Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 8-9/1985
Comme voilà longtemps que nous n’avons correspondu, ma chère princesse ! Mais, grâce au ciel et enfin, je vais bientôt vous revoir.
Je compte furieusement réparer le temps perdu. Cette perspective emplit de joie le cœur de votre fidèle.
Indirectement j’ai eu de vos nouvelles par ma nièce et par Goncourt, lesquels m’ont dit que vous étiez toujours vaillante.
Goncourt m’a semblé très gaillard ; jamais je ne l’avais vu en aussi bonnes dispositions. Était-ce bien l’air de la campagne ? Aurai-je la visite de Popelin ?
J’avais projeté de ne retourner à Paris qu’à la fin de mon affreux livre ; mais la fin n’arrive pas, bonsoir ! Et dans une quinzaine je ferai mes paquets[1]. Ma première course, bien entendu, sera pour me précipiter rue de Berri. Vous n’en partirez pas sans doute avant le mois de juin ? Vos arbres de Saint-Gratien ont-ils souffert ? Ici tous les lauriers sont morts. Le temps des lauriers est fini, et pour moi celui des roses !
Ce qui ne m’empêche pas, Princesse, de me mettre à vos genoux et de vous baiser les deux mains.
- ↑ Flaubert mourut, frappé d’apoplexie, le 8 mai 1880.