Correspondance de Voltaire/1744/Lettre 1678

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Correspondance de Voltaire/1744
Correspondance : année 1744GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 36 (p. 326).

1678. — À M. BERGER.
À Paris, le 7 octobre.

J’ai bien peur, monsieur, de perdre l’imagination comme la mémoire. J’ai été si lutiné, depuis mon retour à Paris, et par mes maladies et par les fêtes que je prépare à notre dauphine ; il a fallu tant faire de vers, tant en refaire, parler à tant de musiciens, de comédiens, de décorateurs, tant courir, tant m’épuiser en bagatelles, que j’avoue que je ne sais plus si j’ai répondu[1] à une lettre que vous m’adressâtes, il y a quelque temps, au Champbonin. Vous me mandâtes que tout le foin de la cavalerie du roi très-chrétien était soumis à votre juridiction. Je souhaite que vous en mettiez dans vos bottes, et que vous veniez à Paris, enrichi de nos triomphes. Il me semble que votre général a fait une campagne à la Turenne, toujours supérieur, par la conduite, à un ennemi supérieur en forces. Si tous les fourrages qu’on a pris aux Autrichiens vous appartenaient, vous seriez un Bernard ; mais, quand vous ne seriez qu’un homme très-aimable un peu à son aise, ce sera toujours un rôle fort agréable. Je serai très-charmé de vous embrasser à Paris. Je compte toujours sur votre amitié ; la mienne est, comme vous savez, ennemie des cérémonies.

  1. Si Voltaire répondit à Berger, sa lettre n’a pas été recueillie.