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Au jardin de l’infante/Accompagnement

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Au jardin de l’infanteMercure de FranceŒuvres de Albert Samain, t. 1 (p. 27-28).

ACCOMPAGNEMENT

Tremble argenté, tilleul, bouleau…
La lune s’effeuille sur l’eau…


Comme de longs cheveux peignés au vent du soir,
L’odeur des nuits d’été parfume le lac noir.
Le grand lac parfumé brille comme un miroir.


La rame tombe et se relève,
Ma barque glisse dans le rêve.


Ma barque glisse dans le ciel
Sur le lac immatériel…



Des deux rames que je balance,
L’une est Langueur, l’autre est Silence.


En cadence, les yeux fermés,
Rame, ô mon cœur, ton indolence
À larges coups lents et pâmés.


Là-bas la lune écoute, accoudée au coteau,
Le silence qu’exhale en glissant le bateau…
Trois grands lis frais-coupés meurent sur mon manteau.


Vers tes lèvres, ô Nuit voluptueuse et pâle,
Est-ce leur âme, est-ce mon âme qui s’exhale ?
Cheveux des nuits d’argent peignés aux longs roseaux…


Comme la lune sur les eaux,
Comme la rame sur les flots,
Mon âme s’effeuille en sanglots !