Aux Mânes de Diderot/Notice préliminaire

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Aux Mânes de Diderot
Aux Mânes de Diderot, Texte établi par J. Assézat et M. TourneuxGarnierŒuvres complètes de Diderot, I (p. xi-xii).


NOTICE PRÉLIMINAIRE


Cet opuscule (36 pages in-12) est de Jacques-Henri Meister, écrivain fécond, né en Suisse le 6 août 1744, d’un père qui était pasteur de l’Église réformée. Meister fut secrétaire de Grimm et le suppléa souvent dans la rédaction de la Correspondance littéraire. Dans une note de sa main sur le feuillet de garde de l’exemplaire de cette Correspondance appartenant à la Bibliothèque de Zurich (édition Longchamps et Buisson, in-8o, 1813), il dit : « La Correspondance publiée sous le nom du baron de Grimm et de Diderot fut rédigée d’abord par l’abbé Raynal, ensuite par le baron de Grimm, enfin par H. Meister. Le travail de ce dernier commence à la page 430 du second volume de la seconde partie (mars 1773) et va jusqu’à la fin du cinquième volume de la troisième et dernière année (1790). » Dans une lettre à Suard, datée du 27 juillet 1812 et publiée par M. Ch. Nisard dans son volume intitulé Mémoires et Correspondances historiques et littéraires inédits, 1726 à 1816 (Michel Lévy, 1858, in-12), il répète cette confession en ces termes : « Il n’y a peut-être pas dans ces cinq malheureux volumes (seconde partie de la Correspondance, publiée par Salgues en 1812) deux cents pages qui soient de M. Grimm. Le premier et les quatre cinquièmes du second, comme il est trop facile de s’en apercevoir, ont été principalement rédigés par Diderot. Hélas ! je suis en conscience plus ou moins coupable de tout le reste. »

On voit, par ce qui précède, que Meister avait vécu dans la familiarité de Diderot, avec lequel il était en collaboration régulière : c’est ce qui donne à ses regrets l’importance d’un document biographique.

Nous avons rétabli le titre primitif de sa brochure, quoique lui-même l’ait transformé en celui-ci : À la mémoire de Diderot, dans le tome II de ses Mélanges de philosophie, de morale et de littérature (Genève et Paris, 1822, 2 vol. in-8o). La première rédaction nous a semblé plus conforme à l’esprit du temps et au ton qui règne dans le morceau.

Nous avons profité de l’occasion pour rétablir en même temps l’épigraphe et la date ; la première a été oubliée dans l’édition des Œuvres de Diderot, donnée chez M. Brière en 1821 ; on a indiqué pour la seconde l’époque présumée où le morceau a été écrit.

Puisque nous touchons à ce point important de la correction du texte, nous signalerons deux autres fautes. Meister dit de Diderot : « Timide et maladroit pour son compte, il ne l’était presque jamais pour celui des autres. » Le mot presque, qui a sa valeur, a disparu dans la réimpression. Dans l’édition originale de son opuscule, Meister cite en note trois extraits des Mémoires de la fille de Diderot sur son père et les indique comme tirés d’un manuscrit de Madame de V. Dans sa propre édition de 1822, comme dans celle de M. Brière, ces mêmes notes réunies en une seule sont portées, à tort, au compte de M. de Vandeul Diderot.

Ce morceau a été imprimé en entier dans la Correspondance de Grimm et en tête de la première édition de Jacques le Fataliste (Buisson, l’an cinquième de la République). M. Depping, dans la Notice qui accompagne le Supplément aux Œuvres de Diderot, publiées chez Belin en 1818, dit que « les qualités du cœur et de l’esprit de Diderot y sont parfaitement appréciées et sans aucune exagération. »

C’est à ce titre qu’il nous a paru propre à servir, avec les Mémoires de Mme de Vandeul, de préface naturelle à l’œuvre du philosophe.