Ballet des Arts/La Peinture

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Robert Ballard (p. 14-16).

LA PEINTURE.



Le Theatre ſe change en une Galerie ornée de pluſieurs Tableaux & Statuës, du fonds de laquelle ſortent les Ombres de ces deux grands Peintres de l’antiquité Zeuxis & Apelle, qui font entre-elles un Dialogue ſervant de recit à l’Art de la Peinture. Quatre Peintres groteſques, ſuivis de leurs Valets, avec quatre Dames ridicules qui vont ſe faire peindre, danſent cette Entrée d’une manière plaiſante & bizarre.


DIALOGUE.
d’Apelle, et de Zeuxis.
Chanté par Meſſieurs de Beaumont, & d’Eſtival.
Apelle.


Ma Venus a charmé les Hommes les plus fins,
Et je ſuis au deſſus de tout ce que nous ſommes.

Zeuxis.

J’ay trompé les oyſeaux en peignant des Raiſins,
C’eſt autant pour le moins que de charmer les hommes.

Tous deux.

Apres de ſi grands efforts,
Nous faiſons bien d’eſtre morts ;
Ces modernes Pinceaux imitant la Nature,
Pretendroient de nous ſurpaſſer,
Et nous auroient fait renoncer
À la Peinture.

Apelle.

Quel honneur qu’on n’ait point achevé ce Tableau
Où l’Amour meſme a crû que je flatois ſa Mere.

Zeuxis.

Quel honneur d’avoir fait un ouvrage ſi beau,
Que ceux qui m’ont ſuivy n’ont jamais pû mieux faire.

Tous deux.

Apres de ſi grands efforts, etc.


IV. Entrée.


Peintres.
Les Sieurs de Lorge, le Chantre, le Comte, & Deſbroſſes.
Dames.
Monſieur Molier, les Sieurs des Airs le cadet, Païſan, & Deſonets.
Valets.
Monſieur Cabou, le Sieur Dolivet.
Pour les Peintres,
Aux Dames.


Leau ſexe, qui par nous venez à bout de l’autre,
Flatez ce qui vous flate, & vous prete ſecours,
Sous voſtre Toile, helas ! vous n’eſtes pas touſjours
Comme vous eſtes ſur la noſtre.