génératrices du cylindre sur laquelle elle est tracée, et, dans le cas présent, si l’on construit un triangle rectangle dont un côté de l’angle droit soit égal à la circonférence dont le rayon est et dont l’autre soit égal à l’angle aigu adjacent à ce dernier côté sera l’angle dont il s’agit.

Cela posé, concevons un nouveau plan de projection horizontal distant du premier de la quantité et coupant le plan vertical suivant il coupera le cône suivant un cercle dont le diamètre parallèle au plan vertical sera et la tangente à ce cercle sera la trace sur le nouveau plan de projection horizontal du plan tangent au cône au point Si ensuite on prolonge d’une quantité égale à et que, par le point on mène une droite faisant avec un angle égal à l’angle constant que fait l’hélice avec les génératrices du cylindre, et coupant en cette droite sera évidemment le rabattement, sur le nouveau plan de projection horizontal, de la tangente à l’hélice en d’où il suit que son point d’intersection avec la projection horizontale de cette même tangente sera le point où la tangente perce ce même plan ; donc la parallèle menée à par le point et coupant en sera la trace, sur le nouveau plan horizontal, du plan tangent à l’hélicoïde en le point appartiendra donc à la fois au plan tangent à l’hélicoïde et au plan tangent au cône par le point il appartiendra donc, à l’intersection de ces deux plans, c’est-à-dire, à la tangente à la spirale conique au point la droit menée du point à ce dernier point sera donc la tangente demandée, dont et seront ainsi les projections horizontale et verticale ; sera donc, en même temps la tangente en à la spirale d’Archimède.

Ce dernier procédé, qu’on pourrait aisément étendre à tout autre point de la spirale conique, offre cet avantage que étant arbitraire, toutes les autres lignes employées dans la construction auront telle grandeur on voudra.

Bien que nous n’ayons considéré que des point de la première circonvolution de la courbe, il n’est pas difficile de voir ce qu’il y aurait à faire pour des points de cette courbe situés au delà. On parviendra aussi très-facilement à modifier le procédé dans le cas où son application obligerait à tracer des droites d’une trop grande longueur.

La méthode de Roberval, qui s’applique fort bien à la recherche de la tangente à la spirale d’Archimède, conduirait également à la tangente à la spirale conique ; mais les procédés déduits des principes de la mécanique, quelque curieux qu’ils soient d’ailleurs, ne paraissent pas devoir dispenser des solutions purement géométriques.


Varsovie, le 5 août 1825.