Biographie nationale de Belgique/Tome 3/CATULLE, André

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CATULLE (André), écrivain latin, chanoine de la cathédrale de Tournai, né vers 1586, à Néchin, dans le Tournésis ; il termina ses premières études à Tournai, au collége de Saint-Paul. Il fit un long séjour à l’Université de Louvain ; en même temps qu’il enseignait la rhétorique au collège de Vaulx, il avait obtenu le titre de licencié ès droits ; quoiqu’on l’ait appelé docteur, on ne trouve pas son nom dans la liste des doctores U. J. au chap. X des Fasti academici de Valère André. Il avait brillé dans ses leçons d’humanités et y avait déployé beaucoup d’éloquence, nous dit-on, quand son talent de jurisconsulte le fit appeler, le 2 décembre 1620, au chapitre de la cathédrale de Tournai : en qualité d’official, puis d’archidiacre et de vicaire général du diocèse, il fut chargé d’affaires litigieuses d’assez grande importance. Presque octogénaire, il fut autorisé, en 1667, à échanger son canonicat de Tournai avec Jacques Thienpont, contre la charge de prévôt à la collégiale Saint-Hermès, de Renaix. Il mourut le 27 septembre 1667. Grâce aux recherches bibliographiques de feu F. Lecouvet, on sait que Catulle avait cultivé la poésie latine dans sa jeunesse, et qu’il avait le droit d’être appelé par ses contemporains Catullius, plutôt que Catullus, nom du poëte romain ; on sait aussi qu’il s’était livré à des travaux d’érudition en dehors des devoirs de sa dignité ecclésiastique. Plusieurs de ses poèmes latins ont été imprimés à Louvain et à Tournai : ils traitent pour la plupart des sujets pieux, tels que les douleurs et les joies de Marie, mais avec une profusion extraordinaire d’allusions et de traits mythologiques se conciliant fort mal avec les mystères chrétiens. Le morceau de poésie le plus curieux qui nous soit venu de lui est un drame allégorique qu’il fit représenter en 1613, à Louvain, dans le collége auquel il était attaché, et imprimé l’année suivante : Scholæ Vaulxianæ Prometheus sive de origine scientiarum drama. Lovanii, typis Philippi Dormalii, 1614. (Volume très-rare, de 56 pages non chiffrées, petit in-4o, de l’imprimerie de Ph. Van Dormael). Ce drame, dont la mise en scène repose sur la fable connue de Prométhée, bienfaiteur des hommes, révélateur des sciences et des arts, est au fond une requête ; c’est le canevas d’un plaidoyer adressé aux magistrats de Louvain en faveur du Collegium Vaulxianum seu Gandense, établi peu auparavant pour l’enseignement des humanités, mais possédant de minces ressources. Le poème dramatique en trois actes, écrit par Catulle dans le goût de l’époque, avec les ressources et les afféteries de la versification latine, renferme des détails fort instructifs sur l’état des études et sur le rôle de plusieurs hommes restés célèbres : sous des formes allégoriques, on y voit la lutte des intérêts bien distincts des facultés de l’ancienne Alma Mater et on y découvre la situation précaire des quelques établissements destinés à continuer les traditions littéraires du XVIe siècle et à maintenir l’influence des langues et des lettres classiques dans l’éducation. Des écrits d’André Catulle en prose, le plus important est sa monographie sur l’histoire de la ville et de l’Église de Tournai, dédiée au prince Léopold Guillaume, archiduc d’Autriche : Tornacum, civitas metropolis et cathedra episcopalis Nerviorum. Bruxellis, ex typis Joannis Mommartii. MDCLII, in-4o, 12 feuillets en 252 pages, avec appendice de 47 pages renfermant les témoignages de divers savants en faveur des opinions de l’auteur. Le Tornacum de Catulle, divisé en onze traités, présente de l’intérêt par les documents qu’il a mis en œuvre, avant que Sanderus eût composé sur la même ville de Tournai un ouvrage plus étendu, achevé en 1662, mais resté inédit : l’historiographe flamand avait dédié le second livre de cet ouvrage à Catulle dont il cite plusieurs fois le livre imprimé. (J. de Saint-Genois, Antoine Sanderus et ses écrits, Gand, 1861, pp. 104-110.) La première monographie a déjà de la valeur pour l’histoire du siége épiscopal de Tournai, et elle est riche en renseignements biographiques sur une foule d’hommes célèbres dans diverses carrières dont Tournai ou quelque localité d’alentour était l’endroit natal. De plus, l’écrivain avait discuté une question d’érudition historique, encore soulevée de nos jours : à savoir si Tournai et non Bavai fut la capitale des Nerviens. Il défendit par de nombreux arguments la thèse affirmative qui semble abandonnée. (Voir Schayes, la Belgique pendant et avant la domination romaine, 2e édit., tome ii, 1858, pp. 295-297, 323-25). Catulle a vécu à Tournai au moment même où cette ville comptait grand nombre d’esprits cultivés, soit dans les familles nobles, par exemple le poëte Jean d’Eunetières, soit dans le chapitre de la cathédrale ; de ce nombre, Jean Boucher, Godefroi Wendelin, Jérôme van Winghe, Claude d’Ausque ou Dausqueius, savant helléniste. Fort estimé dans ses emplois, il était en relation avec la plupart des écrivains florissant alors en Belgique, et il fut même honoré de l’amitié des plus célèbres, tels que Erycius Puteanus qu’il avait entendu à Louvain. Les défauts qu’on lui reprocherait comme poëte et comme prosateur étaient ceux que l’exemple de ces hommes avait répandus et que leur renommée semblait en quelque sorte justifier ; on dirait même qu’il relevait de leur école, d’une autorité prépondérante et incontestée parmi ceux qui s’occupaient de littérature latine. — André Catulle avait un neveu du nom de Jean qui, promu à Louvain licencié en droit civil et canonique, devint chanoine de Tournai en 1644 et mourut en 1673. Les seuls écrits qu’on lui attribue ont trait aux difficultés longtemps pendantes au XVIIe siècle entre l’évêque de Tournai et l’abbé de Saint-Amand.

Félix Nève.

Foppens, d’après Valère André, Bibliotheca Belgica, t. I, p. 50. — F.-F.-J. Lecouvet, André et Jean Catulle (Messager des sciences historiques, 1861, pp. 271-281) ; Tournai littéraire, 1re  partie, Gand, 1841. — Félix Nève, Prométhée, drame latin d’André Catulle, représenté en 1613 dans un collége de Louvain. (Messager des sciences historiques, 1862, pp. 163-205).