Comment je cours sur la route/VI
MA MACHINE
Mais je m’aperçois que je m’occupe surtout de l’homme et que je parle à peine de ma fidèle Peugeot : je dois à ce sujet quelques explications à ceux de mes amis qui seront mes lecteurs.
La machine est tout pour le coureur, aussi doit-elle être choisie avec le plus grand soin.
Tout le monde sait que j’ai fixé mon choix sur une machine sortant des usines de Valentigney, qui sont bien, je vous l’affirme les plus importantes du monde entier.
Je m’en félicite encore aujourd’hui. Je savais par expérience que ma Peugeot accomplirait, avec une facilité dérisoire, les 5 000 kilomètres du dur parcours. Avec elle, deux années de suite, j’ai franchi plaines et montagnes sans avoir jamais éprouve le moindre ennui. J’eusse été bien mal inspiré, alors que j’avais déjà gagné deux « Tour de France » machines poinçonnées, si cette année j’avais éprouvé le besoin de changer de marque.
Donc, j’allai moi-même à Valentigney, où je fis, devant moi, monter soigneusement ma fine bicyclette.
C’était immédiatement après Bordeaux-Paris. Je m’occupai ensuite de tous les accessoires. Et, après avoir mis mon vélo à ma disposition, je repris, à titre d’entraînement la route de Paris.
J’ai tatonné longtemps avant de trouver la bonne position. C’est à mon avis, le problème le plus délicat qui soit à résoudre. On ne parvient pas du premier coup à tomber juste. Il faut travailler pour y arriver, et quelquefois un rien vous arrête longuement.
Et pourtant, pour marcher sur route avec le minimum d’efforts, il est indispensable d’être bien assis sur sa machine.
Il m’est impossible de donner à ce sujet une indication quelconque. Tout ce que je puis faire c’est d’attirer l’attention des aspirants champions sur le guidon et sur la selle. Le guidon doit être suffisamment large pour que la position des bras ne gêne pas la respiration ; la selle doit être éprouvée de longue date. Celle avec laquelle j’ai accompli mon Tour de France cette année me sert depuis au moins deux ans.
Il faut s’attacher à ne monter ni trop haut ni trop bas ; il faut trouver la multiplication qui convient le mieux à ses propres moyens : j’ai adopté 5 mètres pour les étapes ordinaires, au grand maximum 5 m. 30, pour les étapes dures 4 m. 50 ou 4 m. 75.
Les mains doivent se poser naturellement sur le guidon les bras ne doivent pas être tendus ou alors on souffre horriblement des poignets ; il faut monter assez haut si l’on veut éviter les maux de genoux ; dont ont souffert tant de concurrents de la grande épreuve de l’Auto.
Un mot, en passant, relativement aux genoux. Si vous éprouvez le moindre picotement à la suite d’une longue promenade, n’hésitez pas un seul instant, massez-vous les rotules avec des serviettes bien chaudes. Il n’y a pas d’autre traitement.