Chansons populaires de la Basse-Bretagne/Comme un batelet sur l’étang
— Et bonjour à vous, ma gente maîtresse,
Votre cœur va-t-il à merveille ?
— Mon cœur à moi se trouve satisfait,
Si le vôtre l’est aussi, jeune homme.
— Ma maîtresse, quand je passe devers voire jardin,
Je sens l’odeur des plantes fines,
L’odeur du thym et de la violette ;
Ma maîtresse, donnez-moi un bouquet.
— Je vous donnerai, en guise de bouquet,
Un chapelet aux grains dorés ;
Un chapelet aux grains de corail,
Mon serviteur, que vous trouverez pour prier.
— Dis-moi donc, ma maîtresse,
Quand à la mairie nous irons ensemble ?
— Je ne me marierai pas, cette année-ci,
Ni l’année prochaine, je ne le ferai pas non plus ;
Ni l’année prochaine, ni oncques jamais,
Car je me ferai religieuse.
J’aime mieux aller au couvent,
Que, dans ce monde, avoir tourment.
Là, j’aurai ma liberté ;
Avec vous, je n’aurai que tourment, toute ma vie
— Je vous le promets, ma maîtresse,
Pour avec moi vous n’aurez pas à souffrir.
— La manie des hommes est d’affirmer
Qu’ils ne sont pas rudes pour leurs femmes ;
Mais quand ils sont mariés, établis en boutique,
Il en est qui sont exigeants ;
Alors, pleuvant coups de pieds, et giffles,
Et, souvent, caresses de fagot.
Comme un batelet sur l’étang,
Est le cœur de la jeune fille :
Le balelet est joyeux et gai,
Le cœur de la jeune fille l’est aussi.
Comme une barque sur la mer grande,
Est une femme avec son homme ;
La barque est en danger de perdre la vie,
Une fille avec un homme l’est aussi.