Chansons populaires de la Basse-Bretagne/Les gars de Saint-Eloi
Les gars de Saint-Éloi disaient un soir, après souper :
— Allons-nous en, disaient les gars, au Petit-Cachin :
Claire s’est levée la lune ; il fera grandement beau aller ;
C’est là, à ce que j’ai entendu dire, qu’a lieu la veillée de la filerie.
Les jeunes filles se disaient l’une à l’autre :
— J’entends venir, en chantant, Jean-Marie Le Corvé,
Jean-Marie Le Corvé avec ses compagnons ;
Tout à l’heure, quand ils seront arrivés, nous serons régalées.
Comme les jeunes gens approchaient de la maison,
Les jeunes filles se lèvent pour les saluer :
— Salut à vous, jeunes gens ! — A vous, filles, de même !
Votre vue nous met le cœur en joie.
— Voici un long temps que nous ne vous avons pas vus.
— A peu près huit jours, répondent les garçons.
— Avancez, jeunes gens, avancez au haut bout de la maison :
Il y a facilité de vous donner (place) pour fumer,
Et après que vous aurez fumé, vous trouverez filles jolies,
Tant qu’il vous plaira en caresser, au gré de vos désirs.
Il sonne dix, onze heures, minuit est sonné,
En sorte que les garçons disaient : — A la maison il est temps d’aller.
Les jeunes filles disaient : — Vous avez bien le temps
D’ici à demain matin, quand se lèvera clair le jour,
D’ici à demain matin, quand le jour se sera levé clair ;
Vous verrez alors plus de clarté, pour vous diriger vers le logis.
Qui passerait à Kermarec, à l’heure de minuit,
Entendrait François Le Morvan pisser sur la paille.
Qui passerait à Kermarec, à l’heure de midi,
Verrait les draps de Morvan sécher au haut des arbres.
Et dans la côte de Lujiviri[1], près de la maison de la Vierge,
Un des Cabons s’est trouvé mal à l’aise :
Une des folles filles le prit à partie,
Se mit à lui faire reproche, à lui chanter pouille,
Si bien que le pauvre malade dut partir de là,
Sinon quatre bêtes affolées allaient sur le champ lui arracher les cheveux.
- ↑ Luzividi grande côte sur l’ancienne route nationale du Ponthou à Morlaix, au sommet de laquelle il y a une chapelle dédiée à la Vierge.