Ballade de la génération artificielle

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Chez Léon Vanier, éditeur (p. 17-18).


BALLADE
DE LA GÉNÉRATION ARTIFICIELLE


Méphistophélès. — Un homme ! Et quel couple amoureux avez-vous donc enfermé dans la cheminée ?

Wagner. — Dieu me garde ! L’ancienne mode d’engendrer, nous l’avons reconnue pour une véritable plaisanterie. — … Nous tentons d’expérimenter judicieusement ce qu’on appelait les forces de la Nature ; et ce qu’elle produisait jadis organisé, nous autres, nous le faisons cristalliser.

Gœthe. — Le second Faust.



Wagner, chimiste qu’exténue
Le grimoire du nécromant,
Distille, au fond de sa cornue,
La salamandre et l’excrément,
Et le crapaud que, doctement,
Assaisonne la verte oseille.
Pour que soit clos, en un moment,
L’homuncule dans la bouteille.


Catarrheux, il étreint la Nue.
Fi de la Belle-au-Bois-Dormant !
Fi de la galloyse charnue,
Du mignon et de la jument !
Gaûtama ! le renoncement
Absolu que Ton Doigt conseille
Préside à cet accouchement :
L’homuncule dans la bouteille.

Plus de vérole saugrenue !
Plus d’argent-vif ou d’orpiment !
Hélène, avec sa beauté nue,
Intoxique le jeune Amant.
… vous donc tout simplement,
Au coin du feu, sous une treille ;
Puis décantez modestement
L’homuncule dans la bouteille

ENVOI

Fleur des gitons, Prince Charmant,
Nonpareille est cette merveille
Offerte à votre étonnement :
L’homuncule dans la bouteille.