BAnQ/Émeutes de Québec de 1918/Témoignage de Joseph Tremblay, plombier

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Émeutes de Québec de 1918 - Témoignage de Joseph Tremblay, plombier
(p. 1-5).

Témoignage de Joseph Tremblay, plombier[1]


JOSEPH TREMBLAY.


JOSEPH TREMBLAY, de la Cité de Québec, plombier, âgé de vingt quatre ans, étant dûment assermenté sur les Saints Évangiles dépose ainsi qu’il suit :


Mtre. F. O. Drouin. — Avant de commencer, j’aime à faire entendre au Coroner que je suis ici comme représentant du Département de la Justice à Ottawa, branche de la Police Fédérale.


M. Picher. — Pouvez-vous nous présenter vos lettres de créances ?


Le Coroner. — Pouvez-vous produire le télégramme qui vous autorise ?


Mtre. F. O. Drouin. — Je l’aurai, il est au Bureau. J’ai un télégramme depuis samedi.


M. Picher. — On ne doute pas de votre parole.

INTERROGÉ par le Coroner.


Q. Vous êtes le cousin de la victime Joseph Ed. Tremblay ?


R. Pas directement cousin.


Q. Êtes-vous parent ?


R. Une petite parenté.


Q. Petit cousin ?


R. Petit cousin.


Q. Est-ce que vous avez rencontré le défunt Tremblay après son retour de la Malbaie lundi le premier avril dernier ?


R. Oui.


Q. Vous êtes sorti avec lui le même soir ?


R. Oui, je suis sorti avec lui à huit heures.


Q. Quelle était votre intention en sortant ― où alliez-vous ?


R. On allait pour voir l’assemblée qui devait avoir lieu au Marché Jacques Cartier.


Q. Une assemblée qui devait être adressée par M. Lavergne n’est-ce-pas ?


R. Justement.


Q. Vous êtes resté là assez longtemps pour attendre et lorsque vous avez vu que l’assemblée ne se tenait pas…


R. On s’est promenés sur la rue.


Q. Vous êtes revenu tous les deux ensemble ?


R. On est revenu tous les deux ensemble.


Q. Et à quel endroit avez-vous été divisés ?


R. Vers le Boulevard. La Cavalerie s’en venait ― on s’est trouvé séparés et je ne l’ai pas revu après ça.


Q. Savez-vous si Tremblay avait des armes sur lui ?


R. Aucune à ma connaissance. Je ne lui ai vu aucune arme.

INTERROGÉ par Mtre. E. Rochette.


Q. Vous ne vous êtes pas mêlé à la foule ?


R. Non j’ai été là comme spectateur. J’ai été là pour voir si l’assemblée aurait lieu et aussitôt qu’on s’est rendu compte qu’il n’y avait pas d’assemblée on s’en est revenu.


Q. Et sur le chemin si je vous ai bien compris, vous étiez à marcher ? vous n’étiez pas dans la foule ?


R. Il n’y avait pas de foule ― à des places il y avait un peloton de cavalerie qui m’a séparé ― on était obligé de prendre un côté de la rue ou l’autre pour trouver un refuge.


Q. C’était vers quelle heure que vous avez été visiter ?


R. Vers dix heures à peu près, je ne peux pas dire au juste.


Q. Vous êtes parti de la maison vers huit heures ?


R. Vers huit heures.


Q. Lui-même, Tremblay, naturellement, arrivant de la Malbaie ne connaissait pas tout le danger qu’il pouvait y avoir ?


Le Major Barclay. — M. le Coroner, s’il vous plaît…

INTERROGÉ par le Major Barclay.


Q. Vous avez quitté votre maison à huit heures M. Tremblay ?


R. Oui.


Q. Et pendant deux heures de temps, qu’avez-vous fait sur la rue ?


R. On s’est promené.


Q. Avez-vous lu les affiches vous disant que c’était dangereux d’être sur la rue ?


R. Oui je les ai lues.


Q. Les avez-vous considérées ?


R. Un peu comme cela.


Q. Vous avez vu les mêmes annonces dans les journaux de Québec ?


R. Oui ― je ne pensais pas que c’allait être aussi grave que ça. On était loin de penser cela, avoir su que c’aurait été aussi grave que ça on n’aurait pas sorti.


Q. Vous étiez là en curieux tous les deux ?


R. Oui.


Q. Et vous êtes parti avec votre petit cousin vers dix heures ?


R. Oui.


Q. Vous vous êtes rendu chez-vous quand ?


R. J’ai été rendu chez-moi vers onze heures je crois.


Q. Cela veut dire qu’en dépit de toutes les annonces dans les journaux, et en dépit de la foule qui était dans les rues vous êtes resté à peu près trois heures sur les rues de Québec parmi la foule.


R. Oui.

INTERROGÉ par M. E. Rochette.


Q. N’est-ce-pas que lorsque vous avez lu les affiches dans les rues, vous avez compris que ce qu’on défendait c’était des attroupements mais qu’il vous était permis de faire une petite marche avec un ami sur la rue.


Le Major Barclay. — Ne posez pas votre question de cette manière là. Demandez-lui qu’est-ce qu’il croyait, qu’est-ce qu’il pensait.


Q. Qu’est-ce que c’est que vous avez compris quand vous avez vu les affiches posées dans les rues ?


R. J’ai compris que nous n’avions pas le droit de faire d’attroupement de trois de se mêler à une foule, mais seulement vu qu’on était rien que deux je pensais qu’on pouvait circuler.


Le Coroner. — Vous marchiez tous les deux ?


R. Oui Monsieur.

INTERROGÉ par Mtre. Barclay.


Q. Vous n’avez vu personne sur la rue que vous-deux ― vous n’étiez pas avec une foule sur la rue ?


R. Non non.


Q. Vous n’en avez pas vu ?


R. On était seulement que deux.


Q. Mais pendant les trois heures que vous avez été sur la rue, vous n’avez vu personne ?


R. Il y avait beaucoup de monde sur la rue.


Q. Par le Coroner. — Il n’y avait pas de manifestants ?


R. Non nous n’étions pas avec les manifestants.

INTERROGÉ par Mtre. F. C. Drouin.


Q. Vous n’avez pas participé à l’attroupement ?


R. Non.


Q. Qu’est-ce que c’est qui vous a donné à penser que cela ne serait pas aussi grave que ça l’a été lundi soir ?


R. C’était mon idée.


Q. Pourquoi ne pensiez-vous pas que ce serait grave ?


R. Parce que ça n’avait pas été aussi grave les autres soirs.


Q. Qu’est-ce qui vous donnait à penser que cela ne serait pas grave le lundi soir ?


R. C’était mon opinion.


Q. Qu’est-ce que vous aviez pour former votre opinion ?


R. On s’en allait à une assemblée, on ne pensait pas qu’on s’en allait à une affaire de même.


Et le témoin ne dit rien de plus.


Je soussigné sténographe assermenté
certifie que ce qui précède est la transcription
fidèle de mes notes sténographiques.
Alexandre Bélinge
  1. Titre ajouté par Wikisource pour fin de présentation.