BAnQ/Émeutes de Québec de 1918/Témoignage d’Émile Trudel, chef de la Police municipale

La bibliothèque libre.
Émeutes de Québec de 1918 - Témoignage d’Émile Trudel, chef de la Police municipale
(p. 1-45).

Témoignage d’Émile Trudel, chef de la Police municipale[1]


Émile Trudel.


ÉMILE TRUDEL, de la Cité de Québec, Chef de la Police Municipale,
étant dûment assermenté sur les Saints Évangiles dépose ainsi qu’il suit :
INTERROGÉ par le Coroner.


Q. Vous êtes le Chef de la Police Municipale de Québec n’est-ce-pas ?


R. Oui Monsieur.


Q. Voulez-vous dire aux Jurés, M. Trudel, ce qui s’est passé à votre connaissance et quels sont les moyens que vous avez pris pour réprimer l’émeute de Québec à partir de jeudi dernier jusqu’à lundi soir, quant à ce qui vous concerne comme Chef de Police de Québec ?


R. M. le Coroner, si vous voulez me permettre, je pourrais peut-être lire les notes qui se rapporte à cela.


Q. Je n’ai pas d’objection à ce que vous référeriez à vos notes.


R. Ensuite je suis à la disposition de la Cour pour toutes les questions qui pourront m’être posées.


Mtre. F. O. Drouin. – Sont-ce des notes prises au jour le jour ?


R. Ce sont les notes des faits qui existent depuis jeudi soir.


Le Major Barclay. – Quand avez-vous pris ces notes là ?


R. Au fur et à mesure.


Le Major Barclay. – C’est correct.


Mtre. F. O. Drouin. – Pour l’affaire de jeudi l’avez-vous préparé tout de suite ?


R. Tout de suite, le lendemain.


Le témoin donne alors lecture de son rapport comme suit :


Québec, 3 avril, 1918. À Son Honneur le Maire de Québec. RE TUMULTE À ST ROCH, JEUDI SOIR, 28 MARS, 1918.


Peu après neuf heures, le soir du 28 mars dernier, j’ai reçu un téléphone du Capitaine Desrochers, Inspecteur de la Police Fédérale, m’informant qu’il y a deux de ses hommes de mal pris au Poste No 3, situé sur la rue St. François Place Jacques Cartier, à St. Roch. Comme je me trouvais à portée, j’ai rejoint le Capitaine Desrochers en moins de cinq minutes et nous nous sommes rendus immédiatement sur les lieux en voiture. J’ai fait donner l’alarme aux autres postes. Nous avons trouvé le poste entouré d’une couple de mille personnes. Le Capitaine Desrochers est entré dans la station ; moi, je suis resté au dehors pour chercher à apaiser la foule avec les quelques hommes de police que nous avions à ce poste. À ce moment les projectiles commençaient à pleuvoir au-dessus de nos têtes, brisant les carreaux de la station. La foule grossissait constamment ; les offices religieux qui avaient qui avaient eu lieu ce soir là venaient de finir et les curieux affluaient, comprenant des hommes et des femmes de toutes classes qui formaient un rempart entre la station et les manifestants.


Pour l’explication il y avait une élévation sur la Place Jacques Cartier. Les manifestants semblaient être sur cette élévation. C’est pour ça que je dis que les citoyens formaient une sorte de rempart entre la station et les manifestants.


« Aidée des hommes venus des autres stations, nous avons réussi à refouler les gens à une certaine distance.


J’ai alors dit au sergent Léterte qui avait charge du Poste No 3 d’aller dire au Capitaine Desrochers que nous pouvions former une escouade pour les aider à sortir du poste sans courir de danger. Le sergent me fit rapport que le capitaine avait répondu qu’il était bien là et qu’il y restait. Peu après la foule se chiffrait à quatre ou cinq mille personnes qui remplissaient la Place Jacques Cartier. Je suis entré dans la station où le Capitaine Desrochers était à téléphoner au Général Landry qui me répondit qu’il fallait pour cela un écrit du Maire. Je lui répondis que nous ne pouvions pas laisser le poste pour remplir cette formalité et que l’hostilité de la foule était telle que les débris nous tombaient sur les épaules. J’avais aperçu dans la station des officiers de la Police Fédérale que je connais bien personnellement, comme le Major Éventurel, Plamondon et quelques autres. Je n’ai pas vu d’abord Bélanger qui se trouvait en arrière.


J’ai alors appelé le chef de la brigade du feu pour faire sonner une alarme croyant que les pompiers pourraient nous aider à nous tirer d’affaires.


Dans l’excitation causée par l’arrivée des pompiers, j’ai dit aux gens qui étaient dans la station que c’était le temps de chercher à sortir, mais ils ne voulurent pas. Comme ce moyen n’avait pas réussi, j’en ai cherché un autre. Je sortis pour essayer de faire une charge dans la foule en rassemblant les hommes que j’avais à ma disposition, mais je reçus aussitôt un morceau de glace sur les épaules et je constatai que les manifestants se tenaient en arrière de la foule où il était pratiquement impossible de les atteindre. Nous courrions risque de nous voir débordés et de voir quelques uns des manifestants atteindre les officiers fédéraux auxquels ils voulaient faire un mauvais parti. On entendait des gens dire : « On va lyncher Bélanger ». Ma seule préoccupation était de sauver leur vie.


Le constable Jobin m’ayant dit qu’il y avait moyen de trouver une issue chez le voisin en défonçant la cloison de la cave, je l’envoyai tenter de mettre ce projet à exécution. Il fut assez grièvement blessé à la figure mais me fit rapport que les agents avait réussi à se réfugier dans la cave.


À ce moment le Maire arriva en voiture, avec l’échevin Lesage, et traversa la foule ; près de la station, le Maire adressa la parole aux gens.


Mais une fois l’automobile partie, la foule devint encore plus agitée, et nous fûmes complètement débordés. J’étais convaincu alors que les hommes de la police avaient réussi à se mettre en sûreté en passant par la cave, à l’exception du Capitaine Desrochers qui avait été secouru par d’anciens compagnons de milice, non toutefois sans avoir été blessé légèrement. La station était vidée, la foule se divisa en deux groupes dont un se dirigea vers la rue Dorchester, et l’autre prit la direction de la rue de la Couronne. J’entendis quelqu’un crier : « Il y en a un de pris au coin de la rue Dorchester » Je me dirigeai de ce côté mais presqu’aussitôt j’entendis dans l’autre direction ce cri : « On a accroché Bélanger dans les chars et ça l’a à moitie tué » Je me rendis sur la rue de la Couronne, en face de la résidence du Dr Fortier où un millier d’hommes étaient assemblés, criant : « S’il est blessé, on va le rachever » Pour apaiser l’excitation des gens, l’abbé Côté adressa la parole, ainsi que M. Létourneau M.P.P. Je m’adressai aussi à la foule en lui disant : « Dans tout pays civilisé on respecte l’ambulance ; respectez au moins les blessés ».


J’ai pu me faire écouté et le blessé est parti dans l’ambulance sans difficultés. Le sergent Léterte et deux constables étaient présents.


Comme vous le voyez, M. le Maire, ma première préoccupation a été de sauver la vie des agents de la police fédérale qui étaient en danger et nous ne pouvions pas tirer sur la foule. Je crois que si j’avais eu au début le service d’un corps de garde, tout le trouble aurait été évité. Il ne m’appartient pas de faire de commentaires sur les causes de cet incident déclenché d’une façon si spontanée. Je suis demeuré constamment avec les officiers fédéraux qui étaient en danger et je crois avoir fait mon devoir.


Québec, 5 avril, 1918. À Son Honneur le Maire de Québec.


J’ai l’honneur de vous transmettre le rapport suivant des faits qui se sont passés après l’échauffourée du poste No 3 jeudi, le 28 mars dernier, et au sujet de laquelle je vous ai déjà fait rapport.


Dans la matinée de vendredi, je vis le Capitaine Desrochers à mon bureau. Il portait des blessures à la figure. Nous avons causé des évènements de la veille. Je lui ai dit que c’était Bélanger que la foule disait vouloir « lyncher », et qu’elle voulait faire un mauvais parti aux autres officiers fédéraux et que c’était ce dont je me préoccupais pendant que nous étions tous les deux au téléphone, cherchant en vain à obtenir l’aide d’un piquet militaire. J’ai ajouté : « Il va falloir avoir une organisation pour obtenir un piquet militaire sur demande ; on ne peut savoir d’avance ce qui va se passer et de quel côté vont se diriger les manifestants ». Là-dessus le Capitaine Desrochers m’a dit : que la rumeur voulait qu’une démonstration ait lieu à l’Auditorium. Je lui fit savoir de mon côté, qu’on m’avait mentionné plusieurs autres endroits qu’il me fallait faire surveiller à la fois, mais je ne croyais pas qu’après l’échauffourée de la veille, ils recommenceraient, qu’en tous cas c’était aux officiers fédéraux qu’ils en voulaient. Je dis au Capitaine Desrochers : « Comment se fait-il que les autorités militaires ne font pas garder leurs bureaux ? : régistraire ammunition et autres ? » — Ceci est une conversation que j’avais avec le Capitaine Desrochers dans mon bureau dans l’avant-midi du vendredi.


J’avais fait la même remarque au régistraire M. Gobeil, le matin de vendredi, le 28 mars.


Le Capitaine Desrochers me répondit qu’il ne pouvait rien.


Le Capitaine Desrochers était le chef de la Police Militaire depuis deux ans ; ses hommes stationnaient avec les nôtres au poste central, à St. Roch et au Palais. Nous sommes amis et bataillons ensemble. Nous sommes partis du bureau ce soir là vers six heures. Mes ordres avaient été donnés au poste No 1. Je me rendis directement chez moi, laissant le Capitaine Desrochers au coin de la rue Ste. Geneviève en lui disant de me téléphoner s’il se produisait quelque chose.


J’avais à peine pris mon souper lorsque je fus appelé au téléphone par M. le Maire qui me demanda de me rendre chez lui. Demeurant à peu de distance je me rendis aussitôt. On m’appelait à cet endroit pour m’aviser que la foule se rendait à St. Roch. Je communiquai la chose au Maire qui me dit d’en informer le Général Landry. Je rejoins celui-ci à sa résidence et M. le Maire lui parla. Nous sommes allés ensuite aux Quartiers Généraux. Vous savez M. le Maire le temps qu’il nous a fallu et les difficultés que nous avons eues pour remplir les formalités nécessaires pour obtenir les gardes militaires, qui avaient été promis en cinq minutes et sur lesquelles je comptais. Je vous ai accompagné tout le temps et je suis revenu avec vous à votre résidence. Quant à mon service d’ordre, voici : le sergent du poste No 1 avait seize hommes avec lui et le sergent Welman est parti en premier avec une escouade de dix hommes, dès 7.17 heures, pour l’Auditorium où il devait procéder de la manière suivante : Placer quatre hommes en haut de l’escalier du bureau du Régistraire et ne laisser entrer qui que ce soit coûte que coûte, placer deux hommes en faction et le reste en réserve en arrière afin de ne pas attirer l’attention des curieux.


J’ai mentionné que ces ordres ont été donnés dès sept heures et quinze.


Cependant cela avait été suffisant pour attirer une foule d’hommes, de femmes et d’enfants qui étaient déjà à cet endroit lorsque les manifestants y sont arrivés. Ceux-ci se sont mêlés à la foule et un groupe de deux à trois cents continua vers le Chronicle ; nous les avons passés avec notre automobile en nous rendant chez le Général Landry. Tout était calme à l’Auditorium.


Les émeutiers s’étant divisés en deux groupes force fut aussi de diviser les escouades de police et d’en envoyer une dans la direction du Chronicle et de l’Évènement. Les manifestants revinrent à l’Auditorium et livrèrent l’assaut. Une alarme fut sonnée à 9.59 heures et nous n’avions encore reçu aucune aide de la milice au bureau du Régistraire et de la Police Fédérale bien que le rassemblement fut commencé depuis au-delà d’une heure et demie.

Voici le rapport assermenté que m’a fait le sergent Welman à ce sujet :

Québec, 4 avril, 1918.


Capitaine Emile Trudel,

Chef de Police,
Québec.


Cher Monsieur : —

RE TUMULTE À L’AUDITORIUM VENDREDI
LE 29 MARS.


Vers 7.15 heures, je suis parti du poste No 1 Hotel de Ville, en charge d’une escouade de dix hommes avec instructions de me rendre à l’Auditorium et de placer quatre hommes en haut de l’escalier et de ne laisser entrer personne coûte que coûte. À notre arrivée à l’Auditorium la porte était fermée à clef. J’ai mentionné la chose à M. Chs. Gagnon le gardien, que je connais personnellement. Celui-ci m’a dit qu’il avait reçu des ordres de fermer la porte à clef et de ne laisser entrer qui que ce soit. Alors j’ai téléphoné moi-même du kiosque des charretiers, au Capitaine Desrochers, Inspecteur de Police Fédérale, que j’avais vu au poste central Hotel de Ville, avant de partir. Le Capitaine Desrochers m’a répondu : « C’est une chose curieuse. » Je savais que la Police Fédérale du Capitaine Desrochers avait ses bureaux à l’Auditorium. Comme il n’y avait pas à ce moment plus de monde que d’habitude, et pour ne pas attrouper les curieux, je plaçai mes hommes en arrière à portée, pour tout évènement. Lorsque l’attroupement commença je dis au sergent de la police militaire de téléphoner de suite pour l’assistance militaire en cas de besoin. Il téléphona du kiosque des charretiers en face et revint me dire que c’était correct. Pour une deuxième fois, je lui ai dit d’appeler et je n’ai pas eu connaissance s’il a appelé. Dès le commencement du tumulte, j’ai aperçu un piquet militaire de sept à huit hommes au coin de la bâtisse.


Ceux-ci n’ont fait aucun mouvement. Nous nous sommes fait déborder à l’endroit que nous occupions. Si nous avions eu la moindre assistance, nous aurions réussi à disperser les manifestants.

Votre humble serviteur,
(Signé) Pierre Welman
Sergent de Police


Je, soussigné étant dûment assermenté sur les Saints Évangiles, déclare que les faits relatés ci-dessus sont consciencieusement vrais. Et j’ai signé

(Signé) Pierre Welman
Sergent de Police

Déclaré devant lui ce quatrième jour d’avril 1918

J. E. Chapleau,
Commissaire de la Cour Supérieure du
District du Québec.


Est-ce que je n’étais pas justifiable de présumer que le Capitaine Desrochers avait prévu un arrangement quelconque pour nous faire ouvrir les portes ou donner des ordres à la Police Militaire puisqu’il était si convaincu qu’il y aurait non seulement une démonstration mais des hostilités ? N’étais-je pas justifiable d’escompter l’arrivée d’un détachement militaire après que vous m’aviez dit que le Général Landry, sur votre demande, m’enverrait les militaires en moins de cinq minutes d’avis. Nous les avons obtenus qu’après une heure et demie après notre première demande par téléphone. Après l’échauffourée du poste No 3 toutes sortes de rumeurs ont circulé dans le public. On devait dévaster et incendier le Merger, les entrepôts, les magasins où il y avait des armes etc., sans compter les menaces de mort contre les citoyens haut placés. Chacun avait droit à un service de surveillance et de protection et il était impossible de mettre toute la force de police en devoir sans relève ; je n’avais que quatre vingt quinze hommes. Il était impossible aussi d’envoyer toutes nos forces à un endroit où l’on appréhendait des troubles et de laisser de la sorte le reste de la ville à la merci des manifestants.


Ces hommes ont été constamment en devoir jusqu’à deux heures du matin, laissant que pour quelques heures de repos.


Samedi nous avons fini par avoir l’aide de la milice, soit une garde de trois à quatre cents hommes. Cependant malgré ce nombre, nous avons encore été débordés et deux magasins ont eu des vitrines cassées.


M. le Maire, je déplore amèrement la situation qui nous est faite. Je n’ai pas à faire des commentaires sur la cause première, mais j’ai la satisfaction de n’avoir pas une perte de vie à enregistrer lorsque nous étions laissés seuls. Depuis samedi le trente mars, je suis en communication constante, jusque tard dans la nuit, avec le Bureau de la Milice. J’ai lieu de croire que le Colonel O’Meara est très satisfait du service de son département pour le rétablissement de l’ordre et de la paix dont nous étions si fiers à Québec.

J’ai l’honneur d’être,
Votre très humble serviteur.
Chef de Police.


À partir de samedi lorsque la Milice a pris charge et a patrouillé les rues, j’ai eu des ordres spéciaux de me tenir à la disposition du Bureau Militaire. Alors j’ai exécuté les ordres à la lettre. Toutes les trois minutes j’étais en correspondance pour la direction de la police municipale, le service de signalement, enfin toutes les instructions qui ont été données par les autorités militaires, tel que j’avais reçu les ordres à venir jusqu’à présent.


Q. Voulez-vous dire maintenant ce dont vous avez eu connaissance dans la journée du lundi ?


R. Comme je viens de le dire, lundi soir j’étais sous la direction du bureau militaire. J’avais le service de signalement pour connaître le mouvement des troupes et de la police municipale — des manifestants plutôt, et je signalais à toutes les trois minutes au Colonel O’Meara, mais je n’ai pas eu une connaissance personnelle en détail de ce qui a eu lieu au coin de la rue St. Valier.


Q. Ce que les jurés voudraient savoir c’est quelles précautions vous avez prises dimanche pour assurer la paix dans la journée de dimanche et de lundi ?


R. Est-ce le détail des ordres que j’ai reçus de la Milice ?


Q. Comment vous avez agi comme chef de police pour maintenir l’ordre soit seul avec vos hommes de police ou avec l’aide de la milice, les précautions que vous avez prises ?


R. Les précautions que j’ai prises — j’ai fait venir un piquet de mon service…


Q. Vous n’avez pas eu connaissance de tout ce qui s’est passé ?


R. Non.


Q. Où vous teniez-vous ?


R. Au Bureau du poste central, parce que j’avais à répondre à toute la ville à partir de St. Malo jusqu’à la Basse Ville.


Q. Vous vous teniez là par ordre de qui ?


R. J’avais ordre de me tenir là et de suivre les mouvements des manifestants et de faire un rapport à toutes les minutes au bureau de la Milice, et j’avais mon service naturellement, tous mes hommes étaient sur pieds, et j’avais des guides de différents endroits placés à la demande du Colonel O’Meara. Mon service d’ordres à partir de samedi soir a été placé à la demande des autorités militaires.


Q. Sous leur autorité ?


R. Sous l’autorité militaire, oui.


Q. Vous n’aviez à faire que de les informer, de les renseigner ?


R. Les renseigner sur tous les mouvements de la foule.


Q. Et de votre police ?


R. Oui. J’ai demandé au Colonel O’Meara si le service était satisfaisant et il m’a répondu qu’il était très satisfaisant. À partir de samedi il pourra me rendre le témoignage si cela est nécessaire que j’avais toute la police qui a été placée suivant les indications qui m’ont été données, parque que les militaires étaient censés patrouiller les rues.


Q. Vous avez mentionné tout à l’heure M. l’abbé Côté. C’est un des vicaires de la cure de St. Roch ?


R. Oui, il est venu sur les lieux jeudi soir. Il était dans la maison du Dr Fortier. Il est sorti et il a harangué la foule. Il a demandé à la foule d’écouter l’autorité religieuse… La foule s’est apaisée et M. l’Abbé lui a adressé la parole lui demandant d’être pacifique. Il avait un service religieux à faire et qu’il espérait que la foule l’écouterait. La foule à ce moment l’a écouté tel que je l’ai mentionné dans mon rapport. Alors cela a été fini à cet endroit là. On a embarqué le blessé dans l’ambulance et il n’a pas été faite aucune remarque, rien du tout, l’ambulance est partie et ça été fini pour ce soir là.

INTERROGÉ PAR M. Monaghan.


Q. Vendredi soir, devant l’Auditorium combien d’hommes M. le chef.


R. Vingt six hommes et les hommes de la garde ordinaire de la rue, ça fait vingt huit.


Q. Est-ce que les portes étaient fermées ?


R. Les portes étaient fermées avec l’ordre de ne laisser entrer qui que ce soit.


Q. À quelle heure est-ce que cette porte a été ouverte ?


R. Elle a été enfoncée je crois vers neuf heures et quart ou neuf heures et demie. Elle a été enfoncée par les manifestants, mais nous n’avons pas pu rentrer par la porte, elle était fermée à clef.

INTERROGÉ par Mtre. F. O. Drouin.


Q. Qui est-ce qui a remplacé M. Burke lorsqu’il a été blessé — Est-ce qu'il y avait un autre homme pour prendre sa place ?


R. Le sergent Welman qui était là en charge de l’escouade de dix hommes, dès le début dès sept heures et quart.


Q. M. Monaghan.- Maintenant un homme ou deux peuvent-ils empêcher que les hommes montent dans l’escalier, l’escalier était très étroit n'est-ce-pas ?


R. Oui mais la porte n’était pas ouverte. Ce n’est pas deux hommes qui sont arrivés mais deux à trois cents hommes. On nous a débordés. Mon programme était de mettre quatre hommes au dessus de l’escalier. Mon rapport l’a indiqué et de ne laisser monter qui que ce soit coûte que coûte, la porte était fermée, on n’a pas pu rentrer, je n’ai pas pu mettre ce plan à l’exécution. C’est rien que une heure et demie après que les manifestants sont arrivés en foule considérable.


Q. Le Maire a juré l’autre jour que vous lui aviez dit que vous aviez très bien organisé cela à l’Auditorium ?


R. Oui.


R. Le Maire a juré ça ici l’autre jour. Le fait est mentionné dans mon rapport. L’organisation était là.


Q. Est-ce que vous voulez dire qu’ils ne pouvaient pas empêcher cent ou deux cents petits garçons d’entrer ?


R. Ils les auraient empêchés avec la force armée.


Q. Combien de ces hommes ont été blessés — Est-ce qu’ils ont fait un effort pour empêcher les garçons d’entrer ? Les témoignages nous disent qu’ils n’ont rien fait, que la police n’a pas fait leur devoir.


R. Il restait rien qu’une chose à faire, ç’aurait été de frapper à coups de bâtons ou bien en tirant du pistolet et comme la foule était mêlée, de femmes et d’enfants, c’est une chose que ne n’ai pas pu faire. Ensuite ils se sont trouvés tiraillés — une partie de ces constables ont été obligés de suivre la foule au Chronicle, et lorsqu’ils sont revenus la foule les a empêchés de revenir. Une partie était là pour empêcher les manifestants de lancer des projectiles qui auraient pu attraper les femmes et les enfants, alors les hommes de police disaient aux manifestants : Ne tirez pas, vous allez attraper du monde inoffensif.


Q. Il n’y a pas eu d’arrestation pendant tout ce temps là ?


R. Des noms ont été pris. Il y a eu plusieurs arrestations après. Mais dans ce moment là, dans une émeute il serait très difficile, cela ne s’est jamais fait nulle part, d’arrêter des individus séance tenante parce que cela nous empêchait de garantir la vie des citoyens, des spectateurs, contre les manifestants.


Q. Mais il y avait des cas où des petits garçons arrivaient avec des morceaux de glace et des morceaux de pierre, il n’a rien été fait contre cela ?


R. On a fait tout ce qu’il y avait à faire. Il n’y avait pas rien que des petits garçons. Pour assommer un homme de deux cent trente livres comme le détective Welsh je ne pense pas que ce soit un enfant qui ait fait ça.


Q. Dans tous les cas on a dit hier devant le magasin Martineau qu’un homme qui était le chef qui était le foreman devant le magasin opposé, a remarqué des petits garçons qui ôtaient une pièce de glace et jetaient la glace devant la fenêtre et a demandé la police et la police était là et elle n’a rien dit.


R. Cela se peut mais il n’y avait pas rien que des petits garçons qu’on avait à avoir soin. On en avait trois cents à avoir soin.


Q. Dans tous les cas c’est l’opinion du public partout que la police n’a pas fait leur devoir ?


R. Alors je vous ai mentionné cela dans mon rapport et je n’ai rien à retrancher du rapport que j’ai fait. Ils ne pouvaient pas faire plus. On m’avait promis — le Maire m’avait promis que dans cinq minutes j’aurais l’aide voulue. Ça a pris une heure et demi. Si j’avais eu la garde en temps rien ne serait arrivé de ces choses là.


Q. Vous n’avez pas pensé de demander la Home Guard ?


R. J’y ai bien pensé mais je n’ai pas pu trouver la tête ni personne d’eux autres.


Q. Chef, d’après ce que vous avez dit, à partir de samedi soir vous aviez reçu instructions de vous mettre à la disposition des autorités militaires ?


R. Oui Monsieur.


Q. Et de suivre leurs instructions et de vous rapporter ?


R. Oui.


Q. Et de faire ce qu’ils vous demandaient ?


R. Oui Monsieur.


Q. Et vous avez fait simplement cela à partir de samedi ?


R. J’ai exécuté les ordres tous les ordres tels qu’ils m’ont été indiqués par le Colonel O’Meara et le Colonel Acland, — à la lettre et à la minute. Je ne crois pas avoir manqué cinq minutes.


Q. À partir de samedi avez-vous fait quelque chose de votre initiative ou si simplement vous avez suivi les ordres ?


R. J’ai suivi toutes les instructions qui m’ont été données.

INTERROGÉ, par le Major Barclay.


Q. Dans quelle conversation avez-vous reçu instructions de suivre les instructions des Militaires ?


R. M. le Maire m’a dit qu’il avait vu les autorités militaires et que les militaires prenaient charge des rues avec quatre ou cinq cents hommes et de me rapporter au Colonel O’Meara et alors je me suis rapporté au Colonel O’Meara toutes les trois minutes à partir de samedi soir.


Q. Est-ce que vos hommes sont munis de bâtons ?


R. Oui.


Q. Et de revolvers ?


R. Oui.


Q. Est-ce qu’ils ont fait usage de leurs bâtons ou de leurs revolvers pour protéger la propriété de l’Auditorium vendredi soir.


R. Ils ne pouvaient pas.


Q. Pourquoi ?


R. Parce que ils étaient mêlés à la foule des manifestants, ils étaient à travers de sept à huit mille personnes.


Q. La foule de ceux qui ont défoncé les portes à l’Auditorium est-ce que c’était des femmes, des enfants et des vieux ?


R. Non c’était des hommes — il y avait des enfants aussi.


Q. Est-ce qu’il y a eu des coups de revolvers de tirés sur ces hommes là ?


R. On ne pouvait pas tirer des coups de revolvers parce que on aurait attrapé des gens dans la foule.


Q. Quels sont vos ordres dans une émeute comme ça pour protéger la vie et la propriété ?


R. C'est de batailler au meilleur de notre connaissance mais de ne pas tirer à peu près de manière à atteindre des gens inoffensifs.


Q. Même si vous ne pouvez pas apaiser l’émeute sans faire cela ?


R. C’est comme dans toute autre chose, lorsqu’il y a force majeure on ne peut pas se lancer dans ça.


Q. Je vous ai demandé pourquoi vos hommes sont munis de revolvers, est-ce que ce n’est pas pour tirer s’ils ne sont pas capables d'apaiser la foule sans tirer ?


R. Oui mais il faut savoir où est-ce qu’on tire.


Q. On tire sur les manifestants ?


R. Mais il n’y avait pas rien qu’eux, il n’y avait pas rien que les manifestants, il y avait la foule, il y avait des femmes et des enfants et tous les curieux mêlés sur le trottoir. On ne pouvait pas tirer à travers ça et attraper n’importe qui.


Q. C’est leur imprudence d’être là — n’est-il pas vrai que c’est la loi, si vous êtes incapable de faire retirer, de faire calmer ou apaiser une foule, que vous avez droit de tirer même s’il n’y a pas de vies en danger, mais simplement pour sauver la propriété ?


R. On peut toujours tirer, mais c’est plus prudent de ne pas tirer à peu près dans une foule de citoyens comme ça.


Q. Et vous avez pensé que ça serait mieux de laisser saccager l’Auditorium que de tirer sur la foule ?


R. Je n’avais pas le choix.


Q. Pourquoi ?


R. Pour l’Auditorium ou ailleurs.


Q. Pourquoi ?


R. Parce que je ne pouvais pas tirer sur la foule. Mes hommes avaient ordres de ne pas tirer sur la foule.


Q. Parce que vous avez préféré laisser saccager l’Auditorium au lieu de tirer sur la foule ?


R. Si j’avais pu faire rentrer mes hommes dans le haut de l’Auditorium, si j’avais eu affaire rien qu’aux manifestants comme dans une émeute ordinaire, eux aussi auraient chargé à bâton et à coups de feu.


Q. Comme chef policier vous dites que chaque fois dans une émeute il y a des curieux qui sont là pour regarder, vous ne pouvez pas tirer mais vous allez tout laisser faire pour sauver les curieux ?


R. Je vous demande pardon. Vendredi soir il n’était pas question d’une émeute. Il était question d’une démonstration hostile. C’est rien que le lendemain que c’est devenu une émeute.


Q. Quelle est votre définition de l’émeute ?


R. Un groupe de gens, de citoyens qui se révoltent pour une raison quelconque, tandis que dans une démonstration hostile tout le peuple s’y mêle. Il y en a quelques uns qui chantent, quelques uns qui crient, quelques uns font des démonstrations de protestation, mais ce n’est pas une émeute. La même chose a été faite au Poste No 3, c’est une démonstration hostile.


Q. Quand cette démonstration hostile commence à mettre le feu dans la ville, est-ce encore rien qu’une démonstration hostile ou si c’est une émeute ?


R. Ils n’ont pas commencé par mettre le feu. Le feu a pris à dix heures à l’Auditorium. Avec le nombre d’hommes que j’avais là je ne pouvais pas poursuivre la chose autrement.


Q. De sorte que vous étiez là, et au lieu de tirer sur la foule parmi laquelle il y avait des femmes et des enfants, vous les avez laissés saccager ?


R. J’ai dit que nous avions été débordés par les manifestants. Ce sont eux qui nous ont débordés qui ont saccagé l’Auditorium, qui ont mis le feu.


Q. En d’autres termes, la force civile ce soir là était incapable de faire face à la foule ?


R. Avec vingt cinq hommes on ne pouvait pas faire plus qu’avec cinq cents qui n’ont pas pu le faire.


Q. La démonstration hostile était très forte ?


R. Quand même nous aurions tiré des coups de feu, nous aurions été débordés quand même.


Q. Cette démonstration hostile était tellement forte que vous avez été débordés ?


R. Certainement.


Q. M. le Maire a dit que vous aviez voyagé avec lui dans son automobile et qu’en passant plusieurs fois quand vous avez passé à travers la foule, il vous a conseillé de descendre et de prendre charge de vos hommes. Vous lui avez dit qu’il y avait des choses plus importantes à faire. Alors voulez-vous dire à Messieurs les jurés quelles sont ces choses plus importantes que vous aviez à faire ?


R. J’étais en voiture avec le Maire, comme on avait promis que seulement sur un téléphone que nous aurions l’assistance des troupes, et du moment, comme je l’ai dit dans mon rapport que M. le Maire m’avait dit qu’à cinq minutes d’avis j’aurais l’assistance militaire, alors quand j’ai passé devant l’Auditorium la première fois tout était paisible parce que une partie de la foule continuait au Chronicle, et la principale affaire c’était d’avoir de l’aide en temps parce que la chose pouvait prendre des proportions, alors il s’agissait pour moi de remplir les formalités nécessaires.


Q. Est-ce que le Maire était incapable de faire cela sans votre assistance ?


R. Ça se peut. Ça je ne peux pas dire.


Q. Tout de même vous avez préféré rester dans l’auto avec le Maire ?


R. J’ai préféré aller au plus vite et avoir les secours en temps.


Q. Comme chef de police et gardien de la paix à Québec quand avez-vous à recourir à l’assistance militaire ?


R. Dans toutes circonstances…


Mtre Lavergne. Ce n’est pas au témoin à apprécier cela.


R. Je peux donner mon opinion là-dessus. Dans toutes circonstances il y a des choses en rapport avec la milice.


Q. Je vous demande quand vous avez recours à faire une demande aux militaires pour contrôler la populace et pour vous aider ?


R. Dans toutes circonstances où il y a eu des manifestations quelconque en rapport avec les autorités militaires j’ai demandé leur coopération et leur assistance. Par exemple lors du troisième centenaire, ensuite lorsque la guerre a été déclarée quant nous avions quatre ou cinq mille soldats en état d’ivresse dans nos rues, j’ai demandé l’assistance militaire qui m’a été accordée dans cinq minutes. J’avais parlé au Major Williams qui était Provost-Marshhal au camp de Valcartier et dans quelques minutes j’ai pu avoir les troupes. Dans ce cas-ci, dans les circonstances que je n’ai pas à discuter, j’ai donné mes informations d’un moment à l’autre et je croyais que les militaires devaient arriver pour se protéger eux-autres même.


Q. Je vous ai posé la question : Dans quelles circonstances demandez vous l’assistance militaire ?


R. Je vous ai répondu.


Q. Je demande à la personne qui est chargée de la paix à Québec quant elle est forcée d'appeler l’aide des militaires pour l’aider ?


R. Ce n’est pas rien que la question de demander des militaires. Dans tous les endroits du monde…


Q. Je ne vous demande pas ça. Je vous demande quand est-ce que vous devez appeler la milice pour vous aider ?


Le Coroner.- Évidement c’est lorsqu’il le juge à propos.


Le Major Barclay.- Non, la loi dit qu’on ne peut pas appeler la Milice rien que lorsque il y a du danger pour la vie et la propriété.


Mtre. Lavergne.- On ne fait pas la preuve de la loi par témoins.


Q. Maintenant vous vous rappelez l’attaque qui a été faite sur le magasin de Martineau ?


R. Oui Monsieur.


Q. Vous avez appelé encore la Milice pour vous aider ?


R. La Milice était chargée du service dans les rues.


Q. Ça c'était samedi ?


R. C'était samedi. Samedi, étant en devoir, je communiquais toutes les trois minutes, toutes les indications au Colonel O’Meara pour lui dire où se dirigeaient les manifestants. Alors j’ai téléphoné au Colonel O’Meara que les manifestants étaient dans la direction de la rue de la Couronne s’en allant à la Basse Ville. Il m’a répondu : Très bien. Alors il était censé d’avoir une compagnie du côté de chez Martineau.


Q. Vous avez téléphoné qu’on était en train de faire l’attaque sur le magasin de Martineau et d’envoyer les troupes tout de suite ?


R. Oui.


Q. N’est-ce-pas ?


R. Oui.


Q. Quels conseil avez-vous donnés à ces troupes ?


R. Je n’ai pas de conseils à donner aux troupes.


Q. N’est-il pas vrai qu’à l’officier que vous avez appelé sur le téléphone vous avez dit : Tirez dessus, tirez dessus, il n’y a pas moyen de les empêcher autrement.


R. Jamais de la vie. Jamais j’ai dit ça.


Q. Vous jurez ça positivement ?


R. Ce que j’ai dit à l’officier au téléphone de tirer dessus ? Je n’aurais jamais donné un ordre comme ça, de tirer dessus.

INTERROGÉ par Mtre. F. O. Drouin.


Q. M. Trudel j’ai compris qu’à l’Auditorium vous aviez dit que vous aviez vingt six hommes à la porte ?


R. Je n’avais pas vingt six hommes à la porte. J’avais vingt six hommes dans la foule pour empêcher les émeutiers de tirer et d’attraper la foule.


Q. Combien est-ce qu’il y en avait à la porte de l’Auditorium ?


R. Dix.


Q. Ces dix là ont-ils fait quelques tentatives pour empêcher les gens d’entrer dans l’Auditorium ?


R. Lorsque la foule arrive par trois ou quatre cents à la fois — ils ont fait leur possible mais ils se sont fait déborder.


Q. Combien y en a-t-il qui sont montés à l’Auditorium ?


R. Je ne sais pas.


Q. les constables ont-ils fait des tentatives pour les arrêter lorsqu’ils sont descendus de l’Auditorium ?


R. Ils ont fait tout ce qu’il y avait moyen de faire.


Q. Ils n’ont arrêté personne ?


R. Ils ont pris des noms, et des arrestations ont été faites en rapport avec les émeutes.


Q. Quand avez-vous fait les arrestations ?


R. Quelques jours après.


Q. Jeudi le vingt huit, avez-vous remarqué quelqu’uns parmi les manifestants ?


R. Oui.


Q. Les avez-vous fait arrêter ?


R. Oui.


Q. Quand ?


R. Je ne sais pas si c’est le lendemain ou quelques jours après. Il a fallu avoir des témoins. Ils ont comparu devant le Juge Langelier.


Q. N’est-il pas vrai que ce n’est que dans le courant de cette semaine que vous avez fait arrêter ceux qui avaient été reconnus, jeudi vendredi et samedi dernier ?


R. Au commencement de la semaine je crois. Ceux qui ont été reconnus pour l’affaire de l’Auditorium ont été arrêtés deux ou trois jours après.


Q. Ceux que vous avez reconnus jeudi le vingt huit mars, vous ne les avez pas fait arrêter le lendemain ?


R. Il fallait avoir des preuves spécifiques. Il fallait avoir des témoins.


Q. Avez-vous fait des recherches immédiatement le lendemain ?


R. Oui, les détectives ont fait des recherches immédiatement et ils sont venus à en arrêter trois ou quatre en rapport avec l’affaire du Poste No 3, et ils en ont d’autres à arrêter aussi.

Interrogé par Mtre. Lavergne.


Q. Qui est-ce qui vous a informé qu’il y aurait du trouble à l’Auditorium, quelle est la première rumeur que vous avez eue ?


R. C’est en causant avec le Capitaine Desrochers le vendredi après-midi.


Q. Est-ce que M. Gobeil vous en a parlé ?


R. Oui.


Q. Avez-vous informé M. Gobeil ? des mesures que vous prendriez ?


R. J’ai informé M. Gobeil que quant aux bureaux du Département Militaire il fallait de toute nécessité, vu le petit nombre d’hommes que j’avais, mettre sa propre garde là. J’avais toutes les propriétés de la ville à protéger aussi.


Q. Le Major Barclay. Contre des démonstrations hostiles ?


Mtre. Lavergne. — Contre des démonstrations ou contre les soldats ?


R. Contre tout le monde.


Q. Vous avez envoyé un détachement d’hommes à sept heures et quart ?


R. J’en ai envoyé dans la partie basse de la ville autour du Merger.


Q. Restaient-ils à l’Auditorium ?


R. C’est pourquoi je n’ai pas mis plus d’hommes à l’Auditorium, parce que autour du Merger il y avait un millier d’hommes qui auraient pu faire un mauvais parti aux militaires.


Q. Vous avez envoyé dix hommes à l’Auditorium ?


R. Au commencement de tout, avant qu’il n’y ait rien du tout.


Q. À part de ça vous aviez seize hommes et les deux hommes du peloton ordinaire ?


R. Pour les mettre dans la foule, pour empêcher les gars de tirer à peu près dans la foule et attraper les spectateurs


Q. À part de ça deux hommes de police ordinaire pour la circulation ?


R. Oui.


Q. Le vingt huit ?


R. Oui.


Q. Le détachement de dix hommes était sous le commandement de qui ?


R. Le lieutenant Burke, du sous chef Burke et du sergent Welman.


Q. Le sous chef Burke était en commandement de quoi ?


R. Le sous chef a la surveillance générale, il n’était pas chargé particulièrement — il voyait comment les hommes étaient placés.


Q. Quand Welman est arrivé à l’Auditorium il a constaté que les portes étaient fermées ?


R. Il a constaté que la porte était fermée à clef.


Q. Est-ce à votre connaissance ou vous a-t-il fait rapport qu’il a fait de démarcher pour avoir la clef ?


R. Je l’ai questionné et il m’a fait rapport par écrit et par affidavits qu’il avait fait des démarches pour avoir la clef — il a fait des démarches pour avoir l’assistance militaire enfin …

Q. À qui s’est-il adressé pour avoir la clef ?

R. Il s’est adressé au gardien M. Charles Gagnon.

Q. On le lui a refusé ?

R. Il la lui a refusé, il a dit que les ordres étaient de ne laisser entrer personne. Ce n’est pas à nous autres l’édifice.

Q. Votre plan de campagne était de mettre deux hommes dans l’escalier pour empêcher les manifestants de monter ?

R. Oui.

Q. Vous n’avez pas pu réaliser ce plan là ?

R. Non.

Q. Après ça les choses se sont apaisées et ensuite il y a eu une attaque plus tard ?

R. Plus tard. Les manifestants sont allés au Chronicle avant et à l’Évènement. C’est ça qui a fait diviser notre police.

Q. Ensuite ils sont revenus devant l’Auditorium ?

R. Oui.

Q. Quel était le nombre de la foule qui était là ?

R. Bien, six à sept mille, cinq à six mille, parque toute le carré était rempli, jusqu’au marché Montcalm et il y avait des manifestants près du Marché Montcalm.

Q. Il y avait une foule énorme ?

R. Oui.

Q. Composée d’hommes de femmes et d’enfants ?


R. Oui d’hommes de femmes et d’enfants comme je le mentionne dans mon rapport. C’était à la sortie des exercices religieux. Tout le monde s’en venait.


Q. Comme on avait refusé d’ouvrir les portes à la police, vos hommes se sont trouvés sur le trottoir ?


R. Oui.


Q. Mêlés à la foule ?


R. Mêlés à la foule.


Q. Ils ne pouvaient pas se tenir dans l’escalier ?


R. Non.


Q. Alors les manifestants ont fait leur assaut et vous avez été débordés immédiatement ?


R. Oui.


Q. C’est ça qui est arrivé ?


R. Oui.


Q. Si la porte avait été ouverte, vos hommes de police auraient pu se tenir dans l’escalier qui est très étroit ?


R. Oui, et ils les auraient empêché coûte que coûte comme je l’ai dit, à bâton ou à revolvers n’importe quoi, parce que là ils auraient eu affaire rien qu’aux manifestants. Dans la foule on ne peut pas faire ça.


Q. Vous aviez le choix entre laisser dévaster l’Auditorium et tirer dans la foule où il y avait aussi une foule de femmes et d’enfants ?


R. Oui.


Q. Et comme le dit Mtre. Barclay, comme vos fonctions sont de protéger la vie et la propriété, vous avez préféré protéger la vie en sacrifiant un peu la propriété ?


R. Oui certainement parce qu’on peut rebâtir une propriété mais vous ne pouvez pas rebâtir une personne.


Q. Vos hommes n’avaient pas de mitrailleuses ?


R. Non


Q. Maintenant dimanche après-midi étiez vous à St. Roch lorsqu’il y a eu une attaque sur le magasin de M. Young ?


R. Non mais j’ai été renseigné tout de suite parce que j’avais un service de signalement. On m’a dit qu’il y avait deux ou trois mille personnes.


Q. Y a-t-il eu une attaque du magasin de Young ?


R. Pas une attaque du magasin de Young mais on a attaqué la colonne qui était allée chercher les munitions.


Q. Vous n’étiez pas là ?


R. Non.


Q. Savez-vous s’il y avait là vos hommes ?


R. Il y avait la garde du poste No 3.


Q. Savez-vous son nom ?


R. Je n’ai pas le nom tout de suite là mais je pourrai l’avoir. — entre autres il y avait le détective Lacasse. Maintenant je dois ajouter ceci, parce que ceci peut intéresser Messieurs les Jurés. Pour protéger la propriété c’est moi-même qui avait donné avis par l’entremise de mes hommes d’abord, à tous les marchands de fer de la ville, d’avoir à évacuer tout ce qui pouvait attirer les manifestants, les armes etc. et c’est quelques jours après que les militaires ont pris la même initiative avec leur voitures pour aller là, mais les marchands de fer avaient déjà été avertis par ma police.


Q. Dimanche soir où étiez-vous ?


R. J’étais au Bureau de direction, au poste central.


Q. D’après les rapports de la nuit de dimanche, depuis dix heures dimanche soir jusqu’à lundi matin verts sept et huit heures est-ce que la nuit a été paisible ?


R. Je n’ai pas ça en mémoire. On se proposait d’aller à la Basse Ville et c’est justement par notre direction que les manifestants ont été presque cernés au moment où ils sont arrivés sur la place.


Q. Et ils sont retournés ?


R. C’est par les communications que j’avais avec le Colonel O’Meara.


Q. Depuis dix heures ce soir là vos rapports sont que la nuit a été paisible ?


R. Oui paisible après ça.


Q. Savez-vous si les troupes se sont retirées de la ville vers minuit et demi ou une heure ?


R. Je sais qu’un piquet est resté. Je ne connais pas les mouvements des militaires mais mes hommes à moi sont restés en faction jusqu’à une heure. Quant aux militaires, je ne connais pas leur mouvements, les ordres qu’ils ont reçus.


Q. Vous savez que la nuit a été paisible ?


R. Je sais que la nuit a été paisible dimanche soir après ça.

INTERROGÉ par le Major Barclay.


J’avais oublié une question. Est-ce que vous aviez reçu des appels de la part des citoyens, d’autres personnes à Québec, pour leur donner protection ?


R. De tous les marchands de fer et d’autres personnes aussi.


Q. Combien en avez-vous reçu comme ça ?


R. On m’a demandé de protéger les directeurs d’un journal.


Mtre. Lavergne. Ceux là ce sont des marchands d’opinion ?


Mtre. Barclay.- Les marchands d’opinion sont mieux que les vendeurs d’opinion n’est-ce pas ?


R. Mtre. Lavergne. Moi je n’ai pas à exprimer mon opinion ni d’une façon ni de l’autre.


R. Alors je me suis rendu à la demande de nos citoyens. À partir de samedi lorsque j’ai été au poste central, avec les forces que j’avais en mains, je me suis rendu à la demande de tous les citoyens.


Q. Combien d’appels avez-vous reçus — avez-vous reçu ces appels ?


R. J’en ai reçu cinq cents.


Q. Ça veut dire que les personnes à Québec avaient crainte pour leur vie et leur propriétés ?


R. Une fois l’émeute déclenchée, ils avaient autant peur des soldats que des autres.


Q. Pourquoi ?


R. Parce que nous ne sommes pas habitués dans une ville paisible comme la nôtre d’avoir des troubles comme ça.


Q. Cependant vous les avez demandés dans le but de vous aider ?


R. de m’aider dans le début, vendredi, jeudi et vendredi, si j’avais eu un piquet ordinaire, un piquet comme j’ai eu dans le commencement de la guerre et en différents temps durant le Troisième Centenaire, j’aurais peut-être pu réussir.


Q. Vous étiez avec le Maire lorsqu’il a signé cet écrit-là ? — Vous êtes allé avec lui, voir aux choses importantes, comme vous dites, pendant l’émeute ?


R. J’ai été avec le Maire. J’ai tout fait pour arrêter l’émeute, pour empêcher la violence.


Q. Et, quand ce n’était pas dans le pouvoir des autorités civiles d’arrêter l’émeute, ou de l’empêcher, ou de lui faire face, ils ont fait appel à l’Officier du District pour prêter main-forte aux autorités civiles ?


R. Oui.


Q. Et vous dites que, votre propre monde, les marchands et les gens de Québec, vous aviez peur des soldats dans Québec ?


R. Je n’ai pas parlé de ma peur. Vous venez de lire l’Acte d’Émeute…


Q. Ce n’est pas l’Acte d’Émeute, c’est l’Acte signé par Monsieur le Maire et qui était tellement important qu’au lieu d’être en charge de vos hommes, pendant l’émeute, vous êtes allé chercher des signatures, loin de l’Émeute ?


R. …


Q. Interrogé par Mtre. Lavergne.


Q. Le piquet militaire ordinaire est composé de soldats du Huitième et du Neuvième ?


R. Oui.


Q. Ça fait une différence entre un piquet militaire, composé de gens de Québec que vous connaissez bien et qui connaissent bien la population, et un ramassis de troupes, qui viennent d’un peu partout ?


R. Oui, Monsieur.


Interrogé par le Coroner :


Q. Vous avez mentionné que vous aviez eu plusieurs demandes de protection ? Vous rappelez-vous quelques uns de ceux qui vous ont fait ces demandes ? … Vous rappelez-vous si une demande avait été faite d’envoyer la police chez un nommé Lecours, qui tient un petit magasin dans l’escalier de la Côte de la Couronne, et dont le magasin a été saccagé par la foule, lundi soir ?


R. Ça se peut, j’ai eu tant de téléphones et tant de demandes, — alors, je répondais qu’il y avait un service aussi complet que je pouvais en fournir par ma Police, et qu’il y avait la Garde Militaire et qu’il n’y avait pas de danger. Des demandes comme ça, j’en ai eu mille, — vous pouvez mettre deux mille aussi, — des demandes par téléphone, — on me téléphonait toutes les trois minutes, — jusqu’à trois heures du matin, il m’en est venu de tous les citoyens, — au travers, il y avait des demandes absolument ordinaires.


INTERROGÉ par le Major Barclay :


Q. Ils avaient peur de cette démonstration hostile ?


R. Hostile ou pas hostile, le peuple n’est pas habitué à se faire tirer dans les rues.


Q. On n’a pas tiré dans ce moment là ?


R. Non, mais enfin, le peuple n’était pas habitué à cela, et c’était naturel d’être alarmé.


Interrogé par MTRE. F. O. DROUIN :


Q. De combien de constables se compose la Police Municipale actuellement ?


R. À peu près quatre-vingt-dix. (90).


Q. Le vendredi soir, combien est-ce qu’il y en avait en garde en devoir ?


R. Quatre-vingt-six, je pense.


Q. Et la veille, le jeudi soir ?


R. La veille, le jeudi soir, c’était la garde ordinaire, la moitié.


Q. Dispersés un peu partout dans la ville ?


R. Oui.


Q. Maintenant, quand vous êtes passé avec le Maire, en automobile, près du Chronicle, était-ce dévasté dans ce temps-là ?


R. Il n’y avait rien du tout au Chronicle, la chose s’est faite pendant que nous étions dans le Bureau de Milice.


Q. Quand vous êtes revenu par la même direction, là, c’était dévasté ?


R. Après que ça été dévasté, nous sommes montés au devant des troupes, on a pris la rue Ste. Anne, on a pris la rue d’Auteuil, et nous sommes allés en bas du chemin de la Citadelle.


Q. Quand avez-vous rencontré le Maire ce soir-là, — à quelle heure êtes vous allé chez lui ?


R. Le Maire m’a téléphoné de me rendre chez lui et je me suis rendu immédiatement.


Q. Quelle heure était-il ?


R. Vers sept heures et trois quarts ou huit heures.


Q. À quelle heure l’avez vous laissé ?


R. À une heure après minuit, je pense.


Q. Vous êtes resté à votre bureau pendant ce temps-là ?


R. Je ne suis pas resté à mon bureau.


Q. Vous avez voyagé avec lui et, ensuite, vous êtes resté au bureau ?


R. Non, je suis resté avec le Maire.


Q. Vous avez voyagé dans la ville ?


R. On a voyagé dans la partie haute, on s’est occupé de notre affaire.


Q. Vous n’êtes pas allés à l’Auditorium du tout ?


R. Je suis allé à l’Auditorium avec les troupes.


Q. Lorsque vous êtes passé avec le Maire, vous n’êtes pas arrêté ?


R. Non, il n’y avait rien à l’Auditorium.


Q. Quand vous êtes passé la première fois, il n’y avait rien ?


R. Non.


Q. Quand vous êtes revenu, quelle heure était-il ?


R. Vers dix heures moins quart.


Q. Tout était fait dans le temps ?


R. Il y avait encore un rassemblement devant l’Auditorium, les pompiers étaient rendus. Quand nous sommes arrivés là avec l’armée, le Général Landry m’avait dit que je devais être avec le Maire, au moment où l’acte serait lu.


Q. Vous aviez peur que le Maire vous manque ?


R. Ce n’est pas la question, si j’avais peur ou pas peur, je mentionne le fait, et c’est tout.


INTERROGÉ par Mtre. Chapleau :


Q. Est-ce que c’est vous qui avez téléphoné au Général Landry, vendredi soir, lorsque le trouble a commencé, lorsque vous avez su qu’on menaçait de monter sur la Place de l’Auditorium ?


R. J’ai appelé le Général Landry, de la maison privée de


Q. Avez-vous passé par la rue St. Jean, en face de l’Auditorium, dans ce temps là ?


R. Non, en allant chercher les signatures, nous sommes passés, … oui, sur la rue St. Jean.


Q. Est-ce que, à ce moment-là, lorsque vous êtes passé sur la rue St. Jean, il y avait encore quelque chose à l’Auditorium, ou si c’était fini ?


R. On voyait la troupe dispersée, c’est au moment que ça avait lieu au Chronicle et à l’Évènement, et la foule marchait dans tous les sens, les manifestants marchaient dans différents sens.


Q. Lorsque vous êtes monté, la première fois, pour aller chez le Notaire Paradis, il n’y avait encore rien de fait à l’Auditorium ? — les portes n’étaient pas encore enfoncées, n’est-ce-pas ?


R. La première fois, je ne me rappelle pas, — non, ça n’était pas défoncé encore.


Q. Est-ce que c’est pendant que vous étiez chez le Général Landry que les dommages ont été faits au Chronicle ?


R. Pendant que nous étions chez le Général Landry, nous avons vû les manifestants, du Bureau du Général Landry.


Q. Jurez-vous positivement que, quand le Général Landry est arrivé, vous et le Maire, vous étiez au bureau ?


R. Certainement, je suis positif qu’on y était.


INTERROGÉ par le Major Barclay :


Q. Avez-vous discuté avec le Maire, pendant la journée, les formalités requises par la loi, pour demander l’assistance militaire.


R. Non, je n’avais aucune instruction à donner au Maire.


Q. Je vous demande pas ça, je vous demande si vous avez discuté la question ?


R. Non.


Q. En avez-vous parlé ?


R. J’ai mentionné au Maire que, dans les circonstances, il me faudrait un piquet militaire à ma disposition.


Q. Ce n’est pas cela que je vous demande. Est-ce que le Maire vous a parlé de la chose ?


R. De la formule, non.


Q. Ou de la réquisition qu’il allait faire ?


R. Non, il n’a pas été question de la formule, dans la journée.


Q. Et dans la soirée ?


R. Dans la soirée, lorsqu’on a demandé au Colonel, je pensais qu’on pouvait avoir la Milice dans cinq minutes ; je ne savais pas quelle formule remplir.


Q. Vous ne savez pas quand cette réquisition a été préparée ?


R. Non.


Q. Quand avez-vous su cela, — lorsque vous l’avez vu pour la première fois, où l’avez-vous vue ?


R. Dans le bureau du Colonel Landry.


Q. Elle avait été apportée par qui ?


R. Apportée par M. le Maire.


Q. C’est sorti de la poche de M. le Maire ?


R. Oui.


INTERROGÉ par MTRE. CHAPLEAU :


Q. Lorsque vous êtes revenu de chez le Notaire Paradis, qu’avez-vous constaté à l’Auditorium, en passant ? — Est-ce que, dans le temps, c’était défoncé pour pas défoncé ?


R. Je ne peux pas dire, on a passé au travers la foule en se hâtant, pour aller à notre assistance. Maire, dans les environs de huit heures.


Q. Maintenant, vous êtes descendu aux quartiers Généraux ?


R. Nous nous sommes rendus aux Quartiers Généraux, au bureau de Poste.


Q. Est-ce que le Général Landry était là ?


R. Non.


Q. Quand vous êtes descendu ?


R. Nous sommes arrivés au Bureau de Poste, à la porte d’en bas, et on nous a informés que l’élévateur était arrêté. Nous avons passé par en arrière dans la cour, et c’est un garçon du nom de Turcotte qui nous a guidés à travers les sacs de malles. Nous avons monté cinq escaliers et, rendus là, nous avons trouvé les messagers ou les opérateurs de téléphone. Nous sommes rentrés dans le bureau du Colonel Landry, et j’ai téléphoné de nouveau au Colonel Landry, de dans son bureau, avec son instrument téléphonique. J’ai demandé où était le Colonel Landry et, on m’a répondu à la maison, qu’il était en route pour son bureau, — le Général Landry, — et nous l’avons attendu.


Q. L’avez-vous attendu longtemps ?


R. On trouve toujours le temps long, — mais, quinze ou vingt minutes.


Q. Lorsqu’il est arrivé, étiez-vous là ?


R. J’étais là dans son bureau, avec le Maire.


Q. Maintenant, là, vous êtes retourné avec le Maire, pour avoir des signatures, n’est-ce-pas ?


R. Oui.


Q. Chez le Notaire Paradis ?


R. Oui.


INTERROGÉE par MTRE. LAVERGNE.


Q. Est-ce un piquet militaire que vous avez demandé, ou bien, la troupe ?


R. Je n’ai pas demandé la troupe, j’ai demandé l’assistance militaire, la même chose que j’ai toujours eue depuis quatorze ans, c’est-à-dire, une troupe de polices militaires.


Q. Une garde quelconque pour vous renforcer ?


R. …


INTERROGÉ PAR MTRE. CHAPLEAU :


Q. Avez-vous remarqué à ce moment-là, que les gens jetaient des papiers ou des documents par les châssis de l’Auditorium ?


R. Oui.


Q. Quand est-ce que c’était ?


R. C’était vers dix heures.


Q. Était-ce au moment où vous êtes descendu de chez le Notaire Paradis, ou avant ou après ?


R. C’est après.


Q. Le Coroner :- Étiez-vous encore après chercher des signatures pour la réquisition ?


R. On cherchait à remplir la formule, telle qu’exigée par le Colonel Landry.


Q. Le Major Barclay :


Q. Exigée par lui ou exigée par la Loi ?


R. …


Q. Comme gardien de la paix, vous devez le savoir ?


R. …


INTERROGE par Mtre. Chapleau.


Q. Êtes-vous retourné à l’Auditorium après être passé avec le Maire ?


R. Nous sommes retournés à l’Auditorium avec les troupes


Q. Quant vous êtes retourné avec les troupes, est-ce que à ce moment-là, les gens jetaient des papiers, des documents, par le châssis, ou si c’est la fois avant, que vous avez constaté cela ?


R. Lorsque je suis retourné, la Brigade du Feu était là, et la foule était à peu près dispersée — les manifestants étaient dispersés, il restait un groupe de curieux, comme à toutes les incendies.


Q. Vous n’avez pas constaté vous-même, ce soir-là, que les gens jetaient des documents par les châssis ?


R. Oui.


Q. Vous avez constaté cela ?


R. Oui.


Q. Est-ce que c’était en descendant avec le Maire, de chez le Notaire Paradis, ou si c’est la première fois que vous êtes passé devant l’Auditorium ?


R. Ça, je ne me rappelle pas. Je ne sais pas si c’est en allant ou en revenant.


Q. Combien avez vous passé de fois devant l’Auditorium ce soir-là ?


R. Deux fois. … … La première fois, il n’y avait rien du tout vers huit heures ? Il y avait un groupe, du monde qui criait.


Q. La deuxième fois ?


R. La deuxième fois, c’était vers neuf heures, neuf heures et demie, neuf heures et quart ou neuf heures et demie.


INTERROGÉ par le Major Barclay :


Q. Quand le Maire vous a demandé de descendre de l’auto, et de vous placer à l’Auditorium, pourquoi avez-vous refusé ?


R. Parce que je prévoyais un désordre tellement considérable, que c’est pour ça que je voulais avoir toutes les formules remplies.


Q. Vous avez eu des craintes de désordre, dans différentes parties de la ville ?


R. Bien, des craintes … c’était toujours la rumeur.


INTERROGÉ par Mtre. F. O. Drouin :


Q. Vous n’aviez pas besoin d’être deux pour faire signer cela ?


R. Ce n’est pas la question, s’il y avait besoin ou pas besoin, le Maire m’a demandé et je l’ai suivi.


Q. Le Maire pouvait lui faire signer tout seul ?


R. Ça se peut, — le Maire m’a demandé et je l’ai accompagné.


Q. INTERROGÉ PAR MR. MONAGHAN :


Q. À quelle heure votre garde de vingt-six hommes, est-elle arrivée devant l’Auditorium, — parce que je vous ai vû passer avec le Maire, et j’ai passé moi-même, et je n’ai vu que cinq policiers là, à neuf heures et vingt ?


R. D’après l’affidavit de mon sergent Welman, il était rendu là vers sept heures et quart, ou sept heures et demie, avec dix hommes. Les autres sont venus par les autres rues.


Q. Est-ce que les hommes étaient en uniforme ?


R. Les hommes étaient en uniforme, oui. Ils étaient dispersés, — il y en avait un au coin du Marché, il y en avait un au coin de chez Pelland, il y en avait à différents endroits, de manière à protéger la foule.


Q. Il y avait vingt-six hommes ?


R. Oui.


Q. Dans ce temps-là, dans ce quartier-là, est-ce qu’ils étaient tous devant l’Auditorium ?


R. On ne les a pas mis en rangée, comme ça.


Q. Je vous demande cela, parce que je suis passé là, j’ai descendu la rue, et j’ai vu cinq policiers. J’avais un mot à dire avec M. Burke, en passant, et je n’ai pas vu de police là. C’est la raison pourquoi je vous demande cela ?


R. C’est une escouade qu’il y avait devant le trottoir ; il y en avait une dizaine devant le trottoir et les autres étaient dispersés à différentes places, sur le Carré, pour empêcher les gars de tirer à peu près au travers de la foule, — pour le service d’ordre.


INTERROGÉ PAR M. J. G. SCOTT :


Q. Combien d’hommes avez-vous dans la police, en tout ?


R. Quatre-vingt-dix (90). Nous en avons plus que cela, mais nous en avons des vieux, des gardiens, mais des gens pour patrouiller la rue, nous en avons à peu près quatre-vingt-dix que nous pouvons employer.


Q. Est-ce que vous considérez que c’est suffisant pour la protection de la ville ?


R. Non, j’aurais besoin de plus d’hommes de patrouille pour la ville.


Q. Combien d’hommes devriez-vous avoir ?


R. À peu près cent cinquante (150), parce que, les citoyens sont sous l’impression que les quatre-vingt-dix hommes sont là sur la rue, mais ces gens-là ont leurs familles, ils ont leurs maisons, il faut qu’ils se reposent et qu’ils prennent leurs repas. Alors, quatre-vingt-dix hommes, c’est l’effectif de la force, mais les hommes en devoir, sont à peu près quarante-cinq (45), et ces quarante-cinq là, qui viennent en devoir, ils ne peuvent pas être en devoir, vingt-quatre heures, sans repas et sans repos et, généralement, il faut couvrir toute la ville, comme Charlesbourg, Beauport, St. Malo, jusqu’au Cap, — il y en a à peu près trente homme à la fois sur la rue, et les autres, sont en dedans, et ils se relèvent à leur tour. Lorsqu’ils sont fait deux heures, il reviennent sur la rue.


Q. Votre force est alors insuffisante ?


R. Ça, c’est compris par tout le monde.


Q. Avez-vous déjà demandé d’avoir plus d’hommes ?


R. Oui, j’ai demandé, pas cette année, mais l’année passée. Cette année, je n’ai pas eu l’occasion, mais l’année passée, j’ai demandé seize hommes de plus pour le trafic, pour le service de l’ordre et le trafic, pour relever mes hommes ordinaires que j’avais pour ce devoir.


Q. Ne croyez-vous pas que vous devriez avoir cinquante de plus ?


R. Comme de raison que ça serait nécessaire d’avoir encore cinquante hommes.


Q. Vous feriez mieux de les demander ?


R. Par pour le trouble, mais pour tout l’ouvrage que la police est obligée de faire.


Et le témoin ne dit rien de plus.


Je soussigné sténographe assermenté
certifie que ce qui précède est la transcription
fidèle de mes notes sténographiques.
Alexandre Bélinge
  1. Titre ajouté par Wikisource pour fin de présentation.