Chant de l’épée

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Traduction par Gérard de Nerval.
Garnier frères (p. 413-414).


CHANT DE L’ÉPÉE

Par Kœrner.


« Épée suspendue à ma gauche, pourquoi donc brilles-tu si belle ? Oh ! ta joie excite la mienne… Hourra !

— J’accompagne un brave guerrier, je défends un homme libre, et c’est ce qui fait ma joie… Hourra !

— Ma belle épée, je suis libre, et je t’aime… oh ! je l’aime comme une épouse… Hourra !

— À toi, ma brillante vie d’acier ; ah ! ah ! quand saisiras-tu ton épouse ?… Hourra !

— Déjà la trompette joyeuse annonce le matin vermeil… Lorsque tonnera le canon, je saisirai ma bien-aimée… Hourra !

— Oh ! douce étreinte, avec quel désir je t’implore ! oh ! prends-moi, cher époux, ma petite couronne t’appartient… Hourra !

— Comme tu t’agites dans ton fourreau, épée ! ta joie de sang est bien bruyante !… Hourra !

— Je m’agite impatiente du fourreau, parce que j’aime la bataille… Hourra ! — Reste encore dans la retraite, ma bien-aimée, reste ! bientôt je t’en ferai sortir… Hourra !

— Ne me faites pas longtemps languir… Oh ! que j’aime mon jardin d’amour, tout plein de beau sang rouge et de blessures épanouies !.. Hourra !

— Sors donc de ton fourreau, toi qui réjouis l’œil du brave ; sors, que je le conduise dans ton domaine… Hourra !

— Vive la liberté, au milieu de tout cet éclat !… l’épée brille aux feux du soleil, ainsi qu’une blanche épousée… Hourra !

— Braves cavaliers allemands, votre cœur ne se réchauffe-t-il pas ?… Saisissez votre bien-aimée… Hourra !

— Qu’à votre droite Dieu la bénisse, et malheur à qui l’abandonne !… Hourra !

— Que la joie de l’épousée éclate à tous les yeux, qu’elle resplendisse d’étincelles… Hourra ! »