Correspondance de Voltaire/1739/Lettre 1216

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Correspondance de Voltaire/1739
Correspondance : année 1739GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 35 (p. 348).

1216. — À M. DE PONT-DE-VEYLE.
Ce 10 de novembre, en courant.

Huc quoque clara tui pervenit fama triumphi,
Languida quo fessi vix venit aura noti.

(Ovid., epist., ex Ponto, II, i,)

J’apprends dans un village de Liège, en revenant, à Bruxelles, que l’homme du monde le plus aimable va être aussi un des plus à son aise. Vous êtes, dit-on, monsieur, intendant des classes de la marine[1]. Il y a longtemps que je suis dans la classe des gens qui vous sont le plus tendrement attachés, et je vous jure qu’il n’y a personne qui sente plus de plaisir, quand il vous arrive des événements agréables, que les deux voyageurs flamands qui vous font ces compliments très-sincères et très à la hâte. Mme du Châtelet va vous écrire ; mais je l’ai devancée, afin d’avoir un avantage sur elle, une fois en ma vie. Ce sont des hommes comme vous qu’il faut mettre en place, et non pas des animaux qui ne sont graves que par sottise, et qui ne savent ni donner ni recevoir du plaisir. Je vois que M. de Maurepas aime à placer les gens qui lui ressemblent, et qu’il est bon ami comme bon connaisseur.

Adieu, monsieur l’intendant ; il n’est doux de l’être qu’à Versailles et à Paris. Je vous suis attaché pour jamais avec la tendresse la plus respectueuse.

  1. L’Almanach royal, de 1746 à 1749 inclusivement, porte que Pont-de-Veyle fut nommé intendant général des classes de la marine dés 1739 ; c’est ce qui m’a autorisé à donner la même date à la lettre ci-dessus, laquelle est imprimée à la dale de 1740 dans l’édition de Kehl. Cette rectification s’accorde d’ailleurs avec le quatrième alinéa de la lettre du 16 février 1740, à d’Argental, où Voltaire cite monsieur l’intendant des classes, en faisant allusion à Pont-de-Veyle. (Cl.)