Anthologie féminine/Carmen Sylva
LIVRES DE PENSÉES
CARMEN SYLVA
(Pseudonyme de la Reine de Roumanie)
« J’aurais du plaisir à ce qu’on chantât mes compositions sans que l’on sût de qui elles sont. »
C’est bien là le cri d’une jeune reine qui est poète et écrivain, et qui connaît le prix de la sincérité !
Quoique Carmen Sylva soit étrangère, elle a été couronnée par l’Académie française ; nous lui donnons place avec plaisir ; elle a publié jusqu’ici un volume de pensées très remarquable ; un livre de contes roumains et plusieurs romans, tous empreints d’une mélancolie qui ne la quitte pas depuis la mort de sa fille, son unique enfant.
« Je prie Dieu de pouvoir mourir pleurée, après une vie de travail, si je ne devais avoir ni enfants, ni petits-enfants. »
Tel était le souhait qu’elle formait avant que son mariage l’eût placée sur un trône, et alors qu’elle vivait simplement dans le château de ses pères, à Neuwied, où nous l’avons connue, joyeuse fillette, où elle est retournée aujourd’hui, malade et exilée.
Elle écrit encore à la date du 2 janvier 1869 :
« Rien qu’une action de grâces pour l’année chaude, ensoleillée qui vient de passer. Pas de vœu pour l’année commencée, sinon que le travail de mes mains soit béni. »
— Le moins que l’on fasse, il faut le faire tout à fait, si l’on veut que cela réussisse ; le moins que l’on soit, il le faut être tout entier, si l’on veut être quelque chose.
— Tout travail bien terminé est un échelon sur lequel on peut poser le pied solidement et sûrement pour monter plus haut.
— L’homme détruit à coups de cornes comme le taureau, ou à coups de pattes comme l’ours ; la femme à coups de dents comme la souris, ou par une étreinte comme le serpent.
— La toilette n’est pas une chose indifférente, elle fait de vous un objet d’art animé, à condition que vous soyez la parure de votre parure.
— Une femme incomprise est une femme qui ne comprend pas les autres.
— N’épousez pas une femme aux coins de la bouche pendants, la bouche elle-même fût-elle une cerise, vous trouveriez le fruit amer !