Bourassa et l’Anti-Laurierisme/Contradictions

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CONTRADICTIONS.


SIR WILFRID LAURIER JUGÉ PAR M. BOURASSA.

FAIBLE OU FORT.


Lorsque l’on est obligé de discuter avec M. Bourassa, il y a deux précautions préliminaires obligatoires. C’est, d’abord, de trier ce qu’il peut y avoir de cohérent et de susceptible d’analyse au milieu des invectives qui forment le fonds de ses articles. Ensuite, après avoir débarrassé ces bribes d’idées du fumier où ils les a serties — chacun s’entoure de ce qui lui plait — c’est de revoir aux sources officielles toutes ses citations, afin d’en séparer le vrai du faux ; de rendre aux bribes de vrais textes, qui lui échappent, leur signification réelle d’après le contexte ; et de situer les faits dans le cadre qui leur appartient.

Deux des articles qu’il a consacrés à Sir Wilfrid Laurier et à sa mission à Londres, dans le « Devoir », traités de cette manière, ne laissent plus guère à la critique que des affirmations gratuites, et de fausses présentations de faits, dont la portée est complètement dénaturée.


Pour M. Bourassa, Sir Wilfrid Laurier est, d’abord, un homme énergique.

« Rien n’est plus faux que la légende de la faiblesse du premier ministre, de son penchant à se laisser dominer par son entourage. Mais ceux qui ont cru à la légende et qui ont voulu, comme M. Tarte, M. Blair ou M. Sifton, en profiter pour prendre trop de place, ont payé de leur tête leur audace ou leur opiniâtreté. » ( « Le Devoir », 11 mai.)

Cette appréciation lui servait d’entrée en matière pour expliquer, à sa manière, le canard de la rupture Fielding, auquel M. Bourassa feignait de croire.

Mais, le 12 mai, il fallait détruire auprès des fidèles la notion qui se répandait, que Sir Wilfrid Laurier allait à Londres pour déjouer les projets de fédération impériale qui s’agitaient autour de la conférence. Changement de ton. Sir Wilfrid Laurier n’est plus qu’une bonne pâte que chacun peut pétrir à son gré :

« Le premier ministre est un habile homme et un merveilleux négociateur ; mais il n’a ni la NETTETÉ DE PENSÉE, ni la FORCE DE CONVICTION, ni la VIGUEUR DE CARACTÈRE qu’il faudrait pour tenir tête aux hommes puissants qui dirigent le mouvement impérialiste. IL EST TOTALEMENT INCAPABLE DE RÉSISTER AUX MOYENS DE CONQUÊTE ET D’INTIMIDATION DONT LES IMPÉRIALISTES DISPOSENT — ( « Le Devoir », 12 mai.)

Voilà, en passant, une contradiction qui méritait d’être signalée.