Annales de pomologie belge et étrangère/Pomme Reinette franche
Reinette franche.
Cette Reinette d’élite date, à ce qu’il semble, de plus de deux siècles, et par un heureux privilège, bravant les outrages du temps, elle demeure pleine de vie et de séve ; seulement, si l’on veut obtenir de beaux et gros fruits, il l’eut lui réserver un bon sol, une exposition chaude, abritée.
Elle est, à notre avis, la Reinette type, comme l’est l’ancien Beurré pour certaine famille de poires : de là peut-être son nom de Reinette franche (ou vraie Reinette).
Il y a plusieurs variétés de cette Reinette — comme de la Reinette grise — qui ont entre elles une grande ressemblance. Il semble que les auteurs n’ont guère réussi jusqu’à présent à les bien distinguer. Il est de fait qu’elles sont si variables selon les terrains et les saisons, qu’à moins d’avoir été récoltées dans les mêmes circonstances ou à peu près, il est presque impossible d’établir nettement leurs caractères distinctifs ou la supériorité de celle-ci sur celle-là.
« Il y a, dit un praticien bien accrédité, M. Noisette, des Reinettes franches moins grosses, plus allongées, dénuées de côtes, plus ou moins marquées de taches rousses ; d’autres sont aplaties, jaunâtres, tirant sur le gris, piquetées de brun, marquées de taches rousses ; enfin cette Reinette a autant de variétés que la Reine-Claude, et il faut choisir avec autant de soin l’arbre sur lequel on prend des greffes pour ne pas s’exposer à greffer une qualité inférieure. »
Nous allons essayer de la décrire dans ses conditions véritables, normales.
Elle est de forme globuleuse, aplatie à ses deux pôles, mesurant environ 8 centimètres de diamètre sur 7 centimètres de hauteur. Sa surface, qui est fort lisse, offre des traces plus ou moins sensibles de côtes (au nombre de quatre ou cinq). Ces côtes se réunissent et se dessinent vers le calice placé dans une cavité évasée et peu profonde.
Le pédoncule, gros et assez court, s’implante dans un entonnoir large, profond, uni par les bords, ordinairement lavé de gris.
L’épicarpe, d’abord vert tendre, passe au jaune clair lors de la maturité. Rarement on le voit lavé et piqueté de rouge du côté exposé au soleil, mais il est toujours parsemé de points bruns de formes capricieuses, extrêmement variées.
La chair est blanche, jaunissant un peu dans la pleine maturité, fine, à la fois ferme et tendre, d’un goût sucré acidulé et d’un parfum suave.
Si à toutes ces éminentes et précieuses qualités l’on ajoute encore sa longue conservation (elle peut se garder jusqu’aux nouvelles pommes) ; si l’on songe qu’à l’époque de mars et d’avril où elle est dans sa perfection, les bonnes poires sont devenues fort rares et soutiennent difficilement la concurrence, on s’explique aisément la haute faveur dont elle a joui de tout temps ; peut-être ne peut-on plus répéter après Duhamel qu’elle « est la meilleure des Reinettes, » mais si elle n’est plus sans rivale, elle n’est pas encore, que nous sachions, éclipsée par aucune.