Astronomie populaire (Arago)/XVII/12

La bibliothèque libre.
GIDE et J. BAUDRY (Tome 2p. 308-313).

CHAPITRE XII

des comètes intérieures


On appelle comètes intérieures les comètes dont l’aphélie, c’est-à-dire la plus grande distance au Soleil, se trouve en deçà de l’orbite de Neptune, la dernière planète connue du système solaire. Les comètes intérieures dont la périodicité est aujourd’hui hors de toute contestation, sont d’abord les comètes d’Encke (aphélie 4,09), de Faye (aphélie 5,93), de Gambart (aphélie 6,19), dont l’apparition a été constatée au moins deux fois. Il faut aussi placer parmi ces comètes, celle de Lexell (aphélie 5,73) dont nous avons signalé les perturbations singulières dans le chapitre précédent. Enfin, il est des comètes qui ont été visibles durant un temps assez long, pour qu’on ait pu constater que des éléments paraboliques ne pouvaient représenter complétement leur marche, et pour qu’on ait calculé avec assez de certitude des orbites elliptiques rendant compte de tous leurs mouvements, selon les principes que nous avons indiqués précédemment (ch. v). Ces comètes sont regardées comme étant périodiques, quoi qu’on ne les ait pas encore revues depuis leurs premières apparitions.

Parmi les comètes périodiques non retrouvées encore, dont la distance aphélie est plus petite que le demi-grand axe de l’orbite de Neptune, on doit mettre en première ligne celles de Vico, Brorsen, d’Arrest et Peters.

La comète qui porte le n° 166 dans notre catalogue a été découverte à Rome, le 22 août 1844, par le père Vico. Pendant quelques jours du mois de septembre, elle a été visible à l’œil nu ; elle était de l’intensité des étoiles de 6e grandeur ; le noyau, dans les instruments grossissants, apparaissait circulaire et très-bien déterminé ; une courte queue de teinte bleuâtre s’étendait dans la direction opposée au Soleil. Les calculs de MM. Paye, Brunnow, Le Verrier, démontrèrent que les observations ne pouvaient être représentées que par un orbite elliptique, dont les éléments qui complètent ceux du catalogue sont les suivants :

Demi grand axe 
 3,1028
Distance aphélie 
 5,0192
Excentricité 
 0,6176

Durée de la révolution : 1 998 jours, ou 5ans,47.

Le retour qui devait avoir lieu en 1850 n’a pas été constaté ; il est vrai que la comète devait se présenter dans une position peu favorable aux observations. Il n’en doit pas être de même pour le passage au périhélie qui aura lieu dans l’été de 1855 ; M. Brunnow a calculé qu’elle serait à sa plus petite distance du Soleil le 6 août. Dans le passé on n’a pas retrouvé d’apparitions tout à fait certaines de cette comète. Cependant les éléments de la comète de 1678 (n° 48 du catalogue), calculés d’après les observations de La Hire, pourraient bien s’accorder avec ceux de la comète découverte par le père Vico.

M. Brorsen, de l’Observatoire de Keil, en Danemark, a découvert le 26 février 1846 une comète télescopique (n° 173 du catalogue). Cette comète fut à sa plus petite distance de la Terre le 27 mars ; elle fut visible jusqu’au 22 avril ; elle apparut constamment comme une nébulosité, dans laquelle on ne put apercevoir ni noyau ni queue. Les calculs auxquels se livrèrent MM. Brunnow, Goujon et Hind ont montré que les positions observées ne pouvaient être représentées que par une ellipse, et que la comète devait avoir une courte période d’environ 5 ans et demi. En conséquence, cette comète devait revenir à son périhélie en 1851, mais elle ne fut pas aperçue. On devra la rechercher en 1857. Parmi les anciennes comètes celles de 1532 et de 1661 (nos 29 et 42 du catalogue) peuvent être regardées comme ayant des orbites assez semblables à celles de la comète de M. Brorsen, à cause des perturbations qui, durant un si long intervalle, ont dû modifier la marche de cet astre. Aux éléments du catalogue, nous ajouterons les suivants :

Demi grand axe 
 3,198
Distance aphélie 
 5,643
Excentricité 
 0,793

Durée de la révolution : 2 039 jours ou 5ans,58.

Le 27 juin 1851, M. d’Arrest a découvert à Leipzig une petite comète télescopique (n° 191 du catalogue), qui fut visible jusqu’en octobre. On s’aperçut sans difficulté que les observations ne pouvaient être représentées par une orbite parabolique, et qu’une ellipse seule s’accordait avec la marche du nouvel astre dont les éléments complémentaires de ceux donnés par le catalogue sont :

Demi grand axe 
 3,4618
Distance aphélie 
 5,7497
Excentricité 
 0,6609

Durée de la révolution : 2 353 jours ou 6ans,44.

Les éléments calculés ne s’accordent, même approximativement, avec aucun de ceux des anciennes comètes.

Le 26 juin 1846, M. Peters a découvert à Naples une comète (n° 176 du catalogue) qui a été visible jusqu’au 21 juillet. Le calcul a montré que les observations pouvaient être représentées par une ellipse plus allongée que pour les comètes précédentes. Son grand axe serait de 6.32 et elle reviendrait après un intervalle de 16 ans environ.

La comète observée en février 1743 (n° 68 du catalogue) à Paris, Berlin, Vienne et Berlin, dans la Grande Ourse et le Lion, semble devoir être rangée, d’après les calculs de M. Glausen, parmi les comètes à courte période. La durée de sa révolution serait de 5ans,436 et son excentricité 0,721. On a cru voir dans cette comète une deuxième apparition de celle que Blanpain a découverte à Marseille, le 28 novembre 1819 (n° 135 du catalogue), et qui a été observée à Milan jusqu’au 25 janvier 1820. D’après les calculs de M. Encke, celle-ci aurait une durée de révolution de 4ans,810 et une excentricité de 0,687.

Messier a découvert à Paris, le 8 avril 1766 (n° 83 du catalogue), une comète qui a été aussi observée par La Nux, à l’île Bourbon. Burckhardt a calculé qu’elle devait avoir pour orbite une ellipse dont l’excentricité serait 0,864, et que sa révolution s’effectuait en 5ans,025. M. Clausen pense qu’elle est peut-être identique avec celle découverte le 21 juin 1819 par Pons, à Marseille (n°134 du catalogue), et qui a été observée jusqu’au 29 juillet. Les calculs de M. Encke assignent à cette comète une révolution de 5ans,618 et une excentricité de 0,755. L’attraction des planètes aurait apporté de grands changements dans le mouvement de cette comète entre les deux apparitions constatées.

Enfin la comète découverte à York, par Pigott, le 19 novembre 1783 (n°95 du catalogue), aurait, d’après les calculs de Burckhardt, une orbite elliptique dont l’excentricité serait de 0,6 et elle ferait sa révolution en 5 ans.

Des observations de chaque comète nouvelle, longtemps poursuivies et faites avec toute la précision que permettent les instruments actuels, donneront seules les moyens de résoudre la question de l’identité des comètes qui viendront s’inscrire chaque année dans le catalogue des comètes avec celles qu’on trouvera plus tard. Il y a là pour les jeunes astronomes un objet constant de recherches intéressantes.