Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 7/1537
J’attends avec impatience ta lettre de demain matin. Pourvu qu’elle ne m’apporte pas une aggravation de mauvaises nouvelles !
Ah ! s’il pouvait y en avoir de bonnes ! Au moins, dis-moi toute la vérité. Je continue à avoir le cœur comme dans un étau et à ne pouvoir m’occuper de quoi que ce soit, malgré mes efforts.
Hier, à 8 heures du soir, il a fait ici un orage effroyable et tel que les « Anciens » ne se souviennent pas d’en avoir vu. Pendant trois heures, il a plu et tonné d’une façon prodigieuse. Les plafonds de mon cabinet, de mon cabinet de toilette et de la chambre de notre pauvre mère ont été traversés. J’ai cru un moment que la maison allait crouler sur moi, et j’étais dans un joli état moral. Le dégât n’est pas grand, seulement il faut tout de suite faire relever les plafonds. Senart est venu voir ce qu’il y avait à faire. Le plombier s’y mettra demain. Ce ne sera pas grand’chose comme frais.
L’orage m’avait agité, et j’ai eu une bien mauvaise nuit, un cauchemar dont je sens encore l’influence.
Putzel ne me quitte pas, mais la pauvre petite bête a l’air triste. Et toi, pauvre Caro, comment vas-tu ? Tu dois être énervée par le déménagement.
Quand finira notre état d’angoisse ? Aurons-nous de meilleurs jours ? Fais toutes mes amitiés à la bonne Flavie, et embrasse pour moi ton pauvre mari.
Adieu, ma chère fille. À bientôt, n’est-ce pas ? Tu as raison : il faut nous écrire tous les jours pendant ton absence. Donne-moi des détails sur tout.