Anthologie de la littérature ukrainienne jusqu’au milieu du XIXe siècle/Sermon pour le premier dimanche après Pâques

La bibliothèque libre.
Cyrille de Tourov :

Sermon pour le premier dimanche après Pâques (Quasimodo).

Cyrille, évêque de Tourov, entre 1150 et 1180, auteur très fécond, a écrit beaucoup de sermons et de prières. Dans ce qui nous a été conservé, nous trouvons des exemples typiques du style imagé de l’époque.

Le soleil se lève aujourd’hui et réchauffe joyeusement la terre, car en ce jour le soleil de justice, Jésus, est sorti du tombeau pour sauver ses fidèles. Aujourd’hui, la lune, quittant son piédestal, cède sa place à un astre plus grand. Le règne de l’ancien Testament avec ses prophètes et son Sabbat cesse, comme l’a annoncé l’Écriture, pour rendre honneur à la loi de Jésus et à son Dimanche. Aujourd’hui, l’hiver du péché se termine dans le repentir et la glace de l’incroyance a fondu aux rayons de la vérité, parce que l’hiver païen de l’idolâtrie a pris fin par la science des Apôtres et par la foi de Jésus et que la glace de l’incrédulité de Thomas[1] s’est fondue à la vue des flancs du Christ, Maintenant le printemps règne et vivifie la terre entière ; le vent et les orages engendrent les fruits de leur haleine ; la terre, en faisant pousser les semences, produit le gazon.

Le printemps, c’est la belle religion qui vivifie les hommes par le baptême et les orages des pensées criminelles que le repentir a changées en vertus produisent des fruits bienfaisants à l’homme ; tandis que la terre de notre être, ayant absorbé comme une semence la parole divine, et toujours remplie d’une sainte terreur, produit le salut de l’âme.

Aujourd’hui les petits agneaux et les jeunes veaux courent alertement çà et là sur les routes et reviennent joyeusement vers leurs mères, tandis que les bergers glorifient le Christ en jouant des airs joyeux sur leurs chalumeaux. Par agneaux j’entends les justes parmi les païens et par veaux les serviteurs des idoles dans les contrées infidèles ; grâce à l’incarnation du Christ, à la science des apôtres et aux miracles, dès qu’ils ont accepté la loi et sont revenus à l’église, ils sucent le lait de la science et les docteurs chrétiens prient pour tout le troupeau et glorifient le Christ d’avoir réuni les loups et les agneaux en un même troupeau.

Aujourd’hui les arbres se couvrent de bourgeons et les fleurs odorantes s’ouvrent, les jardins exhalent des parfums aromatiques et les ouvriers travaillent pleins d’espoir en invoquant le Christ fécondateur. Nous avons été comme les arbres sauvages des forêts qui ne portent aucun fruit, mais maintenant la foi chrétienne a été semé sur notre incroyance, nous tenons de l’arbre de Jessé et nous produisons des vertus comme des fleurs, en attendant notre renaissance en paradis, et les évêques qui travaillent dans le champ de l’église attendent leur récompense du Christ.

Maintenant les laboureurs de la parole, qui mènent leurs bœufs sous le joug spirituel, enfoncent le soc de la croix dans le sol de la pensée, tracent les sillons du repentir et sèment les graines de l’esprit en se réjouissant dans l’espoir des biens à venir. Aujourd’hui, par suite de la résurrection, le règne de l’ancienne loi cesse et celui de la nouvelle commence. Aujourd’hui, les rivières apostoliques se remplissent, les poissons se multiplient et les pêcheurs, ayant sondé les profondeurs de l’incarnation divine, ramènent des filets pleins, car, selon les mots du prophète, la terre s’écoulera en rivières, les incrédules auront les yeux ouverts et seront guéris. Aujourd’hui, les abeilles monastiques étonnent le monde par leur sagesse, car elles se nourrissent elles-mêmes dans les déserts, émerveillant les anges et les hommes. Elles se posent sur les fleurs et préparent le miel pour donner aux hommes et à l’Église ce qui leur est nécessaire. Tous les oiseaux chanteurs des chœurs de l’Église font leurs nids et sont dans la joie, car les oiseaux, a dit le Prophète, ont trouvé leurs nids sur les autels et leurs chants glorifient Dieu d’une voix intarissable.

  1. Ce dimanche est appelé dans l’église orthodoxe Dimanche de Thomas.