Arc-en-ciel (Maurice Vaucaire)/4

La bibliothèque libre.
Alphonse Lemerre, éditeur (p. 7-8).

MYSTICISME


À J.-M. de Heredia.


Jai composé pendant la nuit une féerie
Pleine de soleils chauds et de décors criards,
De femmes en cheveux blonds et de grands brouillards
Descendant, soutenant toute une allégorie.
Sur des billets d’amour après avoir songé,
La tête appesantie et le corps allongé,
J’ai composé pendant la nuit une féerie.
· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
Ô belle Illusion, dans l’ensommeillement
De mon boudoir obscur tu dansas déguisée,

M’emplissant l’odorat de parfums et mimant
Quelque bouffonnerie étrange, improvisée !
Des instruments jouaient, graves, à l’unisson
Une extraordinaire et bruyante chanson.
Ô sainte Illusion, verte chinoiserie,
Car les arbres étaient d’un vert artificiel,
Ainsi les eaux, ainsi les gens, ainsi le ciel.
· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
Rêveur, annihilé, presque immatériel,
J’ai composé pendant la nuit une féerie.