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Collection complète des œuvres de M. de Florian/Fables/3/La Balance de Minos

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Pour les autres éditions de ce texte, voir La Balance de Minos.

Fables de FlorianLouis Fauche-BorelVolume 9 (p. 119-120).


FABLE XII

La Balance de Minos


      Minos, ne pouvant plus suffire
Au fatigant métier d’entendre & de juger


Chaque ombre descendue au ténébreux empire,
      Imagina, pour abréger,
      De faire faire une balance
Où dans l’un des bassins il mettoit à la fois
Cinq ou six morts, dans l’autre un certain poids
      Qui déterminoit la sentence.
Si le poids s’élevoit, alors plus à loisir
      Minos examinoit l’affaire ;
      Si le poids baissoit au contraire,
      Sans scrupule il faisoit punir.
La méthode étoit sûre, expéditive & claire ;
Minos s’en trouvoit bien. Un jour, en même temps,
      Au bord du Styx la mort rassemble
Deux rois, un grand ministre, un béros, trois savants.
      Minos les fait peser ensemble :
      Le poids s’élève ; il en met deux,
Et puis trois, c’est en vain ; quatre ne font pas mieux.
Minos, un peu surpris, ôte de la balance
Ces inutiles poids, cherche un autre moyen ;
Et, près de là voyant un pauvre homme de bien
Qui dans un coin obscur attendail en silence,
      Il le met seul en contre-poids :
Les six ombres alors s’élèvent à la fois.