Conduites pour les exercices principaux qui se font dans les seminaires ecclesiastiques

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A
JESUS-CHRIST

NOTRE MAITRE
ET

SOUVERAIN SEIGNEUR.
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SAUVEUR du monde, Premier & Souverain Prêtre, Vôtre Majesté a bien voulu icy bas en terre élever, pendant l’espace de plusieurs années ceux qu’elle avait choisi & appellé au Sacerdoce Evangelique, afin de les rendre propres à leur Ministere par les saints exemples & divines instructions, dont ils étoient participans dans vôtre Sacré Seminaire : vôtre moisson est abondante en nos jours ; & entre grand nombre d’Ecclesiastiques il
y a peu d’Ouvriers, ayant peu de connaissance de cet état si sublime, & peu de zele pour l’avancement de vôtre gloire : donnez-donc, mon Seigneur, par le zele infini qui vous a porté à vouloir être le Maître, le Directeur & le Serviteur tout ensemble de vos premiers Disciples, l’abondance de vos benedictions à ce petit Ouvrage, afin que ceux qui prendront la peine de le lire, y écoutant vôtre voix, se portent à aimer & embrasser la discipline pour se bien acquitter des devoirs plus essentiels de leur état, & à vous remercier & servir à jamais en justice & sainteté de vie, comme Auteur de tout bien, & le but de tous leurs desseins.


AVIS AV LECTEVR.
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MON cher Lecteur, il n’y a rien de plus dangereux ny de plus injuste que de laisser préoccuper son esprit legerement, & juger des choses les plus importantes & plus necessaires aux Ecclesiastiques par les principes & maximes de la prudence humaine, qui est animée de l’esprit du monde, & ennemie de toute Discipline Chrétienne & Cléricale : c’est pourquoy je vous prie de considerer ce petit Ouvrage dans le même esprit qu’il a été donné au Public, c’est à dire avec le dessein unique de vous faire reconnoître sa necessité des Seminaires dans l’Eglise, & les grands avantages qu’en tirent ceux qui veulent avec fidelité se servir de ces instructions. Que s’il y a quelque chose qui semble moins necessaire, on peut toutefois assurer que la longue experience en ayant fait connoître l’utilité, si bien il est à la liberté de ceux qui travailleront dans les Seminaires de s’en servir ou non, aussi n’est-il pas à propos d’en priver ceux qui auraient désir d’en faire profit. Vous y avez premierement les avis generaux & particuliers pour mettre les Ecclesiastiques en état de profiter au Seminaire, en se proposant d’y chercher la pieté & l’esprit ecclesiastique par la retraite & mépris du monde, & la science pratique des fonctions de leur état. On explique ensuite la nature, les fins & les moyens de réüssir en chaque Exercice particulier du Seminaire, avec les pratiques pour les faire avec l’esprit que chacun d’eux doit être fait. Enfin l’experience fait voir qu’il n’y a rien de plus rare qu’un homme vrayement Apostolique qui sçache le mettre au travail où il sera employé avec la prudence, le zele, la pieté necessaire, & régler ses occupations journalieres ; il a falu y ajouter l’idée & la conduite d’un bon Curé, qui veut commencer à travailler & perseverer dans quelque bon réglement de vie. On n’a rien inseré de l’ordre du tems des Conferences & Exercices particuliers qui se sont dans le Seminaire, car cela n’a pas été jugé necessaire : il suffit en general ne dire qu’on y fait les Exercices de l’Oraison mentale, les Conferences de pieté, Theologie morale, Catechisme Romain, de la pratique des Sacremens, des Catechismes, des Ceremonies, du Plein-chant, &c. aux jours & heures plus commodes ; Priez Nôtre-Seigneur que tout bon dessein ait un effet de sa misericorde, le fruit de tout cecy réüssisse uniquement à la gloire de son Saint Nom, & à l’édification des Peuples.


POUR LE CATECHISTE.


Estant arrivé à l’Eglise, il faut adorer la Sapience incarnée residente au trés-Saint-Sacrement, faire un acte de contrition, & demander sa benediction pour faire cette action purement pour sa gloire, disant : Jesu sapientia æterna, munda labia mea, qui labia Isaïæ Prophetæ calculo mundasti ignito, ut sanctum Evangelium tuum dignè nuntiare valeam ad laudem & gloriam nominis tui. Qui vivis &c.

Pour s’y porter avec plus de zele, il faut considerer des yeux de la Foy la ferveur de Nôtre-Seigneur, avec laquelle il alloit de Ville en Ville, de Village en Village, annoncer aux pauvres le Royaume de Dieu ; & en cette consideration, se donner à luy pour entrer dans son saint zele, & en recevoir quelque participation, disant :

O Jesus ! mon cher Maître, quand sera-ce que vôtre zele me consommera, & que je n’auray de l’amour & de la ferveur que pour la sanctification de vôtre saint Nom ?

Ensuite regarder par la Foy, l’estime que Dieu fait des ames, & en particulier de celle du plus pauvre & du plus abjet des enfans que l’on va enseigner ; disant en son cœur : O Jesus mon Seigneur ! que vous aimiez cette ame, lorsque vous épanchiez vôtre Sang précieux pour elle, & que vous souffriez tous les mépris, ignominies, toutes les croix & fatigues pour la sauver. O Dieu débonnaire ! faites que je sois tendrement amoureux de ces ames, & que nulle autre consideration ne me fasse jamais entreprendre cette action. O pauvre enfant ! que tu es vil & abjet aux yeux des hommes ; mais que ton ame est précieuse & aimable dans les Playes sacrées de nôtre Sauveur.

Faites, mon Seigneur, par vôtre infinie bonté, & par l’amour que vous portés aux ames, qu’à chaque parole, mouvement, regard & respiration, je puisse renouveller en esprit cette mienne résolution, & vous offrir toutes les loüanges & benedictions qui vous ont été, sont & seront offertes à jamais au Ciel & en la Terre, en union de vôtre saint amour.

Puis il faut dire : O mon Sauveur Jesus-Christ ! je vous adore dans vos abaissemens, enseignant ces pauvres que vous veniez racheter au prix de vôtre précieux Sang : je vous rends graces de tout mon cœur, & me reconnois trés-indigne de cooperer en cette fonction avec vôtre Majesté ; c’est pour accomplir vôtre sainte volonté que j’ose l’entreprendre. Je me donne donc à vous pour vous imiter, & faire cette action avec toutes les saintes intentions que vous desirez, & que vous aviez pour la gloire de vôtre Pere, & le salut des ames. Faites, mon Seigneur, que ce ne soit pas moy qui agisse, qui parle & qui travaille, mais vôtre esprit en moy : faites que je ne connoisse que vous dans les créatures, & que vous soyez l’unique amour de mon cœur, & la recompense de mon travail, aprés y avoir satisfait à vôtre Justice pour mes pechés, dont j’ai regret de tout mon cœur pour l’amour de vous.

Doux JESUS faites-nous la grace
Que nous soyons pauvres d’esprit,
Afin que devant vôtre face,
Au livre des Elûs nous nous trouvions écrits.
Sainte Vierge, Mere des Pauvres,
Obtenez-nous ce don de Dieu ;
Que de catechiser les Pauvres
Ce soit de nos emplois le plus délicieux.


Oraison pour demander l’humilité.


Domine Deus meus parvulorum sublimitas, & humilium celsitudo, qui Unigenitum tuum velamento nostræ carnis indutum in humilitaris magistrum dedisti, eumque humilem in mundum ingredi : humilem in mundo conversari, & humilem è mundo exire voluisti : respice, obsecro, ad desideria cordis nostri, & miserere gemituum infirmitatis noftræ, virtutemque humilitatis nobis tribue, ut eum quem professione sequimur, conversatione imitemur, & tibi, qui gloria nostra es, ejus vestigiis inhærendo placeamus : immitte in corda, quæ creasti & ex æternitate dilexisti, veram & claram notitiam nostri, desideria contemptûs, & vilipensionis excita ad ascendendos hujus scalæ cœlestis gradus robora, & fructus humilitatis in manibus nostris ostende. Da pacem Domine, da pacem nobis, quam in verissima hujus sæculi, & nostri despicientiâ collatam intuemur in animabus nostris : hoc sublimissimum, fundamentum structuræ spiritualis injicito, ut dùm illi te donante virtutum lapides superponimus, & ferventissimâ charitate contegimus, Templum in nobis, quod tu, ô Deus meus ! semper inhabites, exstruamus. Amen.

Meluts est sapere modicum cum humilitate & parvâ intelligentiâ, quàm magni scientiarum thesauri cum vana complacentia. Akempis lib. 3. c. 7.