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Bible Segond 1899/Matthieu/ch27

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ÉVANGILE SELON MATTHIEU
(p. 42-44).

27 Dès que le matin fut venu, tous les chefs des prêtres et les anciens du peuple tinrent conseil contre Jésus, pour le faire mourir. 2Après l’avoir lié, ils l’emmenèrent, et le livrèrent à Ponce Pilate, le gouverneur[1].

3 Alors Judas, qui l’avait livré, voyant qu’il était condamné, se repentit, et rapporta les trente pièces d’argent aux chefs des prêtres et aux anciens, 4en disant : J’ai péché, en livrant le sang innocent. Ils répondirent : Que nous importe ? Cela te regarde. 5Judas jeta les pièces d’argent dans le temple, se retira, et alla se pendre. 6Les chefs des prêtres les ramassèrent, et dirent : Il n’est pas permis de les mettre dans le trésor sacré[2], puisque c’est le prix du sang. 7Et, après en avoir délibéré, ils achetèrent avec cet argent le champ du potier, pour la sépulture des étrangers. 8C’est pourquoi ce champ a été appelé champ du sang, jusqu’à ce jour. 9Alors s’accomplit ce qui avait été annoncé par Jérémie, le prophète : Ils ont pris les trente pièces d’argent, la valeur de celui qui a été estimé, qu’on a estimé de la part des enfants d’Israël ; 10et ils les ont données pour le champ du potier, comme le Seigneur me l’avait ordonné.

Jésus devant Pilate, gouverneur romain. — Sentence de mort confirmée. — Outrages des soldats.

11 Jésus comparut devant le gouverneur. Le gouverneur l’interrogea, en ces termes : Es-tu le roi des Juifs ? Jésus lui répondit : Tu le dis. 12Mais il ne répondit rien aux accusations des chefs des prêtres et des anciens. 13Alors Pilate lui dit : N’entends-tu pas de combien de choses ils t’accusent ? 14Et Jésus ne lui donna de réponse sur aucune parole, ce qui étonna beaucoup le gouverneur.

15 À chaque fête, le gouverneur avait coutume de relâcher un prisonnier, celui que demandait la foule. 16Ils avaient alors un prisonnier fameux, nommé Barabbas. 17Comme ils étaient assemblés, Pilate leur dit : Lequel voulez-vous que je vous relâche, Barabbas, ou Jésus, qu’on appelle Christ ? 18Car il savait que c’était par envie qu’ils avaient livré Jésus. 19— Pendant qu’il était assis sur le tribunal, sa femme lui fit dire : Qu’il n’y ait rien entre toi et ce juste ; car aujourd’hui j’ai beaucoup souffert en songe à cause de lui. — 20Les chefs des prêtres et les anciens persuadèrent à la foule de demander Barabbas, et de faire périr Jésus. 21Le gouverneur prenant la parole, leur dit : Lequel des deux voulez-vous que je vous relâche ? Ils répondirent : Barabbas. 22Pilate leur dit : Que ferai-je donc de Jésus, qu’on appelle Christ ? Tous répondirent : Qu’il soit crucifié ! 23Le gouverneur dit : Mais quel mal a-t-il fait ? Et ils crièrent encore plus fort : Qu’il soit crucifié ! 24Pilate, voyant qu’il ne gagnait rien, mais que le tumulte augmentait, prit de l’eau, se lava les mains en présence de la foule, et dit : Je suis innocent du sang de ce juste. Cela vous regarde. 25Et tout le peuple répondit : Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants !

26 Alors Pilate leur relâcha Barabbas ; et, après avoir fait battre de verges Jésus, il le livra pour être crucifié.

27 Les soldats du gouverneur conduisirent Jésus dans le prétoire[3], et ils assemblèrent autour de lui toute la cohorte[4]. 28Ils lui ôtèrent ses vêtements, et le couvrirent d’un manteau écarlate[5]. 29Ils tressèrent une couronne d’épines, qu’ils posèrent sur sa tête, et ils lui mirent un roseau dans la main droite ; puis, s’agenouillant devant lui, ils le raillaient, en disant : Salut, roi des Juifs ! 30Et ils crachaient contre lui, prenaient le roseau, et frappaient sur sa tête. 31Après s’être ainsi moqués de lui, ils lui ôtèrent le manteau, lui remirent ses vêtements, et l’emmenèrent pour le crucifier.

Jésus crucifié.

32 Lorsqu’ils sortirent, ils rencontrèrent un homme de Cyrène[6], appelé Simon, et ils le forcèrent à porter la croix de Jésus. 33Arrivés au lieu nommé Golgotha, ce qui signifie lieu du crâne, 34ils lui donnèrent à boire du vin mêlé de fiel[7] ; mais, quand il l’eut goûté, il ne voulut pas boire.

35 Après l’avoir crucifié, ils se partagèrent ses vêtements, en tirant au sort, [afin que s’accomplît ce qui avait été annoncé par le prophète : Ils se sont partagé mes vêtements, et ils ont tiré au sort ma tunique.] 36Puis ils s’assirent, et le gardèrent.

37 Pour indiquer le sujet de sa condamnation, on écrivit au-dessus de sa tête : Celui-ci est Jésus, le roi des Juifs.

38Avec lui furent crucifiés deux brigands, l’un à sa droite, et l’autre à sa gauche.

39 Les passants l’injuriaient, et secouaient la tête, 40en disant : Toi qui détruis le temple, et qui le rebâtis en trois jours, sauve-toi toi-même ! Si tu es le Fils de Dieu, descends de la croix ! 41Les chefs des prêtres, avec les scribes et les anciens, se moquaient aussi de lui, et disaient : 42Il a sauvé les autres, et il ne peut se sauver lui-même ! S’il est roi d’Israël, qu’il descende de la croix, et nous croirons en lui. 43Il s’est confié en Dieu ; que Dieu le délivre maintenant, s’il l’aime. Car il a dit : Je suis Fils de Dieu. 44Les brigands, crucifiés avec lui, l’insultaient de la même manière.

45 Depuis la sixième heure jusqu’à la neuvième[8], il y eut des ténèbres sur toute la terre. 46Et vers la neuvième heure, Jésus s’écria d’une voix forte : Éli, Éli, lama sabachthani ? c’est-à-dire : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? 47Quelques-uns de ceux qui étaient là, l’ayant entendu, dirent : Il appelle Élie. 48Et aussitôt l’un d’eux courut prendre une éponge, qu’il remplit de vinaigre, et, l’ayant fixée à un roseau, il lui donna à boire. 49Mais les autres disaient : Laisse, voyons si Élie viendra le sauver.

50 Jésus poussa de nouveau un grand cri, et rendit l’esprit.

51 Et voici, le voile[9] du temple se déchira en deux, depuis le haut jusqu’en bas, la terre trembla, les rochers se fendirent, 52les sépulcres s’ouvrirent, et plusieurs corps des saints qui étaient morts ressuscitèrent. 53Étant sortis des sépulcres, après la résurrection de Jésus, ils entrèrent dans la ville sainte, et apparurent à un grand nombre de personnes.

54 Le centenier et ceux qui étaient avec lui pour garder Jésus, ayant vu le tremblement de terre et ce qui venait d’arriver, furent saisis d’une grande frayeur, et dirent : Assurément, cet homme était Fils de Dieu.

55Il y avait là plusieurs femmes qui regardaient de loin, et qui avaient accompagné Jésus depuis la Galilée, pour le servir. 56Parmi elles étaient Marie de Magdala[10], Marie, mère de Jacques et de Joses, et la mère des fils de Zébédée.

Le corps de Jésus mis dans un sépulcre. — La garde auprès du sépulcre.

57 Le soir étant venu, arriva un homme riche d’Arimathée[11], nommé Joseph, lequel était aussi disciple de Jésus. 58Il se rendit vers Pilate, et demanda le corps de Jésus. Et Pilate ordonna de le remettre. 59Joseph prit le corps, l’enveloppa d’un linceul blanc, 60et le déposa dans un sépulcre neuf, qu’il s’était fait tailler dans le roc. Puis il roula une grande pierre à l’entrée du sépulcre, et il s’en alla. 61Marie de Magdala et l’autre Marie étaient là, assises vis-à-vis du sépulcre.

62 Le lendemain, qui était le jour après la préparation[12], les chefs des prêtres et les pharisiens allèrent ensemble auprès de Pilate, et dirent : 63Seigneur, nous nous souvenons que cet imposteur a dit, quand il vivait encore : Après trois jours je ressusciterai. 64Ordonne donc que le sépulcre soit gardé jusqu’au troisième jour, afin que ses disciples ne viennent pas dérober le corps, et dire au peuple : Il est ressuscité des morts. Cette dernière imposture serait pire que la première. 65Pilate leur dit : Vous avez une garde ; allez, gardez-le, comme vous l’entendrez. 66Ils s’en allèrent, et s’assurèrent du sépulcre au moyen de la garde, après avoir scellé la pierre.

  1. Ponce Pilate gouvernait alors la Judée de la part des Romains, avec le titre de procurateur. Le sanhédrin ne pouvait pas faire exécuter une sentence capitale sans son autorisation. Pilate, dont la résidence ordinaire était à Césarée, se trouvait en ce moment à Jérusalem, probablement à cause de la fête de Pâque.
  2. Le trésor sacré, renfermant les dons et contributions pour l’entretien du culte.
  3. Le prétoire, nom par lequel on désignait la résidence officielle du gouverneur.
  4. La cohorte, ou dixième partie d’une légion, soit environ 4 ou 500 hommes.
  5. D’un manteau d’écarlate, tel que les chefs militaires avaient coutume d’en porter.
  6. Cyrène, capitale de la Libye supérieure, sur la côte d’Afrique. Là, comme en beaucoup d’autres contrées, se trouvait une colonie de Juifs, dont Simon a dû faire partie.
  7. Boisson différente de celle offerte une seconde fois à Jésus, v. 48.
  8. De midi à trois heures.
  9. Le voile, rideau qui séparait le lieu saint du lieu très saint.
  10. Marie de Magdala ; cette Marie est ainsi nommée, probablement parce qu’elle était originaire de Magdala, bourg de la Galilée, aux environs du lac.
  11. Arimathée, ville qu’on croit être la même que Rama ou Ramathaïm, dans la montagne d’Ephraim.
  12. La préparation, terme par lequel on désignait le jour qui précédait chaque sabbat, soit le vendredi. Le lendemain était par conséquent le jour même du sabbat.