Bourses de voyage (1904)/Première partie/Chapitre VI

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Hetzel (Tome Ip. 106-123).

VI

maîtres à bord.

Le coup avait réussi. Cette première partie du drame s’était accomplie dans toute son horreur et en des conditions d’extraordinaire audace.

Après l’Halifax, Harry Markel était le maître de l’Alert. Personne ne pourrait rien soupçonner du drame qui venait de se passer, personne ne saurait dénoncer le crime commis dans l’un des ports les plus fréquentés du Royaume-Uni, à l’entrée de cette baie de Cork, où relâchent les nombreux navires qui mettent en communication l’Europe et l’Amérique.

À présent, ces malfaiteurs n’avaient plus à redouter la police anglaise. Elle n’irait pas les dépister à bord de l’Alert. À eux toute facilité de reprendre le cours de leurs pirateries dans les lointains parages du Pacifique. Ils n’avaient plus qu’à lever l’ancre, à prendre le large. En quelques heures, ils seraient hors du canal de Saint-George.

Il est vrai, lorsque les pensionnaires d’Antilian School arriveraient pour embarquer sur l’Alert dans la matinée du lendemain, l’Alert ne serait plus à son mouillage, et c’est en vain qu’on le rechercherait dans la baie de Cork ou dans le port de Queenstown.

Et alors, cette disparition reconnue, quelle explication imaginer ?… Quelles hypothèses se présenteraient à l’esprit ?… Le capitaine Paxton et son équipage avaient-ils été forcés de mettre à la voile, sans même attendre leurs passagers ?… Mais pour quelle raison ?… Ce n’était pas le mauvais temps qui avait contraint le navire à quitter l’anse Farmar… La brise du large se faisait à peine sentir aux approches de la baie… Les bâtiments à voiles y étaient encalminés… Seuls, depuis quarante-huit heures, quelques steamers avaient pu y entrer ou en sortir… La veille encore, l’Alert avait été vu à cette place, et, quant à supposer que, pendant la nuit il eût été abordé, qu’il eut péri dans une collision sans qu’il en restât une épave, cela était par trop invraisemblable.

Il était donc à croire que la vérité ne serait pas connue de sitôt, qu’elle ne le serait jamais peut-être, à moins que quelque cadavre, retrouvé sur une des grèves, ne vînt révéler le mystère de cet épouvantable massacre.

Mais il importait que Harry Markel abandonnât au plus tôt le mouillage de l’anse Farmar, que l’Alert ne fût plus à ce mouillage au lever du jour. Si les circonstances le favorisaient au sortir du canal de Saint-George, au lieu de mettre le cap au sud-ouest, en direction des Antilles, l’Alert mettrait le cap au sud. Harry Markel aurait soin de se tenir hors de vue de toute terre, de s’éloigner des routes maritimes d’ordinaire suivies par les bâtiments qui descendent vers l’Équateur. Dans ces conditions, son avance lui éviterait d’être repris, en cas qu’on envoyât un aviso à sa recherche. Rien, d’ailleurs, n’autoriserait à penser que le capitaine Paxton et son équipage ne fussent pas à bord du navire frété par Mrs Kethlen Seymour. Pour quelles raisons il avait pris la mer, on ne saurait, et le mieux serait d’attendre quelques jours au moins.

Ainsi, Harry Markel avait pour lui toutes les chances. Ses neuf hommes suffiraient aisément à manœuvrer l’Alert. C’étaient, on l’a dit, de très bons marins, et ils avaient dans leur capitaine une confiance absolue et méritée.

Ainsi tout concordait pour assurer le succès de cette entreprise. À quelques jours de là, le navire n’ayant pas reparu dans la baie de Cork, les autorités seraient induites à penser qu’après avoir pris la mer pour une raison inconnue, il avait péri corps et biens en plein Atlantique. Jamais il ne viendrait à l’idée de personne que les échappés de la prison de Queenstown s’en fussent emparés. La police continuerait ses enquêtes, elle les étendrait aux environs de la ville. Le comté serait soumis à une surveillance très minutieuse. On donnerait l’éveil à la campagne. Bref, que cette bande de malfaiteurs fût reprise à court délai, il n’y aurait certainement pas à en douter.

Il est vrai, ce qui allait aggraver la situation, c’est que les circonstances ne se prêtaient pas à un appareillage immédiat.

En effet, le temps ne s’était point modifié et ne paraissait pas devoir changer. Toujours cette épaisse brume qui tombait lentement des basses zones du ciel. Les nuages immobilisés semblaient s’abaisser jusqu’à la surface de la mer. Par instants, les éclats du phare, à l’entrée de la baie, ne se laissaient plus même apercevoir. Au milieu de cette profonde obscurité, aucun navire à vapeur ne tenterait d’entrer ou de sortir. C’eût été courir le risque de se mettre au plein, faute d’avoir pu relever les feux de la côte et du canal de Saint-George. Quant aux voiliers, ils devaient être encalminés à quelques milles au large.

Du reste, la mer « ne sentait rien ». À peine les eaux de la baie ondulaient-elles sous l’action de la marée montante. À peine un léger clapotis murmurait-il sur les flancs de l’Alert. À peine le canot se balançait-il à l’arrière au bout de son amarre.

« Pas de vent de quoi remplir mon chapeau ! » s’écria John Carpenter, en accompagnant cette remarque des plus effroyables jurons.

Il ne fallait donc pas songer à l’appareillage.

Les voiles inertes auraient pendu le long des mâts, et le navire, entraîné par le flot, eût dérivé à travers la baie jusqu’au port de Queenstown.

En général, lorsque la marée commence à se faire sentir, les eaux du large amènent un peu de brise, et, bien que cette brise eût été contraire, Harry Markel, en louvoyant, aurait essayé de sortir. Le maître d’équipage connaissait assez ces parages pour ne point compromettre sa marche, et, une fois dehors, l’Alert aurait pu se tenir en bonne position pour profiter des premiers souffles. À plusieurs reprises, John Carpenter se hissa dans la mâture. Peut-être l’anse, abritée par de hautes falaises, arrêtait-elle le vent… Non, rien, et la girouette du grand mât demeurait immobile.

Cependant tout espoir n’était pas perdu, même si le vent ne reprenait point avant le jour. Il était dix heures à peine. Après minuit, la marée renverserait. À ce moment, profitant du jusant, Harry Markel ne tenterait-il pas de donner en mer ?… Aidé de ses embarcations, montées par tous les hommes et qui le prendraient à la remorque, l’Alert parviendrait-il à sortir de la baie ?… Et sans doute Harry Markel et John Carpenter avaient songé à cet expédient. Il est vrai, qu’arriverait-il si le bâtiment restait encalminé ?... Lorsque les passagers ne trouveraient plus le navire, ils reviendraient au port… On apprendrait que l’Alert avait appareillé… On le chercherait dans la baie… Et si le bureau maritime envoyait une chaloupe à vapeur pour le rejoindre au-delà de Roche-Point. Quels périls courraient alors Harry Markel et ses compagnons ?… Leur navire immobilisé serait reconnu, accosté, visité… C’était l’arrestation immédiate… C’était la police mise au courant du drame sanglant qui avait coûté la vie au capitaine Paxton et à son équipage !…

On le voit, il y avait un réel danger à partir, puisque l’Alert n’était pas assuré de faire route ; mais il y en avait un non moins réel à stationner dans l’anse Farmar. À cette époque de l’année, en effet, les calmes se prolongent parfois durant plusieurs jours.

Dans tous les cas, il fallait prendre un parti.

Si la brise ne se levait pas dans la nuit, si tout appareillage était impossible, Harry Markel et ses compagnons devraient-ils abandonner le navire, embarquer dans le canot, gagner le fond de l’anse, se jeter à travers la campagne avec l’espoir d’échapper aux recherches de la police, et, ce coup manqué, en tenter un autre ?… Peut-être, après s’être réfugiés dans quelque anfractuosité du littoral pour la journée, devraient-ils attendre la reprise du vent, et, la nuit venue, retourner à bord ?… Mais lorsque les passagers, dans la matinée du lendemain, trouveraient le bâtiment abandonné, ils reviendraient à Queenstown. On enverrait immédiatement des hommes saisir l’Alert et le ramener au port.

C’était donc de ces diverses questions que Harry Markel, le maître d’équipage et Corty s’entretenaient, tandis que les autres restaient groupés sur le gaillard d’avant.

« Chienne de brise ! répétait John Carpenter. On en a trop quand on n’en veut pas, et pas assez quand on en veut !…

— Et si le flot n’amène pas de vent, ajouta Corty, ce n’est pas avec le jusant qu’il soufflera de terre…

— Et le canot qui va embarquer demain matin son chargement de passagers !… s’écria le maître d’équipage. Faudra-t-il les attendre ?

— Qui sait, John ?…

— Après tout, déclara John Carpenter, ils ne sont qu’une dizaine… suivant ce qu’a dit le journal… des jeunes garçons avec leur professeur !… Nous avons bien su nous débarrasser de l’équipage de l’Alert, et nous saurions bien… »

Corty remuait la tête, non point qu’il désapprouvât John Carpenter et il crut devoir faire cette réflexion :

« Ce qui a été facile pendant la nuit le serait moins pendant le jour… Et puis ces passagers auront été amenés par des gens du port qui connaissent peut-être le capitaine Paxton !… Que leur répondre quand ils demanderont pourquoi il n’est pas à bord ?…

— On leur dira qu’il est allé à terre, répliqua le maître d’équipage… Ils embarqueront… leur canot retournera à Queenstown… et alors… »

Il est certain qu’au fond de cette anse déserte de Farmar, à un moment où aucun navire ne serait en vue, ces misérables auraient aisément raison des passagers. Ce n’était pas devant ce nouveau crime qu’ils reculeraient… M. Patterson et ses jeunes compagnons seraient massacrés sans avoir même pu se défendre, comme l’avaient été les hommes de l’Alert.

Cependant, suivant son habitude, Harry Markel laissait parler. Il réfléchissait à ce qu’exigeait cette situation très menaçante où les mettait l’impossibilité de gagner le large. Il n’hésiterait pas mais peut-être serait-il nécessaire d’attendre la prochaine nuit… encore une vingtaine d’heures… Et puis, il y avait toujours cette grave complication : c’est que le capitaine Paxton fût connu de l’un d’eux, et comment expliquer son absence le jour même, on peut dire à l’heure même où devait appareiller l’Alert ?…

Non, ce qui valait le mieux, c’était que le temps permit de mettre à la voile et de s’éloigner, pendant l’obscurité, d’une vingtaine de milles dans le sud de l’Irlande. La malchance était vraiment grande, qui empêchait de déraper pour se soustraire à toute poursuite.

Après tout, peut-être ne s’agissait-il que de prendre patience. Il n’était pas encore onze heures. Une modification des conditions atmosphériques ne se produirait-elle pas avant l’aube ? Oui, peut-être, bien que Harry Markel et ces gens de mer, habitués à observer le temps, n’entrevissent aucun symptôme favorable. Cette brume persistante leur causait de très légitimes inquiétudes. Cela indiquait une atmosphère pure de toute électricité, un de ces « temps pourris », disent les marins, desquels il n’y a rien à espérer, et qui peuvent durer pendant plusieurs jours.

Quoi qu’il en fût, le seul parti, pour l’instant, c’était d’attendre, c’est ce que Harry Markel se contenta de répondre. Le moment venu, on déciderait s’il conviendrait ou non d’abandonner l’Alert et de se réfugier sur quelque point de l’anse Farmar, afin de gagner la campagne. En tous cas, les fugitifs se précautionneraient de vivres, après avoir fait main basse sur l’argent renfermé dans les tiroirs du capitaine ou dans les sacs de ses matelots. On revêtirait les habits de l’équipage, déposés dans le poste, — tenue moins suspecte que celle des échappés de Queenstown. Ainsi, munis d’argent et de provisions, qui sait s’ils ne parviendraient pas à déjouer les recherches de la police, à s’embarquer dans quelque autre port de l’Irlande, à se mettre en sûreté sur un autre point du continent ?…

Donc, il y avait cinq ou six heures à passer avant de prendre une décision. Harry Markel et sa bande, traqués par les constables, étaient rompus de fatigue, lorsqu’ils arrivèrent à bord de l’Alert. En outre, ils mouraient de faim. Aussi, dès qu’ils furent les maîtres du navire, leur premier soin fut-il de se procurer quelque nourriture.

Celui d’entre eux qui était naturellement désigné pour cette besogne, c’était Ranyah Cogh, il alluma un fanal, il visita la cuisine, puis la cambuse, située sous le carré, à laquelle on accédait par un capot. D’ailleurs, la cale, approvisionnée largement en vue du voyage d’aller et retour, suffirait même à la traversée de l’Alert jusqu’aux mers du Pacifique.

Ranyah Cogh trouva tout ce qu’il fallait pour calmer la faim de ses compagnons, leur soif aussi : le brandy, le wisky et le gin ne manquaient point.

Cela fait, Harry Markel, qui avait pris sa part du repas, donna l’ordre à John Carpenter et aux autres d’échanger leurs habits contre ceux des matelots dont les corps gisaient sur le pont. Puis ils iraient dormir en quelque coin, en attendant qu’on les réveillât s’il y avait lieu de hisser les voiles et de lever l’ancre.

Quant à Harry Markel, il ne songea guère à se reposer. Ce qui lui paraissait urgent, c’était de consulter les papiers du bord, d’où il pourrait sans doute tirer certains renseignements. Il entra dans la cabine du capitaine, alluma la lampe, ouvrit les tiroirs avec les clefs prises dans les poches du malheureux Paxton ; puis, après avoir retiré divers papiers, il s’assit devant la table, gardant tout ce sang-froid dont il avait donné tant de preuves au cours de sa vie d’aventures.

Ces papiers divers, on le comprendra, étaient en règle, puisque l’appareillage devait s’effectuer le lendemain. En consultant le rôle d’équipage, Harry Markel put s’assurer que tous les matelots étaient présents lorsque le navire avait été surpris. Il n’y avait donc pas à craindre que quelques-uns d’entre eux, en corvée ou en permission à Queenstown, ne revinssent à bord. L’équipage avait bien été massacré jusqu’au dernier homme.

Harry Markel, en vérifiant le livre de la cargaison, constata également qu’en viande conservée, en légumes secs, en biscuits, en salaisons, en farine, etc., le navire était approvisionné pour au moins trois mois de navigation. Quant à la somme d’argent que contenait la caisse de la cabine, elle s’élevait en chiffres ronds à six cents livres[1].

Maintenant, Harry Markel pensa qu’il avait intérêt à connaître les voyages du capitaine Paxton sur l’Alert. En effet, au cours de ses traversées futures, il importait que le bâtiment ne fût pas ramené aux ports dans lesquels il avait déjà fait relâche et où son commandant pouvait être connu. Avec sa volonté de tout prévoir, Harry Markel n’était point homme à se départir de la plus extrême prudence.

L’examen des livres le renseigna à cet égard.

L’Alert était un navire de trois ans, construit à Birkenhead, aux chantiers de Simpson and C°. Il n’avait encore fait que deux voyages aux Indes, à destination de Bombay, de Ceylan et de Calcutta, d’où il était revenu directement à Liverpool, son port d’attache. Comme il n’avait jamais fréquenté les mers du Pacifique, Harry Markel devait être entièrement rassuré sur ce point. Au besoin, il eût même pu se faire passer pour le capitaine Paxton.

Du reste, des voyages antérieurs du capitaine, relatés sur son livre de bord, il résultait qu’il n’avait jamais fait de voyage aux Antilles, ni françaises, ni anglaises, ni hollandaises, ni danoises, ni espagnoles. S’il avait été choisi par Mrs Kethlen Seymour pour y conduire les boursiers d’Antilian School, si l’Alert venait d’être affrété pour ce voyage, c’était sur la recommandation d’un correspondant établi à Liverpool, et qui répondait à la fois du navire et du capitaine.

À minuit et demi, Harry Markel, sortant de la cabine, monta sur la dunette, où il rencontra John Carpenter.

« Toujours du calme ?… demanda-t-il.

— Toujours, répondit le maître d’équipage, et pas apparence que le temps change ! »

En effet, même bruine tombant de nuages bas, immobilisés d’un horizon à l’autre, même obscurité à la surface de la baie, et aussi même silence que ne rompait pas le plus léger clapotis du courant. On était dans les marées de quadrature, peu fortes à cette époque de l’année. Aussi le flot ne se propageait qu’avec lenteur à travers le goulet jusqu’à Cork et ne remontait que de deux milles seulement dans la rivière de la Lee.

Or, cette nuit-là, la mer devait être étale vers trois heures du matin, et c’est alors que le jusant se ferait sentir.

Certes, John Carpenter avait de bonnes raisons pour pester contre la mauvaise chance. Avec la marée descendante, si peu qu’eût soufflé la brise, et de quelque côté qu’elle fût venue, l’Alert aurait pu mettre à la voile, contourner la pointe de l’anse Farmar, donner dans le goulot, et, même en courant quelques bordées, se trouver avant le lever du soleil au large de la baie de Cork… Non ! il était là, sur son ancre, immobile comme une bouée ou un corps-mort, et n’ayant rien à espérer d’un appareillage effectué dans ces conditions !

Donc, attendre en rongeant son frein et sans espoir que la situation se modifierait lorsque le soleil déborderait des hauteurs de l’anse Farmar !

Deux heures se passèrent. Ni Harry Markel ni John Carpenter ni Corty n’avaient songé à prendre un instant de sommeil, tandis que leurs compagnons dormaient pour la plupart, étendus à l’avant le long des bastingages. L’aspect du ciel ne se modifiait point. Les nuages ne se déplaçaient pas. Si parfois un léger souffle arrivait du large, il cessait presque aussitôt, et rien n’indiquait que la brise dût prochainement s’établir, soit du côté de la mer, soit du côté de la terre.

À trois heures vingt-sept, alors que quelques lueurs commençaient à blanchir l’horizon de l’est, le canot, au bout de sa bosse, drossé par le jusant, vint heurter la coque de l’Alert, qui ne tarda pas à éviter sur son ancre et présenta l’arrière au large.

Peut-être pouvait-on espérer que la mer descendante amènerait un peu de vent du nord-ouest, ce qui eût permis au navire de quitter son mouillage pour donner dans le canal de Saint-George ; mais cet espoir fut bientôt déçu. La nuit s’achèverait sans qu’il eût été possible de lever l’ancre.

Il s’agissait maintenant de se débarrasser des cadavres. Auparavant, John Carpenter voulut s’assurer si un remous ne les retiendrait pas au milieu de l’anse Farmar. Corty et lui descendirent dans le canot et constatèrent que le courant portait vers la pointe qui séparait l’anse du goulet, puisque le jusant entraînait les eaux dans cette direction.

Le canot revint, se rangea le long du bord par le travers du grand mât, et, l’un après l’autre, les corps y furent déposés.

Puis, pour plus de précaution, le canot les transporta jusqu’au revers de la pointe, contre laquelle le courant aurait pu les jeter sur la grève.

Alors, John Carpenter et Corty les précipitèrent l’un après l’autre dans cette eau tranquille dont le clapotis se faisait à peine entendre. Ces cadavres coulèrent d’abord, puis remontèrent à la surface, et, saisis par le jusant, allèrent se perdre au large dans les profondeurs de la mer.

  1. 15,000 francs.