Carnet de guerre 1914-1915 de Louis Doisy

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Vendredi 21 aout (1914-1915.)


À cinq heures, brusquement la sonnerie à cheval retentit, nous ne la connaissions pas mais nous l’avons vite deviné, et 1/4 d’heure après les chevaux sont sellés.

Tout le 11e Esc monte à cheval direction Fives la Belgique, des patrouilles sont paraît-il signalées un peu partout en Belgique, les pelotons se quittent un peu au dessus de Fives pour diff directions, nous allons nous coucher à Watrelos il est 11h½.


Samedi 22. On repart à 3h½ après 2 heures de sommeil (paille) il semble qu’on sent l’ennemi on passe la frontière, nous traversons Mouscron, arrivée à Aelbeke, halte dans l’heure. On place des vedettes à tous les points cardinaux. La population assez [illisible] très bien, trop bien, même pour les hommes. 3 heures à cheval on nous signale des patrouilles ennemies dans la région, nous partons à leur chasse. On en signale une de huit à Courtrai, nous y allons conduits par un garde civique.

La population nous accueille triomphalement (Vive la France).

Tout à coup au détour d’une rue nous voyons la patrouille en question en nous voyant elle prend la fuite.

Aussitot sabre à la main et au galop à travers les rues de Courtrai. Je passe aussitôt en tête grace à mon cheval en un clin d’œil.

J’en passe un et au moment où mon sabre est pour lui entrer dans le dos patatras mon cheval glisse et je ramasse une formidable bûche, je sens un frolement, c’est un cheval qui me franchit puis d’autres qui s’étalent à côté de moi pas de chance !! Derrière moi l’officier allemand qui commandait la patrouille était déjà parti avec un de ses hommes, ils se sont rendus très facilement. Ceux qui ne sont pas tombés ont continué la poursuite individuellement à travers Courtrai, ils en ont repris un, tué deux autres à la carabine un seul est parvenu à s’échapper.

L’officier allemand que nous prîmes était le comte de Schwerin, neveu de l’empereur, lieutenant au 7e cuirassé de Sedlitz

Nous allons ensuite à l’hôtel de ville escortés par une foule délirante.

Puis il était 6 heures du soir

Quand tout fut rassemblé hommes et chevaux, nous repartîmes avec nos prisonniers.

Il était 11 heures quand nous rentrâmes à Watrelos.


Dimanche 23.

Nous rentrons à Lille, réception d’honneur sur tout le parcours repos jusqu’au lendemain


Lundi 24.

Nous repartons à Lanny à 3 heures nous rejoignons les autres pelotons, on couche.


Mardi 25. Nous repartons à 3h½, nous avons l’air de battre tous en retraite avec toutes les troupes massées sur la frontière aucun de nous ne s’explique ce mouvement rétrograde, nous formons l’arrière garde derrière tous les trainards d’infanterie c’est horrible, nous arrivons enfin à La Bassie à 9h½ par une pluie battante.

Mardi 25 26 Repos.

Jeudi 26 27 Départ pour Montigny en Gohelle toujours derrière l’infanterie c’est horrible, nous avons été excessivement bien reçus, trop pour les hommes.

Vendredi 27 28. Départ 1 heure ½ (matin) pour Ribière au dessus d’Arras, nous entendons toujours une violente cannonade en direction de Bapaume ; les esprits sont inquiets, je suis allé en patrouille, rien vu. Chambard de patrouille de char direction des canons, rencontre des fuyards et apporte des nouvelles peu rassurantes on ne se couchera pas cette nuit.

Départ à 10h½ du soir nous sommes harassés, nous dormons tous sur nos chevaux et pourtant nous traversons une zone très dangereuse.

vendredi 26 Samedi 29

Nous arrivons à Gezancourt à 3h de Broullesse, logés dans une grande ferme, où nous sommes très bien reçus ; j’ai été invité à diner et souper.

Dimanche 29[1] Abbeville 11h½ nous logeons au quartier de cavalerie, il passe toujours des masses de troupes. J’ai appris aujourd’hui que la bataille serait livrée aux environs de Cambrai depuis j’ai le cœur serré et à chaque moment de loisir ma pensée se reporte à Noyelles. Je pense à tous les miens. Que sont-ils devenus ? Mieux vaut peut-être que je ne sache rien.


Lundi 31

xx Saint-Riquier, Seine Inférieure. Nous sommes en Normandie dans un charmant pays nous logeons dans une ferme aux mœurs simples, de l’ancien temps.

Nous suivons maintenant les grandes routes hors de la zone de guerre Si je peux vous donner des nouvelles de moi, dire que je ne cours aucun danger, je rassure tous les chers miens qui se demandent maintenant où je suis

Le curé dit une messe le matin à 5 heures à notre intention j’y suis allé.


Mardi 1

Massy (S. I.) Suis bien logé dans une ferme normande.


Mercredi 2

Fontaine le Bourg ⁁1000 habitants 17 km de Rouen.

Magnifique réception à peine arrivé je suis invité à souper et coucher chez un charcutier.


Jeudi 3 aout[2]

Rouen. Nous embarquerons pour Niort dit-on. Sait-on jamais. Il est 11h½ il fait très chaud, à trois heures seulement nous partons. Les chevaux n’ont encore ni bu ni mangé aujourd’hui. On y pensera vers 9 heures du soir. Nous faisons encore aujourd’hui 120 km. À 10 heures nous arrêtons en pleine voie, le train s’arrête jusqu’au lendemain.


Vendredi 4 aout[1] à huit heures du matin, on donne de l’eau aux chevaux au hasard des routes et on nous ravitaille de même.

Aujourd’hui nous avons fait 40 km c’est affreux il y a peut-être 100 trains devant nous, incurie complète. Dieu sait quand nous arriverons à Niort et avec quels chevaux, ils ont tous l’angine.

Je loge avec 2/trois camarades Cornedine, Ramette et Masset sur la plate-forme des fourgons, on passe son temps à dormir manger et boire, et nos parents nous croient sur quelque champ de bataille, s’ils pouvaient nous voir.

Nous passons encore la nuit sans faire un pas heureusement qu’il ne pleut pas.


Samedi 5 7breaout. La journée ne s’annonce pas mieux, il fait très fade nous sommes très heureux sur notre plate-forme, quoiqu’il soit bien difficile de se ravitailler il faut faire un arrêt qquefois 2 km pour trouver Dimanche 6 7bre

Nous arrivons enfin au Mans et nous repartons le soir après un assez long arret

Nous passons à Angers et nous arrivons enfin à Niort dans la nuit du dimanche lundi au lundi mardi, nous logeons au quartier de cavalerie 7e hussards, le dépôt y est déjà.

Nous avons vite repris la vie de quartier avec ses minuties et ses embetements quotidiens, on fait plus de service que dans l’active.

Je couche en ville avec Ramette, Dagen et Moreau qui est venu nous retrouver après un voyage de 8 jours, la défense est formelle mais tant pis si on se fait prendre la paille des chambres est pourrie, on est serré et ça pue.

Nous sortons le soir tranquillement, on ne dirait pas que nous sommes en guerre, n’était l’angoisse qui nous étreint le cœur à chaque fois que nous pensons aux nôtres. J’ai vu avec plaisir le vieux facteur de Cambrai qui portera des nouvelles à la maison à son retour.


Jeudi 17 7bre

Aujourd’hui 2e revue de général il me semble que nous allons bientot partir, nous sommes tout à fait prets.

Malheureusement mon Guillaume n’est pas entièrement guéri de ses blessures de garrot et de plus il tousse c’est dommage car il est très bon.


Dimanche 16 15 9bre 9h½ du soir chez la mère Garcin Ramette dort j’éprouve le besoin de consigner un peu mes impressions et de mettre mon journal à jour. Depuis la date où je l’ai interrompu j’ai sensiblement vécu la vie de quartier ordinaire aggravée d’une oisiveté beaucoup plus grande. Tour à tour les bons chevaux sont partis, le mien avec les autres j’en suis venu à douter du role de la cavalerie et j’ai taché de saisir toutes les occasions de partir. On demande un jour des volontaires pour l’infanterie, je me suis fait inscrire tout de suite, mais l’officier veillait et il m’a rayé d’office, d’ailleurs cette affaire est tombée à l’eau pour tout le monde.

Maintenant je pars comme cycliste et j’en suis heureux, ma joie s’est un peu assombrie à cause du départ de Moreau, mon meilleur camarade et mon compagnon de chambre, il est parti à Poitiers avec environ 400 hommes du 12e.

Le régiment se vide donc et on parle toujours de départs imminents.

Le 11 a été complété en hommes et chevaux aujourd’hui, le 12 forme un escadron et nos. Nos trois groupes de 40 cyclistes doivent être prêts à partir jeudi. Enfin ! Est-ce vrai ? En aurons-nous passé des revues de généraux sous toutes formes toujours pour des départs soi-disant imminents.

Je crois tout de même que cette fois c’est le bon coup, en attendant nous parcourons la campagne Niortaise en guise d’entraînement. Le début est plutôt dur mais il faut bien se faire des jambes. Je fais partie du 1er groupe 2e peloton avec Chombard et Ramette et les hommes du 11e esc. que je connais, ce ne seront certes pas les plus mauvais. Officier : M. Houillon.

Dans ma chambrette pendant que j’écris le vent souffle en rafales et la pluie cingle les vitres. Je ne puis m’empêcher de penser au temps qui nous attend là-bas dans le Nord et aux pauvres soldats qui y sont déjà et ceux qui sont continuellement tenus en éveil, sous la mitraille par tous les temps, souffrant du froid, de la pluie peut-être de la faim.

Et ma pensée se reporte alors aux souffrances morales endurées par les miens sous la botte de l’allemand sans nouvelles de leurs enfants, eux aussi pensent sans cesse : où est-il par ce temps de chien, peut-être est-il blessé abandonné sur quelque champ de bataille, est-il prisonnier, est-il mort ?

Qu’il est terrible d’être sans nouvelles et dire que je ne puis pas leur faire savoir que je suis ici à Niort depuis 2 mois, que je suis bien portant que je vis oisif et xxx heureux matériellement parlant. Oh ! que la guerre est horrible pour les familles qui s’aiment

J’ai essayé d’écrire par l’intermédiaire de la Légation d’Espagne à La Haye, serai la lettre parviendra-t-elle ?

Je corresponds avec ma tante Sr Paul, mon oncle Charles, M. Moglia, M. Puech, Lepercq, L. Decker, Henri de Paris et son père.


10 Xbre J’ai reçu une lettre de Denain datée du 1er par la Hollande. Elle m’a apporté un immense soulagement et m’a beaucoup rassuré.

Brusquement on supprime les groupes cyclistes, désillusion ? Nous étions si bien et si tranquilles. Je passe au 12 je suis affecté à la classe 1915 je reste 8 jours puis on me remet à la classe 1914

1915


au 11 où je repasse avec plaisir.


2 janvier J’étais planton à l’hopital de l’ancienne préfecture quant vers 9 heures je vois arriver Ramery. Il vient me relever car dit-il on reforme le 1er groupe cycliste et il doit être prêt à partir le lundi 4. Tout joyeux je retourne au quartier où nous préparons fiévreusement.


Lundi 4 janvier : départ 7.04 via Chouain, Lens où nous avons deux heures d’arrêt. Avec Chombart nous en profitons pour aller voir nos copains respectifs au 4e cuirassier J’y vois Delcourt, Jaspar, Butez, Larthiez avec infiniment de plaisir

Nous dînons ensemble, souper très gai franche camaraderie qui me fait regretter le 4e cuir


Mardi 6[1] Nous débarquons à Villers Daucourt au dessus de Mourmelon la nuit, c’est lugubre. Pluie, vent nous arrivons à 11h au quartier général du 1er corps à Saint-Rémy sur Bussy. Nous recherchons le régiment, il n’est plus affecté au 1er corps mais au 12e à Vaudemange.


mercredi 7 Nous arrivons à Vaudemange, parcours très dur par un vent debout terrible.


Janvier : j’ai délaissé xx mes mémoires, je les reprends aujourd’hui 29 mars où nous quittons la Champagne

Janvier : le mois s’est passé d’une façon assez calme. Nous avons vécu tout le mois avec le régiment à Vaudemanges, logement assez bon chez Mme Molin femme pas très agréable. 7 enfants sales. Tout le mois pluvieux. Présentation au colonel Seigneur ; bon effet, homme énergique de prompte décision. Malheureusement il fut évacué q que temps après pour rhumatismes, nous avons beaucoup perdu : le lieutenant colonel ne me paraît pas à hauteur (menu).

J’ai fait dans ce mois mon apprentissage aux tranchées, pour débuter je me suis perdu en y allant avec tout le groupe cycliste qu’on avait oublié. Quelle nuit, quelle boue et aussi l’émotion du début au premier obus déchirant l’air.

Nous fûmes répartis dans les compagnies du 135e territorial, recrutement du Gers, très bons soldats, disciplinés, très gentils et serviables, un peu timorés. J’ai logé avec l’adjudant Guichaumé dont je conserve un excellent souvenir.

Le secteur est très tranquille, les tranchées sont à 800m environ, je n’ai jamais vu un Boche et je ne me suis jamais senti en danger.

Février : même vie, toujours dans ce trou de Vaudemange, nous avons trouvé une maison où l’on est très bien chez Mme Barbet et son mari deux bons vieux. Malheureusement pas pour longtemps.

Nous avons maintenant le filon plus de tranchées, les cyclistes sont devenus les hommes d’etait etais du régiment, nous allons au bois, couper débiter et xx assembler des rondins et autres pour les tranchées. En un mot nous sommes très tranquilles. Détail particulier, je mange comme quatre.


Mars : on m’annonce un bon soir que je dois partir aux tranchées avec 20 hommes. Je ne dis rien, mais ma mine s’allonge. Je pars la nuit par Mourmelon le Petit, Baconnes et Prosnes par une route où l’on ne circule plus. Les bycyclettes sont silencieuses nous sommes passés sans encombres. Prosnes xx ce village et est l’image de la désolation. Plus une maison debout, l’église éventrée, et le soir toutes ces ruines grouillent, elles abritent encore le ravitaillement et les cuisines des tranchées de 1re ligne d’un régiment.

Arrivée sans encombre au secteur du 6e en vélo. On nous a fait venir pour couper du bois sur place. Je respire, le cauchemar de la tranchée s’éloigne  : pas de froids de pieds, de nuits sans sommeil, de rondes etc. —

Au contraire je trouve à 200m des cuisines un gourbi confortable, où il ne pleut pas, il y a en a d’autres à coté pour mes hommes qu’ils ont tôt fait d’aménager. Nous formons là un petit hameau de 20 habitants logés dans 5 huttes dissimulées dans un bois de sapin, c’est là que j’ai passé tout mon mois de mars, heureux et tranquille, très bien ravitaillés. Le temps fort souvent beau, et le travail facile et peu abondant (arbres, piquets, rondins)

xx Sur ces entrefaites le régiment a changé de cantonnement, il a quitté Vaudemanges pour Bouzy 6 km plus loin, grand cru de Champagne j’y suis déjà venu 8 jours au repos (sic). Très tranquille, un peu d’entrainement, football avec les fusillers marins.

29 mars : nous quittons Bouzy pour l’inconnu. Je le regretterai  ; la vie y était facile, nous y fûmes tranquilles on y trouvait presque de tout.

Voilà 3 jours que je suis sans correspondance faute de courrier. Je reçois une lettre avec tant de plaisir surtout celles de Marraine Marie si pleines d’affection vraies.

Nous embarquons à Épernay à 3 heures du matin


30 mars : nous prenons la direction de l’Est, traversons Chalons, Vitry le François nous voyons sur la voie des villages en ruines et des tombes.

Épernay. Débarquement à Revigny contrairement à notre attente. Il fait très froid. Nous logeons à Loisy à 25km de là, nous traversons Bar le Duc, les routes sont très dures beaucoup de côtes.


31 Érize St Dizier petit village du Barrois (Meuse) j’ai eu 1 lit oh volupté assez joli papier mural, mangé avec l’état-major.


1 avril Seraucourt à 18 heures route de Verdun petit pays 80 h peu de dégâts, assez joli, avons traversé 2 villages désolés Courcelles Amblaincourt. Demain on repart vers le Nord encore sur Verdun.


2 avril : Belleray 15h 4 k de Verdun, petit village, boueux sur la Meuse restés 5 jours assez tranquilles (offensive des Éparges — meurtrière — Inutile).


6 avril Verdun Quartier de Bevaux au 4e hussards immense, un peu vie de quartier, cyclistes très tranquilles, léger entraînement bécane, football, match avec autres troupes 13e art 19e Ch. On ne se figure pas que c’est la guerre. Impossible entrer dans Verdun.


22 avril Senard (Meuse). Nous avons quitté Verdun ce matin avec joie, la vie y était trop monotone. Tout le 1er corps change. Rencontre Herban, Capon, G. Bricourt, Caron, Cardon, Deleau 24 avril embarquement à Villers-Daucourt bonne nuit en 1re  classe.


25 avril : débarquement à Fismes. J’espérais une région plus près du Nord. Nous cantonnons à Coulonges 1er  village de l’Aisne, agréable eaux-vives partout, un lit gens affables on n’entend plus le canon, drôle de guerre tout de même. On m’annonce une punition parce que je n’ai pas signalé un homme légèrement saoul. Bast, ça glisse, ma conscience ne me reproche rien, c’était un très bon soldat. En revanche nos officiers ne valent pas cher il me semble ! des gens de parade qui ne connaissent rien, pas d’idées larges, courte vue esprit de coterie, et de caste aussi malheureusement. On sent qu’ils n’aiment pas les hommes ils ne considèrent pas les sous-officiers, ils s’en servent voilà tout. Nous verrons ça à l’œuvre


3 mai : Je récolte à nouveau 8 jours motif « n’avoir pas rendu compte qu’on ne touchait plus de thé pour boissons hygiéniques » Oh ! stupidité et ministères et c’est un colonel.


5 mai : Match de football avec le 11e d’art à Nesles, très belle partie nous perdons 3 buts à 1. Nous sommes toujours très bien à Coulonges trop bien même, la table surtout digne du fourrier de la section.


12 mai : Nous étions trop bien on part pour Geux 9 km de Reims. Nous allons recommencer les tranchées, perspective peu réjouissante.


18 mai : Ascension, je le savais à peine Messe à 9 heures. Anaclet Bharné est venu me voir, c’est le 1er  pays que je rencontre je lui ai donné 15 francs il est sans depuis longtemps


La Pentecôte a succédé à l’Ascension le temps passe. Ce sont les beaux jours et je m’ennuie, je pense de plus en plus aux miens, c’était le moment où l’on se réunissait souvent en famille c’était si bon.


Dimanche 31 mai : lavé mon sac. Sermon de l’abbé Régent.

Tous les soirs on groupe xxxx concert très intéressant ma foi, beaucoup de succès, artistes recrutés partout.


18 juin : je suis désigné pour les tranchées. Malheur c’est avec le capitaine Kiener la terreur et l’être infâme par excellence. Heureusement que le lendemain il m’a mis agent de liaison à la verrerie. Tranquille, rien à faire. Les tranchées sont très près qq mètres les Boches tiraillent toujours et on s’engueule ferme.


2 juin quatre obus présumés 155 sur la Verrerie, personne d’atteint. Je couche aux cuisines comme partout dans la pouillerie. Rencontré M. Lefebvre boucher à Cambrai il est caporal d’ordonnance au 284. Puis au garçon coiffeur de chez Fosse à Valenciennes.


3 juin : journée calme, rien fait. Un blessé aux tranchées aisne traversé d’une balle. Billocq. Le soir un brigadier tué, nous l’avons enterré le lendemain matin 4 heures, avec quelques honneurs. Qu’est-ce qu’un homme ? Quelle petite place il tient et si vite refermée.


6 juin : relève. Tout s’est bien passé je reste seul à Gueux. M. Houillon et Chombard aux tranchées. Sensation de repos malgré responsabilité.


8 juin : je conduis mes cyclistes, à travers les environs. Il fait toujours très chaud. Les vignes sont magnifiques et promettent, pourvu que nous ne soyons plus là pour les vendanger. J’ai hâte de changer de milieu on s’abrutit ; l’esprit s’épaissit ainsi que la conscience et la délicatesse au milieu de tous ces hommes qui n’ont d’autre gout ⁁weal[3] que celui de satisfaire leurs passions, boire et manger surtout c’est pour eux le summum du bonheur. Reçu un colis précieux de l’oncle Albert, parti depuis le 20 mars je devais le recevoir pour Pâques. Il ne faut jamais désespérer il en est de ça comme de toutes choses.


12 juin : je pars aux tranchées ce soir, Capitaine Aimond, ce matin j’ai cueilli des fraises de bois, qui pullulent ici ds les bois, elles me xxx font penser à celles de Noyelles et par sympathie à tout le monde. J’ai fait la sainte communion ce matin.

Rien de saillant pendant cette relève, très tranquille. Un brigadier s’est tué par accident


18 juin : vie de cantonnement à Gueux, repos, on nous laisse la paix.


1 juillet nous allons maintenant travailler tous les jours aux tranchées en vélo jusqu’à la verrerie. Nous faisons un abri solide à l’épreuve du bombardement, on s’est aperçu un peu tard que c’était nécessaire. En effet depuis quelques jours plusieurs chasseurs entre autres Delatte Mal des logis se sont fait tuer par des bombes et torpilles dans leurs abris insuffisants. Le travail est pénible et difficile, car outre que la chaleur est terrible, le terrain est très mauvais, ce sont des terres rapportées du canal qui s’écroulent au moindre choc de sorte qu’il faut entièrement boiser et coffrer.

Le travail n’est pas sans risques, c’est l’endroit le plus repéré du cavalier.


4 juillet : j’ai demandé à l’officier pour rester à Gueux. Accordé. J’en ai profité pour communier, c’est le moment ou jamais on doit être en règle, je n’en ferai que mieux mon devoir et avec moins d’appréhension. Chaleur torride.

Nous avons dès maintenant la peu réjouissante perspective d’une campagne d’hiver, je n’ai plus qu’un bien faible espoir d’un dénouement rapide.

Une avance réelle par offensive générale me semble presque impossible elle couterait horriblement cher, et il faudrait l’entretenir et ne jamais arrêter. Je ne crois pas que nous en ayons les moyens maintenant. Dieu veuille que je me trompe L’idée de cette campagne d’hiver fait certes récriminer, mais elle prend corps et elle s’accepte lentement, j’avoue que je ne l’aurais pas cru, allons tant mieux.


14 juillet : Pas de fête nationale ⁁St Henri fête de papa et d’Henri. Rien de changer aux autres jours. On s’aperçoit tout de même que ce jour était entré dans nos mœurs. Nous sommes allés aux tranchées comme d’habitude, on s’attendait a qque chose de la part des Boches on se tient sur ses gardes. Rien ne s’est produit journée très calme.


17 juillet j’ai demandé un laissez passer pour Reims voir un dentiste à Reims. Accordé. Malheureusement je n’ai pas rencontré mon homme M. Robinet 2 rue Thiers. Malgré la pluie j’en ai profité pour visiter un peu Reims et la cathédrale. Le centre de la ville est très abîmé et assez mort. Les arbres sont tombés un peu partout, beaucoup de maisons sont touchées dont l’aspect extérieur est indemne. La cathédrale est bien abîmée, plus de toît, de grands pignons branlants, des sculptures écornées, brisées, tombées ou calcinées, les deux tours et le portail ont particulièrement souffert. ⁁Elle n’est pas en ruine. Malgré tout elle n’en a pris que plus de prestige et de sa masse imposante elle domine encore la ville qu’elle semble protéger. Dieu qu’elle m’a semblée belle et grandiose, je ne pouvais me lasser de la regarder. Les sculptures du bas sont protégées contre les éclats par des échafaudages et des sacs de sable.


18 — Marraine m’a envoyé une lettre que Valentine lui a fait parvenir. Avec quelle ferveur je l’ai lue et relue. Cette chère Valentine que ne puis-je laisser déborder mon cœur dans une lettre pour lui dire toute ma fraternelle affection. Mon filleul a un mois dit elle et tout le monde se porte bien. Edmond a ajouté un mot, brave garçon, je l’aime comme un frère.

C’est de l’écriture de Noyelles que je voudrais voir Dieu que c’est dur d’être sevré de son père et de sa mère si longtemps. Je n’ose leur écrire de peur de leur attirer des désagréments.


19 dimanche. Repos. J’ai communié aux intentions de la famille et en remerciements de la lettre d’hier.


21 — Diner à Saint Brice avec Chombard de Lowe sous-off du 41e d’art. observateur au cavalier[1] de Cemey, c’est un charmant garçon, très distingué, spirituel et fin. xxx Très bien reçu à la popotte des sous-off du 41e dîner abondant, presque trop. Suis allé ensuite à Reims consulter un dentiste M. Robinet pour me remettre la dent qui me manque. Il a commencé à me travailler, seulement je crains que ça me coûte cher et l’argent est rare, tant pis c’est commencé. Reims a été bombardé furieusement aujourd’hui.


22 — Notre abri avance tout doucement, il est temps les Boches nous crachent fort en face xxx 2 torpilles de gros calibres et des obus 26 — L’ordonnance du Comdt de la Halte, tué à la verrerie par un obus qui éclate à 20 mètres de moi derrière. La mine avance il parait qu’on ne sera plus long à la faire sauter. On entend également les Boches miner sous nous. Qui arrivera premier.


29 — le gros œuvre de l’abri est fini. Tout à coup vers 3h½ une détonation sourde qui ébranle tout le cavalier, pas de fumée on ne voit rien d’anormal au dessus. Qu’y a-t-il ? émotion générale. Serait-ce la mine ? on y court. Les sapeurs remontent en hate effrayés, violente commotion, ⁁mais personne de blessé ni emmuré. C’est un camouflet que les Boches ont voulu nous faire, mais pas réussi dit-on rien n’est éboulé. Les autorités arrivent pour se rendre compte. ⁁un énième officier du Gie. Un sous/off du génie et 3 sapeurs descendent on attend, ils ne remontent pas à 10h du soir l’off. du génie M. Belmarre descend avec un homme, il ne remontent pas des hommes envoyés reviennent a demi asphyxiés et racontent que les corps des premiers sont étendus dans la mine, morts foudroyés par les gaz délétères de l’explosion, on ne peut meme pas les rechercher. Le colonel lui meme a failli y passer ainsi que M. Houillon, au total 8 morts dont 3 officiers et 1 sous-off et la mine rendue inhabitable. Que se passera-t-il maintenant arriverons-nous avant eux.

J’étais revenu à Gueux pendant tous ces événements. Décidément à quoi tient notre vie.


1 août Dimanche. Sainte Table[1] puis tranchées finir travaux. On a retiré de la mine 4 cadavres des pompiers de Paris. Il en reste encore un Le S. L de Vienne qu’on ⁁n’a pu ramasser. Deux pompiers ont encore failli y passer. Léger bombardement 2 obus très près de moi.


6 août : M. Houillon est parti en permission. Le fameux abri est fini. Ma foi j’en suis bien aise l’endroit est tellement bien repéré que quelqu’un de nous aurait fini par y passer.

Le colonel nous a donné 2 jours de repos complet.

9 août nous entreprenons un abri caverne au 75e Cantonal bastion C secteur de l’arbre isolé. Long 21 mètres protection de 4 mètres de terre. Le travail sera long.


10 août on a fait sauter la mine à 3h du matin. Le résultat n’a guère été fameux. Aucun trophée sauf 3 mausers : huit tués et une vingtaine de blessés tant aux chasseurs qu’à la Cie de renfort du 127e. On n’a pas encore pris l’entonnoir. Le cavalier a été ensuite sérieusement bombardé et abimé. Je ne suis arrivé qu’à 8 heures du matin tout était déjà fini. Il fait très chaud.


11 août : il restait trois des nôtresmorts en face de la tranchée, malgré nos efforts impossible d’aller les chercher, les Boches veillent. Ils ont organisé l’entonnoir, mais il parait que cette nuit l’artillerie va les démolir.

La journée est calme.

Je n’ai plus le goût d’écrire en ce moment.


12 août Violent bombardement pas de morts ni de blessés, tout est bouleversé sur le malheureux cavalier. J’ai commencé un abri de guetteur.


15 août Je passe mon 15 août aux tranchées, tristes souvenirs, des bruits de relève circulent.


18 août — Nous sommes relevés définitivement par le 201 d’Infanterie. Je me sens tout de même soulagé. Rencontré Pierre Bourguelle Sergent Major.


20 août : Sur ordre général nous construisons tous des lits en fils de fer et treillage. Plus de paille chacun a son lit, c’est très sain et les poilus s’y trouvent très bien.


21 août : Nous remettons un peu d’ordre dans le groupe désorganisé par les tranchées et le manque de repos. Révision des bicyclettes. Elles étaient dans un bien mauvais état.


24 août Médaille militaire à l’adjudant-chef Gouvert. Champagne.


25 août Saint Louis roi de France jour de ma fête. Puisse mon saint patron protéger de la haut son royaume de France etqu’il daigne me prendre sous sa protection.

J’ai reçu aujourd’hui quelques lettres, souhaits de bonne fête auxquels j’ai été très sensible petites attentions qui indiquent le tact et le cœur.

Les lettres de mon oncle Charles, marraine Maman Antine si pleines d’affection vraies et qui m’ont si souvent réconfortées.

M. Lepercq, la famille Bertier.

Aujourd’hui mauvaise nouvelle, l’officier m’a prévenu que le groupe cycliste allait être dissous. J’en suis désolé, je ne m’y attendais réellement pas. Depuis 7 mois nous étions ensemble, mêmes gradés, mêmes hommes nous nous connaissions tous et nous pensions faire quand il aurait fallu, du bon travail. Comme on nous a créé, on nous supprime, un trait de plume et c’en est fait.

J’y étais xxx très heureux, estimé et respecté de mes hommes, bien vu de M. Houillon, nous étions assez indépendants, xx en dehors du service régimentaire et de tous ses petits inconvénients. Comme on dit c’était le filon. irai-je maintenant ? Demain nous le dira.

D’autre part, il semble à certains indices que quelque chose se prépare en ce moment. Il y a de la nervosité dans l’air et dans les esprits.

Je souhaite ardemment un déclanchement quoi qu’il puisse m’advenir.

On parle vaguement d’évolution de cavalerie d’ici 2 ou 3 jours


26 aout Je suis fixé, le colonel nous permet de choisir notre escadron xxx en récompense des services que nous avons rendu. Je choisis le 1er  qui me paraît le meilleur. Je me présente au capitaine qui n’y voit pas d’objection. L’accueil des sous-off est très bon. xxx. Malgré tout je n’ai pu arriver à chasser la tristesse qui m’a embrumé le caractère de toute la journée.

Je étaissuis en même temps très en colère, réellement je ne m’explique pas cette mesure je suis persuadé que nous aurions pu rendre de très grands services quelle que soit la forme de guerre. Enfin Fiat…

Et comme dit notre général Guyomat[1] « Maintenant à cheval avec plus d’ardeur que jamais ».

Chombard espère passer au 4e  Ramette au 127e d’infanterie. Alach mon tampon passe fourgonnier E. M.

M. Houillon officier au 4e esc..

Me suis delecte aux colis de Marraine Marie et de Mme  Decker à l’occasion de la St Louis.


1 7bre Affecte au 1er escadron 3e peloton adjudant Bernard — M. L. Desmarets et Van Lyvendaele. Un peu cafard.


2 septembre : Je suis de jour, ça va bien je me refais petit à petit aux vieilles habitudes cavalières. J’ai comme cheval « Étape » jument pur sang, rigoureuse et tres sensible.


5 7bre : On annonce aujourd’hui que nous partons lundi faire des évolutions de cavalerie avec des régiments voisins. On ne laisse à Gueux que les chevaux indisponibles et les hommes a l’infirmerie.


6 7bre Depart à 8 heures. Je monte Esternay. À 11h½ arrivée à Goussancourt (5 km de Coulonges) où nous cantonnons avec le 2e escadron. tout petit village de 200 h. on n’y trouve absolument rien comme épicerie et vin.


6 7bre au 12 : évolutions de cavalerie attaque et défense d’un village ou d’une ferme, marche d’approche sous le feu déploiements, protection d’une retraite. Somme toute nous n’y avons pas vu grand chose.

J’ai couché dans une grange les 6 jours. Réveil à 4 heures, rentrée vers 11h½. Notre table était très bonne, lapins et poulets à volonté.

Effectif : 6 escadrons du 6me Chasseurs, le 6e Chass. d’Afrique, 2 esc. div. du 6e dragons 2 esc. div. du 21e dragons + huit autres escadrons ennemis que je n’ai pas vus.

Le 10 j’ai eu la surprise de voir à Goussancourt M. Demouy il est installé à Boulogne où il fait du commerce il accompagnait M. Tellier de Boulogne lequel était à la recherche de son fils cavalier au 4e escadron. J’ai dîné avec eux à Coulonges.


12 au 17 : Rentrée à Gueux avec plaisir bonne petite vie tranquille au 1er escadron. On parle toujours de départ imminent on prépare tout. On touche 200 cartouches, ce qui ne s’est jamais vu dans la cavalerie. 80 hommes à pied sont partis le 14 préparer des passages ds les tranchées. Sera-ce cette fois le bon coup. Je l’espère.

J’ai reçu une montre de Marraine Marie malheureusement elle s’obstine à ne pas marcher et je ne trouve personne pour la réparer.


19 7bre : Mauvais coup du sort. Je refuse ce matin la place d’agent de liaison au 1er  de ligne parce que j’étais heureux au 1er  escadron. Chombard accepte la place avec joie, il est vrai que c’est le filon Deux heures après la décision sort et m’apprend que je remplace Chombard au 2e escadron c’est la guigne. J’ai peur de cet escadron on fait beaucoup de service.

Je regrette donc infiniment de n’avoir pas accepté la place de ce matin.

Six sous-off. du régiment partent dans l’aviation.


20 7bre : suis affecté au 2e peloton. Adjudant-chef Devienne, Sous-off. Gantand. L’adjudant : vieux militaire radoteur fait toujours des discours veut toujours avoir raison, pas malin mais croit tout savoir connait la lettre de son métier militaire, il est très bien vu du capitaine. Je me suis présenté à ce dernier il m’a très bien reçu, il a l’air de me connaître très avantageusement. On m’a d’ailleurs très bien reçu à l’escadron.

J’ai reçu 100 fr. de M. Moglia, je les lui avais demandés, je lui dois toute ma reconnaissance, il se met toujours à ma disposition, et il est aux petits soins pour moi.


22 7bre je commence à faire connaissance avec mon nouvel escadron et mon peloton. J’ai un cheval assez bon quoique petit « Éclair » en général nous sommes mal montés. Les meilleurs chevaux sont encore ceux qui restent du début et avec lesquels on est parti en guerre. Le reste américains, réquisitions, ramassis est tout ordinaire.

Le Capitaine du 2e est un type militaire épatant, énergique, prévoyant, capable, je vois que mon escadron peut avoir confiance en lui et il l’a.

L’attaque est imminente, tout le monde est résolu, la préparation a l’air d’être minutieuse. Nous aurons à remplir un role important et très complexe.

Je fais partie de l’escouade d’élite qui doit marcher en avant faire les passages.

Je m’occupe également des pigeons voyageurs. 28 7bre Gueux. Cantonnement d’alerte toujours prêt à partir. Le canon tonne sans arrêt. On nous annonce les meilleures nouvelles. Speech ⁁ému du capitaine qui nous annonce notre sacrifice.

Je suis prêt, j’ai communié hier. Rencontré Habaux sur la route de Jonchery.


fait 1er  octobre}} : voilà 22 jours que je n’ai pas consigné eu le courage d’écrire un peu ma pensée. Au grand espoir de l’offensive générale et de la victoire imminente auxquelles nous croyons tous a succédé la déception.

L’offensive n’a été que locale et la percée n’a pas été faite, les journaux ont essayé de nous endormir un petit moment maintenant c’est fini on n’y croit plus mais miracle, nous n’en sommes point abattus on envisage toutes les éventualités de durée avec résignation et sérénité.

Il ne s’est rien passé dans notre secteur tout était prêt.

On continue le train train à l’escadron instruction à cheval, cantonnement et on rétablit les permissions. Ici j’ai eu une déception. Devant partir le 21 je vois mon tour prolongé et ma place prise par un bleu (Billain) qui a eu l’avantage de faire toute la campagne.

Aujourd’hui très forte cannonade devant nous, et violent bombardement de Reims. Que se passe-t-il donc ?


22 8bre c’était une attaque boche à l’est de Reims sur un front de 10 km elle a été repoussée convenablement.


24 8bre le régiment retourne aux tranchées occuper le cavalier de Cemey. Relève demain, je fais partie de la 1re relève avec Wattine. J’y vais volontiers mais n’empêche que c’est le recommencement de la misère surtout que l’hiver s’annonce rigoureux


31 8bre la relève est terminée et je remonte à cheval avec plaisir. Les six jours se sont très bien passés, un peu froid mais assez tranquillement. Seulement il y a des rats en nombre incalculable. M. Houillon est venu me chercher pour entreprendre un abri caverne dans le remblai du cavalier avant d’arriver au fort de la besace, il a demandé au capitaine Guenan et au colonel pour m’avoir à sa disposition. Ce qui est accordé. Je retourne le joindre au cantonnement.


1 au 6 9bre : Gauchard est aux tranchées, je m’occupe donc seul du peloton, ça n’a pas été trop mal bien que j’ai assez de travail.


7 9bre : je vais prendre la direction des travaux de la Besace. J’ai obtenu d’y aller en vélo et de revenir le soir. Je mange à la verrière à 11 heures. En ce moment le trajet en vélo n’a plus rien d’agréable. Enfin xxx çà me plait tout de même à moitié, on va être plus tranquille et je ne fais plus partie des relèves ordinaires. Nous avons déjà perdu au cavalier 3 tués et 4 blessés.


15 9bre ma permission approchait je vais au bureau pour en connaître la date exacte. On m’offre de partir le lendemain matin, je saisis la balle au bond. Je réclame les 2 jours supplémentaires promis, le colonel me les marque de suite.


16 9bre 3h½ du matin. En route pour Jouchery sur « Éclair ». À midi ½ Paris-Est. Foule de permissionnaires. Départ à 14h. Nous moisissons 2 heures dans la boue à Achères. À 18h½ redépart. Arrivé à Dieppe à minuit. Je dors dans la gare sur une chaise jusqu’à 6h55. À 9 heures Le Tréport, Mers et 7 rue Buzeaux ou j’arrive par surprise. Larmes de joie xxx

On devine le reste. Je ne trouve guère personne de changé. Sauf la vue de Maman Antine diminuée.

Je termine notre 1er  carnet le 24 novembre dans le cours de ma permission. Je ne pourrais le finir mieux car cette époque fera date dans mes souvenirs de guerre. C’est un rayon de soleil dans la tourmente. J’y aurai passé huit jours heureux au milieu de l’affection la meilleure et des soins les plus empressés. Ensemble nous avons parlé de nos absents avec fidélité et attendrissement.

Papa, Maman, Henri, Valentine, Marie, Jeanne, Edmonde ma cousine et les tout petits.

Je vous embrasse tous pieusement

24 novbre 1915 xx Louis
  1. a, b, c, d, e et f N.D.R. En fait, Dimanche 30 août 1914 Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : le nom « t1 » est défini plusieurs fois avec des contenus différents.
  2. N. D. R. En fait, jeudi 3 septembre 1914.
  3. L’auteur a ajouté au dessus du mot « goût » le mot anglais “weal”, traduit généralement par « bonheur »