Chronique de Guillaume de Nangis/Année 1255

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Règne de Louis IX (1226-1270)

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[1255]


Wiliquin, roi des Romains, appelé aussi Guillaume, fut tué par les Frisons. Après sa mort, les électeurs s’étant divisés en deux partis, les uns élurent le roi d’Espagne, et les autres Richard, comte de Cornouailles, frère de Henri roi d’Angleterre. Mais enfin Richard, par le secours de ses richesses, fut couronné à Aix-la-Chapelle. Les habitans de Turin, par le conseil des habitans d’Asti, prirent pour leur seigneurie le comte de Savoie. L’Église romaine, mécontente de ce que la souveraineté de Turin lui avait été conférée par Guillaume, roi des Romains, et par l’église de cette ville, excommunia les habitans de Turin et d’Asti, en Lombardie, et fit confisquer par le saint roi de France Louis les biens qu’ils possédaient dans son royaume. Ladite ville de Turin fut assiégée par Boniface évêque de Lyon, et par Pierre de Savoie, frères dudit Thomas, mais ils ne purent s’en emparer ; Brancaléon de Bologne, serviteur de la ville de Rome, qui cultivait avec zèle la paix et la justice, fut, par le conseil de quelques cardinaux et nobles de Rome, dans une sédition qui s’était élevée, assiégé dans le Capitole. S’étant rendu, il fut mis en prison par le peuple ; mais ayant enfin été livré aux nobles, il fut emprisonné dans une certaine ville où on lui fit subir de mauvais traitemens. S’il n’eût eu à Bologne des otages des Romains, les Romains l’eussent tué, parce que dans l’exercice de la justice, il n’avait pas épargné leurs habitudes de rapine. Les habitans de Bologne, quoique interdits par le pape, ne voulurent remettre leurs otages qu’à condition qu’on leur rendrait leur concitoyen.

Marguerite, comtesse de Flandre et du Hainaut, voyant que Florent, comte de Hollande, fils du feu roi Wiliquin, défendait contre elle ses fils, Jean et Baudouin, qu’elle avait eus de Bouchard seigneur d’Avesnes, et les recevait en Hollande, leva contre eux, dans son pays, une armée considérable qui fut commandée par ses deux fils, Gui et son frère, nés du seigneur de Dampierre, les comtes de Guines et de Bar, et Hérard de Valéry, fameux et vaillant chevalier. Etant venus par mer au rivage de Hollande, trahis par un certain chevalier du parti ennemi, ils tombèrent au pouvoir du comte de Hollande. Le comte de Guines et les Frisons qui s’étaient réunis à cette expédition, non pour porter secours mais pour y faire du gain, enlevèrent Hérard de Valery et le comte de Bar ; mais ensuite, en ayant reçu de fortes sommes d’argent, ils les rendirent sains et saufs à leurs gens.