Cheikh Nefzaoui - La Prairie Parfumée - 11

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La Prairie parfumée où s’ébattent les plaisirs (الروض العاطر في نزهة الخاطر)
Traduction par Baron R***.
(p. 66-68).


CHAPITRE IVe

Des méprisables parmi les femmes

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Sache, ô vizir, que Dieu te fasse miséricorde ! que les femmes sont de diverses natures ; il y en a qui sont dignes d’éloges ; d’autres au contraire, ne méritent que le mépris.

La femme qui mérite le mépris des hommes est laide et bavarde ; elle a les cheveux crépus, le front saillant, les yeux petits et chassieux ; elle a le nez énorme, les lèvres blafardes, la bouche grande, les joues ridées et les dents séparées par des brèches ; ses pommettes sont violacées et il lui pousse du poil au menton ; sa tête est supportée par un cou mince, présentant des tendons saillants ; ses épaules sont resserrées et sa poitrine étroite ; ses seins tombent comme de longues lanières de peau, et son ventre est comme une outre vide ; le nombril en ressort comme un tas de pierres ; ses côtes sont saillantes et paraissent comme des arcades ; on peut compter les os de sa colonne vertébrale ; son derrière est entièrement dépourvu de chair ; sa vulve est large et froide, exhalant une odeur pire que celle de la charogne ; elle est chauve, blafarde et juteuse, et il en sort un long clitoris, dur, puant et suintant.

Enfin elle a de gros genoux, de grands pieds[1], de grandes mains et des jambes étiques.

La femme qui a de pareils défauts ne peut procurer aucun plaisir aux hommes en général, et, en particulier, à celui qu’elle aura pour mari ou qui jouira de ses faveurs.

Celui qui s’approchera d’une telle femme verra son membre, s’il est en érection, redevenir à l’instant mou et flasque, comme s’il n’avait près de lui qu’une bête de somme. Que Dieu très élevé nous préserve d’une femme d’une si détestable nature !

Est aussi méprisable la femme qui rit continuellement avec éclat ; car, comme l’a dit un auteur : « Lorsque tu verras une femme riant beaucoup, aimant le jeu et les plaisanteries, continuellement en course chez les voisins, se mêlant de ce qui ne la regarde pas, fatiguant son mari de plaintes perpétuelles, se liguant avec les autres femmes contre lui, faisant l’importante, acceptant les dons de chacun, sache que cette femme est une putain sans vergogne ! »

Est également méprisable, d’entre les femmes, celle qui a un caractère triste, renfrogné, et qui est prolixe en paroles ; celle qui est légère dans ses relations avec les hommes, ou raisonneuse, ou cancanière et ne sachant pas garder les secrets de son mari, ou d’un naturel méchant. Celle-là, si elle parle, c’est pour mentir ; si elle fait une promesse, c’est pour la violer, et si quelqu’un se confie à elle, elle le trahit ; elle est débauchée, voleuse, criarde, grossière et emportée ; elle est incapable de donner un bon conseil ; elle est constamment occupée des affaires des autres et de ce qu’ils peuvent faire de mal, et toujours à l’affût des nouvelles futiles ; elle aime beaucoup le repos et peu le travail ; elle emploie des paroles malséantes lorsqu’elle s’adresse à des Musulmans, voire même à son mari ; elle a toujours des invectives à la bouche ; elle répand une mauvaise odeur, qui vous infecte quand vous êtes près d’elle et qui ne vous quitte même pas lorsqu’elle s’éloigne de vous.

Est non moins méprisable, d’entre les femmes, celle qui parle sans utilité, qui est hypocrite et qui ne fait pas le bien ; celle qui, alors que son mari la sollicite de remplir le devoir conjugal, ne tient pas compte de sa prière ; celle qui ne seconde pas son mari dans les affaires qu’il peut avoir ; celle enfin, qui l’importune de plaintes et de pleurs continuels.

Une femme de cette nature, si elle voit son mari irrité ou triste, ne s’afflige pas avec lui ; bien au contraire, elle redouble de rires et de jeux et ne cherche pas, par des caresses, à calmer sa mauvaise humeur. Elle est prodigue de sa personne pour d’autres que pour son mari ; ce n’est pas pour lui qu’elle se pare, et ce n’est pas pour lui plaire qu’elle cherche à s’embellir. Loin de là, elle est d’une malpropreté excessive et laisse voir à son mari ce qu’il y a de répugnant, dans sa personne, en fait de choses sales et d’habitudes honteuses. Enfin jamais elle ne se sert d’Atsmed[2], ni de Souak.

D’une telle femme, il n’y a pas de bonheur à espérer pour celui qui l’épousera. Que Dieu nous préserve d’elle !


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  1. (57) Les pieds comme une Guiterne » (guitare), etc. (Rabelais livre 4 chapitre XXXI.)
  2. (58) L’Atsmed est de l’antimoine, dont on fait un collyre. Les femmes s’en noircissent l’intérieur des paupières, afin de faire paraître les yeux plus grands et d’en augmenter l’éclat.