Carnets de guerre d’Adrienne Durville/03-15
Lundi 1er mars
Sept mois de guerre ; et c’est maintenant qu’on va sérieusement commencer. Quels beaux jours de victoire nous allons vivre.
Que Dieu garde seulement notre cher Paul.
Visite de quelques minutes de M. de B. ; nous ne l’avons jamais autant vu que depuis qu’il n’est plus à Belfort.
Mon rhume devient de plus en plus fort.
Mardi 2 mars
Ce rhume devient phénoménal ; je ne puis rien faire que pleurer toute la journée.
Mercredi 3 mars
Cela commence à diminuer un peu, et je reprends figure humaine.
Départ de 16 malades, dont Doria, tout ému. Quel gentil garçon et comme il nous aime. Il a voulu se confesser avant de partir, disant qu’à la guerre, il fallait être prêt.
M. Feltin nous quitte ; il est remplacé par M. Gschwind, assommant et qu’il faudra mettre au pas.
Calme dans la journée ; j’en profite pour coudre un peu. Lettre de Paul ; il est dans la neige, au repos pour l’instant.
Jeudi 4 mars
Soins toute la matinée.
Il fait un temps de printemps, je vais me promener un peu avec M. Th. et Mlle Pichot. Nous allons à mon point de vue préféré voir la neige sur les montagnes ; des avions viennent sur nous, c’est une journée délicieuse.
Le soir, on me fait la surprise de me souhaiter ma fête. Julie et Mlle Bidoux viennent dîner ; menu succulent, champagne ; chacune de ces dames m’offrent un petit souvenir pratique et incassable ! Je suis touchée de toutes ces affectueuses attentions.
Vendredi 5 mars
Messe de 6 heures à St Vincent. Soins toute la journée. Un des malades de Julie est très mal.
Mme Viellard renouvelle son invitation à déjeuner pour demain samedi ; nous devons y aller à quatre, Julie et Renée restant de service aux ambulances.
Nous apprenons que le plan d’attaque du Kalberg a été vendu par un espion. Ce qu’il y en a en Alsace, c’est formidable.
Lettre de Marguerite et de Camille ; Louis est promu officier ; enfin !
Il neige, l’hiver reprend.
Samedi 6 mars
Soins toute la matinée ; Mme Viellard vient elle-même nous chercher à midi dans son auto. Nous sommes admirablement reçues et après un déjeuner délicieux, nous prenons le café avec les officiers malades soignés au château ; nous visitons ensuite l’ambulance qui est merveilleusement aménagée. Sans être très beau, ce château est très grand et très confortablement distribué ; les salons forment de superbes salles de malades et les chambres sont délicieuses. À 3 heures, l’auto nous ramène à Belfort, ravies de notre expédition.
Arrivée de malades dont un hémiplégique sérieusement atteint. Lettre de Mme de Marthille à Julie.
Dimanche 7 mars
Messe à 7 h. à St Christophe. Deux de nos malades y font leurs Pâques. Renée, Julie et M. Th. partent à onze heures déjeuner à la Chapelle ; pendant ce temps, soins et correspondance. À leur retour, elles nous racontent qu’elles ont été fort bien reçues et que le Gal Cordonnier viendra demain prendre le café avec nous accompagné du Capitaine Lelong, l’ami de Paul.
Je reçois justement deux lettres de Paul et de Renée qui m’apprennent sa nomination de capitaine ; il est toujours en pleine neige ! Mme Béha m’offre de faire parvenir une lettre par son mari. Je vais essayer, si cela peut réussir, ce serait agréable de correspondre ainsi.
Lundi 8 mars
Soins toute la matinée.
À 1 h. ½, arrivée du Gal Cordonnier et du capitaine Lelong, tous deux fort aimables.
Après les présentations, je cause avec le capitaine qui me parle de Paul ; le 27e alpin est du côté de l’Hartmannswillerkopf : Wesserling, Oderen, etc… ; Visite de l’ambulance, le Gal s’occupe de chaque malade et leur fait distribuer des cigares : après nous causons sérieusement ; il croit à la fin de la guerre pour juillet, à la fin de l’occupation en Belgique pour mai ; à une avance sérieuse en avril… Dieu l’entende !
Puis une chose nous intéresse tout particulièrement ; le Gal veut nous envoyer dans une ambulance de l’avant au moment des combats pour les premiers pansements. Il trouve que les infirmiers n’ont pas de soin ni d’expérience. Ce serait le rêve. Le gouverneur a donné son autorisation et je crois que cette fois sera la bonne. C’est l’idée Béha reprise par le haut commandement, ce qui est sa seule vraie chance de réussite. Il nous laisse ravies de sa visite, et nos malades enchantés aussi.
Mardi 9 mars
Soins toute la matinée ; notre malade va plus mal ; le docteur le croit perdu. Visites toute l’après-midi : le docteur Petit, toujours aimable et spirituel ; il démolit le pauvre Landouzy de la plus drôle des façons ; le lt Quemelin, un ami de Renée, puis le capitaine de Beaurieux, toujours gai. Il nous redit combien le général a été content et que notre envoi en Alsace est absolument sûr, quand il y aura une action sérieuse.
Mercredi 10 mars
Messe à St Vincent avec trois malades dont Séjournand. Départ vers l’arrière ; arrivée d’un malade tombé de son lit sur le ciment ! il est assez démoli.
On entend le canon, mais peu : ce n’est pas comme la semaine dernière.
Nous apprenons la mort de Febuet, 15 jours après sa sortie de l’ambulance ; cela nous attriste, ce n’est pourtant pas de notre faute. Lettre de Bosne.
Jeudi 11 mars
Soins toute la matinée. Déjeuner chez M. Feltin ; nous sommes merveilleusement reçues par des gens fort aimables et qui paraissent heureux de nous avoir.
Thé chez Julie ; quelques détails sur l’exploit du capitaine Happe[1] ; la poudrière de Rottweil est bien complètement démolie ; il n’en reste que les quatre murs. L’avion est rentré criblé de balles ; c’est miracle qu’il ait pu revenir.
Lettre de Jourdan, qui doit être près de Pont-à-Mousson. Avec sa jumelle, il voit la cathédrale de Metz.
Notre malade est toujours bien mal ; c’est moi qui le veille cette nuit ; je peux m’attendre à des heures pénibles.
Vendredi 12 mars
Nuit désagréable, vu la grossièreté de l’individu, qui réclame perpétuellement pour des choses inutiles et qu’il faut mettre à la raison. Soins toute la matinée.
Samedi 13 mars
Visite du Cap. de Beaurieux qui annonce la visite de Cordonnier pour lundi chez Julie. Rien de nouveau encore en Alsace ; on attend pour avancer que la poussée en Champagne soit plus avancée, puis que nous ayons une provision d’obus plus considérable. Au début de la guerre, les Allemands avaient 6 000 coups à tirer par pièce, et nous 1 500 seulement. Si nous en avions eu seulement 3 000, la bataille de la Marne s’arrêtait au Rhin. Comme l’on veut éviter que cela se reproduise, on attend d’avoir une quantité énorme d’avance, et l’on construit à force ; la matière première ne manque pas ; ce n’est pas comme en Allemagne ; on s’aperçoit d’ailleurs que leurs nouveaux projectiles sont de qualité inférieure.
Courses dans l’après-midi.
Dimanche 14 mars
Messe à St Christophe avec 17 de nos soldats dont 6 font leur Pâques. L’église est comble ; c’est un spectacle magnifique.
Soins toute la matinée.
Lecture du livre jaune ; cela montre la vraie canaillerie de l’Autriche et de l’Allemagne.
Thé avec le Dr Petit, le Gal Lecomte et le Ct Lauth ; causerie fort agréable ; ils sont tous trois enchantés d’être là.
Nous apprenons la mort d’un fils Haas, capitaine au 6e bat. alpin, tué la semaine dernière dans les Vosges[2]. Encore un alpin ; notre pauvre Paul sera-t-il épargné !
Lundi 15 mars
Soins toute la matinée.
Après déjeuner, visite chez Julie du Général Cordonnier, toujours fort aimable. Il nous reparle de la marche en avant, il sera tout à fait prêt dans 8 jours, et attend les ordres ; mais il est probable qu’on ne fera rien encore maintenant ; cela marche bien en Champagne, si l’on peut gagner encore 1 500 mètres, on sera de suite à Vauziers et c’est la percée des lignes allemandes ; on n’avancerait en Alsace qu’après. Comme Mme Ch. V. est là, il ne nous reparle pas de nous emmener ; c’est une discrétion adroite bien rare chez un homme. Elle-même paraît fort embarrassée, gênée vis à vis de nous. Quel tour peut-elle bien nous jouer !
Visite de l’ambulance ; il s’y trouve un chasseur cycliste de la 10e division ; je lui parle de Paul, tout de suite sa figure s’illumine. Je viendrai le voir souvent.
Conférence du docteur sur le vaccin, assez intéressante ; visite de M. Pointet, président du Comité que nous mettons au courant des mesquineries économiques de ses subordonnés, il pourra peut-être y remédier. Visite du sergent Voland ; comme tous nos anciens malades sont heureux de revenir.
Mardi 16 mars
Un temps de printemps, tous nos malades passent la journée dans le jardin. Quelques courses avec Julie.
Retour de Kieck que l’on veut réformer. Nous allons tâcher de l’escamoter ; ce malheureux ne sait où aller.
Mercredi 17 mars
Départ pour l’arrière de 3 malades. Drame au milieu de la visite ; le docteur ayant appris que deux soldats font de la propagande anti-militariste et tiennent des propos contre la France, l’Alsace, etc, leur fait une scène de reproches et les chasse de l’ambulance dans des termes très énergiques, mais si patriotes, que cela nous fait plaisir. Comme ces deux malades sont guéris, il n’y a aucun scrupule à avoir, et ils vont rejoindre leur compagnie immédiatement ; de plus le docteur écrit à leurs commandants pour demander une punition ; ils ne l’ont pas volée. S’il y en a malheureusement comme cela plus qu’il n’en faudrait, qu’au moins, on puisse faire un exemple sur ceux que l’on attrape.
Il fait un temps superbe ; je sors avec Julie, nous allons dans le petit bois où la vue est si belle ; cela fait du bien de respirer un peu d’air pur ; des aéroplanes évoluent sur nos têtes.
Arrivée de plusieurs malades.
Jeudi 18 mars
Soins toute la matinée ; courses après déjeuner, achat d’un cadeau pour la 1re Communion de la petite Béha.
Lettre de M. de N. ; on avance en Champagne mais au prix de beaucoup de pertes.
Séance de photographie dans le jardin ; les hommes sont ravis.
Vendredi 19 mars
Messe à St Vincent ; départ de malades pour Héricourt. Soins toute la journée.
Visite de M. Th. et de sa sœur Mme de Falletans, elle nous laissera Gros-Mimi[3] jusqu’après l’examen.
La seule nouvelle de source très sûre et très secrète, est la présence du Kronprinz à Mulhouse ; on espère beaucoup arriver à un résultat sérieux, vu son incapacité et sa bêtise. Et si on pouvait le prendre !
Samedi 20 mars
Soins toute la matinée. Mme de F. vient déjeuner avec sa sœur : temps splendide mais froid ; courses, visite du commandant Lauth, de Voland ; aucune nouvelle.
Dimanche 21 mars
Messe à St Christophe avec 20 de nos soldats dont 12 font leurs Pâques. Que cette messe militaire est donc belle. Au retour, trois de nos sous-officiers s’écartent pour acheter du champagne et des gâteaux et nous invitent à goûter avec eux ; c’est le monde renversé !
Déjeuner avec les St M., Mme de Falletans et le Capne de Beaurieux ; Mlle B. et Julie viennent se joindre à nous ; chacune apporte son plat pour ne pas faire trop de frais à la C. R.. Beaucoup de gaieté et d’entrain.
— Concert aux Anges, court et bon ; un soldat, 1er baryton au théâtre d’Anvers, chante de façon exquise, Mlle Hosatte etc. C’est vraiment très bien. Renée et moi rentrons vite pour notre goûter avec nos sous-off.
Nous nous installons dans notre bureau et cette très simple réunion est fort gaie.
Regoûter chez Julie avec les majors Petit et Falconnet et le capitaine aviateur Planté. Nous apprenons la visite des Zeppelins sur Paris, sans grands résultats d’ailleurs.
Quelle journée, et au milieu de tout cela, on trouve le moyen de ne pas manquer un pansement ni un soin, plus six nouveaux à installer. Quelle joie de se coucher !
Lundi 22 mars
Lever à 5 h. ½ comme d’habitude ; ce misérable Billot ma fait attendre ¾ d’heure avant de commencer sa quinte de toux ! Soins toute la matinée sans une minute de répit. Visite d’un Taube qui jette des bombes sur la Sté Alsacienne et le parc d’aviation, sans rien détériorer, comme toujours. Canonnade ; rien de plus joli que la fumée blanche des obus éclatant dans le ciel bleu ; malheureusement, ce misérable Allemand n’est pas atteint.
Comme nous avons ici une nouvelle escadrille d’avions munis de mitrailleuses, on peut s’attendre à de fréquentes visites ennemies pour la détruire, ou du moins essayer.
Après déjeuner, visite de l’ambulance par l’évêque de Siam, originaire de Belfort et faisant son service comme aumônier militaire. Puis, grande séance de photo. Il fait un temps idéal. Soins, salut.
À 6 heures, grande nouvelle ; Przemyśl est prise[4] ; les cloches de la Cathédrale sonnent à toute volée, celles du temple se mettent de la partie, c’est impressionnant. Cela ne vaut pas une bonne victoire française, mais cela nous aidera à avoir la nôtre plus belle et peut-être plus prochaine.
Nos soldats sont ravis, surtout les sous-off. un peu plus cultivés. Demain, ils boiront tous en l’honneur des Russes, le champagne offert par le capitaine des douanes.
Mardi 23 mars
Soins toute la matinée.
Après déjeuner, nous allons prendre le café chez Julie où nous retrouvons le capitaine Keller. Il nous dit que l’on va attendre encore, l’affaire de Champagne a coûté 20 000 hommes et l’on veut épargner des vies.
Mercredi 24 mars
Soins, départ pour l’arrière de 7 malades dont l’adjudant Miard que nous regrettons beaucoup et le petit Dessertine qui pleure comme un bébé.
À 2 heures, l’auto de Mme Viellard vient nous chercher pour nous conduire à Morvillars ; Nous y trouvons un grand nombre d’officiers de cuirassiers venus comme nous pour entendre la conférence de Paul Acker, mobilisé dans les environs. Il parle bien, sur la haine.
Toute sentimentalité étant considérée par les Allemands comme une preuve de faiblesse, doit être écartée de la guerre actuelle, et quand nous serons en Allemagne, à part les femmes et les enfants que les Français respecteront toujours, il faudra user de représailles. Il est très applaudi, naturellement, tout le monde étant de son avis. Nous causons avec lui assez longtemps, puis c’est l’heure du thé, simple, mais très élégamment servi. Rien que des uniformes et nos costumes blancs, c’est une vision de guerre tout à fait originale. Nous rentrons à l’ambulance, ravies de notre journée.
Visite du Gal Lecomte ; rien de nouveau au point de vue militaire.
Jeudi 25 mars
Messe à 6 heures. Notre petit malade est bien mal ; il fait ses Pâques de façon édifiante, nous écrivons aux parents.
Soins toute la journée ; visite du lt Bachelard ; aucune nouvelle intéressante.
Vendredi 26 mars
Soins ; correspondance ; je fais passer une lettre à Paul par M. Béha ; visite à Mme Feltin.
Un médecin de Danjoutin, fait prisonnier le 10 août rentre d’Allemagne. Voilà seulement un mois, que par crainte des représailles annoncées, les Allemands laissent passer les vivres et les colis. Il a vu des choses affreuses comme atrocités sur les prisonniers russes. Mais depuis quelque temps, l’insolente assurance des soldats qui les gardaient diminue de jour en jour pour faire place à l’idée de la défaite.
Samedi 27 mars
Voilà l’hiver revenu ; il neige et on gèle. Quel pays !
Visite du cap. de Beaurieux ; on a repris la crête de l’Hartmannswillerkopf ; encore un succès pour les Alpins.
Dimanche 28 mars
Les Rameaux ; temps horrible, neige. Messe militaire ; soins, le petit Bonte va de plus en plus mal.
M. de Beaurieux vient déjeuner, il a le spleen, ayant appris que les Allemands saccageaient tout dans le nord et les Ardennes puis il sait sa femme sans argent et n’a aucune nouvelle depuis Noël ; nous tâchons de le remonter le mieux possible.
Nous finissons par comprendre la vraie raison pour laquelle on n’avance pas. Une offensive générale ne peut se faire qu’avec au moins 130 000 obus par jour ; on n’en fabrique que 90 000 et le stock d’avance n’est pas assez considérable pour que l’on puisse commencer avec la crainte d’être arrêté au bout de très peu de temps par le manque de munitions.
On peut maintenant fabriquer à l’étranger et la production augmente tous les jours ; ce n’est donc plus qu’une affaire de patience ; mais il est bien probable qu’il faut compter encore un mois.
Thé chez Julie avec le Dr Petit, toujours agréable et spirituel.
Lundi 29 mars
Soins toute la matinée ; scène du Dr contre Renée à propos du départ de Gschwind ; le Dr finit par comprendre qu’on l’a trompé et est assez honteux de son pas de clerc. C’est toujours ce comité, individuellement, ils ne sont pas désagréables, mais, pris en bloc qu’ils sont donc ingénieux pour ennuyer les gens.
Deux de nos soldats vont de plus en plus mal, malgré tous nos efforts.
Séance de photographie.
Il est arrivé à l’aviation deux escadrilles de bombardement ; cela fait maintenant 24 appareils. Tous les jours, il en sort quelques uns qui vont bombarder les casernes ou les gares de Colmar ou de Strasbourg. Nous pouvons nous attendre à des visites d’avions boches ; peut-être nous fera-t-on les honneurs d’un Zeppelin.
Mardi 30 mars
À 10 heures, cérémonie assez émouvante ; remise de la médaille de St Georges à un de nos malades, Ougier, qui a eu les deux bras cassés à la bataille d’Aspach le 25 décembre. Il a déjà été cité à l’ordre du jour et est proposé pour la médaille militaire. Nous avions orné notre bureau de drapeaux, fait descendre tous les malades pouvant se lever et fait chercher le docteur. C’est au milieu de cette nombreuse assistance, qu’un capitaine du 42e, après quelques paroles élogieuses, a lu le décret du Tsar et a épinglé la médaille sur l’écharpe de notre soldat, très ému. Nous avions fait apporter du champagne et tout le monde a bu à notre France.
Continuation des ennuis du comité ; le Dr est de plus en plus gêné.
Mercredi 31 mars
Soins toute la journée. Thé avec Beaurieux, le commandant Gasseau et le capitaine Keller ; explication avec le Dr ; tout est bien qui finit bien.
Au beau milieu de mon sommeil, je suis réveillé par Mlle Roch et Mlle Pichot qui me disent qu’un avion allemand est juste au-dessus de nous et qu’il nous lance des bombes ; au même moment, j’entends une détonation formidable ; c’est la troisième, paraît-il. Avec un bruit pareil, comment les deux autres ne m’ont elles pas réveillée.
Cela a dû tomber bien près. On canonne, on tire, sans résultat, et le bruit du moteur s’éloigne de plus en plus. Toute la maison est en l’air ; nous sommes toutes en chemise chez Mlle Roch, la fenêtre ouverte pour ne rien voir ; on gèle et nous allons nous recoucher ; beaucoup de curiosité, mais ni émotion, ni frayeur.
- ↑ Maurice Happe est un aviateur de bombardement célèbre pour ses exploits. Sa base était située à Belfort.
- ↑ D’après l’historique du 6e bataillon de chasseurs alpins, le capitaine Marie-Léon-Dominique Haas (6e compagnie) est tué le 7 mars à l’assaut du Petit Reichaker. NdÉ.
- ↑ Surnom de Marie-Thérèse de St Michel. NdÉ.
- ↑ Przemyśl, ville détenue par les Austro-Hongrois et assiégée par les Russes, est prise le 22 mars 1915. Voir la page de wikipedia à ce sujet.