Correspondance de Voltaire/1725/Lettre 155

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Correspondance de Voltaire/1725
Correspondance : année 1725GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 33 (p. 152-153).
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155. — À MADAME LA PRÉSIDENTE DE BERNIÈRES.

À Fontainebleau, ce 18 octobre.

Gervasi va partir pour vous aller voir : j’en voudrais bien faire autant ; mais jamais mon goût n’a décidé de ma conduite. Je me flatte qu’il vous trouvera en bonne santé, et que ce sera un voyage d’ami plutôt que de médecin. Il vous dira toutes les petites nouvelles de la cour, dont je ne vous parle point. Ne m’en sachez pas mauvais gré. J’aime bien mieux, quand je vous écris, vous parler de vous que de ce qui se passe ici. Je suis bien plus inquiet de votre santé, et plus occupé de ce qui vous regarde, que de toutes les tracasseries de Fontainebleau. Je vais demain à Bellegarde ; je vous en prie, que je retrouve une lettre de vous à mon retour. Mlle  Lecouvreur, qui, je crois, vous écrit souvent, me charge de vous assurer de ses respects. Elle réussit ici à merveille. Elle a enterré la Duclos. La reine lui a donné hautement la préférence. Elle oublie, au milieu de ses triomphes, qu’elle me hait. N’allez pas oublier, au milieu de vos rhumatismes, que vous m’avez aimé, et rompez un peu le silence que vous gardez avec moi, ou du moins faites-moi écrire par votre chancelier ; surtout faites-moi savoir combien de temps vous resterez encore à la Rivière. Permettez-moi de saluer tous ceux qui y sont, et d’envier leur destinée : je n’ose dire de venir la partager, car vous ne m’en croiriez pas ; mais si vous restez encore un mois ou six semaines, je viendrai assurément. Mais, au nom de Dieu, conservez votre santé : elle dépend de vous, je vous le répète encore, beaucoup plus que de tous les médecins du monde. Soyez sobre, et votre santé sera aussi bonne qu’elle m’est chère.