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Bible Crampon 1923/Ecclésiaste

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Traduction par Augustin Crampon.
Texte établi par Société de S. Jean l’Évangéliste, Desclée.

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LIVRE DE L’ECCLÉSIASTE

INTRODUCTION.

[I, 2 — 11.]

1. Chap i. 1-3 : Titre du livre. Position du problème.



Paroles de l’Ecclésiaste, fils de David, roi dans Jérusalem.[1]
2Vanité des vanités ! dit l’Ecclésiaste,
vanité des vanités !
Tout est vanité.
3Quel avantage revient-il à l’homme
de toute la peine qu’il se donne sous le soleil ?

2. Chap. i, 4-11 : Considérations préalables : le perpétuel recommencement des choses.


4Une génération passe, une génération vient,
et la terre subsiste toujours.
5Le soleil se lève, le soleil se couche,
et il se hâte de retourner à sa demeure,
d’où il se lève de nouveau.
6Allant vers le midi, tournant vers le nord,
le vent se retourne encore,
et reprend les mêmes circuits.

7Tous les fleuves vont à la mer,
et la mer n’est point remplie ;
vers le lieu où ils se dirigent,
ils continuent à aller.
8Toutes choses sont en travail,
au-delà de ce qu’on peut dire ;
l’œil n’est pas rassasié de voir,
et l’oreille ne se lasse pas d’entendre.[2]

9Ce qui a été, c’est ce qui sera,
et ce qui s’est fait, c’est ce qui se fera ;
et il n’y a rien de nouveau sous le soleil.
10S’il est une chose dont on dise : « Vois, c’est nouveau ! »,
cette chose a déjà existé dans les siècles qui nous ont précédés.
11On ne se souvient pas de ce qui est ancien,
et ce qui arrivera dans la suite
ne laissera pas de souvenir chez ceux qui vivront plus tard.[3]

I. — SAGESSE ET PLAISIRS.

[I, 12 — II, 26.]

1. Chap. i, 12-18 : Vanité de la sagesse.

12Moi, l’Ecclésiaste, j’ai été roi d’Israël à Jérusalem,[4]
13et j’ai appliqué mon cœur à rechercher et à sonder par la sagesse
tout ce qui se fait sous les cieux :
c’est une occupation pénible
à laquelle Dieu impose aux enfants des hommes de se livrer.
14J’ai examiné toutes les œuvres qui se font sous le soleil :
et voici, tout est vanité et poursuite du vent.
15Ce qui est courbé ne peut se redresser,
et ce qui manque ne peut être compté.
16Je me suis dit en moi-même :[5]
Voici que j’ai accumulé et amassé de la sagesse,
plus que tous ceux qui ont été avant moi à Jérusalem,
et mon cœur a possédé amplement sagesse et science.
17J’ai appliqué mon esprit à connaître la sagesse,
et à connaître la sottise et la folie ;
j’ai compris que cela aussi est poursuite du vent.
18Car avec beaucoup de sagesse on a beaucoup de chagrin,
et celui qui augmente sa science augmente sa douleur.

2. Chap. ii, 1-11. Vanité des plaisirs.Thèse (ii, 1, 2). Expérience (ii, 3-10). Conclusion (ii, 11).

J’ai dit dans mon cœur : « Viens donc,
je t’éprouverai par la joie ; goûte le plaisir ! »
Et voici, cela est encore une vanité.
2J’ai dit du rire : « Insensé ! »
et de la joie : « Que produit-elle ? »

3Je m’appliquai dans mon cœur à livrer ma chair au vin,
tandis que mon cœur me conduirait avec sagesse,
et à m’attacher à la folie,
jusqu’à ce que je visse ce qu’il est bon pour les enfants des hommes,
de faire sous le ciel durant les jours de leur vie.
4J’exécutai de grands ouvrages,
je me bâtis des maisons,
je me plantai des vignes ;
5Je me fis des jardins et des vergers,
et j’y plantai des arbres à fruit de toute espèce ;
6je me fis des réservoirs d’eau,
pour arroser des bosquets croissaient les arbres.
7J’achetai des serviteurs et des servantes,
et j’eus leurs enfants nés dans la maison ;
j’eus aussi des troupeaux de bœufs et de brebis,
plus que tous ceux qui furent avant moi dans Jérusalem.
8Je m’amassai aussi de l’argent et de l’or,
et les richesses des rois et des provinces ;
je me procurai des chanteurs et des chanteuses,
et les délices des enfants des hommes,
des femmes en abondance.[6]

9Je devins grand et je l’emportai
sur tous ceux qui étaient avant moi dans Jérusalem ;
et même ma sagesse demeura avec moi.
10Tout ce que mes yeux désiraient,
je ne les en ai pas privés ;
je n’ai refusé à mon cœur aucune joie ;
car mon cœur prenait plaisir à tout mon travail,
et ce fut ma part de tout mon travail.

11Puis j’ai considéré toutes mes œuvres que mes mains avaient faites,
et le labeur que leur exécution m’avait coûté ;
et voici, tout est vanité et poursuite du vent,
et il n’y a aucun profit sous le soleil.

3. Chap. ii, 12-17 : Fin du sage et de l’insensé.

12Alors j’ai tourné mes regards vers la sagesse
pour la comparer avec la sottise et la folie.
Car quel est l’homme qui pourrait venir après le roi,
lui à qui on a conféré cette dignité depuis longtemps ?

13Et j’ai vu que la sagesse a autant d’avantage sur la folie,
que la lumière sur les ténèbres :
14Le sage a ses yeux à la tête,
et l’insensé marche dans les ténèbres.

Et j’ai aussi reconnu qu’un même sort les atteindra tous deux.
15Et j’ai dit dans mon cœur :
« Le même sort que celui de l’insensé m’atteindra moi aussi ;
à quoi bon donc toute ma sagesse ? »
Et j’ai dit dans mon cœur
que cela encore est une vanité.
16Car la mémoire du sage
n’est pas plus éternelle que celle de l’insensé ;
dès les jours qui suivent,
tous deux sont également oubliés.
Eh quoi ! Le sage meurt aussi bien que l’insensé !
17Et j’ai haï la vie, car ce qui se fait sous le soleil est mauvais à mes yeux,
car tout est vanité et poursuite du vent.

4. Chap. ii, 18-23 : Chacun doit laisser à d’autres le fruit de son travail.

18Et j’ai haï tout mon travail,
que j’ai fait sous le soleil,
et que je laisserai à l’homme qui viendra après moi.
19Et qui sait s’il sera sage ou insensé ?
Cependant il sera maître de mon travail,
dans lequel j’ai mis ma peine et ma sagesse sous le soleil.
C’est encore là une vanité.

20Et j’en suis venu à livrer mon cœur au découragement,
à cause de tout le travail que j’ai fait sous le soleil.
21Car, qu’un homme qui a déployé dans son travail
sagesse, intelligence et habileté,
en laisse le fruit en partage
à un homme qui n’y a pas travaillé :
c’est encore là une vanité et un grand mal.
22En effet, que revient-il à l’homme de tout son travail,
et du souci de son cœur,
qui le fatiguent sous le soleil ?
23Tous ses jours ne sont que douleur,
ses occupations que chagrins ;
la nuit même son cœur ne se repose pas :
c’est encore là une vanité.

5. Chap. ii, 24-26 : Conclusion.

24Il n’y a rien de meilleur pour l’homme
que de manger et de boire,
et de faire jouir son âme du bien-être,
au milieu de son travail ;
mais j’ai vu que cela aussi vient de la main de Dieu.
25Qui, en effet, peut sans lui[7] manger et jouir du bien-être ?
26Car à l’homme qui est bon devant lui,
il donne la sagesse, la science et la joie ;
mais au pécheur, il donne le soin
de recueillir et d’amasser,
afin de donner à celui qui est bon devant Dieu.
C’est encore là une vanité et la poursuite du vent.

II. — VANITÉ DES EFFORTS DE L’HOMME.

[III, 1-22.]

1. Chap. iii, 1-15 : L’homme est livré aux événements : qu’il jouisse du bien-être que Dieu lui accorde.

Il y a un temps fixé pour tout,
un temps pour toute chose sous le ciel :
2un temps pour naître, et un temps pour mourir ;
un temps pour planter, et un temps pour arracher ce qui a été planté ;
3un temps pour tuer, et un temps pour guérir  ;
un temps pour abattre, et un temps pour bâtir ;
4un temps pour pleurer, et un temps pour rire ;
un temps pour se lamenter, et un temps pour danser ;
5un temps pour jeter des pierres, et un temps pour en ramasser ;
un temps pour embrasser, et un temps pour s’abstenir d’embrassements.
6un temps pour chercher, et un temps pour perdre ;
un temps pour garder, et un temps pour jeter ;
7un temps pour déchirer, et un temps pour coudre ;
un temps pour se taire, et un temps pour parler ;
8un temps pour aimer, et un temps pour haïr ;
un temps pour la guerre, et un temps pour la paix.

9Quel est l’avantage, pour celui qui travaille, de la peine qu’il se donne ?
10J’ai examiné le labeur auquel Dieu
impose aux enfants des hommes de se livrer :
11Dieu a fait toute chose belle en son temps,
il a mis aussi dans leur cœur l’éternité,
mais sans que l’homme puisse comprendre l’œuvre
que Dieu fait, du commencement jusqu’à la fin.[8]
12Et j’ai reconnu qu’il n’y a rien de meilleur pour eux
que de se réjouir et se donner du bien-être pendant leur vie,
13et en même temps que si un homme mange et boit,
et jouit du bien-être au milieu de son travail,
c’est là un don de Dieu.
14J’ai reconnu que tout ce que Dieu fait durera toujours,
qu’il n’y a rien à y ajouter ni rien à en retrancher :
Dieu agit ainsi afin qu’on le craigne.
15Ce qui se fait existait déjà,
et ce qui se fera a déjà été :
Dieu ramène ce qui est passé.[9]

2. Chap. iii, 16, 17 : L’homme livré à la tyrannie des chefs.

16J’ai encore vu sous le soleil,
qu’au siège même du droit il y a la méchanceté,
et au lieu de la justice, il y a l’iniquité.
17J’ai dit dans mon cœur :
« Dieu jugera le juste et le méchant,
car il y a là un temps pour toute chose,
et pour toute œuvre. »
18J’ai dit dans mon cœur
au sujet des enfants des hommes :
« Cela arrive ainsi, afin que Dieu les éprouve,[10] et qu’ils voient qu’ils sont quant à eux-mêmes semblables aux bêtes. »

19Car le sort des enfants des hommes
est le sort de la bête :
ils ont un même sort ; comme l’un meurt, l’autre meurt aussi,
il n’y a qu’un même souffle[11] pour tous ;
l’avantage de l’homme sur la bête est nul,
car tout est vanité.
20Tout va dans un même lieu ;
tout est sorti de la poussière,
et tout retourne à la poussière.
21Qui connaît le souffle des enfants des hommes, qui monte en haut,
et le souffle de la bête, qui descend en bas vers la terre ?[12]

22Et j’ai vu qu’il n’y a rien de mieux pour l’homme
que de se réjouir dans ses œuvres :
c’est là sa part.
Car qui lui donnera de découvrir ce qui arrivera après lui ?

III. — ANOMALIES DIVERSES DANS LA SOCIÉTÉ.

[IV, 1 — V, 8.]

1. Chap. iv, 1-8 : Oppression des faibles ; travail inspiré par la jalousie ; travail sans but.

Je me suis tourné et j’ai vu
toutes les oppressions qui se commettent sous le soleil :
et voici que les opprimés sont dans les larmes,
et personne ne les console !
Ils sont en butte à la violence de leurs oppresseurs,
et personne ne les console ![13]
2Et j’ai proclamé les morts qui sont déjà morts
plus heureux que les vivants qui sont encore vivants,
3et plus heureux que les uns et les autres
celui qui n’est pas encore arrivé à l’existence,
qui n’a pas vu les mauvaises actions
qui se commettent sous le soleil.

4J’ai vu que tout travail
et que toute habileté dans un ouvrage
n’est que jalousie contre un homme de la part de son prochain :
cela encore est vanité et poursuite du vent.

5L’insensé se croise les mains,
et mange sa propre chair.
6Mieux vaut une main pleine de repos,
que les deux pleines de labeur et de poursuite du vent.

7Je me suis tourné et j’ai vu
une autre vanité sous le soleil.
8Tel homme est seul et n’a pas de second,
il n’a ni fils ni frère,
et pourtant il n’y a pas de fin à tout son travail,
et ses yeux ne sont jamais rassasiés de richesses :
« Pour qui donc est-ce que je travaille,
et que je prive mon âme de jouissance ? »
Cela encore est vanité, et mauvaise occupation.

2. Chap. iv, 9-12 : Sentences : inconvénients de la vie solitaire.

9Mieux vaut vivre[14] à deux que solitaire ;
il y a pour les deux un bon salaire dans leur travail ;
10car s’ils tombent, l’un peut relever son compagnon.
Mais malheur à celui qui est seul,
et qui tombe sans avoir un second pour le relever !
11De même, si deux couchent ensemble, ils se réchauffent ;
mais un homme seul, comment aurait-il chaud !
12Et si quelqu’un maîtrise celui qui est seul,
les deux pourront lui résister,
et le fil triplé ne rompt pas facilement.

3. Chap. iv, 13-16 : Vanité des espoirs fondés sur un changement de règne.

13Mieux vaut un jeune homme pauvre et sage
qu’un roi vieux et insensé
qui ne sait plus écouter les avis ;
14car il sort de prison pour régner,
quoiqu’il soit né pauvre dans son royaume.
15J’ai vu tous les vivants qui marchent sous le soleil
près du jeune homme[15] qui s’élevait à la place du vieux roi.
16Il n’y avait pas de fin à toute cette foule,
à tous ceux à la tête desquels il était.
Et cependant les descendants ne se réjouiront pas à son sujet.
Cela encore est vanité et poursuite du vent.

4. Chap. iv, 17 — v, 6 : Sentences concernant le culte.

17Prends garde à ton pied quand tu vas à la maison de Dieu ;
s’approcher[16] pour écouter vaut mieux que d’offrir des victimes à la manière des insensés ;
car leur ignorance les conduit à faire mal.


Ne sois pas pressé d’ouvrir la bouche,
et que ton cœur ne se hâte pas
d’exprimer une parole devant Dieu ;
car Dieu est au ciel, et toi sur la terre :
que tes paroles soient donc peu nombreuses !
2Car de la multitude des occupations naissent les songes,
et de la multitude des paroles, des propos d’insensé.

3Lorsque tu fais un vœu à Dieu,
ne tarde pas à l’accomplir, car il n’y a pas de faveur pour les insensés :
ce que tu voues, accomplis-le.

4Mieux vaut pour toi ne pas vouer,
que vouer et ne pas accomplir.
5Ne permets pas à ta bouche de faire pécher ta chair,
et ne dis pas en présence de l’envoyé[17] de Dieu
que c’est une inadvertance :
pourquoi Dieu s’irriterait-il au sujet de tes paroles,
et détruirait-il les œuvres de tes mains ?
6Car, comme il y a des vanités dans la multitude des occupations,
il y en a aussi dans beaucoup de paroles ;
c’est pourquoi crains Dieu.[18]

5. Chap. v, 7, 8 : Princes et rois.

7Si tu vois dans une province le pauvre opprimé,
le droit et la justice violés,
ne t’étonne point de la chose ;
car un plus grand veille sur un grand,
et de plus grands encore veillent sur eux.
8Un avantage pour le pays à tous égards,
c’est un roi qui donne ses soins à l’agriculture.

IV. — VANITÉ DES RICHESSES.

[V, 9 — VII, 12.]

1. Chap. v, 9-19 : Troubles divers dans la jouissance des richesses.Parasites (v, 9-11) ; perte des biens (v, 12-16). Jouir du bien-être que Dieu accorde (v, 17-19).

9Celui qui aime l’argent n’est pas rassasié par l’argent,
et celui qui aime les richesses n’en goûte pas le fruit ;
c’est encore là une vanité.
10Quand les biens se multiplient, ceux qui les mangent se multiplient aussi ;
et quel avantage en revient-il à leurs possesseurs, sinon qu’ils les voient de leurs yeux ?
11Le sommeil du travailleur est doux,
qu’il ait peu ou beaucoup à manger ;
mais la satiété du riche ne le laisse pas dormir.

12Il est un mal grave que j’ai vu sous le soleil :
des richesses conservées pour son malheur par celui qui les possède :
13Ces richesses se perdent par quelque fâcheux événement,
et, s’il a engendré un fils, il ne lui reste rien entre les mains.
14Tel qu’il est sorti du sein de sa mère,
il s’en retournera nu, comme il était venu ;
et il ne recevra rien pour son travail,
qu’il puisse emporter dans sa main :
15C’est encore là un grave mal,
qu’il s’en aille comme il est venu :
et quel avantage lui revient-il d’avoir travaillé pour le vent ?
16De plus, toute sa vie[19] il mange dans les ténèbres ;
il a beaucoup de chagrin, de souffrance et d’irritation.

17Voici donc ce que j’ai vu :
c’est qu’il est bon et séant pour l’homme de manger et de boire,
et de jouir du bien-être dans tout son travail,
auquel il se livre sous le soleil,
durant les jours de vie
que Dieu lui donne ;
car c’est là sa part.

18De plus, pour tout homme à qui Dieu donne richesses et biens,
avec pouvoir d’en manger, d’en prendre sa part
et de se réjouir de son travail,
c’est un don de Dieu.
19Car alors il ne songe guère aux jours de sa vie,
parce que Dieu répand la joie dans son cœur.

2. Chap. vi, 1-12 : Malheur de celui qui meurt sans avoir joui de ses biens.Le sort de l’avorton est préférable (vi, 1-5). Mort pareille pour tous (vi, 6-9). Vanité des désirs, tout étant réglé d’avance (vi, 10-12).

Il est un mal que j’ai vu sous le soleil,
et ce mal est grand sur l’homme :
2Tel homme à qui Dieu a donné
richesses, trésors et gloire,
et qui ne manque pour son âme
de rien de ce qu’il peut désirer ;
mais Dieu ne lui permet pas d’en jouir,[20] car c’est un étranger qui en jouit :
voilà une vanité et un mal grave.

3Quand un homme aurait engendré cent fils,
eût vécu de nombreuses années,
et que les jours de ses années se seraient multipliés,
si son âme ne s’est pas rassasiée de bonheur,
et qu’il n’ait pas même eu de sépulture,
je dis qu’un avorton est plus heureux que lui.
4Car il est venu en vain,
il s’en va dans les ténèbres,
et les ténèbres couvriront son nom ;
5il n’a même ni vu ni connu le soleil,
il a plus de repos que cet homme.[21]

6Et quand il vivrait deux fois mille ans,
sans jouir du bonheur,[22]
tout ne va-t-il pas au même lieu ?

7Tout le travail de l’homme est pour sa bouche ;
mais ses désirs ne sont jamais satisfaits.

8Car quel avantage a le sage sur l’insensé ?
Quel avantage a le pauvre qui sait se conduire devant les vivants ?

9Ce que les yeux voient
est préférable à la divagation des désirs.
Cela encore est vanité et poursuite du vent.

10De toute chose qui arrive, le nom est déjà prononcé ;
on sait ce que sera un homme,
et il ne peut contester avec qui est plus fort que lui.
11Car il y a beaucoup de paroles qui ne font qu’accroître la vanité :
quel avantage en revient-il à l’homme ?
12Car qui sait, en effet, ce qui est bon pour l’homme dans la vie,
pendant les jours de sa vie de vanité,
qu’il passe comme une ombre ?
Et qui peut indiquer à l’homme
ce qui sera après lui sous le soleil ?[23]

3. Chap. vii, 1-7 : Sentences concernant le sérieux de la vie.

Une bonne renommée vaut mieux qu’un bon parfum,
et le jour de la mort que le jour de la naissance.
2Mieux vaut aller à la maison de deuil
qu’aller à la maison de festin,

car dans la première apparaît la fin de tout homme,
et le vivant y applique son cœur.
3Mieux vaut la tristesse que le rire,
car un visage triste fait du bien au cœur.
4Le cœur des sages est dans la maison de deuil,
et le cœur des insensés dans la maison de joie.
5Mieux vaut entendre la réprimande du sage
que d’entendre la chanson des insensés.
6Car semblable au pétillement des épines sous la chaudière
est le rire des insensés :
c’est là encore une vanité.
7Car l’oppression rend insensé le sage,
et les présents corrompent le cœur.

4. Chap. vii, 8, 9 : Sentences concernant la patience.

8Mieux vaut la fin d’une chose[24] que son commencement ;
mieux vaut un esprit patient qu’un esprit hautain.
9Ne te hâte pas dans ton esprit de t’irriter,
car l’irritation repose dans le sein des insensés.

5. Chap. vii, 10-12 : Sentences concernant la sagesse.

10Ne dis pas : « D’où vient que les jours anciens
étaient meilleurs que ceux-ci ? »
Car ce n’est pas par sagesse que tu interroges à ce sujet.
11La sagesse est bonne avec un patrimoine,
et profitable à ceux qui voient le soleil.[25]
12Car telle la protection de l’argent, telle la protection de la sagesse ;
mais un avantage du savoir,
c’est que la sagesse fait vivre ceux qui la possèdent.

V. — VERTU ET BONHEUR.

[VII, 13 — IX, 10.]

1. Chap. vii, 13-17 : Incertitude de l’avenir pour le juste comme pour le méchant.

13Regarde l’œuvre de Dieu :
qui pourra redresser ce qu’il a courbé ?
14Au jour du bonheur, sois joyeux,
et au jour du malheur, réfléchis :
Dieu a fait l’un comme l’autre,
afin que l’homme ne découvre point ce qui doit lui arriver.
15Tout ceci, je l’ai vu au jour de ma vanité :
il y a tel juste qui périt dans sa justice,
et il y a tel méchant qui prolonge sa vie dans sa méchanceté.
16Ne sois pas juste à l’excès,
et ne te montre pas sage outre mesure :
pourquoi voudrais-tu te détruire ?[26]
17Ne sois pas méchant à l’excès,
et ne sois pas insensé :
pourquoi voudrais-tu mourir avant ton temps ?

18Il est bon que tu retiennes ceci,
et que tu ne relâches pas ta main de cela,
car celui qui craint Dieu évite tous ces excès.[27]

2. Chap. vii, 19-22 : Sentences concernant la modération et la clémence.

19La sagesse donne au sage plus de force
que n’en possèdent dix chefs qui sont dans la ville.

20Car il n’y a pas sur terre d’homme juste
qui fasse le bien sans jamais pécher.[28]
21Ne fais pas non plus attention
à toutes les paroles qui se disent,
de peur que tu n’entendes ton serviteur te maudire ;[29]
22car ton cœur sait que bien des fois aussi
tu as maudit les autres.

3. Chap. vii, 23-28 : La sagesse est inaccessible à l’homme, mais la méchanceté et l’immoralité sont une folie.

23J’ai reconnu vrai[30] tout cela par la sagesse ;
j’ai dit : je veux être sage !
mais la sagesse est restée loin de moi.
24Ce qui arrive est lointain,
profond, profond : qui peut l’atteindre ?

25Je me suis appliqué et mon cœur a cherché
à connaître, à sonder et à poursuivre
la sagesse et la raison des choses,
et j’ai reconnu[31] que la méchanceté est une démence,
et qu’une conduite folle est un délire.

26Et j’ai trouvé plus amère que la mort
la femme dont le cœur est un piège et un filet,
et dont les mains sont des liens ;
celui qui est agréable à Dieu lui échappe,
mais le pécheur sera enlacé par elle.

27Vois, j’ai trouvé ceci, dit l’Ecclésiaste,
en considérant les choses une à une pour en découvrir la raison,
28que mon âme a constamment cherchée,
sans que je l’aie trouvée :
J’ai trouvé un homme entre mille,
mais je n’ai pas trouvé une femme dans le même nombre.
29Seulement, vois, j’ai trouvé ceci :
C’est que Dieu a fait l’homme droit,
mais eux cherchent beaucoup de subtilités.

4. Chap. viii, 1-8 : Sentences diverses.Le sage (viii, 1, 2) ; soumission au roi (viii, 3, 4) ; à propos de la rétribution (viii, 5-8).

Qui est comme le sage,
et qui connaît comme lui l’explication des choses ?
La sagesse d’un homme fait briller son visage,
et la rudesse de sa face est transfigurée.[32]

2Je te dis : Observe les ordres du roi,
et cela à cause du serment fait à Dieu ;
3ne te hâte pas de t’éloigner de lui.
Ne persiste pas dans une chose mauvaise[33] ;
car tout ce qu’il veut, il peut le faire ;
4la parole du roi, en effet, est souveraine,
et qui lui dira : « Que fais-tu ? »

5Celui qui observe le précepte n’éprouve rien de mal,
et le cœur du sage connaîtra le temps et le jugement.
6Il y a en effet, pour toute chose, un temps et un jugement,
car il est grand[34] le mal qui tombera sur l’homme.

7Il ne sait pas ce qui arrivera,
et qui lui dira comment cela arrivera ?[35]
8L’homme n’est pas maître de son souffle,
pour pouvoir retenir son souffle,
et il n’a aucune puissance sur le jour de sa mort ;
il n’y a pas de dispense dans ce combat,
et le crime ne saurait sauver son homme.

5. Chap. viii, 9-15 : La sanction.Méchants heureux et justes malheureux (viii, 9, 10). Le vrai bonheur pour ceux qui craignent Dieu (viii, 11-13). Conclusion (viii, 14, 15).

9J’ai vu toutes ces choses,
en appliquant mon cœur à toute l’œuvre
qui se fait sous le soleil,
en un temps où un homme domine sur un homme
pour le malheur de celui-ci.

10Et alors j’ai vu des méchants recevoir la sépulture
et entrer dans leur repos,
tandis que s’en vont loin du lieu saint
et sont oubliés dans la ville
des hommes qui ont agi avec droiture ;
cela encore est une vanité.[36]

11Parce que la sentence portée contre les mauvaises actions
ne s’exécute pas en toute hâte,
à cause de cela le cœur des enfants des hommes
s’enhardit[37] en eux à faire le mal ;
12mais, quoique le pécheur fasse cent fois le mal,
et prolonge ses jours,
je sais, moi, que le bonheur
est pour ceux qui craignent Dieu,
qui sont dans la crainte en sa présence.[38]
13Mais le bonheur n’est pas pour le méchant ;
et pareil à l’ombre, il ne prolongera pas ses jours,
parce qu’il ne craint pas Dieu.

14Il est une autre vanité qui se produit sur la terre :
C’est qu’il y a des justes auxquels il arrive des choses
qui conviennent aux œuvres des méchants ;
et il y a des méchants auxquels il arrive des choses
qui conviennent aux œuvres des justes.
Je dis que cela encore est une vanité.

15Aussi j’ai loué la joie,
parce qu’il n’y a de bonheur pour l’homme sous le soleil
qu’à manger et à boire et à se réjouir ;
et c’est là ce qui doit l’accompagner
dans son travail, pendant les jours de vie
que Dieu lui donne sous le soleil.

6. Chap. viii, 16 — ix, 10 : Les efforts de l’homme devant Dieu.La raison de l’action divine nous échappe (viii, 16, 17). Tout arrive à tous ici-bas, inconvénients (ix, 1-6). Conclusion : profiter des bonnes joies de la vie (ix, 7-10).

16Lorsque j’ai appliqué mon cœur à connaître la sagesse
et à considérer la tâche

qui s’accomplit sur la terre, —
car ni le jour ni la nuit
l’homme ne voit de ses yeux le sommeil, —
17j’ai vu toute l’œuvre de Dieu ;
j’ai vu que l’homme ne saurait trouver
l’œuvre qui se fait sous le soleil ;
l’homme se fatigue à chercher, et ne trouve pas ;
même si le sage veut connaître,
il ne peut trouver.


En effet, j’ai pris tout ceci à cœur,
et j’ai observé tout ceci :
Que les justes et les sages
et leurs œuvres sont dans la main de Dieu ;
l’homme ne connaît ni l’amour, ni la haine :
tout est devant eux.[39]
2Tout arrive également à tous :
même sort pour le juste et pour le méchant,
pour celui qui est bon et pur, et pour celui qui est impur,
pour celui qui sacrifie et pour celui qui ne sacrifie pas.
Comme il arrive à l’homme bon, il arrive au pécheur ;
il en est de celui qui jure comme de celui qui craint de jurer.

3C’est un mal, parmi tout ce qui se fait sous le soleil,
qu’il y ait pour tous un même sort ;
c’est pourquoi le cœur des fils de l’homme est plein de malice,
et la folie est dans leur cœur pendant leur vie ;
après quoi ils vont chez les morts.
4Car pour l’homme[40] qui est parmi les vivants, il y a de l’espérance ;
mieux vaut un chien vivant qu’un lion mort.
5Les vivants, en effet, savent qu’ils mourront,
mais les morts ne savent rien,
et il n’y a plus pour eux de salaire ;
car leur mémoire est oubliée.
6Déjà leur amour, leur haine,
leur envie ont péri,
et ils n’auront plus jamais aucune part
à ce qui se fait sous le soleil.

7Va, mange avec joie ton pain
et bois ton vin d’un cœur content,
puisque déjà Dieu se montre favorable à tes œuvres.
8Qu’en tout temps tes vêtements soient blancs,
et que l’huile parfumée ne manque pas sur ta tête.
9Jouis de la vie avec une femme que tu aimes,
pendant tous les jours de ta vie de vanité
que Dieu t’a donnée sous le soleil,
pendant tous les jours de ta vanité ;
car c’est ta part dans la vie
et dans le travail que tu fais sous le soleil.
10Tout ce que ta main peut faire,
fais-le avec ta force ;
car il n’y a plus ni œuvre, ni intelligence, ni science,
ni sagesse, dans le schéol où tu vas.

VI. — EFFORT ET SUCCÈS.

[IX, 11 — XI, 6.]

1. Chap. ix, 11-16 : Effort et talent ne garantissent pas le succès.Thèse prouvée par des considérations générales (ix, 11, 12), par un exemple (ix, 13-16).

11Je me suis tourné et j’ai vu sous le soleil
que la course n’est pas aux agiles,
ni la guerre aux vaillants,
ni le pain aux sages,
ni la richesse aux intelligents,
ni la faveur aux savants ;
car le temps et les accidents les atteignent tous.
12Car l’homme ne connaît même pas son heure,
pareil aux poissons qui sont pris au filet fatal,
pareil aux oiseaux qui sont pris au piège ;
comme eux les enfants des hommes
sont enlacés au temps du malheur,
quand il fond sur eux tout à coup.

13J’ai encore vu sous le soleil ce trait de sagesse,
et celle-ci m’a paru grande.
14Il y avait une petite ville, avec peu d’hommes dans ses murs ;
un roi puissant vint contre elle, l’investit,
et bâtit contre elle de hautes tours.[41]
15Et il s’y trouva un homme pauvre et sage,
qui sauva la ville par sa sagesse.
Et personne ne s’est souvenu de cet homme pauvre.

16Et j’ai dit : « La sagesse vaut mieux que la force ;
mais la sagesse du pauvre est méprisée,
et ses paroles ne sont pas écoutées. »

17Les paroles des sages, prononcées avec calme, sont écoutées,
mieux que les cris d’un chef au milieu des insensés.
18La sagesse vaut mieux que des instruments de guerre ;
mais un seul pécheur peut détruire beaucoup de bien.

2. Chap. x, 1-4 : Sentences concernant la sagesse et la folie.

Des mouches mortes infectent et corrompent l’huile du parfumeur ;
de même un peu de folie l’emporte sur la sagesse et la gloire.[42]
2Le cœur[43] du sage est à sa droite,
et le cœur de l’insensé, à sa gauche.

3Et aussi, quand l’insensé va dans le chemin,
le sens lui manque,
et il montre à tous qu’il est fou.[44]

4Si l’esprit du prince s’élève contre toi,
ne quitte point ta place ;
car le calme prévient de grandes fautes.

3. Chap. x, 5-7 : L’effort et le talent ne garantissent pas le succès ; nouvel exemple.

5Il est un mal que j’ai vu sous le soleil,
comme une erreur qui provient du souverain :

6la folie occupe les postes élevés,
et des riches sont assis dans de basses conditions.
7J’ai vu des esclaves portés sur des chevaux,
et des princes aller à pied[45] comme des esclaves.

4. Chap. x, 8 — xi, 6 : Sentences diverses.
Accidents et sagesse (x, 8-1)

8Celui qui creuse une fosse peut y tomber,
et celui qui renverse une muraille peut être mordu par un serpent.
9Celui qui détache des pierres peut être blessé,
et celui qui fend du bois peut se faire mal.
10Si le fer est émoussé
et si l’on n’a pas aiguisé le tranchant,
on devra redoubler de force ;
mais la sagesse est préférable pour le succès.
11Si le serpent mord faute d’enchantement,
il n’y a pas d’avantage pour l’enchanteur.

Sage et insensé (x, 12-15).

12Les paroles de la bouche du sage sont pleines de grâce ;
mais les lèvres de l’insensé le dévorent.
13Le commencement des paroles de sa bouche est sottise,
et la fin de son discours est démence furieuse.
14Et l’insensé multiplie les paroles !…
L’homme ne sait pas ce qui arrivera,
et qui lui dira ce qui sera après lui ?
15Le travail de l’insensé le fatigue,
lui qui ne sait pas même aller à la ville.

Rois et princes (x, 16, 17).

16Malheur à toi, pays dont le roi est un enfant,
et dont les princes mangent dès le matin !
17Heureux es-tu, pays dont le roi est fils de nobles,
et dont les princes mangent au temps convenable,
pour soutenir leurs forces, et non pour se livrer à la boisson.

Paresse et intempérance (x, 18, 19).

18Quand les mains sont paresseuses, la charpente s’affaisse,
et quand les mains sont lâches, la maison ruisselle.[46]
19On fait des repas pour goûter le plaisir ;
le vin rend la vie joyeuse,
et l’argent répond à tout.

Réserve au sujet des grands (x, 20).

20Même dans ta pensée ne maudis pas le roi,
même dans ta chambre à coucher ne maudis pas le puissant ;
car l’oiseau du ciel emporterait ta voix,
et l’animal ailé publierait tes paroles.

Activité prudente (xi, 1-6).

Jette ton pain sur la face des eaux,
car après beaucoup de jours tu le retrouveras ;[47]
2donnes-en une part à sept, et même à huit :
car tu ne sais pas quel malheur peut arriver sur la terre.

3Quand les nuées sont remplies de pluie,
elles se vident sur la terre ;[48]

et si un arbre tombe au midi ou au nord,
il reste à la place où il est tombé.
4Celui qui observe le vent ne sèmera point,
et celui qui interroge les nuages ne moissonnera point.[49]
5Comme tu ne sais pas quel est le chemin du vent[50]
et comment se forment les os dans le sein de la mère,
ainsi tu ne connais pas l’œuvre de Dieu,
qui fait toutes choses.
6Dès le matin sème ta semence,
et le soir ne laisse pas reposer ta main,
car tu ne sais pas ce qui réussira, ceci ou cela,
ou si l’un et l’autre ne sont pas également bons.

CONCLUSION.

[XI, 7 — XII, 8.]

Que l’homme profite des joies de la vie, permises et données par Dieu. Il y a de la joie ici-bas, qu’on s’empresse d’y participer avant la mort (xi, 7, 8). Qu’en jouissant, le jeune homme se souvienne de Dieu (xi, 9, 10) ! Qu’on s’en souvienne (xii, 1), avant la décrépitude (xii, 2-5) et la mort (xii, 6, 7) !

7La lumière est douce,
et c’est un plaisir pour l’œil de voir le soleil.
8Même si l’homme vit de nombreuses années,
qu’il se réjouisse pendant toutes ces années,
et qu’il pense aux jours de ténèbres,
car ils seront nombreux :
tout ce qui arrive est vanité.

9Jeune homme, réjouis-toi dans ta jeunesse ;
que ton cœur te donne de la joie dans les jours de ta jeunesse !
Marche dans les voies de ton cœur,
et selon les regards de tes yeux ;
mais sache que pour tout cela
Dieu te fera venir en jugement.
10Bannis de ton cœur le chagrin,
et éloigne le mal de ta chair ;
la jeunesse et l’adolescence sont vanité.


Et souviens-toi de ton Créateur
aux jours de ta jeunesse,
avant que viennent les jours mauvais
et qu’approchent les années dont tu diras :
« Je n’y ai point de plaisir » ;[51]

2avant que s’obscurcissent le soleil
et la lumière, et la lune et les étoiles,
et que les nuages reviennent après la pluie ;
3au jour où tremblent les gardiens de la maison,
où se courbent les hommes forts,
où celles qui moulent s’arrêtent parce que leur nombre est diminué,
où s’obscurcissent celles qui regardent par les fenêtres,[52]
4où les deux battants de la porte se ferment sur la rue,
tandis que s’affaiblit le bruit de la meule ;
où l’on se lève au chant de l’oiseau,
où disparaissent toutes les filles du chant ;

5où l’on redoute les lieux élevés,
où l’on a des terreurs dans le chemin,
où l’amandier fleurit,
où la sauterelle devient pesante,
et où la câpre n’a plus d’effet,
car l’homme s’en va vers sa maison d’éternité,
et les pleureurs parcourent les rues ;[53]
6avant que se rompe le cordon d’argent,
que se brise l’ampoule d’or,
que la cruche se casse à la fontaine,
que la poulie se brise et roule dans la citerne ;[54]
7et que la poussière retourne à la terre, selon ce qu’elle était ;
et que l’esprit retourne à Dieu qui l’a donné.

8Vanité des vanités, dit l’Ecclésiaste, tout est vanité.

ÉPILOGUE.

[XII, 9-14.]

9Outre que l’Ecclésiaste fut un sage,
il a encore enseigné la science au peuple ;
il a pesé et sondé, et il a disposé un grand nombre de sentences.
10L’Ecclésiaste s’est étudié à trouver un langage agréable,
et à écrire avec exactitude des paroles de vérité.

11Les paroles des sages sont comme des aiguillons,
et leurs recueils comme des clous plantés ;
elles sont données par un seul Pasteur.

12Et quand à plus de paroles que celles-ci, mon fils, sois averti.
Multiplier les livres n’aurait pas de fin,
et beaucoup d’étude est une fatigue pour la chair.

13Fin du discours, le tout entendu :
Crains Dieu et observe ses commandements,
car c’est là le tout de l’homme.
14Car Dieu citera en un jugement portant sur tout ce qui est caché,
toute œuvre, soit bonne, soit mauvaise.

  1. I, 1. Sans prétendre résoudre la question du caractère poétique de l’Ecclésiaste, nous avons divisé le texte en stiques, afin de rendre le parallélisme plus sensible ; nous avons suivi généralement les divisions de la Bible des LXX (édition Barclay Swete). — Ecclésiaste, hébreu qôhéleth, celui qui préside une assemblée et y enseigne.
  2. 8. Ne se lasse pas d’entendre. M. à m., ne se remplit pas à entendre.
  3. 11. D’autres : On ne se souvient pas des anciens, et des descendants qui existeront il n’y aura pas de souvenir chez ceux qui existeront ensuite.
  4. 12 et sv. J’ai été roi. Dans ce passage, on trouve beaucoup de traits qui rappellent ce qui est dit de Salomon dans les livres des Rois et des Paralipomènes. Aussi de nombreux auteurs voient-ils dans ce passage une confirmation des données du titre (vers. 1) et concluent-ils que l’on doit attribuer l’Ecclésiaste à Salomon. D’autres, il est vrai, même parmi les catholiques, voient dans ce texte comme dans Sag. vi-ix, une description symbolique, de laquelle on ne peut rien conclure quant à l’auteur du livre.
  5. 16. Je me suis dit en moi-même. M. à m. J’ai parlé avec mon cœur en disant.
  6. II, 8. Des femmes en abondance, sens douteux, texte incertain.
  7. 25. Sans lui, d’après Hébr. et LXX. Vulg., car qui mangera et goûtera les délices plus que je ne l’ai fait ?
  8. III, 11. Dieu a fait toute chose belle, appropriée. — Il a mis dans leur cœur l’éternité, ou mieux la durée indéterminée, « leur donnant la capacité de s’élever au-dessus du moment présent pour envisager l’ensemble des événements, soit de la vie des individus soit de la vie des peuples, avec le désir de les comprendre et de les expliquer » (Podechard). Vulg., il a abandonne le monde à leurs discussions.Mais sans que etc. L’œuvre de Dieu constitue une énigme indéchiffrable.
  9. 15. Dieu ramène ce qui est passé ; m. à m., recherche ce qui a été chassé.
  10. 18. Les éprouve. D’autres, les fasse connaître.Et qu’ils voient. La plupart des versions ont lu le Hiphil au lieu du Qal : et montre.
  11. 19. Souffle ; il s’agit du souffle de vie. De même au verset 21.
  12. 21. Qui connaît le souffle des hommes, qui monte en haut etc. Cette traduction, qui suit la ponctuation massorétique, a contre elle toutes les versions anciennes et le contexte. Au lieu du article, c’est le interrogatif qu’il faut lire. Qui sait si le souffle de vie des hommes monte en haut, et si le souffle de la bête descend en bas vers la terre ?
  13. IV, 1. Ils sont en butte etc. M. à m., et de la main de leurs oppresseurs procède la force (la violence).
  14. 9. Mieux vaut etc. ; m. à m., Deux sont mieux qu’un seul.
  15. 15. Près du jeune homme ; m. à m., près du jeune homme second.
  16. 17. S’approcher etc. ; m à m. et s’approcher, pour écouter vaut mieux que le donner des insensés un sacrifice ; car ils ne savent que faire le mal. LXX Et sois près pour écouter ; car ton sacrifice sera meilleur que le don des insensés.
  17. V, 5. L’envoyé de Dieu, le prêtre. LXX et d’autres versions, devant la face de Dieu.
  18. 6. Sens et texte douteux.
  19. 16. Toute sa vie ; m. à m., tous ses jours etc, LXX : Tous ses jours se passent dans les ténèbres, le deuil, la grande colère, la souffrance et l’irritation.
  20. VI. 2. D’en jouir, litt. d’en manger.
  21. 5. Il a plus de repos. Vulg., il n’a pas connu la différence du bien et du mal.
  22. 6. Sans jouir du bonheur ; m. à m., sans voir le bonheur.
  23. 12. de l’hébreu correspond à vii, 1 de la Vulgate qui, de ce fait, se trouve dans tout le chap. vii en retard d’un vers, sur l’hébreu.
  24. VII, 8. La fin d’une chose ; Vulg., d’un discours (finis orationis).
  25. 11. D’autres : La sagesse vaut mieux qu’un héritage, et même plus pour ceux qui voient le soleil, les vivants.
  26. 16. Pourquoi voudrais-tu te détruire ? D’autres : Pourquoi te rendrais tu stupide ?
  27. 18. Car celui qui craint Dieu évite tous ces excès. D’autres : car celui qui craint Dieu accomplira l’un et l’autre.
  28. 20. Tout homme, même le sage, tombe parfois dans le péché ; mais la sagesse le relève.
  29. 21. De peur que tu n’entendes ton serviteur le maudire. D’autres : de peur que tu n’apprennes que ton serviteur te maudit.
  30. 23. J’ai reconnu vrai ; litt., j’ai éprouvé, j’ai étudié.
  31. 25. J’ai reconnu ; m. à m., et à reconnaître.
  32. VIII, 1. L’explication des choses, ou la solution d’une affaire.
  33. 3. Une chose mauvaise, un mauvais cas.
  34. 6. Car il est grand etc., m. à m., car le mai de l’homme est grand sur lui.
  35. 7. Comment cela arrivera ; ou quand cela arrivera.
  36. 10. LXX et Vulg. paraissent avoir lu autrement : J’ai vu des impies ensevelis, qui, lors même qu’ils vivaient, étaient dans le lieu saint et étaient loués dans la cité, comme si leurs œuvres eussent été justes, etc.
  37. 11. S’enhardit ; litt., se remplit du désir de faire le mal.
  38. 12, 13. D’autres (reliant à ce qui précède) : parce que le pécheur fait le mal cent fois et prolonge ses jours, bien que je sache que le bonheur sera pour ceux qui craignent Dieu parce qu’ils le craignent, et que le bonheur ne sera pas pour le méchant, etc.
  39. IX, 1. Ne connaît ni l’amour… c. à-d. ne sait si ce sera l’amour ou si ce sera la haine qui prévaudra. Vulg. : Nul ne sait s’il est digne d’amour et de haine, mais toutes choses sont réservées pour l’avenir, étant incertaines.Tout est devant eux ; (vers. 2) tout arrive également à tous, même sort etc. ; LXX permet de traduire : tout devant eux est vanité : un même sort est pour tous.
  40. 4. Car pour l’homme etc. M. à m. car celui qui est associé (d’après le qerey ; kethib, est choisi) à tous les vivants, il y a de l’espérance. Le texte est assez irrégulier.
  41. 14. De hautes tours ; ou, de puissants retranchements.
  42. X, 1. Infectent et corrompent l’huile du parfumeur. LXX : infectent la préparation de l’huile du parfumeur. La seconde partie du vers, présente des variantes quand on compare l’hébreu aux versions. L’hébreu voudrait dire (l’emporte sur, litt. pèse plus) qu’un peu de folie détruit les bons effets de la sagesse et de la considération.
  43. 2. Le cœur, qui, dans la psychologie des Hébreux, est l’organe de l’intelligence et de la volonté, est à la droite du sage, c.‑à-d. se porte du bon côté, du côté du bien, du devoir ; la gauche désigne naturellement tout l’opposé.
  44. 3. Et il montre à tous qu’il est fou. M. à m., et il dit à tous. Vulg. et il estime que tous sont fous (il dit de tous : C’est un fou).
  45. 7. Aller à pied ; m. à m., aller à terre.
  46. 18. Quand les toits plats des maisons palestiniennes n’étaient pas entretenus, les poutres pourrissaient rapidement et fléchissaient, et l’eau tombait sur le sol.
  47. XI, 1-2. Presque tous les anciens interprètes ont entendu ces versets de l’aumône.
  48. 3. L’homme ne peut rien contre certaines fatalités de la nature.
  49. 4. L’homme qui voudrait n’agir qu’à coup sûr, après avoir tout prévu, n’oserait jamais rien entreprendre, car l’avenir est connu de Dieu seul ; chacun doit remplir sa tâche en s’abandonnant à la Providence.
  50. 5. Du vent ou, mieux peut-être, du souffle de vie.
  51. XII, 2. Paraît être une évocation de l’hiver, image de la décrépitude.
  52. 3, 4. La maison dont la vie s’éteint peu à peu, nouvelle image de la décrépitude.
  53. 5. Images se rapportant au même sujet, comme le marque la fin du verset, mais d’une interprétation difficile.
  54. 6. Images diverses de la mort ; cf. vers. 7.