Application de l’électricité dynamique à la thérapeutique
I
II
EFFETS PRODUITS PAR LES COURANTS
III
PROPRIÉTÉS INHÉRENTES AUX COURANTS
Courant galvanique.
Courant d’Induction
IV
ADMINISTRATION DU TRAITEMENT ÉLECTRIQUE
V
GALVANISATION
Galvanisme
VI
FARADISATION
MM. BOULEY. (O. *) | Inspecteur-général. |
LAYOCAT *, | Directeur. |
LAFOSSE, * | |
LARROQUE | |
GOURDON | Professeurs. |
SERRES | |
Bonnaud | |
Mauri | Chefs de service. |
Bileaud |
PROGRAMME D’EXAMEN
INSTRUCTION MINISTÉRIELLE
du 22 août 1836.
Théorie. | Épreuves écrites. | 1o Dissertation sur une question de Pathologie spéciale dans ses rapports avec la Jurisprudence et la Police sanitaire, en la forme soit d’un procès-verbal, soit d’un rapport judiciaire, ou à l’autorité administrative ; |
2o Dissertation sur une question complexe d’Anatomie et de Physiologie. | ||
Épreuves orales. | 1o Pathologie médicale spéciale ; | |
2o Pathologie chirurgicale ; | ||
3o Manuel opératoire et Maréchalerie ; | ||
4o Thérapeutique générale, Posologie et Toxicologie ; | ||
5o Police sanitaire et Jurisprudence ; | ||
6o Hygiène, Zootechnie, Extérieur. | ||
Pratique. | Épreuves pratiques. | 1o Opérations chirurgicales et Ferrure ; |
2o Examen clinique d’un animal malade ; | ||
2o Examen extérieur de l’animal en vente ; | ||
4o Analyse des sels ; | ||
5o Pharmacie pratique : | ||
6o Examen pratique de Botanique médicale et fourragère. |
À LA MÉMOIRE DE MA MÈRE !!
Souvenir éternel
――――
À MON PÈRE
Témoignage d’affection et de dévouement
――――
À MES FRÈRES
Gage d’amitié et d’un sincère attachement
――――
À MON ONCLE
M.J AUSSET
Médecin-vétérinaire à Montpezat, ex-chef de service à l’école d’Alfort
hommage de reconnaissance
――――
À MES PARENTS
――――
À MM. X. DEPEYRE ET A. DEPEYRE
――――
À MES PROFESSEURS
Souvenir de leurs précieuses leçons et de leurs bienveillants
conseils
――――
À MES AMIS
I
II
EFFETS PRODUITS PAR LES COURANTS
III
PROPRIÉTÉS INHÉRENTES AUX COURANTS
Courant galvanique.
Courant d’Induction
IV
ADMINISTRATION DU TRAITEMENT ÉLECTRIQUE
V
GALVANISATION
Galvanisme
VI
FARADISATION
La découverte de la bouteille de Leyde donna aux physiciens Nollet et Boze, l’heureuse idée d’utiliser l’électricité, pour le traitement de plusieurs maladies. Les nombreux succès qui couronnèrent ces premières tentatives, attirèrent l’attention des physiciens et des physiologistes les plus distingués : ils cherchèrent par un grand nombre d’expériences à s’expliquer l’action de ce fluide sur l’économie. Certains, voyant qu’un courant électrique dirigé sur un animal en vie ou mort depuis peu, avait pour effet de déterminer des contractions et se rappelant qu’il existe chez quelques poissons (la gymnote, la torpille, le silure, le tétraodon, le trichiurus, etc.) un fluide électrique en tout semblable à celui qu’on fait dégager du monde inorganique admirent, sans données plus rigoureuses, une identité parfaite entre l’influx nerveux et l’électricité.
Pour eux rien ne resta dans l’obscurité, tout phénomène, produit par un courant galvanique, trouvait son explication facile. Ils pensaient avoir à leur disposition l’agent qui préside toutes les fonctions ; ils croyaient pouvoir doser à leur gré la quantité de fluide nerveux pour entretenir l’être vivant dans les meilleures conditions physiologiques. L’économie éprouvait-elle un trouble ? était-elle sous l’action d’une paralysie ou sous celle d’une maladie ayant pour cause une surexcitation nerveuse ? pour la première il suffisait d’accroître l’influx nerveux en infusant une certaine quantité d’électricité, pour la seconde, au contraire, ils soutiraient le fluide. Avec de pareilles théories et plusieurs succès, l’électricité était devenue une panacée universelle ; l’art de guérir avait fait son dernier pas et le problème était résolu.
Le temps et l’expérience démontrèrent combien ces belles théories étaient illusions : l’emploi de l’électricité, alors mal raisonné, devint abusif ; aux quelques succès constatés, vinrent se joindre grand nombre d’écueils et cette médication tomba dans l’oubli pour plusieurs années. Malgré ces faits peu encourageants, Galvani poursuivit ses recherches sur cette importante question ; en 1786, il remarqua que si l’on faisait communiquer, au moyen d’un arc métallique, les nerfs lombaires d’une grenouille morte depuis peu avec les muscles des jambes, on obtenait de vives contractions. Ce phénomène fut pour Galvani le résultat d’une électricité inhérente à l’animal (fluide vital de Galvani), électricité qui, en passant des nerfs aux muscles, par l’intermédiaire d’un arc métallique, avait pour effet de faire naître le mouvement. Le célèbre physicien de Bologne trouva des contradicteurs parmi lesquels le plus illustre fut Volta. Ce physicien, au lieu de voir une électricité inhérente à l’animal, attribua la contraction musculaire à la présence de l’arc métallique et, à l’aide de son électomètre, il parvint à démontrer la formation de l’électricité par le contact de deux métaux différents. Galvani de son côté fit remarquer qu’il était inutile d’avoir recours à deux métaux pour mettre en évidence l’électricité animale. Il prit une grenouille et après l’avoir débarrassée de sa peau, il isola les nerfs lombaires pour les mettre en contact avec les muscles des cuisses, on vit alors de fortes contractions. La discussion paraissait terminée en faveur de Galvani quand volta, physicien avant tout, voulut rapporter cette source électrique au contact et il posa une loi plus générale.[1]
Ses tentatives furent vaines et de nos jours l’opinion de Galvani est presque universellement partagée.
L’existence de l’électricité dans l’économie animale, l’analogie qui existe entre ses effets physiologiques et certains phénomènes nerveux et les résultats merveilleux qu’elle a donnés en plusieurs circonstances ont fait renaître la première opinion que partagent de nos jours plusieurs physiologistes des plus distingués. Telle était aussi la pensée de Galvani.
Nos faibles connaissances ne nous permettent pas de commenter une question si délicate et d’une si haute importance, aussi nous passerons outre en nous réservant cependant le droit de faire connaître nos impressions à cet égard. Selon nous, il ne suffit pas de constater dans l’économie animale l’existence de l’électricité pour lui accorder trop gratuitement la faveur d’être identique à l’influx nerveux. Si nous réfléchissons un peu aux liens intimes qui réunissent les deux grands règnes de la nature et aux causes qui peuvent faire naître l’électricité, nous verrons que sa présence dans l’économie a une juste raison d’être et de plus qu’elle doit être identique à celle que produit le monde inorganique.
Occupons-nous d’abord de la première question.
Comme nous le fait observer M.Lafosse[2], les corps organiques ne différent qu’à certains égards des corps inorganiques ; ces derniers comme les premiers sont formés des mêmes principes élémentaires mais qui ont subi un groupement particulier lequel a suffi peut-être pour leur donner des attributs différents. D’un autre côté, les corps pourvus d’organes, comme les corps bruts, ne sont-ils pas soumis à certaines lois physiques et chimiques, tendant les unes à les conserver et les autres à les détruire ?
Mais, nous devons le dire, les agents destructeurs sont sans action sur les êtres organisés quand ils trouvent pour résistante une force (force vitale) qui neutralise leur action. En poursuivant encore les idées de M. Lafosse ne sommes-nous pas obligé d’admettre combien est influant dans les corps bruts l’arrangement de la matière ? Combien ces corps changent de propriété quand ils ont subi certaines dispositions qui pour la plupart nous échappent ? Observons en effet, comme M. Serres nous l’a fait remarquer dans ses leçons, un barreau d’acier, pénétrons-nous de sa composition et faisons agir sur lui un courant électrique, il sera aimanté en conservant son poids, son aspect physique, sa composition chimique etc. Mais d’où lui vient la propriété d’attirer la limaille de fer et de faire naître un courant dans une bobine ? quelle est la modification subie par la matière qui puisse nous expliquer ses nouveaux attributs, cette espèce de vie, comme l’a dit Pline en parlant de l’ambre jaune ? Nous ne pouvons rien affirmer à cet égard et, si nous voulons nous passer d’une hypothèse, nous sommes obligé de constater un fait sans en connaître la cause. Ces quelques considérations suffisent nous le croyons, pour établir d’une manière irrévocable l’unité matérielle. Nous disons l’unité matérielle seulement parce qu’il existe sur d’autres points une barrière infranchissable entre les deux règnes. Nous croyons superflu un développement sur ce dernier sujet, aussi nous nous contenterons de faire remarquer qu’aux êtres organisés seuls est dévolu le droit de se développer, de se nourrir et de se reproduire. Les êtres supérieurs présentent d’autres facultés telles que l’excitabilité, la contractilité, la sensibilité, la caloricité, l’instinct et l’intelligence.
Il ne nous reste plus maintenant qu’à expliquer la formation de l’électricité dans l’organisme et de ce fait faire découler quelques conséquences.
Les sources d’électricité, nous le savons, sont toutes les combinaisons chimiques, les frottements, le contact des matières hétérogènes et l’électricité elle-même. Ceci posé remarquons ce qui se passe dans l’organisme et nous y trouverons toutes les conditions favorables au développement de ce fluide. La machine animée, pour subsister, absorbe des éléments solides ou gazeux qui se transforment en produits nouveaux pour remplacer ceux qui vont être éliminés par toutes les voix d’excrétion (peau, reins, poumons, glandes, etc.) après avoir rempli le rôle qui leur était dévolu. Mais ces changements, ces substitutions, cette formation de calorique, etc… tout ce qui constitue le mouvement nutritif a lieu par une suite de combinaisons chimiques, par une oxydation toujours croissante. Ajoutons à cette première cause l’action de l’électricité déjà formée, le frottement des organes en action, le contact de tissus très-différents et nous aurons tous les agents qui peuvent faire développer le fluide électrique. On pourra objecter peut-être qu’un courant galvanique, procédant de l’extérieur à l’intérieur a été observé sur des fragments musculaires ; il y a plus encore M. Mateucci a formé des piles avec des tronçons de muscles. Remarquons qu’il ne suffit pas qu’un organe soit séparé du corps pour qu’il ne présente plus aucun signe de vie : Le mouvement nutritif, une oxydation continue jusqu’à ce que la putréfaction vienne dissocier les éléments constitutifs pour les rendre au monde extérieur. On pourra nous dire encore que d’une fois les organes formés, leur contact seul suffira, puisqu’ils sont constitués par des parties hétérogènes, pour donner naissance au premier principe d’électricité et celle-ci dès lors pourra mettre la machine en jeu. À ceux-ci nous répondrons qu’on ne constate plus le fluide dans un cadavre ancien, alors qu’il n’y a plus aucun signe de nutrition. D’après ce que nous venons d’exposer, il nous semble être en droit de penser : 1o que l’être vivant en exécutant ses fonctions, donne naissance au fluide électrique ; 2o que cet agent est en tout semblable à celui qu’on observe dans les corps bruts puisqu’il se manifeste par les mêmes effets et qu’il est dû aux mêmes causes. N’avons-nous pas de plus chez certains poissons un appareil particulier ayant la plus grande analogie avec une batterie électrique ? S’il en est bien ainsi, il est impossible d’admettre une identité parfaite entre les deux fluides qui nous occupent. Comment croire en effet que l’influx nerveux est la conséquence des actions produites par la machine animée puisque c’est lui-même qui la met en jeu, dirige, règle et précise ses mouvements : il doit donc naître au moins en même temps que les rouages. Il est pourtant vraisemblable et l’exposé que nous avons fait nous le démontre, de penser que tous les êtres sont régis par une même force, qu’ils possèdent la même essence, essence variant dans ses attributs, avec l’organisation et l’arrangement de la matière. Mais cet invisible, cet impondérable, ce Mens agitat molem où réside-t-il ? quelle est la nature de cet éther qui ne peut nous avertir de sa présence que par ses effets ? Tel est le problème posé depuis un temps immémorial, resté jusqu’ici sans solution et chez lequel l’hypothèse a toujours remplacé le positif. Quoi qu’il en soit, pour revenir à notre sujet, il nous semble plus juste de considérer l’électricité comme une exciteur très-énergique du système nerveux, et c’est cette propriété qui lui donne la faculté de triompher d’un grand nombre de maladies auxquelles on a opposé tous les traitements qui paraissaient être indiqués. Cette assertion prendra, nous l’espérons, plus de forces quand nous nous serons occupé des effets physiologiques du fluide électrique et de son action dans quelques cas pathologiques.
Avant d’aborder l’action des courants sur les tissus, il serait peut-être utile de les faire et d’exposer leur théorie ainsi que celle des appareils électriques qui leur donnent naissance. Cette étude nous ferait sortir de notre cadre et nous préférons la supposer connue ou renvoyer le lecteur aux divers traités de physique ou d’électricité appliquée à la médecine.
II
Pour ne pas nous exposer à des répétitions, nous comprenons dans cette étude tout ce que les deux espèces de courants présentent d’identique ; plus tard nous ferons connaître leurs propriétés particulières.
On désigne sous ce nom les phénomènes qui font naître les courants sur un animal vivant ou mort depuis peu de temps.
La première expérience que nous ayons à citer est celle de Galvani. Quand la pile fut connue, Aldini soumit à un courant énergique la tête d’un bœuf sacrifié depuis peu. Les deux pôles placés dans les oreilles, on constata des
contractions des lèvres et des joues, les paupières s’ouvrirent, les yeux roulèrent dans l’orbite, la langue exécuta des mouvements variés.
À Glasgow, Andrew-Un, opéra, avec une pile de 270 couples sur le cadavre d’un supplicié, l’un des pôles était en contact avec la moëlle, dans la région cervicale, l’autre était plongé dans le talon ; la jambe, étant dans la flexion, tout-à-coup on remarqua de vives contractions. Le pôle négatif porté dans une incision faite aux intercostaux on parvint à faire entrer en contraction tous les muscles de la cage thoracique et les fonctions respiratoires semblaient s’exécuter. Enfin quand on porta le pôle négatif sur les ramifications de la cinquième paire, les muscles de la face se contractèrent d’une manière si effroyable que les spectateurs en furent épouvantés.
Inutile de dire que tout signe de vie disparaissait avec la cessation du courant.
C’est surtout la fibre musculaire, volontaire ou involontaire, qui accuse avec la plus grande énergie l’influence que lui font resentir les courants. Cet élément organique, étant répandu dans presque tous les appareils, il en résulte une série de phénomènes qui varient avec les organes sur lesquels on expérimente. Aussi nous voyons-nous obligé, pour être plus compréhensible, d’étudier isolément les réactions que chaque système opère quand il est sous l’action du fluide dynamique.
En posant les excitateurs sur une région mouillée avec l’eau salée, on fait naître des contractions qui diffèrent de celles produites avec la bouteille de Leyde en ce que les premières sont successives puisqu’il se forme sans cesse une nouvelle quantité d’électricité tandis que la seconde se décharge complètement en faisant resentir une seule fois ses effets.
Les chocs prennent de l’énergie à mesure que les couples augmentent en nombre — 50 à 60 couples de Bunsen donnent une forte secousse qui deviendrait dangereuse si l’on élevait le nombre à 150.
Il va sans dire que plus le sujet sera grand et lymphatique moins il réagira ; le contraire aura lieu pour les sujets irritables. D’après M. Marianini, la direction du courant paraît avoir une grande influence sur les muscles : s’il est centrifuge, dans la direction des nerfs, le premier phénomène qui se manifeste est la contraction de la fibre et après elle on ressent une douleur sourde, difficile à définir ; le contraire a lieu, s’il est centripète. L’auteur de cette observation fait remarquer que ses expériences ne donneront les résultats connus qu’autant qu’on se servira d’un courant de faible intensité ; car, s’il en est autrement, il y aura toujours contractions et douleurs quelle que soit sa direction. Enfin il doit toujours suivre les ramifications nerveuses ; s’il en est autrement, à moins qu’il ait une grande énergie, il ne se produit rien de particulier.
Comme nous venons de le voir, l’électricité mise en rapport avec l’économie, produit une excitation dans le système nerveux, excitation qui a pour résultat final de produire des contractions et de faire ressentir de la douleur. Mais les choses ne se passent pas toujours de la même manière : ainsi en faisant agir un courant sur une partie quelconque son action sera primitivement dévoilée par les phénomènes connus ; bientôt l’économie, habituée à ses effets n’émettra plus les moindres signes d’excitation. De ce fait découle la nécessité, si l’on veut produire des contractions car tout est relatif, d’augmenter le courant ou de l’interrompre par intervalles par quelque procédé que ce soit. La théorie de la contraction musculaire de M. Becquerel nous donnera l’explication de ce phénomène.
M. Duchesne a remarqué que la sensibilité électro-musculaire était plus grande dans certains muscles que dans d’autres ; ainsi elle semble être exagérée dans les muscles de la face à cause de la présence de la cinquième paire ; elle est très-vive au cou, à la poitrine, assez à la face interne des cuisses et des bras, moins dans la région dorso-lombaires etc.
Nous croyons inutile une description de l’action du fluide électrique sur les nerfs. Ce que nous avons dit à propos de la fibre musculaire volontaire s’y rapporte entièrement, et si les phénomènes que nous venons de constater se sont manifestés c’est que la fibre nerveuse a été excitée.
Les centres nerveux présentent des phénomènes remarquables. Weber en plaçant les conducteurs à chaque extrémité de la moëlle a obtenu des contractions tétaniques qui ont persisté après l’opération : les mêmes résultats ont été obtenus en plaçant les deux excitateurs dans la région postérieure. Ce fait nous oblige de reconnaître à la moëlle épinière une action particulière ; s’il en était autrement dans le deuxième cas il n’y aurait eu que de simples convulsions des membres postérieurs. L’expérience suivante achèvera de nous convaincre.
Si par une section complète on divise la moëlle et qu’on laisse en contact les parties pour laisser circuler le courant
on ne constate plus que des convulsions des membres postérieurs puisque la moëlle ne peut plus transmettre son action.
Il entre dans la composition de l’appareil digestif des fibres musculaires involontaires qui forment une tunique d’enveloppe à la muqueuse ; c’est ce deuxième tube qui emboîte le premier pour lui former une charpente et lui donner plus de résistance. Il l’aide aussi dans ses fonctions en exécutant des mouvements vermiculaires qui ont pour but d’activer la sécrétion intestinale, de mélanger les matières alimentaires aux fluides digestifs pour que ceux-ci exercent sur elles une action dissolvante plus complète et de favoriser leur cours. Ces fibres, elles aussi, se laissent impressionner par le fluide en mouvement.
Un courant établi aux deux extrémités du tube digestif, le pôle positif étant à la bouche, fait naître des contractions péristaltiques très-énergiques. Pour s’en assurer, il suffit, pendant qu’on opère d’ouvrir le ventre de l’animal de mettre à découvert une anse intestinale. Les fonctions vitales sont exaltées, il y a une expulsion de gaz et quelquefois des matières fécales par le rectum. Les sécrétions sont plus abondantes qu’à l’état normal, le cours de matières alimentaires est plus rapide, la digestion se trouve ainsi facilitée et demande moins de temps pour s’effectuer.
Le D. Andrieux fait observer qu’en changeant le rapport des conducteurs, on détermine des contractions antipéristaltiques. Il n’est pas rare alors de voir les matières suivre un mouvement rétrograde et provoquer des
éructations et des vomissements.
La respiration devient grande et accélérée, parfois raccourcie et irrégulière, d’autrefois suspendue par intervalles pour reprendre son cours avec plus d’énergie ; les parois pectorales se dilatent fortement, les naseaux sont très-ouverts et la tête tendue : les deux temps ne sont plus égaux, le rhythme physiologique a disparu, l’on ne peut plus constater qu’un trouble, qu’une confusion dans les mouvements ayant pour résultat une exagération marquée de cette fonction.
Les battements du cœur sont forts et accélérés, ils sont par intervalles plus rapides et ensuite plus lents, quelquefois suspendus pour reprendre bientôt leur cours : le pouls présente les mêmes caractères. Malgré cette irrégularité la circulation est beaucoup plus active ; les muqueuses sont rouges, les capillaires très-dilatés, la calorification augmente, les veines superficielles sont gonflées et plus apparentes. On constate souvent un pouls veineux dans les jugulaires, dû sans doute aux mouvements irréguliers du cœur ou à la compression du tronc de la veine cave antérieure par les mouvements déréglés qu’exécutent les poumons.
Si l’on dirige un courant sur un organe glandulaire, on s’aperçoit bientôt que la quantité de liquide sécrété augmente considérablement en conservant toutes ses propriétés. Dans l’utérus de la femme, il survient parfois une hémorrhagie capillaire. Dans les plaies suppurantes telles que vésicatoires, moxas, le pus ou la sérosité n’a pas, comme l’avait annoncé le savant Humboldt, des propriétés irritantes, puisque mis en contact avec des parties saines, introduit même dans le corps muqueux, il ne détermine pas d’accidents.
La matière sécrétée exerce, il est vrai, une action rubéfiante sur le tégument qui est le siège de l’opération, mais cette particularité se fait aussi remarquer quand on humecte la partie avec l’eau pure. Ce qui a fait dire à Andral, et à Ratier que les liquides ne faisaient qu’étendre la sphère du galvanisme.
Nous ne pouvons pas terminer ce qui a trait à ce sujet sans faire connaître les sensations douloureuses que déterminent les conducteurs sur la peau humectée. Si leur application est prolongée — 6 à 8 minutes – la douleur devient très-vive, un afflux sanguin se développe au point de contact et l’inflammation se manifeste avec tous ses caractères. Enfin si l’application durait 12 à 15 minutes il ne serait pas rare de voir des eschares se produire. Ce fait n’a pas échappé à M. Briquet qui considère cette action comme une médication résolutive et il dit que pour traiter avec succès il faut placer les conducteurs sur la partie endolorie et prolonger leur application autant que faire se pourra.[3]
Il nous paraît superflu d’étendre plus loin cette description, on conçoit déjà ce qui se passerait si l’on soumettait
à la même action les autres organes composés de fibres contractiles.
Les phénomènes décrits ne peuvent s’isoler que par la pensée, c’est-à-dire que l’on voit les uns et les autres en même temps malgré que l’expérimentation n’ait lieu que sur un seul système. Il serait difficile sans doute, vu leurs connexions avec les filets nerveux et la transmission des effets par sympathie, de concevoir, par exemple, l’électrisation de l’appareil respiratoire sans que celui de la circulation y participe, surtout si l’on emploie un courant intense.
Les phénomènes décrits ne diffèrent pas seulement de ceux que l’on constate à l’état physiologique par leur plus grande énergie et par leur rapidité, ils en diffèrent encore par leur rhythme irrégulier et leur confusion ; rien n’est isochrone et tout annonce que quelque chose est venu déranger l’action si précise du système nerveux pour lui faire convoiter les lois de la nature.
Les auteurs, pour expliquer les contractions, ont donné diverses théories. Celle qui paraît le plus nous satisfaire appartient à M. Becquerel ; nous allons la reproduire : « …un nerf ébranlé en un point quelconque de son trajet, ou traversé par un courant électrique dans le sens de ses ramifications n’éprouve ni contraction, ni dérangement apparent, lors même que le muscle est fortement agité, nous devons admettre que son action consiste à transmettre rapidement au muscle une impulsion donnée, à peu près comme le fait une boule d’ivoire en contact avec une série de boules disposées en ligne droite et qui leur communique à toutes successivement jusqu’à la dernière, la quantité de mouvement qu’on lui a donnée, sans que les boules intermédiaires éprouvent un dérangement quelconque. L’organisation fibrillaire et globulaire du nerf justifie cette allégation, en supposant toutefois aux globules élémentaires une élasticité parfaite.
« Cet ébranlement se propageant rapidement dans tous les filets nerveux dont chaque fibre musculaire est pourvue, fait entrer celle-ci en contraction. En effet, les fibres musculaires se trouvant dans une direction sensiblement perpendiculaire à celle des filets nerveux, doivent éprouver un déplacement assez considérable quand les parties constituantes de ces derniers sont ébranlées. Voilà comment on peut concevoir le phénomène des contractions mécaniquement parlant, c’est-à-dire en ne mettant en jeu que les particules matérielles des nerfs et des muscles au moyen des excitants ordinaires.
« En faisant intervenir l’électricité on doit voir des effets du même genre ; aussi ont-ils plus d’intensité quand un nerf est traversé par un courant. Que se passe-t-il ? Ce courant ébranle sur le champ ces molécules organiques, il les écarte et les tient distendues. Voilà ce que nous savons des effets mécaniques de l’électricité.
« Cette distension subsiste pendant tout le temps que circule le courant et alors il ne se manifeste pas de contraction. Mais vient-on à ouvrir le circuit, il se manifeste aussitôt des contractions dues au retour immédiat des mêmes parties à leur état primitif d’équilibre, si toutefois elle a été de courte durée, et d’une faible intensité. Car, dans le cas contraire, les parties organiques ayant été longtemps dans un état forcé, ne reprennent celui du repos qu’au bout d’un certain temps. Il faut admettre, bien entendu, que le passage de l’électricité n’a produit aucun désordre résultant d’effets physiques ou chimiques. On se rend facilement compte pourquoi les effets physiologiques sont plus énergiques que ceux produits par les autres moyens d’excitation appliqués en un point quelconque : le courant, en parcourant le nerf, affecte tous les points, tandis que tous les autres stimulus ne peuvent être appliqués qu’en quelques points. »
L’action des deux sortes de courants (Induit et direct), nous l’avons vu, est la même dans quelques cas ; cependant ils jouissent de certaines propriétés qui leur sont particulières et que nous devons tâcher de faire connaître.
Un courant galvanique continu produit une contraction avec douleur au moment de son application ; si son contact est prolongé, l’économie s’habitue à ses effets et ne semble plus réagir, les nerfs ne peuvent plus porter au cerveau les sensations éprouvées. Il est donc hyposthénisant.
L’action chimique qu’exerce le fluide galvanique sur l’économie est encore peu connue. Cependant, en observant ce qui se passe dans la décomposition de l’eau, des oxydes et des sels par un courant on est obligé de voir combien est grande sa propriété désoxydante. Il agit sans doute de la même manière quand il traverse l’organisme ; alors qu’il est en contact avec les tissus et le sang tous chargés d’oxygène ; ce dernier surtout renfermant entre autres éléments de l’eau, des oxydes et des sels servant à augmenter sa conductibilité. On conçoit dès lors les nombreuses modifications que doit subir le fluide nutritif : l’oxygène entrant dans la composition de tous les éléments constitutifs, étant en partie diminué, ces mêmes éléments doivent comme conséquence inévitable être grandement modifiés et même anéantis en partie pour peut-être en créer d’autres avec leurs propres molécules.
Comme exemple à l’appui de cette remarque, due à M. Robin, nous pouvons citer l’action de la foudre, action qui pendant un certain temps a été mal interprétée puisqu’on a dit qu’un sujet foudroyé devait sa mort à l’asphyxie ; les lésions cadavériques présentées par les victimes avaient induit nos observations en erreur. Sur les sujets tués par cette cause nous avons des lésions qui ne sont pas sans analogie avec celles que l’on trouve chez les asphyxiés. Ainsi le sang est noir et très-liquide, il est accumulé dans les cavités droites du cœur et dans les gros vaisseaux, les organes parenchymateux sont engoués, les centres nerveux congestionnés, etc. Tout nous indique que l’élément nutritif manque d’oxygène ; ce qui avait fait croire que les actes respiratoires étant suspendus, l’hématose avait cessé de s’accomplir ; dès lors le sang était devenu délétère et avait porté la mort dans tous les organes. Aujourd’hui, quand on a remarqué que le temps nécessaire à la foudre pour éteindre à jamais la vie était tellement court qu’une seule inspiration ne pouvait pas s’accomplir, on est revenu de cette erreur. Il n’y a dès lors plus moyen d’expliquer les caractères que présente le sang d’un foudroyé par l’absence de l’hématose mais seulement par l’action spoliatrice de l’électricité. En un mot, il se passe dans l’économie ce qu’on constate dans le Voltamètre quand on décompose l’eau. Ajoutons à cette désoxydation une violente commotion dans les centres nerveux, pouvant produire des déchirures et nous aurons les causes véritables de cette mort subite.
Cette remarque, pleine d’intérêt, nous explique assez bien les propriétés anesthésiques de la foudre et d’un courant quelconque. Elle pourrait être invoquée, peut-être, pour nous donner l’explication de certaines cures qui nous paraissent mystérieuses. Ne serait-ce pas, comme l’a dit M. Hiffelsheim, en vertu de cette propriété qu’un courant continu est préférable dans le traitement de certaines névralgies, dans celui des paralysies générales et dans quelques maladies (chorée, tétanos, etc) qui se manifestent par une excitation nerveuse ? Pour notre compte nous penchons beaucoup vers cette hypothèse.
Cet espoir suffira, nous l’espérons, pour nous montrer une fois encore combien il est des points obscurs et qu’il serait sans nul doute très-avantageux de pouvoir élucider. Que cette propriété de désoxyder le sang et les tissus, de faire entrer l’oxygène dans d’autres combinaisons ne nous échappe pas et peut-être un jour, quand on pourra diriger à son gré ce puissant modificateur, la science aura fait un grand pas.
Les effets calorifiques de la pile sont subordonnés à la quantité d’électricité et non à son intensité ; de là la nécessité d’employer des couples d’un grand diamètre. Nous savons que si l’on ferme un courant voltaïque avec un fil métallique, il rougit et se volatilise plus tard ; sa capacité calorifique, si l’on peut ainsi parler, est tellement grande qu’il acquiert la propriété d’agglomérer les sables, d’arrondir les angles saillants des silex, etc. La médecine humaine a tiré parti de cette propriété pour cautériser certains tissus, modifier quelques parties et la nature de certaines affections ; elle s’en sert encore pour détruire des tumeurs, dilater des anneaux, etc. Ce nouveau procédé est connu sous le nom de Galvano-Caustique.
Nous nous contentons de le citer en passant sans en donner une description précise parce que son emploi, dans notre médecine, est très-secondaire pour ne pas dire inutile. La cautérisation actuelle est préférable à tous égards à la cautérisation électrique surtout pour les animaux chez lesquels nous avons peu à tenir compte des douleurs et de l’épouvante que ressentent les sujets pourvu que nous les guérissions vite et à un prix modéré.
Un courant d’induction continu fait naître une suite de contractions qui ont pour conséquence, comme dans le premier cas, de paralyser l’action des nerfs et d’émousser la sensibilité. On voit donc qu’il peut remplacer le premier ; toutefois les courants induits interrompus sont plutôt excitateurs qu’hyposthénisants. Tandis que le courant inducteur à une propriété élective pour les muscles striés, le courant induit exerce une grande influence sur la peau, la rétine et la fibre lisse : la tension est grande et il pénètre l’organisme avec facilité ; en revanche ses effets chimiques sont presque nuls.
Avant d’indiquer les moyens mis en usage pour utiliser l’électricité comme traitement dans certaines maladies, nous devons nous attacher à faire connaître :
1o Quel est le courant qui doit être employé.
2o Les règles à suivre pour soumettre le sujet à son action.
3o La méthode adoptée pour doser le courant.
4o Les indications.
5o Les contre-indications.
Nous allons successivement passer ces cinq points en revue.
1o Courant à employer. — Un désaccord a longtemps régné sur la question de savoir quel est le courant qui répond le mieux à telle ou telle indication. Cette dissidence est assez facile à concevoir si l’on tient compte qu’il y a peu de temps encore que les effets des courants étaient peu connus et que les deux sortes de fluides ont donné un égal succès dans le traitement de certaines maladies. L’époque actuelle de la science est venue jeter de nouvelles lumières pour résoudre, d’une manière satisfaisante la question restée en suspens ; sans entrer dans un développement qui nous conduirait beaucoup trop loin nous allons poser le principe.
S’il s’agit de calmer une surexcitation, il faut employer un courant voltaïque continu ; dans le cas contraire, c’est-à-dire quand il y a atonie des nerfs, il faut avoir recours un courant induit interrompu.
Dans cette loi se trouve, selon le Dr. Lunel, tout le succès du traitement par l’Électricité.
2o Règles à suivre pour soumettre le sujet à son action. — En règle générale on doit toujours faire agir un courant direct, c’est-à-dire que le pôle positif doit être au centre et le négatif à la périphérie.
Cette loi, comme on le verra, ne souffre que de rares exceptions. Nous empruntons au Dr B. Lunel les procédés à suivre pour électriser certaines régions.
1er Cas ─ Courants électriques devant traverser la partie antérieure de la tête.
Il faut appliquer les excitateurs sur les tempes et promener le pôle positif sur la région frontale.
2o Cas — Courants électriques devant passer par les paupières et par les yeux.
Placer le pôle négatif sur la nuque et le pôle positif très-près de l’œil.
3o Cas — Courants électriques devant traverser la tête du front à la nuque.
Appliquer le pôle positif sur le milieu du front et le pôle négatif à la nuque.
4o Cas — Courants électriques devant porter leur action sur la colonne vertébrale.
Appliquer un pôle à la nuque et l’autre sur la colonne vertébrale.
5o Cas — Courants électriques devant être dirigés d’une oreille à l’autre.
Appliquer les deux excitateurs au-dessus des apophyses mastoïdes, etc. Les connaissances anatomiques peuvent guider le praticien dans cette voie.
3o Méthode adoptée pour doser le courant. — Les médecins se sont beaucoup occupés de cette question ; les uns ont voulu par des données mathématiques déterminer d’une manière irrécusable la tension qu’on devait donner au courant, la durée et le nombre des séances ; d’autres ont déterminé un nombre invariable de secousses. Ces règles, on le comprend, ne doivent pas servir de guide ; il n’y a rien de positif à cet égard et c’est à l’opérateur à observer la physionomie du patient, de cesser ou de diminuer l’action du fluide si le besoin l’exige. Par ce procédé on évitera des accidents toujours fâcheux puisqu’ils peuvent, dans certains cas, déterminer la mort du sujet ou tout au moins compromettre la réputation du praticien.
4o Indications relatives aux maladies dans lesquelles on emploie l’électricité. — Pour ne pas faire une énumération qui serait toujours incomplète des maladies qui peuvent être traitées par cet agent, nous allons rapporter ce qu’a dit M. Becquerel sur ce sujet, en laissant au praticien électriseur le soin de rapporter chacune d’elles à la loi qui lui correspond. Les principes posés par l’auteur, comme on pourra le voir, sont généraux et contiennent tous les cas dans lesquels l’électricité peut être salutaire.
L’électricité dynamique est indiquée :
1o Quand on veut rétablir la contractilité dans les muscles qui en sont privés.
2o Pour rétablir la sensibilité générale ou la sensibilité spéciale des organes des sens.
3o Pour ramener à leur type normal la contractilité ou la sensibilité exagérée.
4o Pour produire une révulsion cutanée.
5o Faire agir l’électricité comme agent chimique ; pour coaguler, par exemple, le sang dans une tumeur anévrysmale, la synovie, etc.
5o Contre-indication. — L’électricité sera contre indiquée.
1o Toutes les fois que le sujet présentera une susceptibilité telle qu’il ne pourra pas la supporter.
Cette loi n’est pas absolue puisqu’assez souvent l’organisme finit par se soumettre à ce traitement. Nous devons faire observer que l’opérateur devra être patient, agir avec des courants d’une faible intensité et les augmenter successivement.
2o La persistance de la malade aiguë ou chronique ayant déterminé la maladie à traiter.
Cette contre-indication est irrévocable et il y aurait même danger à la violer ; avant de traiter on doit attendre la disposition de la cause qui a pu donner naissance à l’affection. L’administration de l’électricité dynamique peut se diviser en deux méthodes principales la Galvanisation et la Faradisation. Cette division est entièrement basée sur la nature des courants employés.
Définition.— On nomme ainsi l’opération qui a pour but de faire agir sur l’organisme un courant galvanique.
Les moyens que possède la médecine humaine pour administrer le galvanisme sont aussi nombreux que variés. Quelquefois on met en contact l’appareil lui-même avec la peau ; les chaînes électriques, la ceinture de MM. Breton sont dans ce cas ; d’autres fois on pose les deux réophores armés d’excitateurs, variant dans leur forme, sur la peau ; d’autres fois encore on combine l’action du courant et celle de l’acupuncture et l’on a la galvano-puncture. Parmi tous ces procédés nous devons faire un choix en tenant compte d’abord de leurs actions et de la facilité
plus ou moins grande avec laquelle nous pourrons les utiliser dans notre médecine où nous n’avons pas de patients capables de porter des ceintures, des flanelles, des cataplasmes électriques, etc. De plus l’organisation de la peau, comme on le sait, se prêterait peu à ces divers traitements. Ceux qui nous paraissent le mieux appropriés aux circonstances sont les deux derniers ; ce sont aussi ceux qui ont une action plus fidèle.
C’est l’opération qui consiste à mettre en contact avec les tissus les deux réophores d’une pile électrique.
Les conducteurs portent des excitateurs variant dans leur forme jusqu’à l’infini ; ils sont cylindriques, coniques en boule, en pinceau, etc ; d’autres fois ce sont deux cylindres creusés d’une cavité pour porter une éponge imbibée d’eau légèrement salée. Cette forme nous paraît la plus commode quand on veut mettre les deux excitateurs sur le tégument externe.
Chez l’homme la peau est sensible très-vasculaire et dépourvue de l’épiderme épais que présente celle de nos animaux ; elle n’est pas non plus couverte de poils ni souillée par toutes les impuretés que laisse la transpiration cutanée pour former une couche de matières non conductrices, aussi on n’a pas besoin de la préparer. Pour nos animaux, au contraire, il nous semble indispensable
de raser le tégument et de le soumettre au lavage à l’eau de savon avant de commencer l’opération. Cette précaution aura le double avantage de faire disparaître les matières grasses et d’imbiber l’épiderme, couche épaisse et inerte qui, en vertu de son peu de conductibilité, pourrait compromettre le succès de l’opération. C’est en tenant compte de ces particularités que nous ne saurions trop recommander d’enlever l’épiderme à l’aide d’une friction vésicante. Si l’on veut agir sur le tégument interne, il est inutile de mettre en pratique ce que nous venons de dire à propos du lavage de la chute de l’épiderme ; les excitateurs employés seront dépourvus d’éponges puisque dans ce cas elles sont inutiles.Après avoir convenablement fixé l’animal et préparé les parties comme il a été dit plus haut, on commence l’opération en observant rigoureusement les préceptes déjà posés. Dans quelques circonstances on doit donner un courant interrompu, pour remplir ce but on peut avoir un appareil destiné à cet effet, d’autrefois l’opérateur se réserve ce soin. Enfin il peut être utile de renverser le courant pour produire de la douleur, etc ; ce sujet a été suffisamment développé pour que nous nous dispensions d’y revenir.
Le galvanisme a rendu à la médecine de grands services ; dans des cas désespérés il a rendu la santé à des malades abandonnés aux soins de la nature ; avec un courant intermittent Leroy d’Étioles a guéri des hernies étranglées. Son procédé consiste à établir le courant en plaçant le pôle positif dans la bouche et le pôle négatif dans le rectum. À l’aide d’un courant continu on est parvenu à ramener l’état de santé des asphyxiés par immersion, morts en apparence. Andral et Ratier conseillent d’avoir recours à cet agent quand dans des cas d’accouchement on veut s’assurer si le fœtus est mort ; ils prescrivent de diriger le courant sur le fœtus et, s’il lui reste encore un signe de vie, on s’en assurera par ses réactions. Le galvanisme a aussi fait ses preuves dans certaines paralysies, dans les atrophies, les névralgies, l’amaurose et dans toutes les maladies qui peuvent être classées dans les lois connues.
Pour traiter la hernie étranglée, il nous semblerait plus efficace d’appliquer, si cela était possible, les deux conducteurs sur la région même. Ce que nous venons de dire n’est qu’une déduction des effets physiologiques du courant sur l’intestin ; nous savons que si l’on électrise localement, si nous pouvons ainsi parler, une anse intestinale et qu’on retire subitement les conducteurs, la partie électrisée continue à se contracter après la cessation du courant. — C’est cette particularité offerte par l’intestin qui nous porte à faire cette supposition ; nous ne saurions trop engager les praticiens à faire usage de ce procédé dans des cas désespérés pour en apprécier sa juste valeur.
La médecine vétérinaire compte peu d’observations attendu que ce traitement a encore été peu employé vu le prix élevé des appareils et la valeur quelquefois minime des sujets à traiter.
M. Caussé de Castelnaudary a fait connaître quelques cas de guérison que nous allons extraire du traité de chirurgie de M. Gourdon.
1er Cas — Le sujet était un cheval atteint d’une météorisation par surcharge d’aliments. M. Caussé soumit le sujet à un courant en mettant le pôle positif à la bouche et le négatif dans le rectum ; au bout de quelques instants on remarqua de vives contractions des muscles abdominaux, des rejets de gaz… tout allait pour le mieux quand une rupture du diaphragme vint amener la mort.
2e Cas — Une jument atteinte de météorisation avec absence des borborygmes, ce qui fit croire à M. Caussé que les contractions péristaltiques étaient suspendues. Au bout de quelques minutes le courant, dirigé comme dans le premier cas, fit renaître les mouvements vermiculaires ; il y eut une évacuation de gaz par les rectum et l’animal reprit la santé.
3e Cas — Une jument présentant des coliques intermittentes qui se renouvelaient sous la moindre cause, elle fut soumise sans succès à un traitement qui dura trois mois. Enfin pour dernière ressource M. Caussé eut recours au galvanisme toujours d’après le même procédé et après deux séances faites en deux jours la malade récupéra la santé.
Dans le traitement de cas semblables, il serait peut-être plus avantageux de donner à l’excitateur négatif la forme d’un long cylindre creux ouvert à ses deux extrémités. L’instrument, ainsi confectionné, aurait pour effet de remplir le rôle d’un spéculum en dilatant le rectum et de s’opposer au resserrement du sphincter ce qui favoriserait le rejet des matières excrémentielles.
4e Cas — Une paraplégie datant de dix jours, sur un bœuf, quand on eut recours au galvanisme. On établit un courant, fourni par 250 couples, de la bouche à l’anus ; au bout de cinq minutes l’animal présenta un mieux très-sensible, il chercha à se relever, la chaleur augmenta, les membres s’agitèrent ; à la vingtième minute, on porta le pôle positif sur les parois abdominales pour agir sur la vessie un quart d’heure après le malade se releva, l’urine fut expulsée et la santé se rétablit.
5e Cas — Un cheval présentait une chute du pénis compliquée d’un fort engagement froid ; cet organe fut soumis à un courant, le pôle négatif fut placé au tube uréthral et le positif à la base de l’organe, dans une incision pratiquée à cet effet. Quand l’animal fut relevé le pénis se cacha dans le fourreau et peu de jours après il devint le siège d’un engorgement chaud qui disparut bientôt.
L’opération qui a pour but de faire pénétrer un courant voltaïtique dans la profondeur des tissus au moyen d’aiguilles ou stylets métalliques porte le nom de galvano-puncture.
Les médecins avaient une opinion déjà arrêtée sur l’action du fluide électrique, lorsque Berlioz eut l’heureuse idée de proposer l’association de son action avec celle de l’acupuncture. Par ce procédé, disait-il, on pourra produire un effet parfaitement localisé sur tel ou tel lieu que l’on voudra et épargner les parties superficielles. Sarlandière fut le premier qui mit en pratique ce genre de traitement que grand nombre de succès vinrent assurer. La galvano-puncture, malgré son efficacité réelle, est un peu délaissée aujourd’hui à cause des vives douleurs que peut produire l’implantation d’aiguilles dans les tissus et l’épouvante qu’elle produit sur le malade. De pareilles argumentations ne sont pas sérieuses ; on ne doit pas reculer devant la douleur que peut faire éprouver un remède puisque celui-ci doit nous rétablir la santé. D’ailleurs, dans notre médecine, nous n’avons guère à tenir compte de ces observations ; nos patients ne risquent pas d’être impressionnés à la vue de longs stylets ni à la faible sensation qu’ils ressentent quand ils pénètrent dans leurs tissus. Ainsi, nous le voyons, pour des raisons majeures nous devons adopter ce mode de traitement qui est à la fois très-efficace dans beaucoup de maladies et d’une application facile.
Nous avons d’abord à nous occuper de l’introduction des aiguilles.
Ce sont de sortes de stylets coniques, à pointe très-effilée pour passer entre les fibres sans les déchirer ; leur longueur est de 6 à 12 centimètres ; pour les animaux on peut l’accroître, si le besoin l’exige ; une extrémité est renflée et porte une ouverture dans laquelle s’engage l’électrode de l’appareil électrique. Les métaux qu’on a employés pour leur confection ont varié, on s’est servi de l’or, du platine, de l’argent, de l’acier ; ce dernier est préférable parce qu’il offre l’avantage d’être moins cher et de se donner des instruments minces et rigides en même temps, ce qui rend plus facile leur introduction.
Les aiguilles peuvent être implantées par trois procédés différents : par Percussion par Pression et par Rotation.
Avant de les décrire disons que pour faire pénétrer une aiguille dans les tissus, il est indispensable de la faire
recuire à la flamme d’une lampe ou sur des charbons incandescents. Si l’on n’avait pas cette précaution, elle casserait par l’effet de la contraction musculaire et pourrait produire des ravages plus ou moins graves dans le corps
du malade.
On saisit l’aiguille près de la pointe et après l’avoir mise en contact avec l’endroit qui doit être piqué, on l’enfonce avec deux ou trois coups de maillet.
On saisit l’aiguille de la main droite pour la faire pénétrer en un seul temps dans les tissus après avoir tendu la peau avec la main gauche.
On fait pénétrer l’aiguille en la roulant entre le pouce et l’index et en exerçant une pénétration régulière.
De tous ces procédés le dernier seul pourrait être employé dans la galvano-puncture : dans les deux premiers l’aiguille pénètre trop rapidement dans l’organisme et n’a pas le temps d’épargner les vaisseaux et les nerfs qui se trouvent sur son passage. Quand il ne s’agit que de l’acupuncture une piqûre faite, soit à une artère, soit à un nerf, est de peu d’importance ; il n’en est plus ainsi quand on doit faire agir le fluide galvanique, celui-ci pouvant quelquefois désorganiser les parties qui se trouvent en contact avec l’aiguille.
C’est en tenant compte de ces considérations que nous conseillons, pour introduire une aiguille, de pincer le tégument avec le pouce et l’index de la main gauche pour obtuser sa sensibilité excessive, pendant que de la main droite on le pique avec l’instrument, quand celui-ci l’a traversé on l’enfonce lentement en lui imprimant un mouvement rotatoire. Par ce moyen, mieux que par tout autre, on pourra écarter les fibres et épargner les parties essentielles.
Maintenant que nous avons fait connaître les divers procédés employés pour implanter les aiguilles, il ne nous reste plus qu’à nous servir de leur concours pour l’introduction du fluide électrique dans les organes profonds. Pour arriver à ce but, il nous suffira d’observer rigoureusement les lois développées dans ce qui précède ; par ce moyen, nous ne nous livrerons pas à des descriptions qui, sans rendre le sujet plus complet, nous entraineraient à des répétitions. Cependant, nous devons le dire, s’il est un procédé capable de mettre à profit les propriétés chimiques d’un courant voltaïque, c’est, comme nous l’apprendront quelques pathologiques, la galvano-puncture.
La première chose à faire c’est d’interrompre le cours du sang dans la tumeur anévrysmale au moyen de la compression ; on introduit ensuite l’aiguille prolongeant le pôle positif dans son centre et l’autre au voisinage ; le courant étant établi, l’on prolonge son administration pendant deux ou trois minutes. Peu de temps après (dix à douze minutes) on s’aperçoit par le taxis que la poche est plus consistante, qu’elle renferme des corps résistant assez à la pression que les doigts leur font subir. Enfin le sang se coagule comme le blanc d’œuf soumis à l’influence d’un courant et la guérison ne se fait pas longtemps attendre.
Le Dr. Labaume, M. Pétrequin de Lyon et beaucoup d’autres se sont occupés du traitement de l’hydrocèle par la galvano-puncture. M. J. Guittard, il y a peu de jours encore, a communiqué à plusieurs sociétés savantes un mémoire dans lequel il passe en revue un grand nombre de cas de guérison après peu de jours de traitement. M. J. Guittard implante les deux aiguilles dans la tumeur et établit un courant d’intensité variable. Il est de remarque qu’après la première administration la tumeur diminue considérablement en laissant le plus souvent un épanchement d’aucune importance dans le tissu cellulaire sous-scrotal.
Ces résultats connus, il nous semble juste de croire que par ce procédé on pourrait obtenir la cure des tumeurs érectiles ; de plus, comme M. J. Guittard le fait observer, le fluide galvanique pourrait aussi rendre de grands services dans les hydropisies articulaires, tendineuses, etc.
La médecine vétérinaire compte deux observations dues à M. Caussé et que nous nous faisons un devoir de mentionner.
1er Cas — Une jument atteinte d’une paralysie traumatique de tout le côté gauche de la tête. La saignée, des frictions mercurielles et de noix vomique, tout a été vain ; trente jours après l’accident, M. Caussé se décida d’employer la galvano-puncture et au bout de quinze jours la guérison fut complète.
2e Cas — C’était une jument de quinze ans en proie avec un vertige abdominal. Une petite incision fut pratiquée dans la gouttière œsophagienne et l’autre aux parois abdominales ; dans les solutions de continuité on introduisit les deux aiguilles pour fermer le courant ; des contractions péristaltiques provoquèrent le rejet de matières demi-fluides d’abord et plus tard sanguinolentes. Le lendemain la sensibilité fut rétablie.
On désigne ainsi l’opération qui a pour but de faire agir sur l’organisme un courant d’induction.
La faradisation date de peu de temps, elle est très-employée de nos jours contre toutes les maladies nerveuses,
quand on veut rappeler la vitalité dans une partie engourdie. Cette propriété trouve son explication dans les effets physiologiques déjà développés.
Pour passer au procédé opératoire nous faisons appel à tout ce que nous avons dit à propos de l’administration des courants en général et du galvanisme en particulier ; ainsi les excitateurs offrent les mêmes modifications, les parties mises en contact avec eux doivent subir les mêmes préparations, etc.
Un grand nombre d’appareils ont été mis en usage ; ils sont tous assez compliqués et d’un prix élevé ; ce qui nous explique pourquoi nos praticiens délaissent un traitement qui pourrait dans bien des cas leur être d’une grande utilité.
Aux vétérinaires qui voudront avoir recours à cet agent, nous pouvons conseiller l’appareil de M. Bianchi. Cet instrument est modificatoire de l’appareil de M. Duchenne, il se recommande par son petit volume, sa commodité et son prix relativement minime, 45 fr. Son énergie assez considérable peut être augmentée en introduisant dans la bobine des barreaux de fer doux destinés à cet effet. On peut graduer à volonté l’intensité du courant et l’employer pour les grands comme pour les petits animaux. Pour faire fonctionner cet appareil il suffit du concours d’une pile.
Les éléments de Bunsen sont d’un prix minime ; mais ils offrent l’inconvénient de s’user très-vite ; de plus il faut une nouvelle quantité d’acide toutes les fois qu’on veut renouveler une séance, ce qui occasionne de nouvelles dépenses et une perte de temps. Pour obvier à ces inconvénients nous ne saurions trop conseiller la pile au bichromate de potasse ; elle offre une commodité qu’on ne trouve pas dans la première ; elle est si ingénieusement construite que pour la faire fonctionner ou pour interrompre son action, il suffit de descendre ou de monter à l’aide d’un curseur la plaque de zinc ; quand elle est descendue elle plonge dans la solution et la pile fonctionne, si on la retire le liquide ne mouille que le charbon et il n’y a pas production d’électricité.
La solution qui l’active peut se conserver indéfiniment ; nous allons donner sa composition[4].
On nous fera grâce, nous l’espérons, de la description de l’appareil de M. Bianchi, notre cadre ne nous permettant que de le mentionner.
Nous nous dispenserons encore d’énumérer les maladies qui ont été guéries par les courants induits continus ou intermittents, en pensant que le praticien trouvera dans ce que nous avons dit, toutes les indications qui pourront lui être nécessaires.
Nous allons pour terminer notre travail passer en revue quelques observations faites dans notre médecine.
Les deux cas que nous avons à citer se rapportent à deux paraplégiques de l’espèce canine.
Une chienne havanaise âgée de trois ans chez laquelle la paralysie débuta par des prodromes qui furent aperçus par sa propriétaire comme nous le prouvent les renseignements fournis au Cabinet de Clinique de l’École. « La marche était incertaine, quand l’animal sautait pour recevoir mes caresses, les membres postérieurs fléchissaient et il retombait sur le sol comme une masse lourde ; je l’ai gardé pendant quatre jours dans cet état et ce n’est que quand j’ai aperçu une aggravation toujours croissante que je me suis décidée à le conduire à l’École pour lui faire prodiguer tous les soins nécessaires. »
Arrivé dans les infirmeries, le sujet fut confié à nos soins ; à la visite du matin, M. Lafosse constate tous les symptômes d’une paraplégie essentielle et ordonne la faradisation de la colonne vertébrale, des membres postérieurs. Le traitement, prescrit par M. le Professeur, fut par nous scrupuleusement exécuté ; tous les jours, de concours avec notre ami et condisciple M. J. Pons, nous soumettions l’animal à un courant interrompu ; les séances duraient pendant trois minutes. Sept jours se passèrent ainsi sans constater la moindre amélioration ; alors M. Lafosse ordonne de prolonger les séances de deux minutes et de les répéter deux fois dans les 24 heures ; huit jours après cette modification, l’animal fut guéri.
Le second malade fut soumis à la même médication ; les résultats semblaient aller au comble de nos désirs, lorsque le sujet fut attaqué par une pneumonie aiguë qui ne tarda pas à lui donner la mort.
Les résultats obtenus jusqu’ici dans notre médecine par l’emploi du fluide électrique quoique peu nombreux sont assez satisfaisants pour nous prouver combien il serait avantageux de recourir à ce genre de traitement un peu négligé par nos praticiens. Qu’on ne lui accorde pas de prime abord toute la confiance que possèdent les médicaments qui ont fait leurs preuves entre les mains des sages praticiens, cela nous paraît tout-à-fait naturel et ne doit pas souffrir la moindre réflexion de notre part. Mais au moins ayons-y recours dans des cas désespérés et peut-être par les bons effets qu’il produira finira-t-il par occuper le premier rang parmi les meilleurs agents thérapeutiques.
- ↑ Deux substances hétérogènes quelconques, mises en contact, se constituent toujours, l’une à l’état positif, l’autre à l’état négatif.
- ↑ Traité de pathologie vétérinaire de M. Lafosse. Tome I page 2
- ↑ Ce phénomène sera plus tangible si l’on emploie le courant provenant d’une pile.
- ↑
P. Bichromate de potasse 100 gr. Eau 1000 gr. Faites bouillir l’eau, ajoutez le bichromate de potasse pulvérisé et 50 g. d’acide sulfurique pour faciliter la solution.