Correspondance de Victor Hugo/1832

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(tome 1p. 505-520).
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1832.


À Monsieur Esquirol,
médecin en chef de la Maison Royale de Charenton[1].


Monsieur,

Il y a quelques mois, on me transmit une lettre adressée à un de mes ...[2] et dans laquelle l’administration de St-Maurice réclamait de la famille de M. Eugène Hugo, mon frère, une somme de cinquante ou soixante francs par an pour subvenir à ceux de ses besoins auxquels l’État ne pourrait pas subvenir. La liquidation de la succession de mon père n’étant pas encore terminée, et ne sachant si, toutes dettes payées, il reviendrait une part quelconque à ses héritiers, je crus devoir offrir sur-le-champ, d’avance, moi-même, la somme que l’administration réclamait, et je chargeai la personne à laquelle la demande était adressée de répondre que M. Victor Hugo paierait, sur la demande de l’administration et sur ses reçus, la somme de soixante francs par an en deux paiements semestriels de trente francs, le jour où l’administration les réclamerait près de lui. J’apprends aujourd’hui que mes intentions n’ont pas été remplies, et que mon cher et pauvre frère attend toujours. Je m’empresse, monsieur, de m’adresser directement à vous et de vous faire savoir que j’ai toujours été prêt, quoique sans aucune fortune et chargé d’une famille de neuf personnes, à faire pour mon frère Eugène ce que l’administration de Saint-Maurice réclamait. Je serais charmé d’en causer avec vous, si vous en avez le loisir, le jour, l’heure et à l’endroit que vous me désignerez. Je voudrais aussi savoir si vous verriez toujours à ce que je visite mon frère les mêmes inconvénients qu’y voyait il y a sept ans M. Royer-Collard.


Je compte, monsieur, sur un mot de réponse de vous, et je vous prie d’excuser la peine que je vous donne et d’agréer l’assurance de mes sentiments distingués.

Paris, 23 janvier [1832].
Victor Hugo.
9, rue Jean-Goujon,
Champs-Élysées[3].


À Monsieur le général Louis Hugo[4].

Je t’écris, mon cher oncle, avec des yeux bien malades ; mais le plaisir que j’ai à t’écrire m’empêche de m’apercevoir de mon mal. J’ai reçu ta petite lettre et le mandat pour Martine qui te remercie bien.

Tu as peut-être appris par les journaux qu’un de mes enfants, mon pauvre gros Charlot, avait été malade du choléra. Dieu merci ! nous l’avons sauvé. Mais ta femme qui est mère, se figurera aisément les angoisses de la mienne. Nous espérons comme toi que l’épidémie n’atteindra pas Tulle, car nous serions bien inquiets de vous tous. Paris en est presque délivré.

Voici une nouvelle édition de mes romans que je t’envoie[5]. Tu recevras les autres volumes à mesure qu’ils paraîtront.

Eugène est toujours dans le même état. Ce pauvre frère souffre peu ou point, c’est le seul bonheur qu’un pareil malheur nous laisse. M. Esquirol me défend toujours de le voir, mais j’ai fréquemment de ses nouvelles, et j’ai pris les mesures pécuniaires nécessaires pour qu’il ne manque de rien.

Adieu, mon excellent oncle. Nous vous embrassons tous de tout cœur.

Victor[6].
5 mai [1832]. Paris.


À Sainte-Beuve.


17 mai [1832].

Je pense, mon cher ami, que vous avez vu Renduel[7] et qu’il vous a dit ce dont je l’avais chargé. Jusqu’à présent je n’ai proposé votre article aux Débats[8] qu’avec une extrême réserve en maintenant tous les privilèges dus à votre talent, et en demandant que l’article fût accepté sur votre nom sans être lu au préalable. Cependant M. Bertin l’aîné, qui a, vous le savez, la plus haute et la plus profonde estime de ce que vous faites et de ce que vous êtes, m’ayant témoigné hier le désir de lire l’article, uniquement pour voir s’il ne renfermait rien de contraire à la couleur politique du journal, je ne pense pas qu’il faille le lui refuser. Je le lui remettrai donc, si vous ne me le défendez pas. M. Bertin est on ne peut plus disposé à insérer, et je suis convaincu que l’article passera. Sinon, je compte toujours sur votre bonne intention pour le National. J’ajouterai ici, en confidence, que le désir de vous avoir aux Débats comme rédacteur littéraire me paraît très grand et perce dans tout ce qu’on me dit. Tenez ceci bien secret. Qu’en pensez-vous de votre côté ?

Maintenant, vous serait-il possible d’ajouter à votre admirable article une page, n’importe où, à la fin par exemple, pour parler de l’édition en elle-même, des nouvelles préfaces, notamment de celle du Dernier jour d’un condamné qui a quelque étendue, sinon quelque importance, et pour dire que lorsque la réimpression nouvelle de Notre-Dame de Paris paraîtra, le journal en reparlera, ainsi que des trois chapitres nouveaux qui sont très longs, et où figure Louis XI. Ceci est dans l’intérêt matériel de la chose et du libraire. Pardon ! si vous y consentez, écrivez-moi s’il est nécessaire que je vous renvoie l’article ou si au contraire vous pouvez faire cette addition sans cela et me l’envoyer assez promptement pour que la remise du tout à M. Bertin ne soit pas trop retardée.

Pardon encore et mille fois merci.

V.[9]


À Sainte-Beuve.


Ce 7 juin, dix heures du soir [1832].

Je rentre, mon cher ami ; l’heure du rendez-vous au National est passée[10]. Mais je m’unis à vous de grand cœur. Je signerai tout ce que vous signerez, à la barbe de l’état de siège[11].

Votre ami dévoué,
Victor[12].


À Sainte-Beuve.


12 juin 1832.

Je ne suis pas moins indigné que vous, mon cher ami, de ces misérables escamoteurs politiques qui font disparaître l’article 14 et qui se réservent la mise en état de siège dans le double fond de leur gobelet !

J’espère qu’ils n’oseront pas jeter aux murs de Grenelle ces jeunes cervelles trop chaudes, mais si généreuses. Si les faiseurs d’ordre public essayaient d’une exécution politique, et que quatre hommes de cœur voulussent faire une émeute pour sauver les victimes, je serais le cinquième.

Oui, c’est un triste, mais un beau sujet de poésie que toutes ces folies trempées de sang[13] ! Nous aurons un jour une république, et quand elle viendra, elle sera bonne. Mais ne cueillons pas en mai le fruit qui ne sera mûr qu’en août. Sachons attendre. La république proclamée par la France en Europe, ce sera la couronne de nos cheveux blancs. Mais il ne faut pas souffrir que des goujats barbouillent de rouge notre drapeau. Il ne faut pas, par exemple, qu’un Frédéric Soulié[14], dévoué il y a un an à la quasi-censure dramatique de M. d’Argout[15], clabaude à présent en plein café qu’il va fondre des balles. Il ne faut pas qu’un Fontan[16] annonce en plein cabaret pour la fin du mois quatre belles guillotines permanentes dans les quatre places principales de Paris. Ces gens-là font reculer l’idée politique qui avancerait sans eux. Ils effrayent l’honnête boutiquier qui devient féroce du contre-coup. Ils font de la république un épouvantail. 93 est un triste asticot. Parlons un peu moins de Robespierre et un peu plus de Washington.

Adieu. Nous nous rencontrerons bientôt, j’espère. Je travaille beaucoup en ce moment. Je vous approuve de tout ce que vous avez fait, en regrettant que la protestation n’ait pas paru. En tout cas, mon ami, maintenez ma signature près de la vôtre.

Votre frère,
Victor[17].


Au baron Taylor.


Ce jeudi, 7 septembre [1832].

Je pars, mon cher Taylor, après-demain samedi, à une heure après midi ; je reviendrai à Paris exprès pour la lecture[18] ; mais comme je serai obligé de retourner dîner à Bièvre[19] à six heures, et qu’il y a trois heures de chemin, il faudra absolument que la lecture soit finie à trois heures au plus tard, et par conséquent qu’elle ait commencé au plus tard à dix heures et demie du matin. Je vous serai donc reconnaissant de faire la convocation de ce jour-là pour dix heures. Je serai forcé, moi, de me lever à six heures du matin ; c’est une dure extrémité, mais je m’y résigne. Vous trouverez ci-contre une ébauche de la distribution. J’aurais bien besoin de vos bons conseils pour cela, et vous seriez bien aimable de venir me voir un moment pour cet objet demain ou après-demain avant midi. Vous savez combien est entière ma confiance en vous. Mlle  Mars accepte-t-elle ? Monrose[20] désire-t-il ? Que me conseillez-vous à défaut de Mlle  Mars, Mlle  Anaïs[21] ou Mlle  Brocard ? Je voudrais bien vous parler aussi de Desmousseaux[22] que j’aime et que j’estime et à qui je ferai un beau rôle avant peu. Vous voyez que j’ai un million de choses à vous dire, sans compter les amitiés.

Victor.

Il serait fort à souhaiter que M. Ciceri[23] et le dessinateur des costumes fussent au théâtre le jour de la lecture pour que je puisse leur parler.

Projet de distribution :
François Ier M. Bocage[24].
Triboulet M. Ligier.
Blanche Mlle  Mars ou Anaïs.
M. de Saint-Vallier M. Joanny.
Saltabadil M. Monrose ou Beauvallet.
Maguelonne Mlle  Dupont.
Clément Marot M. Samson.
M. de Pienne M. Geffroy.
M. de Pardaillan (page) Mme  Menjaud.
M. de Cossé M. Duparay.
Mme  de Cossé Mme  Masson.
M. de Gordes M. Marius.
M. de Vie M. Bouchet.
M. de la Tour Landry M. Mirecour.
MM. de Montchenu, de Brion et de Montmorency. M. Régnier.
M. Albert.
M. Monlaur.
Dame Bérarde Mme  Tousez.
Une femme du peuple Mlle  Petit.
Un médecin M. Dumilatre.
Victor Hugo.

Vous voyez que j’ai besoin de vos conseils pour ces rôles secondaires,

qu’on peut d’ailleurs distribuer un peu plus tard sans inconvénient.
À Sainte-Beuve.


Ce vendredi, 21 septembre [1832]. Les Roches.

Je vous écris bien vite quelques lignes, mon ami. Quelqu’un part en ce moment pour Paris et se charge de cette lettre pour vous. Quand on met une lettre à la poste à Bièvre, elle met trois ou quatre jours pour arriver à Paris. Je crois, vraiment, qu’elle passe par Marseille.

Nous sommes ici dans la plus grande paix qui se puisse imaginer. Nous avons des arbres et de la verdure mêlée à ce beau ciel de septembre sur notre tête. C’est tout au plus si je fais quelques vers. Je vous assure que le mieux ici est de se laisser vivre. C’est une vallée pleine de paresse. Votre lettre pourtant m’a fait regretter Paris. Si j’avais été à Paris, nous aurions dîné ensemble dans quelque cabaret, et vous m’auriez lu votre article sur Lamartine[25]. Vous savez combien j’aime Lamartine, et combien je vous aime. Vous êtes pour moi deux poëtes égaux, deux admirables poëtes du cœur, de l’âme et de la vie. Jugez combien je suis impatient de voir l’un analysé par l’autre. J’attends avidement la Revue du 1er octobre. C’est une chose singulière que vous m’ayez amené à désirer un journal au milieu de toutes ces belles prairies.

M. Bertin a invité l’abbé de Lamennais et Montalembert[26] à dîner aux Roches. Ils viendront dimanche. Ils trouveront ici d’assez médiocres catholiques, mais de vrais et sincères amis de tout génie et de toute vertu.

Adieu, mon cher ami. Je n’ai pas encore besoin de votre bonne présence au Roi s’amuse. Comptez que j’userai de vous comme vous useriez de moi. Le premier bonheur de la terre, c’est de rendre des services à un ami ; le second, c’est d’en recevoir.

Adieu. Je vous serre tendrement les mains.

Victor.

Nous nous portons tous à merveille. Ma femme fait deux lieues à pied

tous les jours et engraisse visiblement[27].
À Mademoiselle Louise Berthin[28].


Lundi, 22 octobre 1832.

Mademoiselle, est-ce que vous me permettrez d’ajouter un troisième griffonnage aux deux griffonnages hideux que je vous envoie ? Didine et Charlot ont gribouillé à l’envi, comme vous voyez ; et je vous demande grâce pour eux comme pour moi.

Nous avons reçu ce matin votre bonne et charmante lettre. Didine m’a prié de la lire à haute voix, ce que j’ai fait à la satisfaction générale de ma populace de marmots. Ma femme a été attendrie jusqu’aux larmes de tout ce que vous écrivez de tendre et de gracieux à ces pauvres enfants. Je vous assure que toutes nos journées se passent à regretter les Roches, quand je ne suis pas dans la caverne de Saltabadil et de Maguelonne. Nous nous rappelons à chaque heure du jour quelque douce chose à laquelle elle était employée près de vous. Ligier[29] me disait hier à la répétition que je reconstruisais le théâtre français ; j’aimerais bien mieux bâtir avec vous un théâtre de cartes.

Le temps est beau, et je pense avec joie que l’admirable jardin des Roches n’est pas fermé par les pluies d’automne aux promenades de M. Bertin. Dites-lui bien, ainsi qu’à Mlle  Bertin, à quel point je vous suis dévoué à tous. Vous ne me parlez pas d’Édouard qui travaille, j’espère, comme un diable, et qui est bien heureux de n’avoir pas besoin de faire jouer ses paysages. Serrez-lui la main pour moi, je vous prie.

Ma femme me charge expressément de vous prier de ne pas trop travailler et de penser beaucoup à nous. Il est inutile que je vous reparle de mon profond et respectueux attachement.

Je ferai chercher votre couteau, mais Didine se prétend sûre de ne pas l’avoir emporté. Je pense que vous le retrouverez dans quelque double fond de la boîte à couleurs.

Victor Hugo.
À Mademoiselle Louise Bertin.


Paris, 30 octobre 1832.

Malgré votre défense, mademoiselle, je vous écris encore : il faut que vous me permettiez de vous envelopper de quelques mots le style et l’orthographe de mes marmots. Je ne sais pas où diable Antoni[30] irait chercher le naïf dans l’art, si ces lettres-là ne le ravissaient pas. Quant à moi, elles m’enchantent, je vous le déclare ; je leur laisse la bride sur le cou, et les deux petits lutins vous écrivent tout ce qui leur passe par la tête. Je vous demande pardon pour eux.

Je vous demande aussi pardon pour moi qui ai pris la liberté de vous envoyer de mon style imprimé ces jours passés. C’est votre libretto[31] sur papier de Chine et en trois volumes, que je me suis hasardé à mettre à vos pieds. Il y a par-ci par-là quelques pages nouvelles pour lesquelles je vous demande votre indulgence, si vous les lisez, par aventure.

Il faut que vous me plaigniez, d’abord et beaucoup, d’avoir quitté les Roches, ensuite un peu d’être depuis huit jours dans l’exécrable tohu-bohu d’un déménagement[32], fait à l’aide de ces machines prétendues commodes qui ont aidé tant de pauvres diables à déménager en masse et pour leur dernier logis à l’époque du choléra. Voilà huit jours que je suis dans le chaos, que je cloue et que je martèle, que je suis fait comme un voleur. C’est abominable. Mettez au travers de tout cela mes répétitions où je suis forcé d’aller, et le portrait[33] qu’on peut voir chez Ingres, que j’ai la plus grande envie de voir, et que je n’ai pas encore été voir ! Voilà bien des voir dans la même phrase, mais que voulez-vous, c’est le style d’un garçon tapissier que je vous envoie aujourd’hui.

Jugez si je regrette les Roches, et les douces journées et les douces soirées et les châteaux de cartes, et Jamais dans ces beaux lieux et Phœbus, l’heure t’appelle.

On me joue du 12 au 15 novembre. Adieu, mademoiselle. Il y a une famille qui est heureuse et qui est bonne, et que je porte dans mon cœur, c’est la vôtre. Je donnerais le reste du monde pour les Roches, et le reste des hommes pour votre famille. Adieu encore, c’est-à-dire à bientôt. Quand reviendrez-vous ?

Votre respectueux et dévoué collaborateur,

Victor.


À Monsieur Sainte-Beuve,
1ter, rue du Montparnasse.
13 novembre 1832.

Toute la salle est louée[34], mon ami, et louée je ne sais trop comment à je sais trop qui. Cela s’est fait si rapidement que je n’y ai vu que du feu. On a cependant réservé quelques loges pour ceux de mes amis qui voudraient en louer, et je suis heureux de pouvoir en faire céder une à Mme  Allart[35]. Elle pourra, la veille de la représentation (qui aura lieu le 22), faire retirer les coupons de la loge n° 5 des secondes, côté gauche. La loge est à six places. Je vous garde une stalle, et je vous donnerai les deux billets que vous désirez. Que vous êtes bon de penser à moi et de m’aimer toujours un peu !

Le gentilhomme devient, en effet, fabuleux[36] ; mais que voulez-vous ? il faut le plaindre encore plus que le blâmer. Il sera bien ravi si le Roi s’amuse fait fiasco. C’est ainsi qu’il me paye les applaudissements frénétiques d’Othello.

Vous, vous êtes toujours le grand poëte et le bon ami. J’aurai grande joie à vous rencontrer un de ces dimanches soirs chez Nodier, peut-être dimanche prochain, n’est-ce pas ?

Votre vieil ami,

À Mademoiselle Louise Bertin.


Ce dimanche soir 25 [novembre.]

Tout à l’heure, mademoiselle, ma Didine faisait cette remarque tristement, qu’il Y a huit jours nous étions tous auprès de vous. Cela dit, elle s’est mise à vous écrire, et moi aussi, sans lui en dire rien, si bien que nos deux lettres, écrites côte à côte, vont vous arriver ensemble pleines de la même pensée.

Vous savez bien, n’est-ce pas, que vous êtes toujours présente et toujours aimée ? Il y a quatre petits enfants qui parlent souvent de vous, et le père qui y pense plus souvent encore.

Voici les derniers beaux jours partis. La boue et l’hiver reviennent. Paris n’est pas gai. Vous, vous avez le ciel gris et les feuilles mortes. Cela vaut mieux que la rue Saint-Honoré avec ses embarras de charrettes.

Nous espérons que madame Bertin va de mieux en mieux. Nous avons dîné aujourd’hui en ne causant que de cela.

Grondez-moi, je n’ai pas encore vu Duponchel[38]. En revanche, j’ai vu Védel[39] ; cela rime. Cela vous est bien égal, mais j’ai un procès avec les Français[40] ; cela rime encore. Que voulez-vous que j’y fasse ? Ce que j’aurais de mieux à faire, ce serait d’aller aux Roches causer avec votre excellent père, avec vous, avec Édouard, et me promener au pied de vos belles collines, sans plus songer aux huissiers, au tribunal de Commerce et à la Bourse, ce temple grec, blanc et bête, maculé d’agents de change.

Mais ma destinée m’entraîne. Je suis furieux contre la Comédie-Française, et j’ai besoin d’un procès pour me soulager. Ce qui est extraordinaire, c’est qu’il paraît certain que je le gagnerai, avec de gros dommages et intérêts que le gouvernement payera, à ce que disent messieurs les sociétaires.

Pardon de tous ces bavardages. Ce sot procès est la seule nouvelle que je puisse vous conter. On ne parle que de cela chez moi, depuis huit jours, et je vous envoie un peu de mon ennui. Permettez-moi d’y joindre le nouvel hommage d’un vieil attachement bien profond, bien respectueux et bien dévoué.

Victor H.
Ma femme vous embrasse tendrement.
À Monsieur le rédacteur du Constitutionnel.


Paris, 26 novembre 1832.
Monsieur,

Je suis averti qu’une partie de la généreuse jeunesse des écoles et des ateliers a le projet de se rendre ce soir ou demain au Théâtre-Français pour y réclamer le Roi s’amuse et pour protester hautement contre l’acte d’arbitraire inouï dont cet ouvrage est frappé. Je crois, monsieur, qu’il est d’autres moyens d’arriver au châtiment de cette mesure illégale, je les emploierai. Permettez-moi donc d’emprunter, pour cette occasion, l’organe de votre journal pour supplier les amis de la liberté, de l’art et de la pensée de s’abstenir d’une démonstration violente qui aboutirait peut-être à l’émeute que le gouvernement cherche à se procurer depuis si longtemps.

Agréez, monsieur, l’assurance de ma considération distinguée.

Victor Hugo[41].


À Mademoiselle Louise Bertin.


27 novembre 1832.
Mademoiselle,

Quelles que soient les malheureuses divisions politiques et littéraires qui se sont élevées et où j’ai la consolation de ne pas avoir eu un tort de mon côté, j’espère que vous n’avez pas douté de moi un seul instant. Vous me savez dévoué du fond du cœur, à vous, mademoiselle, à votre excellent père (que j’aime comme s’il était le mien, et qui est, j’en suis sûr, plus affligé que moi de l’événement inouï qui me frappe), à tout ce qui vous est cher. Cet évènement-là même aura eu cela d’heureux à mes yeux de bien vous faire voir qu’il n’y a jamais eu que des raisons d’attachement personnel et désintéressé dans les relations que j’ai été si heureux et si fier de nouer avec vous, avec vous dont j’admire la belle âme et le profond talent. Dites bien, je vous supplie, à vos bons parents qu’ils ne s’inquiètent de rien avec moi, qu’ils ne se croient pas obligés de gêner les polémiques littéraires ou politiques qu’ils pourraient juger nécessaires contre moi dans la nouvelle position où mes ennemis de toute nature et de tous rangs m’ont placé[42] que je serai toujours, quoi qu’il arrive, empressé et obéissant à vos moindres volontés, et que je ne renoncerai jamais à l’œuvre que nous faisons en commun[43], à moins que ce ne soit vous qui, dans votre propre intérêt, croyiez devoir répudier une collaboration qui expose à tant d’orages. Vous me connaissez, vous, mademoiselle Louise, et je suis sûr que vous vous êtes déjà dit tout cela à vous-même ; je suis sûr que vous comptez fermement sur moi. Répondez donc de moi, je vous prie. J’irai vous voir. Je vous demanderai vos ordres comme par le passé. Je mettrai tout mon loisir à vos pieds. Je vous demanderai aussi de me plaindre un peu, moi homme tranquille et sérieux, d’être ainsi violemment arraché à toutes mes habitudes et d’avoir à soutenir maintenant ce combat politique en même temps que le combat littéraire.

Où sont nos beaux jours des Roches ?

Je mets tous mes respects et tout mon dévouement à vos pieds.

Victor Hugo.


À Sainte-Beuve.


Ce samedi soir, 1er décembre [1832].

J’ai vu Carrel, mon cher ami, et je l’ai trouvé cordial et excellent. Il m’a dit que vous n’aviez qu’à lui apporter demain un extrait de la préface[44] (Renduel a dû vous l’envoyer ce soir) avec une espèce de petit article[45] où vous diriez ce que vous voudriez, que le tout serait publié lundi matin dans la partie politique du journal. Il m’a déclaré qu’il croyait que c’était le devoir du National de m’appuyer énergiquement et sans restriction dans ce procès que je vais intenter au ministère, et il a ajouté de son propre mouvement que je pouvais vous prier de sa part de faire, d’ici à cinq ou six jours, un article politique étendu sur toute la question[46] et sur la nécessité où est l’opposition de me soutenir chaudement dans cette occasion, si elle ne veut pas s’abdiquer elle-même. J’ai grand besoin de tous ces appuis, mon cher ami, dans la lutte où me voilà contraint de m’engager et de persister, moi à qui vous connaissez des habitudes si recueillies et si domestiques. Somme toute, j’ai été enchanté de Carrel. Il est disposé à tout faire pour donner à mon affaire le plus d’importance possible. Quant à la question littéraire, il est fort bien aussi. Il dit même qu’il ne verra aucun inconvénient à ce que vous ou Magnin fassiez un article sur la pièce imprimée, dans une semaine ou deux, quand l’article de Rolle[47] sera assez complètement oublié pour que le journal n’ait pas l’air de se contredire.

Adieu, mon pauvre ami. Voilà bien des services que je vous demande à la fois, et je dois vous excéder. Mais vous êtes encore l’ami sur lequel je compte le plus, et je demande tous les jours au ciel une occasion de vous rendre tous les bons offices de cœur que je vous dois.

Je me remets tout entier dans vos mains.

Votre ami à toujours,
Victor[48].


À Monsieur le baron Taylor.


3 décembre [1832]. Lundi.

Tout ce qui est arrivé, mon cher Taylor, n’a pas dépendu de vous, ni de la Comédie, je le sais. Je vais cependant être obligé d’intenter un procès au Théâtre-Français en dommages-intérêts, parce que c’est malheureusement le seul moyen de faire le procès politique au ministère. Cependant je reste votre ami. Odilon Barrot[49] plaidera pour moi, l’affaire aura beaucoup de retentissement et d’éclat, mais je ne voudrais pas qu’il fût rien dit qui pût vous nuire et vous compromettre, vous personnellement. Je sens le besoin de m’entendre avec vous sur cela, je me mets dans votre position et je crois de mon devoir d’ami et d’honnête homme d’agir avec vous comme je voudrais que vous agissiez avec moi si vous étiez à ma place et moi à la vôtre. Guerre loyale et acharnée au pouvoir, mais tous les ménagements possibles et conciliables avec les besoins de la cause pour vous, Taylor, que j’aime et que j’estime. Venez donc me voir et déjeuner avec moi demain matin si vous pouvez. Je vous attendrai jusqu’à onze heures.

Vous recevrez avec ce billet votre exemplaire du Roi s’amuse et de Notre-Dame de Paris.

Je vous serre la main.

Victor Hugo[50].
À Monsieur Eugène Renduel.


[Décembre 1832.]

J’ai vu hier au soir Carrel ; tout est convenu. Il a été excellent. Je vous conterai la chose en détail. Sainte-Beuve peut faire l’article comme il le voudra et le porter aujourd’hui avec le fragment de préface. Carrel mettra tout. Carrel veut, en outre, un grand article politique pour un de ces jours sur l’affaire. Vous savez que c’est Odilon Barrot qui plaidera pour moi. Venez me voir.

Voici quelques lignes pour le Journal des Débats qu’un de nos amis m’a faites hier au soir. Elles sont en trop grosses lettres, ce qui serait ridicule. Vous ferez bien de les recopier et de les porter tout de suite.

Tout à vous.
Victor H.

Voyez Sainte-Beuve et les journaux[51].


À Sainte-Beuve.


[Décembre 1832.]

Je ne sais pas l’adresse de Béranger, mon cher Sainte-Beuve. Est-ce que vous seriez assez bon, vous qui le voyez souvent, pour vous charger de ce paquet pour lui ?

À bientôt. Je vous aime plus que jamais.

Victor.

Je pense que Renduel vous a remis votre exemplaire[52]

Que devient notre bon Leroux[53] ? Je ne le vois plus[54].


À Sainte-Beuve.


Ce 31 décembre 1832.
Mon cher Saint de Beuve,

Je te remercie bien du beau livre de Paul et de Virginie que tu m’a envoyé. Toto[55] et Charle son très content du soldat et du jardin déplante. Dédé[56] est très contante du beaux boa que tu lui à donné et elle le prends poure son petit chat si on lui donnait toujours elle s’amuserai bien. Mais malheureusement on ne veut pas lui lesser toujours. Papa m’a dit que je te dise bien des choses de sa part maman aussi.

Adieu mon cher Saint de Beuve.

Léopoldine Hugo.
Ce 31 décembre 1832.

Voici du style de Didine, mon ami, il faut qu’ici j’en mette aussi un peu du mien, et que je vous remercie et que je vous embrasse du fond du cœur.

Victor[57].


À Monsieur Mérimée[58],
secrétaire de M. le comte d’Argout.


Décembre 1832.
Monsieur,

Il résulte de ce que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire[59] que vous êtes resté complètement étranger aux influences qui ont déterminé le gouvernement à arrêter illégalement ma pièce. En pareille matière, l’affirmation d’un homme d’honneur suffit à un homme d’honneur. Je m’empresse donc de déclarer que tout ce qui pourrait vous concerner personnellement dans le fait que j’ai plutôt indiqué que raconté[60], sans nommer qui que ce soit, relativement à la suspension de ma pièce, tombe de lui-même devant votre réclamation. Ma loyauté m’impose en effet le devoir de ne laisser aucun nuage sur la vôtre. Mon affaire est une affaire générale, dont rien ne doit me détourner, et non une affaire personnelle, et il m’importe de n’avoir jusqu’à la fin aucun tort de mon côté.

J’espère que ma conduite en cette occasion vous prouvera que rien n’altère en moi l’estime réciproque dont vous me parlez.

Vous pouvez publier cette lettre, si vous le jugez convenable. Je suis, monsieur, votre très humble serviteur,

V. H.[61]
  1. Inédite.
  2. Mot illisible.
  3. Collection Louis Barthou.
  4. Inédite.
  5. Édition Renduel.
  6. Bibliothèque nationale.
  7. Renduel fut le grand éditeur des romantiques ; il commença à être apprécié vers 1830 ; il sut attirer les auteurs à succès (Balzac, Victor Hugo, Théophile Gautier, etc.), et deviner les gloires naissantes. Vers 1840, il dut se retirer, sa santé ne lui permettant pas de continuer.
  8. Article sur l’édition Renduel des romans de Victor Hugo. Cet article parut le 24 juillet 1832 dans le Journal des Débats.
  9. Archives Spoelberch de Lovenjoul.
  10. Ce même jour, 7 juin, Sainte-Beuve avait écrit à Victor Hugo :
    « Mon cher ami,
    « On est décidé, au National, à rédiger une déclaration des écrivains en faveur de l’indépendance de la presse à l’occasion de l’état de siège. Lerminier rédige cette déclaration et dans les termes les plus généraux, pour comprendre les diverses nuances de l’opinion libérale. On désirerait le plus de noms honorables, voire même illustres. Ampère va demander la signature de M. de Chateaubriand ; on me prie de demander la vôtre.
    « On sera au National vers neuf heures. Un mot de vous ou votre présence seraient excellents ; quelque chose enfin qui autorisât à mettre votre nom à l’acte.
    « À vous de tout cœur,
    « Sainte-Beuve.
    « Je joins à ceci la lettre d’Ampère. »
    Gustave Simon. Lettre de Sainte-Beuve à Victor Hugo et à Mme  Victor Hugo. Revue de Paris, 1er janvier 1905.
  11. L’état de siège avait été proclamé à la suite de l’insurrection suscitée par les obsèques du général Lamarque.
  12. Archives Spoelberch de Lovenjoul.
  13. « ... Oh ! mon ami, si vous daignez penser une demi-heure à ces infamies, que vos poésies politiques seront belles et flétrissantes ! » 11 juin 1832. Gustave Simon. Lettres de Sainte-Beuve à Victor Hugo et à Mme  Victor Hugo. Revue de Paris, 15 janvier 1905.
  14. Frédéric Soulié auteur de plusieurs drames ; l’un d’eux eut un grand succès : la Closerie des genêts. Malgré ces mots contre Frédéric Soulié, Victor Hugo estimait l’écrivain, il le prouva deux fois : par le discours qu’il prononça à ses funérailles, et par le secours qu’il fit obtenir ensuite à son père dont la situation était précaire.
  15. Comte d’Argout, pair de France, plusieurs fois ministre. Sénateur en janvier 1852.
  16. Fontan, auteur dramatique, fut emprisonné sous Charles X pour ses idées révolutionnaires.
  17. Archives Spoelherch de Lovenjoul.
  18. Le Roi s’amuse venait d’être reçu au Théâtre-Français.
  19. Aux Roches, chez M. Bertin.
  20. Monrose ne joua pas Saltabadil qui échut à Beauvallet.
  21. Mlle  Anaïs créa Blanche.
  22. Desmousseaux, sociétaire du Théâtre-Français, y tenait un emploi secondaire.
  23. Ciceri était alors le plus illustre décorateur des principaux théâtres de Paris.
  24. Bocage, grand interprète des drames romantiques, avait créé le rôle de Didier dans Marion de Lorme. — François Ier fut joué par Perrier.
  25. Article publié dans la Revue des Deux Mondes, 1er octobre 1832.
  26. Publiciste, orateur et homme politique, fondateur, avec Lamennais, de l’Avenir. Pair de France, il soutint les doctrines ultramontaines. C’est sans doute par Lamennais que Montalembert connut Victor Hugo ; il lui écrivit une longue lettre enthousiaste après avoir assisté à la lecture de Marion de Lorme ; le 8 octobre suivant il signa : « Votre bien reconnaissant et profondément attaché pour la vie. » Il devint son adversaire politique le plus violent à partir de 1849, et, sous l’empire, il demanda sa radiation de l’Académie française.
  27. Archives Spoelberch de Lovenjoul.
  28. Louise Bertin, compositeur et poète, fille de M. Bertin l’aîné, s’était prise d’adoration pour les enfants de Victor Hugo ; l’intimité était telle que le poète pouvait écrire à Mlle  Louise : « Vous êtes comme une mère pour mes enfants ». — Mlle  Bertin a laissé deux volumes de poésie : Les Glanes et les Nouvelles Glanes.
  29. Artiste dramatique. Il créa le rôle de Triboulet dans le Roi s’amuse.
  30. Antoni Deschamps.
  31. Un exemplaire de Notre-Dame de Paris, roman d’après lequel a été composée la Esmeralda avec la musique de Mlle  Louise Bertin.
  32. Victor Hugo quittait la rue Jean-Goujon pour aller s’installer place Royale, aujourd’hui place des Vosges.
  33. Portrait de M. Bertin l’aîné. Ce portrait est réputé pour être l’un des plus beaux exécutés par le maître peintre dont la réputation est universelle.
  34. Le Roi s’amuse fut représenté pour la première fois au Théâtre-Français le 22 novembre 1832.
  35. Hortense Allart avait prié Sainte-Beuve de demander pour elle une loge à Victor Hugo. Hortense Allart, femme de lettres, était moins connue par ses écrits que par ses aventures galantes dont la plus célèbre fut sa liaison avec Chateaubriand.
  36. Le gentilhomme, comme l’appelait Sainte-Beuve, était Alfred de Vigny. Une brouille, envenimée à plaisir par Sainte-Beuve, était née de cette phrase publiée par la Revue des Deux Mondes, 1er novembre 1832 (Chronique littéraire, toujours anonyme) : « Drame, roman, poésie, tout relève aujourd’hui de cet écrivain », (Victor Hugo). — A. de Vigny, froissé, protesta par une note rectificative que le directeur de la Revue, Buloz, refusa d’insérer et que Sainte-Beuve finit par rédiger lui-même, tout en dénigrant, dans ses lettres à Victor Hugo, le gentilhomme.
  37. Archives Spoelberch de Lovenjoul.
  38. Chef du service de la scène à l’Opéra.
  39. Védel, caissier du Théâtre-Français, dont il devint directeur de 1837 à 1839.
  40. Le Roi s’amuse avait été interdit le 25 novembre, le lendemain de la première représentation, et Victor Hugo intentait un procès à la Comédie-Française.
  41. Le Constitutionnel, 27 novembre 1832.
  42. Le Journal des Débats était, quoique indépendant, soumis à un certain contrôle du gouvernement ; or Victor Hugo, tout en attaquant le Théâtre-Français, faisait en réalité le procès au gouvernement qui avait interdit sa pièce.
  43. La Esmeralda.
  44. Préface du drame Le Roi s’amuse.
  45. À propos de ce « petit article » paru dans le National du 13 décembre, Sainte-Beuve se plaignit de ce que « deux ou trois phrases littéraires , très circonspectes, avaient été mises de côté ».
  46. Sainte-Beuve, dans sa réponse datée du 8 décembre, se dérobe : « Je n’ai pas d’idées nettes sur cette question de législation théâtrale ». - Gustave Simon. Lettres de Sainte-Beuve à Victor Hugo et à Mme  Victor Hugo. Revue de Paris, 15 janvier 1905.
  47. Article très violent, non signé, dans le National, 25 novembre 1832. — Rolle débuta comme journaliste en 1826, au Figaro, collabora au National en 1832, puis au Constitutionnel, à l’Ordre. Très hostile au mouvement romantique, sa critique était de parti pris et principalement malveillante pour Victor Hugo. Il devint sous l’empire conservateur de la Bibliothèque de la Ville de Paris.
  48. Archives Spoelberch de Lovenjoul.
  49. Odilon Barrot, avocat aux Conseils du roi et à la cour de cassation en 1814, préfet de la Seine sous la monarchie de Juillet et président du conseil sous le ministère de Louis Bonaparte. — Odilon Barrot était sincèrement dévoué à Victor Hugo ; nous avons eu sous les yeux cinq lettres de l’avocat qui en font foi, la dernière est du 9 septembre 1843 ; puis l’exil du poète mit fin à leurs relations.
  50. Archives de la famille de Victor Hugo.
  51. Collection Louis Barthou.
  52. Le Roi s’amuse, publié au début de décembre 1832.
  53. Pierre Leroux fonda, en 1824, avec Dubois, le Globe ; de 1831 à 1835 il collabora à la Revue encyclopédique , puis à la Revue des Deux Mondes ; en 1838 il fonda l’Encyclopédie nouvelle ; l’année suivante, il créa avec George Sand la Revue indépendante. En 1840 il publia son principal ouvrage :De l’humanité, de son principe et de son avenir. Élu représentant du peuple en 1848, il soutint les doctrines socialistes ; il publia plusieurs ouvrages. Après le coup d’État, il se réfugia à Jersey. Le post-scriptum de cette lettre à Sainte-Beuve semble indiquer que Victor Hugo était en assez bons termes avec Pierre Leroux. Pourtant, en 1863, un livre de Pierre Leroux : La Grève de Samarez est très hostile au proscrit et à son entourage.
  54. Archives Spoelberch de Lovenjoul.
  55. François-Victor.
  56. Adèle.
  57. Archives Spoelberch de Lovenjoul.
  58. Mérimée se destinait d’abord au droit ; sa première œuvre : Théâtre de Clara Gazul parut sans nom d’auteur en 1825 ; on a de lui de nombreux romans et nouvelles ; les plus célèbres sont Carmen et Colomba. Il fit une belle carrière dans l’administration ; il fut chef de cabinet de divers ministères, inspecteur des monuments historiques. Élu à l’Académie en 1844, sous l’empire il fut un des familiers de la cour.
  59. Cette lettre n’a pas été retrouvée.
  60. Discours prononcé au Tribunal de Commerce, séance du 19 décembre 1832.
  61. Brouillon. Archives de la famille de Victor Hugo. — Il ne faudrait pas, d’après cette lettre, évidemment officielle, juger des rapports entre Victor Hugo et Mérimée. Les quelques lettres que nous avons eues sous les yeux dénotent, de part et d’autre, une vive cordialité ; Mérimée s’intéressait aux succès du poète qui, de son côté, lui recommandait volontiers des artistes dans le besoin, qu’une commande de l’État tirerait d’embarras. Plus tard, sous l’empire, le proscrit cessa naturellement toutes relations avec l’ami de Mme  de Montijo et le protégé de l’impératrice. Mérimée, comblé d’honneurs, mourut le 23 septembre 1870, quelques jours après le retour de Victor Hugo en France.