Berthe aux grands pieds/IV

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Alphonse Lemerre, éditeur (p. 25-26).

IV

L’ARRIVÉE

Cependant ont passé les nuits après les jours,
Et Berthe à son balcon, pensive, attend toujours,
Les lèvres et les mains vaines, mais sans reproches.
Or voici que les temps, et les barons, sont proches,
Et la vierge bientôt ne doit plus ignorer
Que Pépin se languit de toujours espérer.
Ils viennent. Les voilà, fourbus et hors d’haleine ;
Leurs ombres devant eux s’allongent sur la plaine,

Et leur cuirasse luit dans le soleil couchant.
Le galop des chevaux se hâte en trébuchant.
Mais là-bas, comme Elsa fit plus tard vers le cygne,
Berthe aux grands pieds leur tend les bras et leur fait signe,
Puis, se ressouvenant qu’elle est fille de roi,
Elle prend un air doux, mélancolique et froid.