Biographie universelle ancienne et moderne/2e éd., 1843/TAI-TSOU
Tome 40 page 580 à 581
TAI-TSOU
TAI-TSOU (1)[1], empereur de la
Chine,chef et fondateur de la dynastie
des Tcbeou postérieurs, monta sur le
trône l’an 951 de l’ère chrétienne.
Avant son élévation, il portait le nom
de Kono-ouci, qu’il avait illustré
dans la guerre contre les Tartares.
Ses talents, joints à sa naissance,
l’élevèrent rapidement aux premiers
emplois militaires. Il fut un des quatre mandarins auxquels l’empereur
Kao-tsou recommanda son fils Yu-ti
qu’il avait déclaré son successeur. La
confiance de ce prince dans ses ministres ne fut point trompée. Kono-ouci, chargé de pacifier les provinces de l’occident, assiégea les chefs
des rebelles dans les places où ils s’étaient renfermés, et les força de se
donner la mort. Affermi sur son trône, Yu-ti ne songea plus qu’à se livrer à son goût effréné pour les plaisirs. Il abandonna le soin du gouvernement à ses ministres, et nomma le
brave Kono-ouci commandant-général de ses troupes. Des ministres intègres ne purent voir sans peine les
revenus de l’état dissipés en vaines
prodigalités. Au risque de lui déplaire,
ils osèrent faire des représentations
à l’empereur sur la nécessité de diminuer ses dépenses. Yu-ti, loin de leur
savoir gré de cette noble franchise, les
fit mettre à mort, et donna en même
temps l’ordre d’exterminer leurs familles. Un sort pareil menaçait Kono-ouci. Les soldats, dont il avait
gagné le cœur par sa prudence et ses
libéralités, l’engagent à se rendre à
la cour, pour dissiper les impressions
fâcheuses qu’on aurait pu donner à
l’empereur sur sa conduite, et tous
veulent l’accompagner. Effrayé par
le bruit de sa marche, Yu-ti rassemble à la hâte des troupes, et s’avance
au-devant de Kono-ouci ; mais il est
abandonné par ses soldats : sa capitale lui ferme ses portes. Il arrive la
nuit dans un village dont les habitants
prennent les armes pour sa défense,
et, dans le tumulte, l’empereur est
tué sans être reconnu. Kono-ouci
s’empresse d’inviter l’impératrice à
se concerter avec les mandarins pour
désigner un successeur à l’empire.
Les suffrages se réunirent sur un neveu d’ Yu-ti, que ce prince avait adopté ; mais ce choix mécontente les soldats. Alors l’impératrice force Kono-ouci de saisir les rênes de l’état.
Le premier soin de Taï-tsou, en montant sur le trône, fut de publier une
amnistie générale. Descendant d’une
des branches de la grande famille
de Tcheou, il ordonna que sa dynastie prendrait ce nom. Dès qu’il eut
pacifié ses états, il alla visiter le tombeau de Confucius, auquel il décerna,
par un édit, le titre de roi. Les courtisans qui l’accompagnaient lui ayant
représenté l’inconvenance d’accorder
ce titre à un homme qui, pendant sa
vie, avait été le sujet d’un petit prince : « On ne peut, répondit-il, trop
honorer celui qui a été le maître des
rois et des empereurs. » Cependant
le frère d’Yu-ti n’avait point renoncé
à ses prétentions au trône. Allié avec
quelques gouverneurs mécontents, il
ne tarda pas à lever l’étendard de la
révolte. Taï-tsou chargea quelques-uns
de ses généraux de marcher contre
les rebelles. L’affaiblissement de sa
santé l’obligeait de rester dans son
palais. Tous les soins ne purent le rétablir ; et il mourut, en 954, à l’âge
de cinquante trois ans, laissant pour
successeur son neveu, qui prit le nom
de Chi-tiong. D’après ses intentions,
il fut inhumé en habit de bonze. C’est
dans la deuxième année du règne de
ce prince que fut publiée l’édition des
NeufKing, imprimée avec des planches de bois ; véritable édition princeps, dit M. Abel-Rémusat, qui fixe
l’époque de l’établissement de l’art
typographique à la Chine {Journ. des savants, 1820, p. 557 ). — Ce nom de
Taï - Tsou est commun à plusieurs
fondateurs de dynasties à la Chine,
dont le plus célèbre est celui qui est
vulgairement cité sous le nom de Gengiscan, ou plus exactement Tching-gis-khan (voy. Djenguyz-khan ).
W—s.
- ↑ (1) On a déjà-eu occasion de faire observer que les noms par lesquels les empereurs chinois sont désignés dans les écrits des Européens ne sont pas de véritables noms, mais des appellations honorifiques décernées à ces princes après leur mort, ou des titres assignés aux années de leur règne. Les noms de Taï-tsou et de Taï-tsoung appartiennent à la première classe, ainsi que ceux de Chi-tsou et de Chi-tsoung, de Wen-ti, de Wou-ti et plusieurs autres. Chacun de ces noms revient dans l’histoire chinoise autant de fois qu’il y a de changement de dynastie, et l’ordre dans lequel ils reparaissent est à peu près fixé par l’usage, de sorte que pour savoir de quel prince on entend parler, il est nécessaire d’être informé du nom de la famille impériale à laquelle ce prince appartenait. Taï-tsou (le grand aïeul) est le nom qu’on donne d’ordinaire au fondateur d’une dynastie, Taï-tsoung ( le grand illustre prince ) à celui qui l’a consolidée ou qui en a augmenté l’éclat ou la puissance. Du reste il y a dans les annales chinoises une douzaine de Taï-tsou et autant de Taï-tsoung. Pour s’entendre il faut ajouter le nom de la dynastie : Soung Taï-tsoung ou Thang Taï-tsoung, le Taï-tsoung de la dynastie des Soung ou de celle des Thang ; Tcheou Taï-tsou ou Youan-Tai-tsou, le Taï-tsou des Tcheou ou des Youan, etc. A. R— T.