Comme aux âges naïfs je t’ai donné mon cœur

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Mercure de France (p. 23-24).

VIII


Comme aux âges naïfs, je t’ai donné mon cœur,

Ainsi qu’une ample fleur,
Qui s’ouvre pure et belle aux heures de rosée ;
Entre ses plis mouillés ma bouche s’est posée.

La fleur, je la cueillis avec des doigts de flamme ;
Ne lui dis rien : car tous les mots sont hasardeux :
C’est à travers les yeux que l’âme écoute une âme.

La fleur qui est mon cœur et mon aveu,
Tout simplement, à tes lèvres confie
Qu’elle est loyale et claire et bonne, et qu’on se fie
Au vierge amour, comme un enfant se fie à Dieu.


Laissons l’esprit fleurir sur les collines

En de capricieux chemins de vanité,
Et faisons simple accueil à la sincérité
Qui tient nos deux cœurs vrais en ses mains cristallines ;
Et rien n’est beau comme une confession d’âmes
L’une à l’autre, le soir, lorsque la flamme
Des incomptables diamants
Brûle comme autant d’yeux
Silencieux
Le silence des firmaments.